33. La Naissance de MATHIS.

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Dans la charmante ville de Reims, en ce jour de printemps, le 21 mars 1982, Monique et Claude se trouvent à la clinique de l'université, dans le service de maternité. Les couloirs de l’hôpital sont baignés d’une lumière pâle qui filtre à travers les hautes fenêtres, éclairant par endroits les murs aux couleurs neutres, dans des tons de beige et de vert pâle. L’odeur du désinfectant flotte dans l’air, familière et un peu piquante. Alertés par un coup de fil, Claude a pu se dégager un moment pour rejoindre Monique. Mais, il ne peut entrer dans la chambre, car le travail est déjà bien trop entamé. Claude, nerveux, fait les cent pas, le regard tantôt posé sur l’horloge, tantôt sur la porte fermée de la chambre de Monique, espérant être appelé d’un instant à l’autre.

À l’intérieur de la chambre, Monique est épuisée, sa main crispée sur les barreaux métalliques du lit tandis qu’elle traverse les derniers moments de douleur. Autour d’elle, la chambre est simple, mais propre et lumineuse : une grande fenêtre offre une vue sur un parc en contrebas, où les premières fleurs de printemps commencent tout juste à éclore. Quelques rayons de soleil passent entre les rideaux, illuminant la pièce d’une douce lueur réconfortante. Sur la table de chevet, un petit vase en plastique, renfermant un bouquet de jonquilles jaunes, semble célébrer silencieusement l’arrivée imminente d’une nouvelle vie.

— Waaah ! Wêêêh !

Il est exactement 8h52 lorsque Claude, à l'extérieur, entend enfin le premier cri de son bébé. Ce son perçant, qu’il attendait depuis son arrivée, le fait se figer, son cœur battant plus fort. Quelques minutes plus tard, une sage-femme en blouse blanche ouvre la porte et lui fait signe d’entrer. Claude ne perd pas une seconde, il entre dans la chambre, les yeux rivés sur le petit être qui vient de naître.

— Alors ? ça y est ? il est là ?

— Oui, enfin... souffle-t-elle, visiblement comblée mais exténuée.

— Et toi ? Comment tu te sens, ma chérie ?

— Vidée, douze heures de travail, mais ça en valait le coup, n'est-cepas ?

— Oh oui, il est magnifique. Je l'aime déjà si fort. Je t'aime. Tu me combles de bonheur.

— Moi aussi, je ne voudrais pas changer quoi que ce soit. Mais vas-y, approche. N'aie pas peur.

Là, enveloppé dans un linge blanc et blotti contre la poitrine de Monique, repose Mathis. Sa peau est rose et délicate, ses minuscules traits légèrement plissés comme s’il fronçait les sourcils en découvrant le monde pour la première fois. Ses paupières sont encore mi-closes, révélant à peine un regard curieux et incertain. Sa bouche minuscule s’agite, et il émet de petits gémissements, puis se calme sous le contact rassurant de sa mère. Son nez est minuscule, ses cheveux d’un doux duvet brun encadrent son front plissé. Claude observe chaque détail, fasciné par ce visage nouveau et fragile, conscient qu'il n'oubliera jamais cet instant de rencontre.

Monique et Claude, les yeux encore brillants d'émotion, se félicitent en silence d'avoir réussi ce petit prodige. Ils se regardent tendrement, presque incrédules, comme s'ils n'en revenaient pas d'avoir donné vie, une fois encore, à un être aussi parfait. Pendant un long moment, ils savourent simplement la contemplation de ce petit être paisible, lové contre sa mère. Claude caresse doucement la main minuscule de Mathis, ses doigts à peine plus gros que des pétales, et il sent son cœur se serrer sous l’intensité de ce bonheur.

Au bout de quelques instants, Claude se penche vers Monique et murmure avec tendresse :

— Repose-toi, mon amour. Je vais chercher Tom chez la nounou. Il est surexcité, impatient de faire la connaissance de son petit frère.

Monique approuve, ses yeux déjà mi-clos sous l’effet de la fatigue et des heures d’efforts passées. Elle sourit faiblement, émue par l’attention de Claude et impatiente elle aussi de voir la réaction de leur aîné face à ce nouveau membre de la famille. Claude embrasse Monique avec beaucoup de tendresse puis dépose un baiser sur le front de Mathis. Il se redresse, jetant un dernier regard attendri à Monique et Mathis avant de quitter la chambre, le cœur empli de fierté et de bonheur.

Quittant la clinique, un sourire involontaire étire ses lèvres à l'idée du visage de Tom découvrant son frère. Il imagine déjà leur future complicité, écho de celle qu'il partage avec Monique.

Dehors, l'air frais du matin de printemps emplit ses poumons de bonheur. Le soleil naissant caresse les passants d'une lueur complice. Sur le chemin de la nounou, ses pensées courent vers Tom et leur rencontre. Quelle sera sa réaction face à ce nouvel arrivant ? Curiosité ? Peut-être une pointe de jalousie ?

Sa Peugeot 305 bleu profond, chromes étincelants sous le soleil radieux, l'attend. Le moteur ronronnant, une allégresse inédite le saisit en traversant les rues de Reims. La ville entière semble vibrer à l'unisson de sa joie, des pavés aux façades.

Il longe la majestueuse cathédrale, ses tours dardant vers l'azur, les vitraux irisés par la lumière matinale. Puis, les boulevards bordant le canal, où l'eau argentée apporte une fraîcheur apaisante. Les reflets familiers lui arrachent un sourire neuf.

Direction le quartier Saint-Remi, longeant le parc des Arènes du Sud, ses allées vertes, théâtre de tant de dimanches avec Tom. Aujourd'hui, le parc lui semble plus vivant, saluant l'arrivée de Mathis. Joggeurs et familles baignent dans une atmosphère de paix heureuse.

Rue Tournebonneau, les cerisiers du Japon croulent sous une pluie de fleurs roses. Les pétales tourbillonnent autour de la voiture, un tapis délicat sur la chaussée. Jamais ces lieux connus ne lui ont paru si beaux, comme parés pour célébrer son fils.

Enfin, rue Chantereine, il se gare face au numéro 10 de l'esplanade Fléchambault, l'appartement chaleureux de Maryse. Tom l'attend. Claude coupe le moteur, le cœur s'allégeant à chaque pas vers la porte.

Arrivé chez la nounou, Claude sonne et attend, le cœur battant encore d’émotion après la naissance de Mathis. Maryse, la nounou, lui ouvre avec un sourire chaleureux et l’accueille avec une sincère affection.

— Félicitations, Claude ! Alors ça y est ! Et comment va Monique ?

— Oui, le bonheur vient encore d'inonder ma famille. Monique est très fatiguée. Un travail long. Mais si heureuse avec Mathis dans ses bras. Dès demain elle pourra recevoir. Si vous le souhaitez, passez voir votre futur petit pensionnaire.

— Demain, en fion d'après-midi car j'ai des petits jusque dix-sept heures. Embrassez votre épouse et félicitez la pour moi !

Tom surgit d’une petite pièce en courant, cheveux blonds en bataille et grands yeux verts remplis de curiosité. Il se jette dans les bras de son papa, ses questions fusant déjà :

— Papa, il est né ? C’est quand que je peux le voir ? Mon petit frère ?

Claude rit doucement et passe une main rassurante dans les cheveux de Tom, touché par l’impatience de son aîné, qui semble déjà prêt pour son nouveau rôle de grand frère.

— Oui, Tom, ton petit frère, Mathis, est là. Maman et lui t’attendent à la clinique. On y va.

Ils disent au-revoir à Maryse et Tom tire la main de son père, impatient d'aller à la clinique.

Sur le chemin du retour, Claude ralentit légèrement le pas, savourant ce moment unique où il tient Tom par la main. Il réalise combien ce simple contact symbolise tout ce qu’il souhaite offrir à sa famille : amour, sécurité et tendresse. Tom trottine à ses côtés, la main fermement ancrée dans celle de son père, et laisse libre cours à sa curiosité débordante :

— Est-ce qu’il peut marcher ? Est-ce qu’il sait parler ? Comment il est sorti du ventre de maman ?

Amusé, Claude s’efforce de répondre avec des mots simples, un sourire attendri devant la candeur de Tom :

— Non, mon grand, il est encore tout petit, bien trop pour marcher ou parler, explique Claude avec patience et tendresse. Mais un jour, il apprendra en te regardant. Ce sont les médecins qui ont aidé Mathis à venir au monde, et maintenant, c’est à nous de l’aider à grandir. Toi, tu pourras lui montrer comment être un bon grand frère.

— Oui, P'pa, et même le meilleur du monde !

Avant de retourner à la clinique, Claude fait un détour par la fleuriste. Avec son fils, il choisit un bouquet aux couleurs éclatantes, une attention pleine de gratitude pour Monique.

En sortant de la boutique, bouquet en main, il se dirige vers la voiture. Il pose d'abord le bouquet sur le siège avant passager, puis installe Tom dans son siège auto. Le petit garçon serre précieusement contre lui une peluche jaune vif en forme de poussin.

— P'pa, j'espère qu'il aimera mon cadeau. Et, s'il aime pas ?

— Impossible, tu as choisis le plus doux, le plus beau ninin. Mathis va l'adorer. Tu verras, ce sera son compagnon un long moment.

— Oui, t'as raison. Mon P'pa, c'est le meilleur.

Claude sourit en voyant son fils, touché par son enthousiasme et son désir d’offrir un premier cadeau à son frère. Il regarde la peluche, ému, se disant qu’il est certain que Mathis adorera ce petit poussin...

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