34. Une famille heureuse.
De retour à la maternité, Claude et Tom montent ensemble jusqu’à la chambre de Monique. Claude pousse doucement la porte, et Tom, impressionné par le calme de l’endroit, s’arrête un instant, observant la pièce avec des yeux écarquillés. Puis, tout doucement, il fait quelques pas vers sa mère, son regard brillant de curiosité et de joie.
Monique, bien que fatiguée, rayonne de bonheur. À la vue de son fils, un sourire apaisant se dessine sur ses lèvres. D’une voix douce, elle l’invite à s’approcher :
— Viens, Tom, approche-toi.
Tom s’avance alors, se précipitant dans les bras de sa maman pour un câlin chaleureux. Puis, elle lui désigne du doigt un petit lit près d’elle, où Mathis repose.
— Voici ton petit frère, Mathis, lui dit-elle avec tendresse.
Tom s’approche timidement du lit de Mathis. Il se hisse sur une chaise puis sur la pointe des pieds, ses yeux brillants d’une curiosité mêlée d’émerveillement, Claude prêt à le rattraper en cas de chute. Lentement, il se penche pour mieux voir Mathis, qui dort paisiblement, son visage minuscule encore tout plissé. Ses minuscules poings serrés et ses paupières mi-closes semblent contenir tout le mystère de sa nouvelle vie. Timidement, Tom tend un doigt vers la main minuscule de son frère, et lorsque Mathis referme instinctivement ses doigts autour de celui de Tom, l’aîné laisse échapper un éclat de rire ravi :
— Il m’a attrapé, maman, papa ! Il est fort, mon petit frère !
Claude et Monique échangent un regard ému, leurs cœurs gonflés d’une immense fierté et de bonheur en voyant cette rencontre se dérouler avec tant d'effusion de joie. Dans un geste instinctif, Claude pose une main sur l’épaule de Tom et murmure avec tendresse :
— Oui, il est fort, et il a beaucoup de chance d’avoir un grand frère comme toi, Tom.
Tom est ravi, un grand sourire éclaire son visage. Il ne sera plus seul à la maison, un petit frère prometteur est enfin arrivé. Monique semble très fatiguée. Claude le remarque alors il pose une main affectueuse sur son épaule et lui dit :
— Viens, mon grand, nous rentrons à la maison maintenant. Maman et Mathis ont besoin de se reposer.
— Déjà ?
— Attends un peu Claude, c'est vrai, il vient seulement d'arriver...
— Comme tu veux ma chérie mais ne lutte pas, repose toi.
Tom comprend au delà des mots, alors :
— P'pa, aide moi à lui faire un gros bisous, s'te plaît... Smaaackk !
Puis.
— M'man maintenant.
Son père le porte à nouveau. Tom embrasse sa maman avec amour.
— Allez P'pa, viens, ils doivent se reposer ! J't'attends !
Claude est époustouflé par l'attitude de son fils et ne se fait pas davantage prier. Il embrasse Mathis et Monique :
— Dors bien... à demain.
Sur le trajet du retour, Tom regarde par la fenêtre, les paysages défilant lentement devant lui. Mais, dans son esprit, c’est l’image de ce joli petit frère qui occupe toutes ses pensées. Il repense à ses petites mains, à son minois tout plissé, et à la tendresse qu’il ressent déjà pour lui.
De retour dans leur appartement, situé au sixième et dernier étage de l’immeuble, Claude et Tom se déchaussent soigneusement dans l’entrée. Le sol, recouvert d’une moquette râpeuse à poil extrêmement ras, semble absorber chaque pas.
À droite de l’entrée, la cuisine, simple et fonctionnelle, déploie un décor typique des années 70. À gauche, le salon est un lieu de lumière et d’ouverture. Une large baie vitrée, occupant tout un pan du mur, permet au soleil de pénétrer généreusement dans la pièce, baignant chaque recoin d’une lumière douce et accueillante. Dès que l’on franchit la porte du salon, on est frappé par la sensation que la ville s’éloigne, qu'elle se dissout doucement derrière cette étendue de verre, laissant place à un décor plus naturel, plus calme.
La baie vitrée s’ouvre sur un balcon spacieux, véritable observatoire privé. Il offre une vue dégagée à couper le souffle, où l'urbanisme et la nature s’entrelacent harmonieusement.
En bas, le parc de l'immeuble, avec ses pelouses verdoyantes et ses arbustes soigneusement taillés, est un écrin de verdure où les enfants jouent en toute sécurité dans un grand bac à sable. C'est un lieu paisible, préservé, où la tranquillité semble régner en maître, et ce, à quelques pas seulement de l'effervescence de la ville. Juste après le parc, une longue piste cyclable s'étend sur toute la largeur du panorama. Bordée de rectangles de pelouse parfaitement entretenus, elle offre un trajet agréable aux cyclistes et promeneurs, qui s'y déplacent dans une quiétude rare.
Au-delà de cette piste, le boulevard animé de la ville se dessine, mais tout semble plus doux, plus lointain depuis ce balcon, comme si la nature avait trouvé un moyen d'effacer l'agitation urbaine. Ensuite, un talus de gazon vert sépare le boulevard du canal, dont les eaux reflètent les péniches et quelques bateaux de plaisance qui passent lentement, apportant une touche de mouvement à la scène. De part et d'autres, ses berges offrent des chemins aux promeneurs, qui semblent eux-mêmes partie intégrante de ce paysage apaisant.
De l'autre côté du canal, la berge est plus large, constituée d’un sentier de calcaire concassé, dont les pierres, de couleur beige et blanche, captent la lumière et créent un effet de douceur qui contraste avec le vert sombre du canal. Ensuite, on découvre une zone boisée, où le murmure tranquille de la rivière Vesle se fait parfois entendre à travers les arbres. Ces derniers forment un rideau végétal d’une grande densité, apportant une ombre bienfaisante et un parfum de nature qui assainit l'air.
En remontant le regard, on aperçoit le quartier Saint-Anne avec son église Sainte-Clotilde, coiffée majestueusement de sa coupole néo-byzantine. Sa présence constitue un repère visuel indéniable dans ce paysage urbain où se mêlent harmonieusement modernité et héritage.
Mais c’est surtout au coucher du soleil, lorsque les teintes dorées et rosées du ciel viennent se refléter sur le canal, que cette vue prend toute son ampleur. Le spectacle est saisissant : un crépuscule enflammé qui embrase les toits et l’eau du canal, apportant à cet ensemble une beauté éphémère mais inoubliable. Le contraste entre la vie urbaine qui vibre en bas et la tranquillité de ce décor naturel fait de cet appartement un véritable havre de paix, un privilège rare en plein cœur de la ville.
Enfin, depuis l'entrée, une troisième porte donne sur un petit couloir muni de WC et qui mène au fond à un vestibule qui dessert la partie nuit constituée de quatre chambres ainsi qu'une salle de bain exiguë et une salle de douche qui l'est encore plus. Mais l'ensemble est très fonctionnel.
Dans le salon, Tom saute de joie en repensant à la figure de son frère et surtout au moment où il a serré son doigt de sa petite main.
— P'pa, je sens qu'il m'aime déjà. T'aurais senti comme il m'a aggripé. Il ne voulait plud me lâcher. C'est magique !
Son père est ravi de voir la joie manifeste de son fils. Il s'installe dans le canapé pour savourer le plaisir de ce jour merveilleux, lui aussi un peu éprouvé par tant d'émotions.
Ce salon est simple et chaleureux. Il incarne parfaitement l'esprit de son époque avec un canapé trois places en velours marron, avec ses coussins imposants, un meuble laqué, sobre et pratique, qui soutient une télévision Radiola à écran cathodique noir et blanc.
Dans un coin opposé, une table ovale et ses quatre chaises complètent le coin repas, typique de l’époque. Les formes sont simples, sans fioritures inutiles, et l’accent est mis sur l’utilisation pratique de l’espace.
Le principal atout de la pièce, cependant, est cette vue, cet espace ouvert, cet accès à la lumière naturelle, qui donne tout son cachet au salon. Ce qui importe, c’est de vivre dans un cadre qui respire la tranquillité, l’intimité, et la chaleur familiale.
C'est là, plongé dans ses pensée, que Claude, rejoint par Tom qui lui fait un calin, attend que la famille soit enfin réunie.
La maternité, elle se prépare au bouillonnement inévitable qui accompagne l’arrivée du bébé. Elle va rapidement devenir un lieu de passage où se pressent les proches, impatient de faire la connaissance de ce petit être qui entre dans leur vie.
Ainsi, les visites se succèdent, chacune apportant un vent de félicitations et de tendresse. La famille et les amis viennent admirer le bébé et partager ce moment d’intimité et d’amour. Les échanges sont chaleureux et joyeux. Des cadeaux, des mots tendres, des câlins se partagent avec une grande simplicité. Ce moment devient ainsi bien plus qu’une simple naissance ; il est un point de convergence, un instant où les liens familiaux se renforcent et où chacun se projette dans l'avenir avec un espoir renouvelé.
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