Bien imprudentes, sont les proies qui s’ignorent
Pendant toute une journée, il avait suivi la piste sans difficulté. Dans une clairière, un reste de feu et quelques tâches de sang noir ne pouvaient appartenir qu’à ses petits rats de campagne. Ils avaient bien évité les bourgs et préféré les sous-bois aux routes, mais ils n’avaient pas couvert leurs traces. La traque avait été un jeu d’enfant jusqu’au petit domaine. Si facile qu’il avait presque été déçu en voyant apparaître à l’horizon les pierres grises et le toit d’ardoises.
Mais le lieu était désert.
Il inspecta les dépendances puis força la porte de la maison, dans l’espoir d’y trouver quelque chose. Tout était propre et les meubles recouverts de linges blancs. Un peu trop ordonné pour des fuyards. Sans doute des domestiques étaient passés après le départ des maîtres pour fermer la demeure. Les occupants n’avaient pas prévu de revenir de sitôt.
Il fouilla des tiroirs, trouva quelques correspondances adressées à un certain Goulvenic Kab Pennarglenn, de la part du Duc d’Enezatil, Erwin Kab Pennarglenn.
Intéressante parenté.
Il sortit sur le pas de la porte et resta quelques instants à observer la pluie fine qui commençait à balayer la lande. Il resserra son manteau d’hermine sur ses épaules et cracha sur le sol. Ce n’était pas quelques gouttes qui empêcheraient sa traque.
Néanmoins, ils ne perdit pas de temps et enfourcha son cheval pour continuer à suivre la piste, tant qu’elle était encore visible. A l’assaut d’une petite colline, la pauvre bête renâcla : il ne l’avait pas laissée soufflée depuis plus d’une journée. Sourd à sa fatigue, il laboura ses flancs. Déjà les traces devant lui se diluaient dans la boue.
Elles s’éloignaient droit vers le Sud, droit vers Wened.
Les imbéciles étaient prévisibles.

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