III - Syl

6 minutes de lecture

Le monde d’Anstrilla est partagé en plusieurs royaumes, dont le plus important est le royaume des Trois Lunes. Dirigé par l’assemblée des Trois, il est lui-même divisé en six États souverains, chacun étant gouverné par un seigneur ou un chef de clan.

Composée d’un humain, d’un elfe et d’un nain, l’assemblée contrôle l’ensemble du territoire et décide qui sera à la tête de chaque État. Ainsi, il n’est pas impossible de voir un État peuplé d'humains dirigé par un seigneur nain, même si pour le moment ce fait reste un cas isolé.

Peut-être verrons-nous un jour un orc diriger une contrée d’elfes ?

« Réflexions et polémiques d’un royaume décadent »

Scribe Téron

Debout, furieux, Syl tapait du poing sur la table tout en regardant l'assemblée d'un œil sombre.

— Comment peut-on être mauvais à ce point ! hurla-t-il.

Un homme assis au bout de la table voulut s’exprimer, mais Syl l’arrêta d’un geste :

— Aucune explication, aucune parole de quelque sorte ne pourra pardonner ton incompétence. Et si tu essayes de l'ouvrir encore une fois, la mort te sera préférable aux souffrances que tu endureras au cours des dix prochaines années de ta misérable vie !

Le ton était donné. Syl était d'une humeur massacrante. Un silence glacial accueillit ses mots. Tous connaissaient son caractère exécrable, surtout quand une situation lui échappait.

Depuis son arrivée au ministère de la Défense de la cité, il avait réussi à grimper marche par marche les échelons, jusqu'à atteindre le sommet. Il avait mis en œuvre tant de ténacité et d'efforts qu'il était parvenu à écraser tous ceux qui lui barraient le passage.

Syl était un homme dur, froid, qui ne souriait pratiquement jamais et qui avait consacré toute sa vie et son énergie à sa carrière. Cette carrière qui, selon lui, était en train de vaciller par la faute et l'incompétence de ses subordonnés. Et cela le rendait furieux.

Tout en fulminant, il se rassit, ferma les yeux et croisa les mains. Puis, il attendit.

C'était le signe avant-coureur qu'une décision d'importance allait être prise. Un malaise perceptible envahit l'assemblée, mais aucun son ne sortit de la bouche de ses conseillers.

— Bien !

Il marqua une pause et rouvrit les yeux.

— Vous trois, dit-il en désignant trois hommes au fond de la salle, vous serez dégradés et assignés dès demain en première ligne. Mais avant ça, vous me ferez un rapport complet et détaillé de la situation, narrant votre nullité et votre incompétence. Expliquez bien dans les moindres détails comment vous avez pu laisser échapper ce garçon et le trésor qu'il a dérobé.

Aucun des trois hommes n'osa rétorquer quoi que ce soit, de peur de voir sa peine s'alourdir grandement. Syl poursuivit :

— Ensuite, nous allons établir un périmètre de sécurité...

Il continua ainsi une bonne partie de la nuit à expliquer quel était son plan pour retrouver le fugitif et ceux qui l'avaient aidé à s'échapper. Mais sa priorité était de récupérer ce qu’ils lui avaient dérobé.

Une fois la réunion terminée, l’un des conseillers s'approcha de lui et murmura :

— Il veut vous voir.

Syl souffla, las et fatigué.

— Entrez ! fit une voix rauque.

La porte s'ouvrit et Syl entra dans la pièce. Il la referma soigneusement et s'accroupit devant son seigneur, assis sur un imposant trône doré décoré de dragons.

— Monseigneur ! prononça Syl dans un souffle.

— Syl. Tu me déçois, le sais-tu ?

Ce dernier hocha la tête en silence.

— Si je t'ai choisi pour te promouvoir à la tête de l'armée de ma cité, ce n’est pas uniquement grâce à tes aïeux, mais pour tes soi-disant qualités dont on m’avait fait l'éloge ! Et ce n’est pas parce que tu possèdes un quelconque lien de parenté avec l’un des Archimages que tu peux te permettre d’échouer !

Le seigneur s'arrêta un instant afin que ses paroles fassent leur effet. Il but une gorgée d'un breuvage noir et reprit d’un ton ferme :

— Cela fait à présent trois ans, Syl. Trois ans que tu me promets de trouver le secret de ces tablettes. Que tu me promets de réussir à débloquer les voies qui m’amèneront à la magie. Et qu'ai-je reçu en retour ?

— Rien Monseigneur, s'efforça de répondre Syl d'une voix monocorde.

— Exactement… Rien ! Ou plutôt si : des ennuis. Des tas d'ennuis !

Il but à nouveau une gorgée et reposa calmement son verre sur la table basse qui jouxtait son trône. Il se leva de son siège et se mit à marcher jusqu’à une fenêtre. La lune, pleine, brillait comme jamais, déposant un voile lumineux sur l'ensemble de la cité. Sa cité. Son œuvre et celle de ses ancêtres.

Il croisa les mains derrière son dos, prit une profonde inspiration et expliqua :

— Comme je suis un seigneur patient, je vais te laisser vingt-neuf jours pour te racheter et prouver à ton seigneur que tu es digne de sa confiance. Retrouve ce voleur et la tablette qu'il nous a dérobée avant la nouvelle pleine lune.

Il se retourna, comme pour appuyer l'importance de ses paroles :

— Et débarrasse-toi une fois pour toutes de ces voleurs ! Ils pullulent dans ma cité et me font passer pour un seigneur négligent.

— Vos désirs sont des ordres, Monseigneur.

Quelqu'un frappa doucement à la porte.

— Maintenant, laisse-moi. Tu m'as épuisé.

Syl se releva, salua à nouveau son seigneur et se dirigea vers la porte qu'une jeune femme venait d'ouvrir.

Ses cheveux bruns descendaient jusqu'au bas des reins, et sa peau blanche faisait ressortir avec malice ses yeux bleus vifs et pétillants. Ses jolies rondeurs glissaient sous le peu de vêtements qu’elle portait, et sa peau claire et éclatante brillait sous les rayons de la lune.

Il détourna son regard quand la jeune femme s'aperçut qu'il la dévisageait. Elle lui sourit chaleureusement. Il sortit.

Syl ruminait. Il est vrai que son oncle était l’un des douze puissants Archimages du royaume, mais même eux ne savaient pas ce qui s'était produit le jour de la déliquescence ! Alors comment lui-même le pourrait-il ? Lui qui n'avait de sa famille que son sang et quelques ouvrages poussiéreux ?

Pourtant, il en avait passé des heures à éplucher ces livres consacrés aux différents courants de magie, mais rien n'indiquait le moyen de les débloquer. Ou plutôt, si : d’après l’un des auteurs, l’utilisation conjointe des courants magiques et des tablettes d'Asmaar pourrait débloquer lesdits courants. Quelle bonne blague… Comment utiliser de la magie sans magie ? S’il tenait le malin qui avait écrit ça…

Dans un autre ouvrage, il avait découvert qu’un peuple ancien estimait que les humains n'utilisaient pas la magie à bon escient, n'y recourant que pour la guerre et la conquête. Ces anciens décidèrent d'interdire son utilisation en y bloquant l’accès à l'aide de puissants sortilèges, mais ils n’y parvinrent que très brièvement : les courants brisèrent le sortilège d’eux-mêmes presque immédiatement et les flux magiques coulèrent à nouveau.

Un autre livre expliquait le mécanisme de la magie : « Elle est le résultat de la source mère, d'où s'échappent huit courants distincts. D'après certains érudits, il en existerait bien plus, mais rien de tel n'a pu être prouvé jusqu'à présent.

Dans ces chemins ont été transcrites différentes incantations. Comment et par qui, nous le recherchons encore. Mais lorsqu'une incantation est lancée par un magicien, l'effet décrit dans le courant survient alors. »

Le livre traitait ensuite de différentes incantations et de leurs combinaisons, ainsi que de la grande puissance de certaines. À quoi bon lui serviraient de tels mots alors qu'ils n'ont plus aucun effet ?

Syl pestait et tournait en rond. Vingt-neuf jours pour retrouver le voleur. Autant de jours pour trouver le moyen de débloquer ces courants et prendre à son tour la tête du royaume, détrônant cet imbécile de seigneur qui ne pensait qu'à fricoter avec des femmes. Tout cela était bien futile aux yeux de Syl. Se reposer alors qu'il y avait tant à faire pour diriger un royaume... Il était intimement convaincu qu'il serait un bien meilleur dirigeant. Sans magie toutefois, son entreprise serait vaine.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Nycolas ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0