Repli
— Kaz, je sais que c’est pas vraiment pour ça que vous êtes venus, mais j’aurais vraiment besoin que quelqu’un aide Nasoa à s’occuper des gamins. Il est débordé, là. Tu pourrais juste lui prendre Coean ?
Comme toi, le clan manquait de bras. Je me proclamai tuteur dudit Coean, un enfant étrange et mal à l’aise, mais d’une rare vivacité d’esprit et avide d’histoires.
Riao se refermait sur soi-même. Ses membres se cachaient sous des couvertures ou s’agglutinaient près des feux. Le moindre frisson était traité avec circonspection, le moindre toussotement avec alarme.
Niashæl et Royan s’étaient retirés dans la hutte du Naræs après un demi-ciel de soupes, de décoctions, de labeur et de mots rassurants au chevet des malades. La semi-Riao s’est écroulée devant le foyer éteint en le scrutant, espérant peut-être le convaincre de s’allumer par la seule force de son regard. Elle a soupiré, ce qui n’a eu aucun effet non plus. Il restait un peu plus d’énergie au loup, qui s’est chargé du feu récalcitrant. Il a fixé les paupières mi-closes de la sang-mêlé, peu rassuré. Après tout, est-ce vraiment de la paranoïa si le danger est avéré ?
— Je n’ai pas de fièvre.
— Y’a pas de mal à vérifier. Je peux ? a-t-il dit en tendant la main.
Elle a haussé des épaules éreintées. Royan a approché des doigts frémissants, peut-être par appréhension, peut-être à cause du malla. Il s’est senti étrangement ridicule, puis a réalisé avoir touché son front un instant de trop. Il a retiré sa main, confus et incertain, sans plus bouger, considérant son pouls accéléré. Son cœur a sombré quand il a remarqué, honteux, que Niashæl l’entendait aussi. Était-ce un sourire moqueur qu’il voyait sur son visage ?
Avant qu’il ne démêle ses émotions, Niashæl a enserré sa main laissée en suspens et doucement écartée. Il se sentait sot ; ses oreilles lui tenaient chaud. Elle lui serrait toujours la main, ce qui n’avait aucun sens, et ne semblait pas percevoir son embarras. Elle paraissait calme, comme s’il ne se passait rien de particulier.
Ils sont restés ainsi, main dans la main, un moment bien trop long.
Niashæl a souri comme à l’une de ses plaisanteries, puis s’est penchée pour l’embrasser. Il a écarquillé les yeux, interloqué, avant de lui rendre un baiser craintif. Elle a collé son front contre le sien, l’air de démentir sa fièvre supposée, et caressé la joue du loup qui l’a de nouveau embrassée, avec plus d’assurance cette fois.
Son pouls battait à faire chuter les étoiles, mais il n’en avait cure.

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