Chapitre 26

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— Putain, qu'est-ce que t'as foutu encore ! On t'avait dit que ça allait mal tourner ! hurla mon cousin Arthès en faisant les cent pas dans la pièce austère où je me trouvais.

 Il n'était pas très grand, mais son corps trapu ne donnait pas envie de l’embêter. Son aura non plus. Pourtant, je n'étais pas impressionnée. Même en connaissant sa réputation, son intelligence freinait sa force. Quoi qu'il arrive, j'aurais toujours un train d'avance. S'il était là aujourd'hui, c'était bien grâce à moi. Peut-être était-il temps de le lui rappeler.

— Tout d'abord, tu vas baisser d'un ton, lui rétorquai-je d'un calme olympien. Je t'ai dit que je maîtrisais la situation. Mademoiselle Craft ne nous posera aucun problème, je m'en suis assurée et... — Arrête tes balivernes ! me coupa-t-il en frappant du poing sur la table.

Son geste n'avait aucun impact sur moi, mais je ne l'avais encore jamais vu aussi furieux. Cet excès d'émotion pouvait le rendre incontrôlable et impulsif. Prudence.

— Depuis le début, tu ne sais pas ce que tu fais ! Tu nous as vendus, et maintenant tu veux que je te suive dans cette folie ? On était enfin en sécurité, avec une bonne situation, et tu vas tout faire foirer. Je t'avais prévenue : si tu continues, j'irai tout raconter à la milice temporelle. Tu sais ce qu'ils feront de toi.

- Tu n'oserais pas, lui dis-je, un sourire provocateur aux lèvres.

Mon cousin se rapprocha de moi, je pouvais sentir son souffle putride s'afférer contre mon visage, malgré mon malaise grandissant, il était hors de question que je recule devant lui. Je pris une posture plus droite et leva la tête en signe de défis.

— Hum hum, fit mon oncle en se raclant la gorge.

Nous nous figeâmes instantanément. Il était si silencieux que j'avais oublié sa présence. Il en imposait davantage que son fils. Si une personne pouvait me faire peur dans cette vie, c'était bien lui.

— Ça suffit, on dirait un jeu du chat et de la souris, trancha-t-il d'une voix posée mais autoritaire.

— Oui, mon oncle, répondis-je en baissant les yeux.

— Qu'as-tu prévu pour elle ? Si tu l'as laissée faire, connaissant les risques de sa lignée, c'est que tu as un plan. J'imagine qu'elle n'est qu'un pion sur l'échiquier de tes ambitions ?

— En effet, mon oncle. Je pense pouvoir l'utiliser pour restaurer notre influence et retrouver notre grandeur d'antan.

Son regard brilla lorsqu'il entendit ces mots. Il était tellement avide de pouvoir qu'il ne remarquerait pas de sitôt que je me moquais de lui.

— Et comment comptes-tu t'y prendre ?

— Tu sais aussi bien que moi que ce gouvernement ne vaut rien. Si notre lignée nous rejoignait ici et maintenant, nous serions à même de rétablir l'ordre divin.

Mon oncle jubilait. C'était dérisoirement simple de le berner. Il suffisait de trouver les bons mots.

— Fais-moi confiance, ajoutai-je. J'ai un plan, mais je préfère agir seule. Le moindre faux pas pourrait tous nous ruiner.

Je posai mon regard sur Arthès en insistant sur mes derniers mots. Il me fusilla du regard.

— Très bien, consentit mon oncle. Arthès, laisse-la travailler. Après tout, autrefois, elle nous a sauvés. Tu es là grâce à elle, sois-en reconnaissant.

— Non, papa. Elle nous a trahis, ne l'oublie pas ! Si maman et Brymse ne sont plus là, c'est à cause d'elle ! Faut-il que je te rafraichisse la mémoire ?!

— Calme-toi, mon grand. Elle a pris des décisions difficiles. Si elle avait pu, elle nous aurait tous sauvés.

J'acquiesçai, bien sûr. Mais il n'en était rien. Je les avais sauvés eux, parce qu'ils étaient là au mauvais endroit, au mauvais moment. Arthès l'avait toujours su. Il m'avait à l'œil, me menaçant sans cesse de révéler mon secret à la milice. Mais si je tombais, il tomberait aussi. C'est sans doute ce qui l'avait toujours retenu d'aller plus loin que ses menaces.

— Pffff ! fit-il avant de claquer la porte.

— Bon, eh bien, la discussion est close, dis-je en me dirigeant vers la sortie. Mais mon oncle m'attrapa par le bras. Sa main paraissait immense comparée à mon poignet.

— Sois prudente. Pas de bêtises.

— Bien sûr, répondis-je en me dégageant, avant de quitter la pièce sans me retourner.

Si mon plan fonctionnait, il ne serait bientôt qu'un mauvais souvenir.

Dans le couloir du manoir familial, Arthès m'attendait, bras croisés.

— Je te préviens, je t'ai à l'œil, petite pétasse. Le moindre faux pas et tu morfleras. Même le sort que la milice te réserve te paraîtra doux comparé à ce que je compte te faire.

Je souris.

— Tu peux toujours me menacer, je n'ai pas peur de toi. Rappelle-toi où tu es, et grâce à qui. Bonne journée, Arthès.

Puis je claquai des talons et retournai à mes appartements, un sourire sadique sur les lèvres. Il n'était pas prêt pour ce qui allait se passer.

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