Chapitre Neuf écrit par Waterlily

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Chapitre Neuf écrit par Waterlily

Allez ma chérie, dit la mère, dis au monsieur ce que tu promènes dans ce sac hein ? Et le sac, toujours dans les bras de Tina, se met à bouger. Faiblement….

- Non, pas ici répond Tina. Elle recule d’un pas et serre le sac encore plus fort.

- Bon sang, tu vas l’ouvrir ce putain de sac ! Hurle le beau-père.

- Non pas comme ça, il ne voudrait pas. Elle l’avait dit d’une voix plus grave comme si elle le défiait.

- Qui ne voudrait pas ? Je lui pose la question avec toute la douceur possible, pour trancher avec le ton hystérique de son beau-père. Je regarde du coin de l’oeil le petit Jason qui reste là, prostré, sans doute traumatisé par toute cette agitation.

- Papa m’a donné ça avant de partir. Et le beau-père redémarre au quart de tour.

- Ton père t’as rien donné ! Ce connard est parti sans laisser d’adresse ! Il a rien laissé à ta mère, seulement deux mioches à nourrir. Il se tourne vers moi, et ajoute :

- Allez vielle merde, dégage ou j’appelle les flics en leur expliquant que t’as voulu enlever la gamine.

J’analyse la situation. Je pourrais dire à la police que le beau-père est violent, qu’il est un pervers. Que vaudraient les paroles d’un gars des rues puant l’alcool et la sueur avec son vieux chien décrépi face à un expert comptable (toujours une supposition, j’ignore s’il est vraiment comptable et je m’en fou). Même s’il portait un son tee-shirt I am the boss, il aurait l’air crédible. Je ronge mon frein.

Je pose la main sur l’épaule de Tina et je la regarde droit dans les yeux.

- Je vais devoir partir Tina. J’aurais voulu la prendre dans mes bras mais au lieu de ça, elle me tend le sac.

- Tenez, il est à vous maintenant. Elle a les yeux qui brillent.

- Mais Tina, tu ne connais pas ce monsieur, ce sac est à toi, lui dit sa mère de plus en plus nerveuse. Elle a peur, je le vois. Ce type a fait d’elle sa chose.

- Laisse-là faire, bon débarras. Ce vieux sac pourri, je peux plus me le voir. Après ça la gamine ne nous ramènera pas tous les jours un SDF à la maison. Hein Tina ? C’est bien la dernière fois que tu nous ramènes un type raté comme ton père ?

Elle fait oui de la tête. Des larmes coulent sur ses joues. Si tu savais Tina comme j’aimerais être un super héro et lui régler son compte à ce salaud. Mais je ne suis rien, qu’un pauvre clocard, un mendiant de pacotille. La brute continue de plus belle :

- Très bien. Casse-toi, grosse merde avant que je change d’avis !

Je prends délicatement le sac des mains de Tina. Je sais ce qu’elle me dit avec ses yeux. Ne nous oublie pas.

Je les regarde une dernière fois, Tina et le petit Jason, immobiles sur le perron de leur maison pavillonaire. Je me berce d’illusions en me faisant la promesse de les aider dès que je me serai tiré d’affaire.

Je marche avec Jojo à mes côtés, dans les rues à l’asphalte humide. Dans mon esprit les images surgissent en cascade. Mes échecs au boulot, mon patron qui me demande d’aller toujours plus vite. Des graphiques réceptionnés dans ma boîte mail avec mon taux de productivité lamentable. Plus je me débattais, plus je m’enfonçais comme dans du sable mouvant. Mon ex, me faisait des reproches. J’étais peu présent, je devenais irritable. Je ne voulais pas lui en parler. Je ne voulais pas lui montrer que j’étais faible. Elle gagnait plus que moi, cela ne me gênait pas. Elle avait de l’ambition, la niaque comme diraient certains. Elle excellait dans son travail. Je me suis enfermé dans mon silence, je suis resté cloîtré. Le pire c’est que Myriam en a payé le prix. Quand ma femme m’a quitté, quand le tribunal a pronnoncé son verdict, que j’ai perdu sa garde, j’aurais voulu hurler. Il n’y eu qu’un silence, un silence de mort. Le regard qu’avait Myriam ce jour-là était le même que celui de Tina. Qu’est-ce que je faisais sur cette terre ? Quel était le message exactement ? Le sens de ma vie ? Je n’en voyais aucun.

Arrête de pleurnicher sur ton sort. En ayant cette pensée quelque chose en moi change. C’est subtil, puis c’est un tsunami. Je ressens un mélange de rage, de révolte et oui, aussi incroyable que cela puisse paraître, une envie nouvelle, une envie insoupçonnée, celle de me battre. Pas avec les poings, me battre contre tous les obstacles de la vie. Belle idée mais comment ? Cette fulgurante lueur d’espoir retombe comme un souflet.

Je me suis posé dans une rue éclairée par un antique réverbère. Jojo fait sa pause pipi sur celui d’à côté.

- A nous deux, j’ai dit en posant le sac à terre en évitant les flaques d’eau. Pendant que la fermeture éclaire glisse doucement j’essaie d’imaginer ce qu’il y a l’intérieur. Je visualise un lapin nain, un chiot, un chaton, non pas un serpent tout de même ! J’ écarte délicatement les rebords du sac. Sa doublure est sombre. Il y a du linge impeccablement plié. Je ne vois pas tout de suite de quoi il s’agit. C’est bizarre, rien ne bouge à l’intérieur. Pourtant, j’ai bien vu quelque chose bouger. J’ai peut-être attendu trop longtemps pour l’ouvrir et un petit animal est mort éttouffé. Au lieu de ça je trouve, une cape noire, un chapeau haute forme rétractable, une chemise parfaitement repassée, des chaussures cirées et à ma pointure, une baguette magique, une boîte avec des dessins d’étoiles et de lunes, un jeu de cartes et son tapis rouge. Le costume d’un magicien et tous ses accessoires !

Jojo est venu s’assoir à côté moi. J’éclate de rire et je prends la baguette magique dans ma main tremblante.

- Dis-moi Jojo que dirais-tu de devenir mon assistant ?

C’est à ce moment-là que la boîte avec les dessins d’étoiles et de lunes a bougé.

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