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 Le carillon tinte à son entrée. Une odeur de vieux bois se dégage des promontoires, sur lesquels masques, parures et costumes rappellent l'appareil d'un cabaret baroque. Les motifs sont fantasques et bestiaux : animaux, ou plutôt créatures – des anges et des centaures, des sirènes et des aigles aux becs fumants – ont inspiré toutes les pièces.

 Un immense manteau au col de fourrure pend au plafond. Blanc crème, zébré d'éclairs or – qui sont en réalité, si l'on prend la peine de se rapprocher, les branches interminables d'un arbre sans tronc. Des fleurs germent sur les membres de bois, elles ouvrent des gueules aux crocs acérés et semblent rugir.

— Bonjour, vous cherchez quelque chose ?

 Frans sursaute. Ni lui ni moi n'avions aperçu la femme derrière le comptoir, dans le fond de la pièce.

— Combien valent les ailes en vitrine ?

— Ah, (la vendeuse esquisse un sourire) vous parlez d'Eraci ?

 Elle quitte son poste et l'accompagne en silence jusqu'à l'article convoité. Tac. Tac. Tac. Ses talons contre le parquet ciré.

— C'est pour vous ?

 Elle se tourne vers lui et le scrute de haut en bas. Elle doit se dire, voilà un jeune homme bien annodin pour une pièce si singulière.

— Sais pas. Je pense que j'aimerais l'offrir.

Eraci coûte plus d'une centaine d'euros...

 L'air songeur, Frans caresse les plumes du dos de sa main. Il ne semble pas alerté par le prix.

— C'est combien, exactement ?

— Cent vingt-neuf euros et quatre-vingt-dix-neuf centimes.

— Je les prends.

 La vendeuse est sceptique.

— Je peux payer tout de suite, annonce-t-il de but en blanc, vous prenez l'espèce ?

 Elle acquiesce avec lenteur. Suspicion. Au comptoir, Frans entrouvre son sac – je distingue gel douche et jogging de rechange – pour en extraire son porte-monnaie. Il sort trois billets de cinquante euros.

— Ce sont tes économies, mon grand ?

 Frans lève les yeux vers la vendeuse.

— Je sais ce que je fais, rétorque-t-il, un peu sec.

 J'en doute cependant. La femme semble partager ma perplexité.

— Tu peux toujours repasser demain pour les prendre avec tes parents. Ça te laisse le temps de la réflexion. Ne t'inquiète pas, je te garde Eraci au chaud en attendant...

 Frans braque sur elle un regard excédé. Lui glisse l'argent dans la main.

— Tenez. Je serai pas là demain.

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