Le blues d'un parapluie

Une minute de lecture

Le temps m'a submergé, je gis, seul, abandonné, dans une sorte d'égouttoir à pépins en céramique bleue.

Il y a bien longtemps que l'inutilité de mon existence m'accroche. Je n'ai plus l'espoir, comme aux premiers jours de mon abandon, qu'une main secourable m'attrape, m'emporte hors de la maison, ouvre ma robe chatoyante et l'offre à l'eau du ciel.

Je m'enfonce dans mes rêves d'ondées printanières, de petites pluies chantantes, de giboulées frigorifiantes, d'averses battantes ou à défaut de quelques gouttes éparses, pour étancher ma soif. De ces songes, je ne sors que rarement.

À l'occasion, la porte d'entrée s'ouvre, la lumière du jour éclaire ma carcasse poussiéreuse. Une femme entraîne des visiteurs dans l'inspection des lieux. ils passent dans chaque pièce, parlent entre eux, les questions, les réponses fusent, les corps se meuvent lentement. Là un enfant me saisit, sa mère intervient, elle me repousse avec dégout dans ma clisse.

"Pouah ! Lâche ça tout de suite !"

Je retombe sans ménagement, et l'obscurité m'enveloppe sur un claquement de porte.

Je crois que je finirai là.

Je fuis de nouveau dans mes illusions ; peut-être qu'on m'adoptera la prochaine fois ?

Un roulement d'orage résonne en moi ; ou pas ?

La demeure redevenue silencieuse, je replonge dans la torpeur. Résigné, je m'endors... où je me meurs ?

Non, avec joie, j'ouvre mes ailes sous l'empyrée, et parmi les nuées noyées je m'envole.

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