Le Départ vers la Capitale

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L’après-midi même qui suivait son entrevue avec Ozanne, Peio préparait ses affaires :

De la viande séchée et une couverture chaude.

Ses plus beaux vêtements de fête, des livres d’histoire et le pendentif de sa famille à l’ombre dans ses poches.

Un manteau de cuir rembourré de laine, un arc, des flèches, une lance, une fine épée, plusieurs poignards. Le collier de la famille Jurill dans la chaleur de son capas.

Des parasols et des litres d’eau.

Des morceaux de bois et des litres d’alcool.

Des pommades contre les brûlures et les coups.

Des herbes médicinales pour endormir la douleur.

Une jument faiblarde.

Sig contrarié.

Une garde rapprochée, son père à ses côtés, et la destination du port de Jera.

La solitude, le froid, la colline à destination, mais bon nombre de danger les séparant.

*

Ozanne connaissait le chemin, mais ne l’aimait pas pour autant. Elle devrait passer par les hautes montagnes et comme chaque fois qu’elle avait fait le voyage, deux choix s’offraient à elle : Traverser par les cols ou prendre le canyon.

Cette réflexion s’installa dans son crâne durant les longues heures de voyage qui permettaient de les atteindre. L’aventurière avait opté pour une autre méthode de parcourir les plaines. Pour les longs trajets, elle préférait que Sig gambade la nuit et qu’ils se reposent pendant les heures plus chaudes de la journée, même si elles restaient des plus glaciales. Un moyen efficace d’avancer sur une longue durée tout en gardant ses forces. La jeune fille prenait soin d’esquiver les villages qui pourraient être effrayés par sa monture. Cette dernière ne semblait pas encore remise de la malédiction. L’animal ne cessait de renifler avec intérêt Ozanne et même si désormais, il acceptait de s’allonger contre elle pendant le temps de repos, il le faisait d’un œil ouvert et attentif.

Ozanne aussi restait à l’affût. La démone semblait se plaire dans le Sanctuaire, mais dès que celle-ci comprendrait son stratagème, elle se mettrait à ses trousses. S’il y avait bien une chose à ne pas faire avec ces entités, c’était de mépriser leurs malédictions. La jeune fille se donnait l’espoir d’atteindre les murailles de la cité avant qu’il ne soit trop tard.

Quatre jours défilèrent jusqu’à ce que les montagnes apparaissent dans le paysage. De puissants pics rocheux, bien plus impressionnants que ceux qui entouraient les anciennes ruines de la Kiolasse. Les monts enneigés disparaissaient même derrière les épais nuages gris qui recouvraient le ciel.

Ozanne se résolut : le canyon était encerclé de bandits armés en tout genre. Elle ne prendrait pas le risque de perdre la vie dans le contrebas. Cette idée ne plairait pas à Sig mais ce serait le relief qui userait ses sabots.

**

- Nous prendrons le passage à travers les montagnes.

Leur guide leur indiquait une faille dans les parois qui s’enfonçait dans le ventre de la montagne. Peio souffrait du long voyage. Cela faisait déjà une semaine qu’il avait quitté sa ville natale et dans la précipitation du départ, il avait dû se contenter de la jument de théâtre qui l’avait accompagné dans les vignes. Sa mère ne serait pas enchanté de le savoir. Des gardes puissamment armés jetaient des coups d’œil farouches vers les hauteurs afin de protéger Ghazil. Ce dernier s’entretenait avec ses conseillers. Le jeune homme, lui, fermait la marche, souffrant autant de la chaleur que sa jument assoiffée.

- On raconte que lors d’une grande guerre, un puissant guerrier aurait pourfendu les montagnes de son épée.

L’ouverture dans la montagne était verticale et étroite. Elle traversait de haut en bas les rochers, offrant l’accès principal pour rejoindre le port de Jera. Leur guide prenait le temps de leur expliquer les légendes des lieux.

Les voyageurs s’enfoncèrent dans la montagne, le regard tendu vers les pics vertigineux. Des hors-la-loi rodaient en ses lieux, mais avec la garde rapprochée qu’ils avaient prise, il y avait peu de chance pour qu’on les attaque. De plus, ces derniers préféraient les convois de marchandises, plus rentables à piller. Mais les enlèvements et les rançons les guettaient toujours de prés. Peio donna un fort coup de talon pour que sa monture se fonde dans le groupe de soldats armés.

***

Ozanne tremblait de froid. L’altitude refroidissait l’air et le vent soufflait sur les cols. Sig peinait à avancer, la neige lui recouvrait les pattes. Il glissait, dérapait, tombait même parfois. La jeune fille se protégeait du froid avec son manteau et son écharpe de laine. Traverser les montagnes n’avait jamais été aisé.

Elle changea de rythme. Sa monture n’était pas un animal de nuit. Avancer dans la pénombre, l’empêchait de voir où il marchait.

Dans une de ses poches, la voyageuse gardait une carte des lieux. Un précieux bien qui lui permettait de savoir quels étaient les plateaux les plus faciles d’accès et les grottes qui lui permettaient de se reposer à l’abri. Malheureusement, parfois l’épuisement les assaillait avant de rejoindre le prochain point de repos. Il leur fallait alors se reposer derrière un rocher pour s’abriter du vent.

Un soir où les bourrasques étaient particulièrement ardues, la grotte ne s’annonçait plus qu’à quelques mètres. Le froid l’assaillait, l’assommant presque. Dans la tempête, elle vit au loin des lueurs de feu jaillir de l’entrée de son lieu de repos. Ozanne s’en doutait… Elle s’approchait de la frontière. La suite de son voyage ne serait pas des plus simple.

La carte de la jeune fille était un vieux parchemin décrépi. On lui avait donné, il y a fort longtemps, mais elle savait qu’elle renfermait les secrets de la milice extérieure. Ces hommes gardaient les abords de la capitale des dangers du dehors : bandits, animaux sauvages, démon…

À l’allure qu’elle avait, elle aurait très bien être soupçonné des trois et cela n’aurait pas été faux. En choisissant les montagnes, elle en avait pris le risque. La nuit serait longue, mais le vent et la neige cacheraient ses traces et lui donnerait un peu d'avance.

Les guerriers de la milice étaient des plus entraînés. Ils trouveraient rapidement les empreintes de sabots de Sig et remonteraient jusqu’à elle bien plus vite que sa monture avançait.

Il allait lui falloir ruser…

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