Chapitre 37 : La plupart des gens le sont

13 minutes de lecture

Aux archives de l’Hôtel de Paix, les deux jours suivants ne furent pas plus victorieux.

Cependant, Kamu devait bien admettre que, sans l’aide des rudits, lui et Jahil ne seraient jamais venus à bout de ces registres. Sur les deux rangées d’étagères, plus de la moitié des livrets avait été inspectée.

Les collègues de Jahil s’investissaient complètement dans la recherche. Ils parcouraient les lignes d’encre à un rythme incroyable, renforçant le sentiment d’inutilité qui accablait Kamu. Il était de loin le plus lent. Puisqu’il n’était pas sensé savoir lire, les rudits ne s’en alarmaient pas, mais il connaissait ses capacités, et sa progression était… pitoyable. C’était comme si son cerveau ne fonctionnait plus.

— Kamu ?

Il s’aperçut qu’il fixait le vide.

— Désolé, dit-il en se frottant les yeux.

— Faites une pause, par Vultur, s’exaspéra Greki.

— Toi, tu ferais mieux d’arrêter d’en faire, le tança Farra. Tu dois bien en être à ta dixième depuis le début de la journée…

— C’est comme ça que j’arrive à être aussi productif.

Greki se servit un des petits pains qu’il avait lui-même apporté – et qu’il avait déjà ingéré en quantité prodigieuse.

— Regarde-le, reprit-il en mastiquant, il ne fait aucune pause et pourtant, j’avance plus vite que lui…

— Moi non plus je ne fais pas de pause, remarqua Torost, et j’avance plus vite que toi.

— Et toi, tu sais lire, renchérit Farra. Ce doit être éprouvant sans comprendre ce que vous avez sous les yeux… non ? Kamu ?

— Ah. Oui, oui, acquiesça ce dernier.

— Faites une pause, répéta Greki. Et mangez donc, on n’arrive à rien l’estomac vide.

À contre cœur, Kamu attrapa un pain. Son estomac était vide, oui, mais il n’avait pas faim.

— Je suis d’accord pour faire une pause, s’enquit Jahil, resté silencieux depuis un long moment.

Il se saisit à son tour d’un petit pain, tandis que Kamu mordait dans le sien.

— Bande de fainéants, grommela Torost.

Le pain était farci. Ce goût… c’était plutôt bon, mais ce n’était pas du saka. Kamu reconnaissait vaguement la texture et les saveurs, la dernière fois qu’il avait mangé quelque chose de semblable devait bien remonter à…

— Est-ce-que c’est… de la viande ?

— Bien sûr. Que voulez-vous que ce soit ?

Kamu se força à déglutir, puis reposa le pain.

— C’est, heu, vraiment très bon, mais je…

— Moi, je la fait cuire, déclara Greki.

— De toute évidence, mais, hum, cuite ou pas, je n’en mange pas.

— Quoi ? Vous ne mangez pas de…

— AAH ! rugit Torost en abattant son livret sur la table. Berklin Temir ! Berklin Temir, rudit de chiffres, habite au huit rue du ciel !

Quatre soupirs soulagés accueillirent sa découverte. Kamu sentit ses muscles se détendre, alors que les rudits se levaient avec entrain.

— Rue du ciel, ce n’est pas très loin d’ici, remarqua Jahil.

— Un instant, intervint Kamu, nous n’allons pas tous nous y rendre, n’est-ce-pas ?

Torost, Greki, et Farra le foudroyèrent du regard.

— Un coup de main ne sera pas de trop pour arrêter un assassin, dit Jahil. Allons-y.

Kamu fut contraint de suivre les rudits. Il récupéra son manteau avec ravissement et s’empressa de l’enfiler, sans omettre sa capuche. Le petit groupe traversa l’étage encombré de bureaux, puis les couloirs étroits qui, après plusieurs jours, n’empestaient plus tant que ça.

— Dites-moi, s’enquit Greki tout bas tandis qu’ils arrivaient à l’accueil, quand vous dites que vous ne mangez pas de viande, qu’insinuez-vous exacte…

— Rudit Chad, salua une voix.

Ils se retournèrent tous d'un même mouvement.

— Rudite Samra ! S'exclama Jahil avec une authentique surprise.

La femme les dévisagea quelques secondes avant d'afficher un sourire aimable. Elle portait ses cheveux blonds coupés très courts, et avait un petit nez pointu.

— Quel plaisir de vous revoir à l’Hôtel, dit-elle en gardant son sourire.

— Cette enquête nous accapare, répondit Jahil d'un ton las.

— Du progrès ?

— Heu… rien pour l’instant.

La rudite Samra ne montra rien d’autre qu’un sourire compatissant.

— Courage, rudit Chad. Et courage…

Elle se tourna vers Kamu en haussant un sourcil.

— Hum, Faust, dit-il. Merci.

Elle inclina légèrement la tête, satisfaite.

— Bien, je ne vous dérange pas plus longtemps. Bonne continuation.

Elle repartit puis disparut dans l’escalier.

— Mais enfin, Jahil, s’étrangla Farra, qu’est-ce-que…

— Je ne peux pas tout vous expliquer. Et nous devrions nous presser.

Tous quittèrent l’Hôtel de Paix. En remontant les rues, Kamu vint se placer aux côté d’un Jahil à la mine sombre.

— Alors c’est elle qui était à Claire-voix ? Demanda-t-il discrètement.

— J’ai pensé qu’il valait mieux de ne pas l’informer…

— Oui, vous avez bien fait. Et… eux ?

Kamu jeta un coup d’œil aux trois rudits qui les suivaient, visiblement troublés de cette rapide entrevue. Il se retourna juste à temps pour éviter une flaque d’eau.

— Ils font bien leur travail, je leur fait confiance.

— Vous faisiez confiance à la rudite Samra, il n’y a pas si longtemps…

— C’est… différend. Ne vous inquiétez pas.

Le reste du trajet s’effectua en silence. Comme l’avait dit Jahil, l’adresse indiquée dans le registre n’était pas très éloignée de l’Hôtel de paix, et ils arrivèrent en peu de temps.

La rue du ciel regroupait des appartements et des boutiques de rudits. Un endroit modeste, même pour ceux qui décryptaient l’alphabet Justinien, semblable au quartier où Jahil habitait. Contrairement à la plupart des bâtisses de la Ville Haute, celles-ci se divisaient en plusieurs appartements. Ils trouvèrent celui qu’ils recherchaient à l’étage d’une boutique de cartes et de fournitures papiers. À l’intérieur, l’escalier grinça sous leurs pas. Le petit groupe progressa jusqu’à un corridor, agrémenté d’une seule lucarne pour en chasser la pénombre. Ils se dirigèrent vers l’une des portes, Jahil en tête.

Alors que celui-ci s’apprêtait à frapper, Kamu le stoppa :

— Il vaut mieux que j’y aille en premier, chuchota-t-il.

— Vous ne comprenez toujours pas, soupira Jahil.

Il toqua trois fois. Kamu se concentra sur les battements. Les quatre cœurs qui l’accompagnaient palpitaient de façon légèrement irrégulière, comme le sien. Il y en avait une vingtaine d’autres répartis dans tout le bâtiment, au rythme tranquille et constant. Et puis il y avait celui derrière la porte. Au moment où elle s’ouvrit, Kamu bouscula Jahil pour prendre sa place, et le visage si familier se dévoila derrière le battant en bois.

Un visage rond, des petits yeux et des cheveux blonds. Une courte barbe, celle qui l’avait curieusement marqué à son arrivée à Claire-voix. C’était bien lui, Berklin. L’assassin.

Kamu lui décocha un coup de poing. L’homme recula avec un cri et porta la main à son nez, hébété. Il y avait de quoi : Kamu y avait mis toute la colère et toute la peine ramenées par le souvenir de la jeune femme au cœur silencieux qu’il avait échoué à sauver. De suite, les quatre rudits le poussèrent pour immobiliser l’homme avant que celui-ci n’ait le temps de réagir.

— Ce ne sont pas les méthodes des rudits de paix ! Beugla Torost.

— D-Désolé, bredouilla Kamu.

Berklin se débattit en dépit de ses mains menottées, mais les efforts des rudits suffirent à le maîtriser.


***


Les geôles de l’Hôtel de Paix ressemblaient à celles que Kamu avait déjà visité. Sauf que cette fois, il se tenait de l’autre côté des barreaux. Un large couloir au plafond bas desservait une quinzaine de cellules, pour la moitié occupées. La plupart des prisonniers s’effaçaient dans l’obscurité, mutiques. À la jointure des murs et du plafond, des fentes horizontales laissaient voir le passage urbain au travers de leur grille. Des torches enflammées contraient la lumière froide qui s’en écoulait.

Berklin n’avait pas dit un mot depuis son arrestation lors de la veille. Assis sur sa couchette sommaire, et toujours menotté, il ne faisait rien d’autre que fixer les dalles poussiéreuses de sa cellule, et il frémit à peine lorsque la grille gémit à son ouverture.

— Debout, dit le rudit de surveillance.

Il cogna sa matraque contre les barreaux pour faire réagir le prisonnier. Celui-ci s’activa sans hâte. En passant devant Kamu, il s’immobilisa et leva tête vers lui, une étrange lueur brillant dans ses yeux. Le rudit lui assena d’avancer d’un coup de matraque.

La salle d’interrogatoire était une petite pièce, simplement meublée d’une table et de chaises. Un anneau incrusté dans le bois de la table permettait d’y attacher la chaîne des menottes. Les poignets ainsi verrouillés, Berklin observa Jahil et Kamu s’installer, l’expression hostile.

— Pour commencer, s’enquit Jahil, pourriez-vous confirmer votre identité ?

Il trempa sa plume dans l’encrier, prêt à l’utiliser sur le papier disposé devant lui. Mais Berklin ne répondit pas. À la place, il se contenta de fixer Kamu. Ce dernier soutint son regard avec la même antipathie.

— C’est une simple formalité, précisa Jahil en réponse à son silence. Je poursuis, donc : où étiez-vous lors du premier dayma de setsha, entre la troisième et la sixième heure de l’après-midi ?

Le silence, encore.

Jahil répéta la question. Il gardait un ton égal, formel, sans l’ombre d’impatience. Mais Berklin demeurait mutique, son regard rivé sur Kamu.

Jahil répéta encore la question.

Kamu se racla la gorge pour attirer son attention.

— J’aimerais vous parler, lui dit-il tout bas.

Jahil fronça les sourcils, puis hocha la tête et tout deux regagnèrent le couloir.

— Qu’y-a-t’il ?

— Il ne parlera pas.

— Nous venons tout juste de commencer, dit doucement Jahil. Il finira par avouer, vous ver…

— Est-ce-que je pourrais lui parler ? Seul ?

— C’est à dire que… vous n’êtes pas habilité pour retranscrire l’interrogatoire, et il ne sera pas pris en compte sans trace écrite.

— Pour l’instant, votre trace écrite se résume à des questions sans réponses.

— Je viens de vous dire que…

— Laissez-moi lui parler, le coupa Kamu, s’il vous plaît. S’il vous plaît.

Jahil détourna les yeux, gêné.

— Votre réaction lors de son arrestation ne m’encourage pas non plus à vous laisser seul avec lui…

— Je suis désolé. J’ai pensé… qu’il valait mieux lui que vous. Mais je ne compte pas recommencer, je vous le promets. Je veux juste lui parler.

Le rudit se mordilla les lèvres, puis poussa un soupir.

— Très bien. Mais je resterai derrière la porte et j’interviendrai au moindre bruit suspect.

— Vous n’aurez pas à le faire, assura Kamu. Merci.

Il lui lança un sourire qu’il espérait rassurant, puis inspira un grand coup avant d’ouvrir la porte. Évidement, Berklin n’avait pas bougé.

— Ce sera juste nous deux, fit Kamu en reprenant sa place.

Même regard.

Kamu croisa les bras et s’enfonça dans son siège.

— L’examen du rudit de santé a confirmé qu’il s’agissait bien de ta dent qu’on a retrouvé. Alors avec ou sans aveu, tu seras quand même reconnu coupable. Au moins pour le meurtre de Merida. Tu sais, la rudite de lettres qui était dans ma chambre. J’imagine que pour un crime comme celui-là, tu seras exécuté, poursuivit Kamu. Peut-être même que tu seras le prochain pendu. Mais bon, chaque chose a une fin, pas vrai ?

Rien, pas un battement de cils.

— Chaque chose a une fin, répéta amèrement Kamu. Merida a déjà connu la sienne. Toi, tu seras pendu, et moi, j’irai au Puits. C’est l’une des deux choses que tes aveux peuvent changer ; sans coupable des meurtres de la colline, je suis autant condamné que toi. Mais franchement, je m’en fiche. Je m’en fiche parce que, au final, le grand responsable de tout cette merde, lui, il va s’en tirer. Grâce à toi.

Kamu marqua une pause.

— Nous savons tout les deux de qui il s’agit, dit-il en se redressant. Le bienfaiteur qui t’a permis de devenir rudit. Celui qui a permis à tant d’autres enfants d’échapper à la misère par les voies de la rudition. Pff… j’ai du avoir l’air con, la semaine dernière. Quand je t’ai demandé si c’était elle qui t’envoyait. Je n’avais toujours pas compris… je ne t’avais pas encore reconnu. Tu ne te souviens peut-être pas de moi, mais je…

— Tu m’aidais en cuisine.

Kamu mit quelques secondes avant de réagir.

— L’interrogatoire ne sera pas retranscrit, dit-il finalement. Tu peux dire tout ce que tu veux, ça ne comptera pas dans l’enquête.

— C’est bien ce que j’avais cru comprendre.

Les deux hommes se jaugèrent en silence.

— Tu n’es pas le genre de personne qu’on oubli facilement, reprit Berklin. Le petit favori d’Amra… elle s’en cachait bien, mais ça crevait les yeux. Tu traînais toujours avec cette fille n’dyalaise et un rouquin bigleux.

Kamu serra les dents.

— Si… si tu m’a reconnu… pourquoi n’avoir rien dit à Cotard ?

— Qu’est-ce-que tu veux dire ?

— Il me prend pour quelqu’un d’autre. Il croit que je m’appelle Faust, que je suis le frère de Kamu.

Bien qu’il s’efforçait de rester impassible, Berklin écarquilla légèrement les yeux.

— Ça, je ne le savais pas, répondit-il. Il n’est pas du genre à partager ses pensées. Pour ma part, je croyais que tu étais mort du morbus, comme tout les autres. Mais de toute évidence, tu n’es pas mort.

Ses yeux se posèrent sur le brassard de Kamu, puis revinrent sur lui.

— Et tu n’es pas rudit, rajouta-t-il.

— Je… suis parti de Claire-voix, révéla Kamu. Avant l’incident du morbus, évidement.

Berklin s’esclaffa froidement.

— C’était sacrément stupide de ta part. Mais on dirait que ça t’a sauvé.

— Mmm. Alors, dis-moi, c’est à ça que j’aurais eu droit, si j’étais devenu rudit ? Me glisser en douce chez les gens par des tunnels secrets pour les assassiner ?

— C’est bien plus que ça.

— Participer à l’appel du Léviathan ? Causer des morts et du chaos là où il y en a déjà pour qu’il y en ait encore plus ?

— C’est l’ordre inéluctable des choses. Tu l’as dit toi-même, chaque chose a une fin.

— Si c’est inéluctable, pourquoi faut-il intervenir ?

Berklin contracta furieusement sa mâchoire.

— Tu n’as aucune idée de ce qu’est réellement l’Ordre, ni aucune conscience de son ampleur, dit-il en se penchant vers lui. Ta petite enquête n’est qu’un infime aperçu de son étendue. C’est à croire que tu as tout oublié de l’enseignement d’Amra…

— Je ne l’ai pas oublié. Mais Amra nous poussait à réfléchir, avant toute chose. Et c’est ce que j’ai fait. Les monstres n’existent pas, articula Kamu. Nous n’en avons pas besoin, regarde toi ; Cotard t’a tellement bien dressé que tu serais prêt à sacrifier n’importe qui, toi le premier, tout ça pour des idéaux malades qui prêchent une morale et des devoirs tout aussi malsains.

— La raison néce…

— Assez ! Hurla Kamu en abattant son poing sur la table.

Aussitôt, la porte s’ouvrit derrière lui.

— Désolé, lança-t-il. Ce n’est rien.

Il sentit le regard de Jahil faire quelques va et vient entre lui et Berklin. Puis la porte se referma.

— La raison nécessaire n’existe pas, martela-t-il en s’efforçant de maîtriser sa colère. Rien n’est nécessaire, et Kredik le Cynique n’était qu’un foutu théoricien qui n’a jamais mis les pieds en dehors de sa bibliothèque.

Berklin fronça le nez, avant de se détourner vers un coin de la pièce.

— Qu’est-ce-que tu crois ? Demanda-t-il tout bas. Que j’ai pris du plaisir à tuer cette rudite ? Ou en empoisonnant ces nobles ? Ou en… ( Il marqua une pause ) Elle ne devait pas mourir. Ça devait juste être toi, mais quand je l’ai vu, j’ai paniqué et j’ai voulu accomplir ma mission avant tout, et…

Kamu ne brisa pas le silence.

— Je te donnerai tes aveux, dit finalement Berklin d’une voix plus dure. Je devais simplement t’empêcher de découvrir les tunnels… que tu ailles au Puits ou pas, ça, je n’en ai rien à faire.

— Moi non plus, je n’en ai rien à faire. Je te l’ai déjà dit.

— Mais je ne dénoncerai pas l’Ordre, reprit Berklin en se retournant vers lui. Je ne fais pas partie de ceux qui ont besoin d’entraîner les autres dans leur chute.

— Comme tu voudras…

Kamu s’affala sur sa chaise. Il soupira.

— Dis-moi… est-ce-que tu avais… un ami, ou quelqu’un à Claire-voix qui rencontrait des difficultés dans la lecture et l’écriture ?

— Un ami, oui, répondit Berklin avec suspicion.

— Et est-ce-que… je suppose qu’Amra le prenait dans son bureau pour travailler ?

— Elle faisait ça avec tout ceux qui présentaient des lacunes – où veux-tu en venir ?

À son tour, Kamu détourna les yeux.

— Elle s’appelait Molly, dit-il. Cette fille n’dyalaise dont tu parlais. Et elle avait du mal à lire et à écrire. Et Mama la faisait travailler dans son bureau. Je ne sais pas si c’était le cas pour tout le monde, mais pour… ( Il dut s’arrêter pour contrer les tremblements de sa voix ) mais pour elle, et pour un autre gamin aussi, ils… Mama… elle faisait des trucs. Dans son bureau. Avec eux.

— Des… trucs ?

— Tu vois de quoi je parle.

Berklin eut un ricanement moqueur.

— Où vas-tu chercher de telles…

— Je l’ai vu.

— Eh bien tu as dû mal voir, parce qu’Amra n’aurait jamais fait ça. Elle nous aimait trop, elle était trop gentille pour nous faire du mal.

— Bien sûr qu’elle nous aimait, bien sûr qu’elle était gentille, fit Kamu d’une voix rauque. La plupart des gens le sont.

Berklin sembla sur le point de dire quelque chose, mais il se ravisa.

— C’est vraiment dommage, cette histoire de fuite et de morbus, déclara-t-il finalement. Tu as sûrement besoin de lunettes, mais tu aurais fait un bon rudit de sagesse.

Kamu soutint son regard durant quelques instants, puis se leva.

— Le triomphe du cœur sur l’esprit, marmonna-t-il en quittant la pièce.

Une fois dans le couloir, Jahil l’interrogea du regard.

— Il va avouer, annonça Kamu. Au moins pour Merida et les nobles de la colline. Est-ce-que… vous pensez que je pourrais lui reparler, demain ? Je pourrais peut-être le convaincre de dénoncer Cotard, mais là…

— Bien sûr, acquiesça Jahil. Il se fait tard, et c’était une grosse journée. Prenons sa déposition, je vous raccompagnerai au Carillon ensuite.

— En fait… je préférerais vous attendre ici. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

— Pas du tout.

Jahil lui adressa un sourire chaleureux, et rejoignit Berklin dans la salle d’interrogatoire.

Le couloir était désert. Appuyé contre le mur, Kamu se laissa glisser au sol.

— Quelle ironie, Costa, murmura-t-il pour lui-même.

Annotations

Vous aimez lire Arno ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0