12 · Soufflechamps

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C’était une magnifique journée de printemps à la ferme de Soufflechamps. Tout le monde s’était levé de bonne heure, à l’exception d’Eldria qui avait traîné au lit jusqu’à neuf heures du matin au moins. Rentrée tard la veille, la jeune fermière réalisa bien trop tard qu’elle n’avait paressé que trop longtemps. Elle s’empressa de sauter du lit, enfila une robe légère, puis sortit de sa chambre.

Au rez-de-chaussée, sa tante s’affairait à passer un coup de chiffon sur la table de la salle à manger. C’était une femme d’une cinquantaine d’années, aux formes généreuses, les cheveux bruns coupés courts, et dont le visage jovial rayonnait habituellement d’une bienveillance communicative. Ce jour cependant, elle arborait une mine contrariée de circonstance.

– Bonjour Tante Dona, lança Eldria d’une voix pâteuse, trahissant une nuit un peu trop décalée.

– Bonjour, la dormeuse ! lui répondit sa tante sur le ton du reproche.

Elle positionna les poings sur ses hanches et la fixa d'un air autoritaire, mais plein d'affection.

– Désolée, je... me suis couchée tard.

– Tu étais encore avec Jarim, n'est-ce pas ?

Eldria hésita un instant.

– Oui... consentit-elle à révéler d’une petite voix

Dona la considéra d'un air désapprobateur, même si Eldria savait pertinemment que c’était plus pour la forme que pour le fond. Sa tante appréciait Jarim.

– C'est un très beau garçon, Eldria, mais es-tu sûre que ce soit ce que tu veux ?

– C'est mon ami.

– Et pas un petit peu plus ? Vous vous absentez souvent tous les deux, et...

– Non, trancha simplement Eldria, soudainement mal à l’aise à l’évocation de ce sujet.

Elle détourna les yeux en rougissant. Sa tante la considéra un moment, attentive.

– Bon, éluda-t-elle finalement tout en se remettant à essuyer la table. Après tout, tu es grande maintenant.

– Où est Oncle Daris ? demanda Eldria, désireuse de changer rapidement de sujet.

– Il est à l'extérieur. Nous avons de la visite aujourd'hui.

Curieuse, Eldria engloutit une tranche de pain et un verre d’eau en guise de petit déjeuner, la salua, puis sortit. Le soleil la gratifia de ses plus beaux rayons, dont elle profita quelques secondes en levant le visage vers le ciel azuré avec un sourire.

Au milieu de la cour principale, elle aperçut très vite son oncle en compagnie de trois hommes qui n'habitaient pas à la ferme et qu’elle ne connaissait pas. L'un d’eux, un homme plutôt grand mais avec de l’embonpoint, la moustache drue, devait avoir la quarantaine bien tassée, tandis que les deux autres, en retrait, se ressemblaient comme deux gouttes d’eau et devaient plus ou moins avoir le même âge qu’Eldria.

En la voyant approcher, Daris l’interpella :

– Ah, ma chérie, viens voir qui est là ! Kelrin, tu te souviens de ma nièce ?

L'homme le plus âgé des trois la gratifia d'un sourire amical.

– Oh, mais oui ! Jeune fille, la dernière fois que je t'ai vue, tu n'étais pas plus haute que ça.

Il plaça la main à environ un mètre au-dessus du sol, comme s’il cherchait à mesurer un plan de tomates.

– Comme tu as grandi !

Eldria lui sourit poliment en retour.

– Eldria, tu te souviens de Kelrin ? reprit l’oncle Daris. Il venait souvent à la ferme il y a de cela quelques années. Tu jouais beaucoup avec ses deux garçons, quand vous étiez enfants.

Eldria se tourna vers les deux jumeaux restés en retrait. Maintenant qu’elle les voyait de plus près, elle les reconnaissait enfin : Troj et Aran avaient bien changé depuis toutes ces années ! La dernière fois qu’elle les avait côtoyés – neuf ou dix ans plus tôt – ils devaient faire encore à peu près sa taille et leurs silhouettes chétives inspiraient alors davantage la pitié que l’admiration. Aujourd’hui, tous deux culminaient à un bon mètre quatre-vingt-dix et n’avaient plus rien de frêle. Leurs larges épaules et leurs bras musclés s’accordaient parfaitement à leurs visages fermés et à leurs regards peu expressifs. Ils la toisèrent de toute leur hauteur, non sans arborer un sourire en coin qui leur donnait des airs de bovins égarés. Déjà enfants, ils ne brillaient pas par leur intelligence : cela, au moins, n’avait guère changé avec les années.

Eldria les salua d’un ton placide, sans la moindre envie de raviver des liens d’enfance depuis longtemps dissous. Le père des deux garçons reprit la parole :

– Bref, comme je te l’expliquais, Daris, ce n'est pas une visite de courtoisie. Je dois t'entretenir de choses urgentes...

D’un air entendu, son regard s'attarda sur Eldria.

– ... et je préfèrerais que nous évoquions ces sujets en privé.

– Bien sûr, répondit Daris, suis-moi. Nous pourrons parler en toute quiétude chez moi. Eldria, ma belle...

L’intéressée ne se fit pas prier :

– J'ai des choses à faire de toute façon. Je vous laisse.

Les deux hommes, en pleine discussion, la saluèrent rapidement puis s’éloignèrent.

Ne souhaitant à aucun prix se retrouver seule – et mal à l’aise – en compagnie de ses deux anciennes connaissances, Eldria feignit d’être pressée et prit aussitôt la direction de l’étable, sans ajouter un mot. Par chance, Troj et Aran ne lui emboîtèrent pas le pas. Sur le chemin, elle croisa Salini. Sa voisine – qu’elle considérait autrefois comme sa meilleure amie – ne daigna même pas la saluer. Au lieu de cela, comme envoûtés, ses deux yeux brillants d’un bleu vif étaient fixés sur les fils de Kelrin, toujours plantés benoitement au milieu de la cour. D’un pas précipité, elle accourait littéralement vers eux.

Eldria souffla. Depuis aussi loin qu’elle s’en souvenait, Salini avait toujours eu des rêves inconsidérés. La jeune femme – de maintenant dix-neuf ans – ne jurait que pas les choses précieuses, les vêtements délicats et, par-dessus tout... les garçons ! Pour ne rien arranger, elle était réticente à toute forme de travail à la ferme, ce qui avait le don d’exaspérer Eldria qui, elle, ne rechignait pas à la tâche. Et justement, elle avait du pain sur la planche.

Avant tout, elle devait nourrir les animaux. Elle empoigna donc un seau rempli de restes de légumes abîmés qu’elle distribua aux cochons et aux chevaux, lesquels la virent approcher avec bonheur. Ensuite, elle ouvrit en grand l'enclos des vaches et des chèvres afin de les laisser paitre tranquillement dans la prairie voisine. Eldria aimait la compagnie des animaux et se plaisait à croire que, eux aussi, l’appréciaient en retour. Comme chaque jour, elle caressa longuement son cheval préféré, lui murmurant quelques mots doux à l’oreille – un rituel auquel elle ne dérogeait jamais.

Finalement, après quelques corvées supplémentaires, elle sortit de l'étable et prit la direction du petit potager, situé près de l’entrepôt de bois où étaient rangés les outils et stocké le foin. Elle était seule ce jour-là : la plupart des hommes étaient probablement partis à la chasse, tandis que les femmes s’étaient attelées à la cueillette dès l’aube.

Saisissant un panier, elle s’accroupit devant les rangées de carottes et se mit à scruter les plants, à la recherche de légumes suffisamment mûrs pour être récoltés. Ce fut alors qu’elle entendit du mouvement provenant de l’intérieur de l’entrepôt, dans son dos. Elle n’avait aperçu personne alentours, aussi se demanda-t-elle de qui il pouvait bien s’agir. De plus, un rapide coup d’œil lui permit d’établir que la porte du bâtiment était toujours close : qui que ce fût, l’intrus ne désirait visiblement pas se faire remarquer.

Quelques nuits plus tôt, leur petite communauté – pourtant isolée – avait été victime d'un vol. De nombreux outils ainsi que du bétail avaient disparu, aussi s’étaient-ils tous entendus pour redoubler de vigilance : la ferme ne pouvait guère se permettre de telles pertes.

Soudainement sur le qui-vive, tâchant de faire le moins de bruit possible, Eldria s'approcha à pas feutrés du mur de bois de l’entrepôt. Elle y appuya délicatement l’oreille et retint son souffle, attentive au moindre son suspect. De prime abord, elle ne perçut rien. Tout au plus entendit-elle la toiture craqueler doucement sous l’effet du vent. Puis, après quelques instants, elle en fut subitement certaine : elle entendait quelque chose – ou quelqu'un ! – se mouvoir à l’intérieur. Or, cela ne pouvait pas être un animal : elle avait compté consciencieusement tout le bétail quelques minutes auparavant.

Elle décolla prestement l’oreille et inspecta les planches à la recherche d'un interstice par lequel elle pourrait observer, en toute discrétion, le potentiel pillard. Elle repéra sans peine une mince ouverture, large d’à peine un demi-centimètre, contre laquelle elle vint plaquer un œil vigilant. Là, contre toute attente, tous ses doutes furent bien vite éclipsés : en lieu et place d’un voleur, elle fut surprise de découvrir Salini, l’air parfaitement décontracté, adossée contre un tas de foin.

Eldria poussa un soupir de soulagement. Rassurée, elle s’apprêta à retourner vers ses plants de carottes mais, tout de même un peu curieuse de découvrir ce que la jeune femme aux longues boucles d’or pouvait bien fabriquer seule dans l’entrepôt – elle qui était d’ordinaire si réticente à y travailler –, elle se décala légèrement pour tenter d’élargir son champ de vision. Salini, immobile, semblait en effet observer quelque chose en face d'elle. Eldria réalisa alors que son amie d’enfance, semblant de prime abord seule, ne l’était en fait pas : Troj et Aran étaient là eux aussi, et tous trois, dans un silence quasi solennel, s’observaient avec une étrange intensité. Que pouvaient-ils bien manigancer ici ? Cet entrepôt n’était guère le lieu idéal pour des retrouvailles visant à évoquer de vieux souvenirs d’enfance !

Alors qu’elle aurait pu parfaitement les ignorer et reprendre ses activités, Eldria choisit, par pure indiscrétion, de poursuivre son observation clandestine, intriguée par la présence de ce trio en ce lieu isolé. Elle se surprit même à retenir sa respiration, de peur qu’un simple souffle ne trahisse sa présence.

Soudain, et à son plus grand étonnement, Salini entreprit de soulever lentement le devant de sa robe, jusqu’à dévoiler le creux de son ventre. Les jambes subtilement écartées, apparemment sans gêne aucune, elle ne dissimulait rien de sa fine culotte incarnate aux deux jeunes hommes, qui continuaient de la fixer ardemment. Puis, du bout des doigts, tout aussi lentement, elle commença à s’effleurer l'entrejambe par-dessus le voile délicat de dentelle qui en préservait à peine l’intimité, tout en soutenant leurs regards dévorants.

Troublée par cette vision inédite, Eldria décolla son œil effarouché d’entre les planches. Son cœur cognait furieusement dans sa poitrine, comme affolé par ce qu’elle venait d’apercevoir. Salini était-elle en train... d'aguicher ouvertement les deux garçons ? Ceux-là même avec qui, autrefois, elles érigeaient ensemble des châteaux de sables et jouaient innocemment au papa et à la maman ?

Tout à coup, elle fut saisie par un étrange dilemme : devait-elle s’en retourner à ses corvées, feindre de n’avoir rien vu, et balayer cette image troublante de son esprit ? Après tout, ce que Salini faisait sur son temps privé ne la concernait en rien. Contrairement à elle, Eldria savait pertinemment que sa voisine n’était plus vierge, et donc davantage accoutumée à ce genre de pratiques qui lui étaient pour sa part parfaitement étrangères – des pratiques qui, en vérité, ne l’avaient jamais réellement intéressée. Ou bien devait-elle, mue par une curiosité aussi déplacée que naïve, demeurer là, tapie derrière le mur, laisser son regard s’attarder sur ce qui s’offrait sans filtre à sa vue ? Pour elle qui ne connaissait rien aux choses de l’amour, c’était en effet une excellente opportunité d’en apprendre davantage par l’entremise de son ancienne amie, expérimentée en la matière.

Elle songea soudain à Jarim, et aux sensations uniques qu’elle éprouvait en sa présence, sans jamais avoir su comment les nommer ni les exprimer. À cette pensée, l’indiscrétion l'emporta sur la raison. D’ailleurs, elle ne comptait les observer qu’une petite minute, guère plus ! Et puis après tout, elle ne faisait de mal à personne. Sa décision prise, elle s’étonna même de sentir naître, dans son bas-ventre, une forme inédite d’exaltation, proche de l’émoi, comme si une main invisible la chatouillait subtilement en ce endroit.

De l’autre côté de l’interstice, Salini continuait de se caresser sous le nombril, à la frontière entre sa culotte et sa peau légèrement halée, présentée sans fard. Sans quitter des yeux les jeunes hommes en face d'elle, elle fit glisser la langue sur ses lèvres d’une manière que même Eldria trouva sensuelle. Cela sembla d’ailleurs inspirer les deux jumeaux car bientôt, ils entreprirent à leur tour d’en dévoiler plus que de raison : avec appréhension, la gorge nouée, Eldria les contempla, pantoise, alors qu’ils déboutonnaient leurs chemises, dévoilant des abdominaux plus marqués encore que ceux de Jarim. Elle se surprit à les admirer avec plus d’intérêt qu’elle ne l’aurait cru, se sentant même gagnée par une subite bouffée de chaleur devant ce tableau qu’il lui était donnée d’apprécier secrètement et sans contrepartie. La teinte écarlate que prenait peu à peu son visage ne s’améliora d’ailleurs pas lorsque, sans plus de cérémonie, Troj et Aran baissèrent presque en même temps leurs pantalons et leurs sous-vêtements respectifs, se retrouvant, de fait, tous deux dans le plus simple appareil au milieu des bêches et des pelles.

Eldria – qui commençait à réaliser que ce qu’elle faisait était peut-être mal – voulut détourner le regard. Elle-même, en effet, n’apprécierait sans doute pas d’être espionnée en train de se dévêtir. Pourtant, une nouvelle fois, la petite voix de sa curiosité lui intima de rester bien sagement à sa place, accroupie dans les plantations, comme happée par cette vision nouvelle. Une forme d’excitation jamais ressentie s’empara d’elle : elle pouvait maintenant détailler, sans artifice, leurs deux longs sexes affublés d'une imposante touffe de poils noirs à leurs bases. C'était la première fois qu'elle avait l’occasion d’observer le pénis d’hommes adultes, et elle s’en retrouva plus émoustillée que de raison. Elle se concentra sur celui de Troj, qui lui parut plus gros que ce à quoi elle se serait imaginée : la chose pendait mollement entre ses cuisses musculeuses, par-dessus une sorte de grosse bourse veineuse et boursoufflée. Eldria n’était d’ailleurs pas la seule à s’y intéresser, car la vue de ces attributs masculins, exposés sans filtre, sembla grandement satisfaire Salini, qui en profita pour intensifier le rythme de ses caresses sur son propre corps.

Eldria, pour sa part, se sentie tiraillée entre, d’un côté, la peur, et de l’autre, une exaltation intense, presque envahissante. Que se passerait-il si, d'aventure, on la surprenait en train d’assister, sans y être invitée, à une scène pourtant si intime ? Que diraient Salini, Troj et Aran s’ils apprenaient qu’ils avaient été surpris dans cette situation à caractère privé, par une voyeuse clandestine – leur amie d’enfance qui plus est ? Elle-même ne se sentait plus dans son état normal, comme si tous les traits ordinairement raisonnables de sa personnalité s’étaient subitement évanouis. Elle eut l’impression, en cet instant et du haut de ses tout juste dix-huit ans, d'être brutalement propulsée dans le monde très mystérieux des adultes. La tête se mit presque à lui tourner.

Maintenant qu'ils étaient nus, Troj et Aran se rapprochèrent tranquillement de Salini, qui commençait à gémir doucement, appuyée contre le foin. Tous deux s'agenouillèrent chacun d'un côté et de l'autre de la jeune femme. Ils étaient si grands que même dans cette position, ce fut à peine si Salini les dépassait. Leurs doigts musclés ne tardèrent pas à trouver le chemin de la poitrine de cette dernière, qu'ils se mirent à palper sans vergogne au travers de sa robe d’été. Elle ne les repoussa pas. Au contraire, elle ôta sa main de sa culotte et, pliant subtilement les genoux pour les atteindre, entreprit à son tour de caresser les jambes nouvellement dénudées de ses deux partenaires. Après quelques instants à faire glisser ses doigts de manière sensuelle sur leurs cuisses épaisses, la main droite de la jeune femme finit par atteindre le sexe de Troj, tandis que la gauche faisait de même avec Aran. Elle avait saisi leurs pénis avec poigne, comme elle l'aurait fait de proéminents pis de vache, puis y entama de langoureux mouvements de va et de vient.

Depuis sa cachette, Eldria demeura coite, presque sidérée. C'était donc de cette façon que l’on satisfaisait un homme ? En lui trayant le sexe ? Elle avait toujours eu du mal à se représenter en détails l'acte sexuel, pourtant elle savait – au moins en théorie – comment cela devait fonctionner, pour l’avoir lu malgré elle dans des livres. Salini et ses deux partenaires en arriveraient-ils à de telles démonstrations charnelles ? Et, par-dessus tout, Eldria avait-elle seulement envie d'en être témoin ?

Elle n’eut guère le loisir de s’interroger davantage. En effet, à mesure que Salini leur stimulait la verge, Eldria constata avec effarement que celles-ci gagnaient notablement en volume, comme de grands ballons allongés que l’on gonflerait avec ferveur. Après une trentaine de secondes, celle de Troj n'avait plus rien à voir avec la modeste excroissance molle des instants précédents : c’était devenu une sorte de long manche marbré d’une bonne vingtaine de centimètres, comme soudainement gorgé d’une ardeur aux nuances pourpres, qui semblait pulser aux creux des doigts habiles de Salini. Ceux-ci devaient ainsi parcourir plus de distance entre sa base et son bout, lequel était terminé par une sorte de protubérance arrondie, à la peau légèrement plus mate et luisante que le reste du membre de forme oblongue. La bouche grande ouverte et le souffle rauque, cela semblait d’ailleurs procurer un plaisir certain à son propriétaire.

Pourtant, en face et malgré leur gémellité, le sexe d'Aran avait visiblement plus de mal à entrer en érection. Salini y appliquait pourtant les mêmes aller-retours désormais frénétiques, mais cela ne semblait pas avoir la même efficacité. Aussi, après une bonne minute sans évolution notable, et alors que des mains masculines attoucheuses continuaient de lui parcourir le corps, Salini fit une chose qu’Eldria n’aurait jamais cru possible : à sa plus grande stupeur, elle approcha son visage rosissant du pénis réticent d'Aran et, de la main gauche toujours, l’érigea vers sa bouche pour le sucer goulument, comme elle l’aurait fait d’un succulent os de poulet rôti.

Eldria, l’œil grand ouvert, la pupille dilatée, trouva absolument surréaliste la scène qui se déroulait à seulement deux ou trois mètres d’elle, de l’autre côté de la maigre paroi. Elle avait brièvement oublié le monde qui l’entourait, les carottes enterrées à ses pieds, la ferme, ses habitants... Chaque fibre de son être était absorbée par cet aussi soudain qu’inattendu déferlement de stupre, survenu sans crier gare dans sa vie. C’était la première fois que, de façon inespérée, un pont s’ouvrait pour elle vers le monde si obscur et impénétrable des plaisirs charnels, qui semblaient tant plaire aux autres adultes. Jamais elle n’avait été témoin d’une telle scène, qu’elle croyait se dérouler habituellement en privé, en couple, dans l’intimité d’un lit. Certes, il lui était quelques fois arrivée d’entendre subrepticement, au milieu de la nuit, son oncle et sa tante se livrer à des activités dont elle soupçonnait la nature sexuelle, mais jusqu’alors elle était restée comme étrangère à cet univers nébuleux, qu’il était attendu des adolescents et des jeunes adultes qu’ils découvrent par eux-mêmes. Elle-même ne s’était jamais sentie pressée pour la chose.

Alors qu’elle demeurait comme hypnotisée par la langue de Salini en train de pourlécher avec volupté le bout gonflé du phallus d’Aran, Eldria sentit que son propre corps, cette fois-ci, réagissait de manière inattendue à cette vision licencieuse. La sensation étrange dans son bas-ventre s’était muée en une forme inédite d’excitation fébrile. Elle en était persuadée, si elle avait pu se regarder dans un miroir en cet instant précis, elle aurait constaté que son visage était devenu rouge écarlate. C’était cependant plus bas, au niveau de l’entre-jambe, que la réaction de son corps l’intriguait le plus. Elle avait la curieuse impression d’être comme humide en son endroit le plus intime, et pourtant elle n’était pas en période de menstruation. Cela lui parut très étrange, mais après tout il faisait déjà chaud en ce milieu de matinée : il s’agissait sans doute de sa sueur.

Bientôt, les lèvres et la langue habiles de Salini semblèrent faire effet car le sexe d’Aran devint tout aussi long et dur que celui de son frère. En bonne amante, la main droite de la jeune femme n’avait cependant pas oublié Troj, et continuait de le masturber avec vigueur. Les bras puissants de ce dernier n’étaient d’ailleurs pas restés inactifs et avaient entamé une inexorable descente depuis la poitrine de leur amie – par-dessus sa robe – vers son nombril, pour finir leur course au niveau de sa culotte. Ce qui se dissimulait en-dessous avait en effet l’air de particulièrement l’enthousiasmer. Ce détail ne parut pas échapper à l’intéressée, qui éloigna enfin son visage d’entre les cuisses d’Aran – laissant après elle un long membre suintant de salive et érigé dans sa direction – pour se redresser avec grâce. Lançant un dernier coup d’œil satisfait aux pénis de ses partenaires, elle les lâcha d’un même mouvement. Les deux phallus demeurèrent étonnamment droits, comme maintenus en l’air par une force invisible.

Doucement, Salini se recouvrit avec le pan de sa robe qu’elle fit redescendre jusque sur ses cuisses graciles, écartant au passage d’un geste désinvolte les doigts de Troj qui s’y aventuraient encore. Puis elle se leva d'un bond élégant et s’éloigna d’un pas langoureux, laissant les deux garçons accroupis dans le foin derrière elle, orphelins de ses bons soins. Ceux-ci, cependant, ne perdirent pas une miette du déhanché sensuel que leur offrait leur ancienne camarade de jeux. Très vite, profitant qu’elles étaient aisément accessibles, ils empoignèrent leurs verges respectives et entreprirent d’y poursuivre l’œuvre inachevée de Salini, leurs yeux ardents rivés sur les courbes aguicheuses du fessier de la jeune femme, dont on devinait les formes avantageuses se mouvant sous l’étoffe aérienne ondoyant autour de ses hanches.

À mesure qu’elle progressait, Salini s’approchait dangereusement de la mince paroi de bois derrière laquelle se dissimulait Eldria. Cette dernière, crispée, s’efforçait de demeurer parfaitement immobile, redoutant que son ombre, projetée par le soleil matinal à travers les interstices, ne trahisse sa présence. Fort heureusement, sa séduisante voisine s’arrêta net non loin de la cachette, avant d’être trop proche pour repérer quoique ce soit. Un sourire malicieux vint alors ourler ses lèvres fines. Là, elle se tourna lentement pour faire face à ses deux compagnons, exposant sans le savoir son dos à Eldria. Puis, avec une lenteur étudiée, elle saisit les deux bretelles de sa robe et les fit glisser le long de ses minces épaules. Après quelques instants à aguicher son audience conquise, elle laissa tomber sa robe d’un geste fluide et sensuel, dévoilant, en l’espace d’une fulgurante seconde, son buste, ses hanches fines, ainsi que ses jambes élancées.

Elle demeura ainsi, debout devant ses deux partenaires, à demi-nue, laissant leurs regards flamboyants parcourir sa silhouette svelte. Enfin, d’un geste tout aussi langoureux, elle retira sa culotte – ultime rempart de sa pudeur –, qu’elle accompagna sans se presser jusqu’à ses chevilles. La vue de leur amie d’enfance, désormais femme, entièrement nue devant eux, sembla combler Troj et Aran d’un plaisir intense, car ils redoublèrent bientôt d’ardeur dans la stimulation manuelle de leurs organes génitaux.

Les cheveux d’or de Salini virevoltèrent autour de ses épaules tandis qu’elle enchaînait des poses aussi équivoques que calculées, manifestement satisfaite de l’effet qu’elle produisait. Même Eldria, postée dans son dos, se surprit à contempler avec une étrange fascination ses courbes galbées. De cet endroit, il lui était en effet donné d’admirer, dans les moindres détails, les fesses arrondies de la jeune femme

Malgré l’inimité qu’elle nourrissait envers Salini, Eldria dut se résoudre à admettre une évidence : son ancienne amie avait été dotée d’une rare beauté. Elle-même pouvait-elle en dire autant ? En vérité, elle ne s’était jamais réellement souciée de savoir si elle était séduisante. Fallait-il entretenir une silhouette aussi parfaite pour plaire aux garçons ? Était-elle aussi bien formée que sa voisine ? Elle se surprit même à songer : produirait-elle le même effet si, d’aventure, elle devait se retrouver dans une situation semblable... face à Jarim ? Cette idée la fit rougir de plus belle tandis qu’elle sentit une douce chaleur envahir son bas-ventre, comme si une flamme y crépitait subitement.

Soudain, alors qu’elle brûlait de curiosité à l’idée de découvrir ce que la suite de ce spectacle alléchant lui réservait, elle perçut dans son dos des voix indistinctes en provenance de l’étable, non loin. Son sang ne fit qu’un tour : quelqu’un approchait ! Que penserait-on si on la découvrait ainsi accroupie au milieu des rangées de carottes, l’œil plaqué contre le mur d’un entrepôt censé être vide ? Et pire encore : qu’adviendrait-il si on l’interpelait ? Même de l’intérieur, Salini, Troj et Aran entendraient sans doute, et comprendraient aussitôt qu’ils étaient espionnés.

Ni une ni deux, Eldria se releva – veillant à ne produire aucun bruit – puis fit son possible pour s’éloigner d’un pas naturel, abandonnant derrière elle, à contrecœur, l’expérience érotique la plus troublante qu’elle eût pu imaginer.

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