Chapitre 14

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Quelques heures plus tard, seule chez moi devant mon bureau couvert de matériel de peinture, je soupirai en regardant mon portable posé près de moi. Clément m’avait envoyé un SMS un peu plus tôt, pour me dire ‘Tu me manques, ma belle. J’arrête pas de penser à toi.’ Et ces quelques mots m’empêchaient de me remettre au travail. Moi aussi, à présent, je pensais à lui, à cette nuit passée ensemble, au plaisir partagé. Je lui avais répondu aussitôt, mais sans recevoir de réponse : il avait certainement repris les cours.

Je m’appuyai au dossier de ma chaise et fermai les yeux en soupirant de plus belle. J’avais bien avancé le matin, mais là depuis ce SMS, je n’arrivais plus à rien…

Sans que je m’en rende compte, mes doigts avaient glissé jusqu’à mon entrejambe. A travers le jean, ma main semblait brulante. Je posai mon crayon sur le bureau, écartai un peu les cuisses et me caressai franchement. Après tout, puisque la journée était foutue, autant en profiter ! Je ne tardai pas à aller m’installer sur mon lit, repoussant la couette pour me coucher dans les draps après avoir ôté mes vêtements. Je fermai les yeux, et sur mes paupières closes dansait le visage de Clément. J’entendais sa voix, aussi, résonnance des mots qu’il avait prononcés la veille… Et rien que ce souvenir suffisait à m’exciter.

Je laissais courir mes doigts sur mon corps, effleurant ma poitrine menue, mon ventre, et j’écartai les cuisses pour atteindre l’endroit où semblaient converger tous les nerfs de mon corps. Je me cambrai au simple contact de mon doigt, et m’employai à développer le plaisir, à le faire grandir. Je l’imaginais comme une bulle de savon, ce plaisir dans mon ventre, se déformant un peu, grossissant tout doucement, s’étendant lentement en moi, jusqu’à me contenir tout entière et me submerger complètement.

Essoufflée, je repris lentement ma respiration en même temps que mes esprits, pour réaliser que l’orgasme n’avait pas encore apaisé mes envies. Armée de ma brosse à cheveux dont le manche m’avait déjà mainte fois aidée, j’ai remis ça presque aussitôt. Et cette fois, l’action conjuguée des caresses et d’une présence en moi m’a comblée pour de bon…

Enroulée dans ma couette, j’ai somnolé un moment, détendue, puis j’ai rêvassé. Ça faisait du bien, pour une fois, de ne rien faire… Après, quand je me suis secouée pour me remettre à dessiner, j’ai été beaucoup plus productive…

***

J’avançais vraiment bien dans mon travail, j’étais contente. Pierre-Luc, l’éditeur, m’avait déjà plusieurs fois demandé quand j’allais lui proposer quelque chose à publier, un livre « à moi ». Je m’en tirais à chaque fois d’une pirouette, mais je bossais quand même dans ce sens… Et ce n’étais pas facile. Les illustrations, rien de plus simple. J’aurais pu en faire des kilomètres… mais le texte ? Ce jour-là, après avoir une fois de plus regardé mes dessins en me creusant la cervelle pour trouver comment raconter mon histoire, je décidai d’aller me balader, ça me changerait les idées. La course à pied me manquait… ça me faisait vraiment du bien, de courir. Mais depuis qu’Attila n’était plus là, je n’avais plus envie. Alors je décidai de marcher. En arrivant place de Jaude, sur une impulsion subite je contournai le centre commercial pour aller à la médiathèque. J’étais toujours inscrite, même si j’y allais assez rarement. Je passai le reste de mon après-midi à feuilleter des albums, et repartis avec une quinzaine de livres, dont des documents théoriques sur la littérature jeunesse.

Je rentrais chez moi, pressée de lire et d’analyser mes bouquins. Dans ma rue, je tombai nez à nez avec Stanislas, le frère de Paul : « Je suis venu l’aider à déménager, mais il n’est pas encore rentré, son pot de départ doit s’éterniser… » m’expliqua-t-il.

« Oh, il a trouvé du travail à Bordeaux, alors ?

_ Oui, tu ne savais pas ?

_ Paul ne me parle plus depuis quelques mois… » soupirai-je.

Je proposai à Stan de s’installer dans le troquet du coin de la rue, pour discuter en attendant son frère.

« Tu sais, il en bave depuis que vous n’êtes plus ensemble…

_ Parce que tu crois que j’en ai pas bavé, moi ? En quelques mois, j’ai perdu ma mère, mon chien, et je me suis fait plaquer !

_ Je sais Louise. J’ai pas dit ça.

_ Désolée. Je sais qu’il le vit mal… Et je comprends qu’il préfère couper les ponts. Mais je trouve ça dommage… Bon, comment vont tes parents ? Et Guillaume ? »

Il me donna des nouvelles, m’annonça que Gengis Khan le hamster était en pleine forme, et que Guillaume était fier de travailler, lui aussi.

« Il a réussi à avoir une place dans un Centre d’Aide par le Travail, il bosse dans une petite imprimerie, ils sont plusieurs dans le même cas que lui. »

C’était un peu étrange d’être là avec Stan, sans Paul. Et sans Guillaume…

« Tu sais, j’étais sincère, quand j’étais avec Paul. Je ne sais pas s’il le sait, s’il en a conscience, mais j’étais honnête. Tu lui diras ? Quand il sera prêt à l’entendre ?

_ Promis.

_ Il mérite d’être heureux, et j’espère vraiment qu’il rencontrera une fille qui pourra lui offrir ce qu’il attend… Moi, je ne pouvais pas.

_ Je sais, Louise. Et je sais aussi que mon frère n’aime pas beaucoup les concessions. Alors ne culpabilise pas trop, d’accord ? Si j’ai bien suivi, il avait espéré te faire changer d’avis. Il n’avait pas compris que c’était jouer à un jeu dangereux.

_ Parce que toi, tu l’avais compris ? » Je levai un sourcil curieux.

« Oui. Tu es entière. Et tu n’aimes pas plus que lui faire des compromis.

_ J’ai rien contre les compromis, s’ils sont équitables. Mais il ne pouvait pas me reprocher de ne pas vouloir quitter mes frères, alors qu’il cherchait à se rapprocher de Guillaume et toi.

_ C’est sûr, dit comme ça… » sourit Stan.

Mon téléphone se mit à vibrer dans ma poche, et je m’excusai avant de répondre : Clément, qui me proposait de passer la soirée ensemble. Quand je raccrochai, Stan me demanda : « Tu as rencontré quelqu’un ?

_ Oui. » Je ne m’étendis pas, mais je n’allais pas le cacher non plus

« Tu es heureuse ?

_ Eh bien… J’ai évité de me poser cette question, depuis qu’Attila n’est plus là. » Je n’arrivais vraiment pas à dire, ni à penser, qu’il était mort. « Ça me faisait un peu peur, tu vois. Mais… ça va. Je vais bien. »

Il sourit : « Alors c’est le principal. Ne t’en fais pas pour mon frère, il s’en sortira. Vis ! Ce mec a de la chance de t’avoir. Il le sait, au moins ? »

Son téléphone se mit à sonner au même moment, et me dispensa de répondre. C’était Paul. On a payé nos consommations, et pris le chemin du retour.

Quand Paul me vit arriver, son visage se crispa un peu, et il détourna le regard après m’avoir saluée. Il disparut aussitôt dans son appartement, tandis que son frère restait avec moi le temps que j’ouvre ma porte.

« Tu vas me manquer, Stan. Je ne sais pas si tu auras l’occasion de revenir dans la région, mais ça me ferait très plaisir d’avoir de tes nouvelles…

_ Et toi, si tu passes à Bordeaux, préviens, d’accord ?

_ Promis. Embrasse tes parents et Guillaume. Oh ! Et évitez de vous blesser en déménageant, je ne suis pas là ce soir… » On a ri en repensant à l’arrivée de Paul, dix-huit mois plus tôt… et il alla le rejoindre. Je fis un saut chez moi pour prendre quelques affaires, et m’enfuis littéralement.

« Ça ne va pas ? » demanda Clément en me voyant arriver. Je lui expliquai que ça me faisait quelque chose de voir Paul s’en aller, et surtout de savoir qu’il partait fâché.

« Allez ma belle… Tu n’y peux rien… » Son étreinte rassurante, son calme… J’enfouis mon nez dans son T-shirt et respirai son odeur. Il avait le don de m’apaiser par sa seule présence, et j’en ai profité un petit moment, avant de m’installer contre lui sur le canapé, avec mes bouquins. Il m’a taquinée, parce que je lisais des livres pour enfants, dont la plupart n’avaient pas ou peu de texte. Mais je me suis vengée lorsqu’il a parlé de faire à manger : « Tu as besoin d’aide, pour faire réchauffer ton plat surgelé ? »

Il s’est figé au beau milieu de la pièce, et m’a regardée avec un faux air vexé : « Pas du tout, mademoiselle la parfaite maitresse de maison. Ce soir, je sors le grand jeu ! Pâtes carbo. »

J’ai pouffé de rire, si c’était ça sortir le grand jeu !

« Alors, c’est pas bon ?

_ Mais si, c’est bon ! Il faut seulement que je t’apprenne à cuisiner autre chose que des pâtes… »

Sa sauce était délicieuse, et les tagliatelles cuites al dente, juste bien. Mais après le repas, comme je continuais à taquiner sur l’étendue plus que limitée de ses talents culinaires, Clément m’a dit :

« Tes frangins ont raison, en fait : t’es rien qu’un petit truc agaçant...

_ Oh ! Tu oses ? » me suis-je insurgée, en lui sautant dessus.

On a bataillé, pour rire mais bataillé quand même, jusqu’à se retrouver emmêlés sur le canapé.

« OK, d’accord, tu fais du judo. » admit Clément. « Mais moi, j’ai fait du rugby ! » En effet, il pesait de tout son poids sur moi, et ma technique de l’anguille s’était avérée inefficace, il avait réussi à me coincer dans le clic-clac. Luttant contre l’envie de rire, j’ai changé de tactique, et j’ai commencé à le caresser et à embrasser son épaule qui se trouvait à ma portée. Je me faisais allumeuse. Et ça a fini par fonctionner, il s’est relevé sur ses coudes pour me regarder. Il ne pensait plus à m’immobiliser, mais à me culbuter…

On a roulé, failli tomber, et déplié le canapé. Et quand Clément est venu en moi, c’était déjà tellement bon, tellement fort, que je me suis accrochée à ses épaules en fermant les yeux, gémissant de plaisir à chacun de ses mouvements. On a fait l’amour plusieurs fois, la nuit et le lendemain. Prenant le temps de se découvrir, apprenant le corps et les réactions de l’autre, mémorisant ce qu’il aimait, ce qui le faisait vibrer, ronronner, jouir, gémir, voire crier parfois…

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