Chapitre 53

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Fin septembre 2017

Le temps a filé à toute vitesse, et la veille du mariage, Nicolas et Meaza sont venus au chalet pour préparer la déco et les plats. Puis Nicolas m’a confié sa fiancée et les clés de la 205 : lui restait à la maison avec Clément et Virgile, ils avaient prévu de passer une soirée entre mecs, même si on ne pouvait pas appeler ça un enterrement de vie de garçon. Meaza et moi avons rejoint Julia chez elle. Une fois les enfants couchés, on a papoté dans le salon. Je découvrais que passer du temps avec Julia n’était finalement pas désagréable, même si on n’avait pas grand-chose en commun. Quant à Meaza, elle était un peu nerveuse à l’idée de passer devant le maire le lendemain, mais je la trouvais bien plus détendue qu’avant en présence de Julia.

Meaza et moi avons partagé le lit de la chambre d’amis, qui était quelques mois plus tôt la chambre de Nico chaque week-end. Et le lendemain, on a été réveillées par Corentin qui est venu sauter sur le lit entre nous – et sur nous, aussi.

« Tatie Lou, Tatie Zaza ! Tatie Louuuuu ! »

On s’est levées, et à partir de ce moment-là on n’a plus rien maitrisé. Passé le petit-déjeuner, il a fallu s’occuper des enfants tout en écoutant Julia s’exciter sur la montagne de choses qu’il restait à faire avant 16 heures, heure du rendez-vous à la mairie. Moi, ça me paraissait large, comme timing, pour préparer le repas de midi, le manger, et s’habiller, mais apparemment non. Ma belle-sœur s’était transformée en furie façon bonne fée dans Cendrillon, elle avait l’intention de nous faire un ravalement de façade, trousse de maquillage à l’appui. Que dis-je, trousse de maquillage ? C’était une vraie caisse à outils, son truc ! Il parait que je n’y connais rien, qu’on appelle ça un vanity

Franchement, le plus difficile fut de réussir la coiffure de Meaza. On était allées, deux jours plus tôt, passer l’après-midi chez ma coiffeuse qui avait défait et refait nos tresses à toutes deux. Pour Meaza, elle nous avait montré comment fixer ces dizaines de petites nattes avec des pinces et des barrettes décorées de perles blanches, pour en faire un beau chignon travaillé.

Ensuite, Julia a insisté pour maquiller Meaza, en promettant que si ça ne lui plaisait pas, elle avait le droit de se démaquiller dans la foulée. On l’a laissée jouer à la Barbie, et j’ai accepté moi aussi… Elle m’a simplement mis un peu de noir autour des yeux, « pour accentuer le regard », et du rouge à lèvres. Et c’est tout. J’ai estimé que je pourrais survivre à ça. Meaza, quant à elle, a eu droit à la totale, du fard à paupières, du mascara, du crayon, le rouge à lèvres… et même de la poudre sur les joues. Bon, j’avoue, le résultat était superbe. Il y avait un petit truc en plus de d’habitude, mais sans avoir l’air tartinée à la truelle. Après ça, il ne nous restait plus qu’à sauter dans nos robes, puis à réveiller les enfants, les faire goûter et les habiller, et c’est sans doute ce qui fut le plus long et le plus compliqué. Lucile n’avait pas son compte de sommeil, elle était grognon et chouinait malgré le biberon, quant à Corentin il était excité comme une puce, il sautait partout, et j’ai dû lui courir après dans tout l’appartement avant de parvenir à l’attraper pour lui enfiler son petit bermuda et sa minuscule chemise blanche avec un nœud papillon. Et si courir après mon neveu n’avait rien de nouveau, en revanche c’est la première fois que je faisais ça en jupe, avec des sandales à talons. Pas aiguilles, heureusement ! mais Julia avait gagné, et j’avais accepté de porter des nu-pieds avec un petit talon.

Bref, on a réussi à arriver à l’heure à l’hôtel de ville. Clément nous attendait devant la façade de grosses pierres noires.

« Où est Nicolas ? » a demandé Meaza d’une voix pas vraiment assurée, en s’accrochant à mon bras.

« Il nous attend à l’intérieur, avec Virgile. Venez, je crois que tout le monde est là-haut. » Nous l’avons suivi, il nous a guidés dans les couloirs et les escaliers. Meaza s’accrochait à mon bras, Julia portait Lucile, et Clément, Corentin.

Mes frères se trouvaient, avec notre père, Marité et les autres invités, au fond du couloir du premier étage. Nico semblait nerveux, il tirait sur sa cravate, se passait la main dans les cheveux toutes les cinq secondes, mais se figea littéralement en nous voyant arriver. Son regard s’est éclairé, tout son visage rayonnait. Avait-il peur que Meaza ne vienne pas ? Sa main à elle, sur mon bras, s’est resserrée un instant, avant de me lâcher, et elle s’est élancée vers lui, devancée par Corentin qui est allé se jeter dans les bras de son père.

Le temps d’embrasser tout le monde pour dire bonjour, et le maire est arrivé, ceint de son écharpe tricolore on ne pouvait pas le manquer. Derrière lui venait une dame avec un dossier sous le bras. Nous sommes entrés après eux, c’était la première fois que je mettais les pieds dans la salle des mariages et j’ai eu un temps d’arrêt en la découvrant : les quatre murs étaient décorés de fresques en trompe-l’œil, de telle manière qu’on se croyait sur une terrasse ensoleillée, avec vue sur la ville et la chaine des puys en arrière-plan. Même le plafond était peint d’un magnifique ciel bleu sans nuage. Nos amis étaient installés sur les banquettes roses disposées en deux rangées, et le maire attendait derrière la table. Nicolas et Meaza ont pris place sur les deux fauteuils qui leur étaient réservés, et nous nous sommes assis également.

La cérémonie a été très simple, plutôt rapide, mais pleine d’émotions. Les regards amoureux que se lançaient Nicolas et Meaza, leurs « oui » vibrants, Corentin qui trottinait jusqu’à eux avec dans sa menotte l’écrin contenant leurs alliances…

Après l’échange des anneaux, le bisou et les signatures, le maire nous a souhaité à tous une bonne journée, et il est retourné à ses occupations, sans doute la préparation du mariage suivant. Nous avons discuté quelques minutes dans la salle, avant de sortir. Gauthier avait pris des photos de la cérémonie, avec mon appareil que je lui avais prêté dans ce but.

« Tiens Loulou, je te rends ton précieux.

_ Attends, on va faire des photos dehors ! » est intervenu Nicolas. On avait repéré ensemble des endroits sympas pour prendre des photos de couple et des photos de groupe. On a fait les premières dans la cour intérieure de l’hôtel de ville. Les murs couverts de vigne vierge et le parterre fleuri étaient du plus bel effet en guise de décor. J’ai pris des photos, Gauthier aussi, on se disputait l’appareil, et on a fini par le fixer sur le trépied qu’on avait confié à la garde d’Hugo, pour faire des photos avec tout le monde.

Ensuite, on est allés dans le square Blaise Pascal, tout proche, dont la fontaine faisait un chouette décor là aussi. Puis on s’est donné rendez-vous chez nous et on s’est tous dirigés vers les voitures.

Les garçons avaient bien travaillé pour décorer le jardin et le chalet. Il y avait des guirlandes sur la balustrade de la terrasse, des guirlandes faites de grosse ficelle brute sur laquelle on avait passé des heures à coudre des fleurs et feuilles en tissu et des nœuds de tulle blanc. Les mêmes guirlandes étaient tendues entre les arbres du verger, au-dessus d'une longue table faite de planches posées sur des tréteaux.

Gauthier a rassemblé tout le monde pour une autre photo de groupe sur fond de nature, puis j’ai récupéré mon appareil tandis que Clément et Virgile commençaient à servir le Champagne. Avec Julia et Marité, on est allées chercher les petits fours.

On était une petite vingtaine, la famille et la bande habituelle avec conjoints. C’était une bonne soirée, et surtout Nicolas et Meaza étaient heureux. Ça se voyait. Ils souriaient tout le temps, ils riaient. Ils étaient beaux.

Lorsque la nuit est tombée, Clément a branché une rallonge électrique, et des guirlandes ont illuminé les arbres du verger sous lesquels était dressée la table. C’était magnifique, féérique même. On a continué la soirée à la lueur des minuscules ampoules blanches qui scintillaient dans les branches, et des bougies parfumées à la citronnelle qu’on avait disposé partout sur la table, à la fois pour s’éclairer et repousser les moustiques.

Après avoir englouti salades et viande grillée, puis le dessert : un magnifique gâteau commandé chez le pâtissier, Clément a mis de la musique. Pas trop fort, pour laisser dormir Lucile et Corentin que leurs parents avaient couchés dans mon atelier. Nicolas et Meaza ont ouvert le bal, sous les étoiles, et bientôt tout le monde s’est retrouvé en train de danser dans le verger. Au bout de quelques minutes, j’ai envoyé valser mes tongs - les sandales à talons étaient déjà rangées depuis un moment, Clément avait eu pitié en me voyant me tordre les chevilles dans le terrain un peu inégal et m’avait promis qu’il ne m’en voudrait pas si j'ôtais mes nu-pieds. Pendant un slow, il m’a attirée un peu plus près de lui, en se penchant, pour glisser à mon oreille : « Je t’aime, Louise.

_ Moi aussi. » ai-je répondu. La semaine précédente, nous avions signé les papiers pour notre PACS, même si personne d’autre que nous n’était au courant. C’était juste un bout de papier, pour les impôts, mais ce qui comptait vraiment pour nous c’était notre amour. A cette occasion, Clément avait insisté pour nous offrir un bijou, un témoin tangible de notre engagement. J’arborais donc autour du cou un pendentif très sobre au bout d’un cordon, un médaillon en argent représentant le Puy de Dôme stylisé. Quant à lui, il avait choisi un bracelet de cuir noir, qu’il ne quittait pas.

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