"Elle tente de s’en sortir pourtant, elle y met toute son énergie, son ardeur pour retrouver son innocence perdue. "

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"Elle tente de s’en sortir pourtant, elle y met toute son énergie, son ardeur pour retrouver son innocence perdue. "

Arrondissement de Manhattan-Janvier

Panique. Assourdissement conséquent. Evangeline se redresse doucement, elle tente de se souvenir, de sa journée jusqu’à maintenant, de ce samedi. Nathanaël, elle avait rendez-vous avec Nathanaël. Il lui avait promis de venir, avec un tiramisu mascarpone chocolat. Bien sûr, elle aurait pu l’acheter dans ces pâtisseries  à proximité du collège mais ça n’aurait pas été la même chose. Ça n’a pas la même valeur, le même gout. Le mieux, même, c’est de le voir faire mais là, ce n’était pas possible. Il y a déjà Eian qui squatte en reclus son appartement et on y tient difficilement à quatre. Claquement de langue réprobateur qu’elle avait eu sur Skype en apprenant la nouvelle, même si en un sens, ça l’avait rassuré.  Elle n’avait plus de nouvelles de l’Islandais depuis plus d’un an. Personne d’ailleurs. Et ça commençait à déteindre sur Parvati qui ne donnait elle aussi que des nouvelles brève depuis le début de l’été. Du coup, Ephkaïa avait commencé à s’inquiéter sérieusement. Yaya s’inquiète tout le temps, surtout quand on ne l’appelle pas régulièrement. Et comme ils sont nombreux et pas forcément stables, elle a toujours une bonne raison de s’inquiéter. C’est ce à quoi Evangeline a pensé en fouillant son armoire pour s’habiller. Quand elle y pense, ça veut dire qu’il faut qu’elle l’appelle. Calcul rapide du décalage horaire, six heures en plus pour la France. On verra ça à seize heures.

Un petit bruit, le grattement d’une patte griffue contre sa porte de chambre a ensuite attiré son attention. Un sourire avait alors étiré son visage. Elle avait enfilé en vitesse un tee-shirt marinier, un collant de laine et une jupe en jean, ne portant aucun intérêt à sa longue crinière blonde. Il avait eu en ce moment quelque chose de bien plus important que de se coiffer pour le peu de reste de l’âme de petite fille qu’elle possède encore. Quelque chose qui ressemble à une petite boule de poil blanche qui jappe et qui est toujours prête à une caresse, un contact. Omnius, le petit chien volpino qui se tient devant sa porte et qui tourne et retourne sans pouvoir s’arrêter. Comme toutes les fois, il s’était jeté dans ses bras au moment où elle avait ouvert la fameuse porte, provocant chez elle un rire silencieux. Sa présence avait signifié quelque chose de très réjouissant, la présence d’Erec, son maitre, quelque part dans l’appartement. Erec, c’est un ami de Quinto, un des seul qu’elle lui connaisse en fait. C’est sûr que de partir du principe que tous les autres sont des incompétents finis, ça handicape pas mal les relations. Alors quand, on plus, on s’avère être quelqu’un de méprisant et sarcastique au possible, c’est encore pire. Erec est spécial en même temps dans son rôle d’ami, il vit presque ici, dort souvent sur place et Quinto ne lui envoi aucune pique mal placé, même quand il est énervé. Pour ce dernier point, ce doit être la seule personne au monde.

Erec est quelqu’un de très silencieux, mais tellement gentil. Il a toujours le mot pour réconforter. Il se noie régulièrement dans ses dossiers sur le canapé du salon, il est avocat, avocat d’affaire. Quinto a toujours des questions pour lui, du point de vue juridique, avec des mots qui font plus de trois syllabes et dont elle ne connait pas le sens. Erec lui répond avec son accent chantant, qui la fait tant rire. Erec est québécois et plus que d’autres, son accent est plutôt marqué. Et en effet, il se tenait là, envahi par ses papiers, concentré, son stylo coincé entre sa tignasse bouclée brune et la branche gauche de ses lunettes, derrière son oreille. Un jappement d’Anima, son second chien, une magnifique chienne Berger de Tervuren au poil blanchissant, avait signalé sa présence. Il lui  sourit franchement. « Quinto a dû partir en catastrophe, sa directrice commerciale a appelé. C’était tellement urgent qu’ils sont venus le chercher .Je lui ai promis de rester avec toi jusqu’à ce que tu t’en ailles ». Il lui avait fait signe de la main pour qu’elle approche, passant son doigt taché d’encre de sa crinière blonde désordonnée avant de lui demander son peigne et son matériel de coiffure. Erec a cinq petites sœurs, ça lui donne des talents de coiffeur assez insoupçonnés.

Une coiffure élaborée avec une natte coincée dans un chignon plus tard, Eve avait attrapé son manteau de laine verte, son bonnet et son échappe. Elle avait enfilé ses bottes fourrées, enfouit une dernière fois son nez dans la fourrure d’Omnius,  poser ses lèvres entre les deux oreilles touffue d’Anima et salué Erec de la main. Le lui avait inspecté une dernière fois, tirant sur son manteau pour qu’il lui descende bien comme il faut. Le paraitre s’avère être le nerf de la guerre, lui avait il dit une fois. Elle avait mis ses écouteurs dans ses oreilles, lancé sa musique et avait claqué la porte. Elle avait pris l’ascenseur, descendu jusqu’au rez-de-chaussée, passé la porte automatique  de l’immeuble. Elle avait remarqué la voiture de Quinto, Erec n’avait pas menti, impossible de manquer le rutilent véhicule rouge. Et puis …. Et puis plus rien. Une explosion. Quelques millièmes de seconde plus tard, la voiture n’est plus qu’un amas de ferraille calciné. Évangeline est plaquée contre le mur, immobile, tétanisée. Elle panique, ses oreilles sifflent, sont assourdis, n’entendent plus rien. On s’agite autour d’elle, ça court dans tous les sens. Elle sent couler un liquide le long de sa tempe. Tétanisée. On lui parle, une femme, elle ne la connait pas. Ses larmes taraudent le coin de ses joues. Morts. Elle revoit par flash ce fameux soir, celui où on a tué ses parents, elle était là, cachée dans un placard mais elle était là. Et elle a tout vue. Son cœur bat à tout rompre, ses jambes ne la supporte plus.

Ils nous ont retrouvés.

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