Facétieux Commissaire

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 Après s’être assurée que leur poursuivante était repartie, les filles se précipitèrent vers la Mine au Sucre. Romulus parut fort soulagé de les voir indemnes. L’oncle de Jonah, quant à lui, était au téléphone avec le poste de police. Son neveu lui avait raconté leur mésaventure et le vendeur de sucreries avait pris très au sérieux la menace vampire.

 — Le commissaire va passer vous chercher, déclara-t-il après avoir raccroché. Je vais reconduire Jonah et Cléo chez eux et il fera de même avec vous quatre.

 — Merci monsieur, c’est gentil.

 — Pas de quoi ! Je ne vais quand même pas laisser un vampire dévorer mes meilleurs clients !

 Il leur proposa quelques friandises en attendant et tous se servirent. Sauf Agatha qui, plongée dans ses pensées, n’avait pas remarqué la distribution. Cléo en profita pour se servir une seconde fois, ni vu ni connu. La sorcière avait d’autres choses en tête sur le moment pour s’en soucier. La mine défaite et déçue de la vampire restait gravée dans sa mémoire. Ce n’était pas l’expression d’un chasseur furieux d’avoir raté sa proie.

 Plus tard, une calèche de la police s’arrêta devant la boutique. Le père de Romulus en sortit, demanda à son collègue centaure d’attendre un instant, puis vint les rejoindre. Il parla deux minutes avec l’oncle de Jonah avant que ce dernier n’attrape ses clés pour fermer sa boutique.

 — Vous quatre, avec moi ! lança le commissaire en accrochant la brouette derrière la calèche. Vous êtes sûr que ça ira, avec ces deux-là ?

 — Ils n’habitent pas loin, le plus gros risque qu’ils courent avec moi, c’est quelques carries.

 — Bien, je vous remercie. Je vais tâcher de tirer ça au clair au plus vite.

 Satisfait par la promesse des forces de l’ordre, la fée adulte entraina les deux enfants avec lui. Avant de partir, Jonah fit un signe à ses amis. Cléo, lui, se contenta de suivre sans leur prêter attention. La petite bande ne lui en tint pas rigueur. Tel qu’ils le connaissaient, la momie n’avait peut-être même pas compris qu’ils se séparaient.

 — Bon ! lança le commissaire en s’asseyant à côté de son fils, face aux trois filles, dans son véhicule qui démarra aussitôt. Est-ce que l’un d’entre-vous peut m’expliquer comment vous faites pour toujours vous retrouver dans une situation délicate ?

 Quelques semaines plus tôt, le père de Romulus aurait tenu les mêmes propos avec un ton de reproche. Aujourd’hui, cependant, il paraissait plus amusé qu’inquiet ou fâché. Son fils en était le premier surpris. Il lui raconta en détail ce qu’ils avaient vécu, puis laissa la parole à Juliette pour la fin.

 — Finalement, Lisa nous a sauvées ! On est rentrées dans sa toile et la dame, elle n’a pas compris où on était passées !

 — Pratique. Avez-vous pu voir son visage d’un peu plus près ? Vous pourriez peut-être me l’identifier ? Cheveux marrons, rouge à lèvre très vif, un petit grain de beauté sur la joue droite, peut-être ?

 La précision du commissaire surprit Agatha. Hélas, elle s’était trop attardée sur l’expression de leur traqueur pour remarquer ces détails. Lisa, par contre, poussa une exclamation.

 — C’est exactement ça ! Je l’ai vue, oui, même si elle essayait de le cacher avec un peu de maquillage !

 — Donc, vous savez déjà qui c’était ? en conclut Agatha avec un sourire.

 — Oui, elle est venue me parler pas plus tard qu’hier. Malheureusement, je n’ai pas pu l’aider. Par contre, je vous rassure, je doute qu’elle vous veuille du mal.

 — Vraiment ? Mais papa, les Carotide…

 — Ce n’est pas une Carotide, fiston. Elle n’a rien à voir. Enfin, toutes les familles de vampires sont cousines plus ou moins éloignées, mais elle m’a garanti avoir rompu tous liens avec eux depuis belle lurette.

 — Et vous savez ce qu’elle recherchait, dans ce cas ?

 — J’ai une assez bonne idée sur la question, Agatha. On va justement faire une petite halte à l’hôtel où elle a pris une chambre. Est-ce que ça te dirait de venir avec moi pour l’interroger ?

 La sourire d’Agatha s’agrandit. Si elle avait eu quelques craintes peu de temps auparavant, la tournure des évènements lui plaisait de plus en plus.

 Peu de temps après, la diligence s’arrêta. Le commissaire sortit et tint la porte aux enfants, les invitant à le suivre. Agatha se précipita en première dehors. Ses camarades, eux, échangèrent d’abord un regard circonspect. Comme aucun ne savait que faire, ils haussèrent les épaules et suivirent le mouvement. Romulus déplaça le tableau de Lisa et la replaça dans la brouette que son papa venait de détacher.

 — Je crois que nous arrivons à pic pour éclaircir ce malentendu, déclara le commissaire en regardant vers l’hôtel.

 En effet, depuis les portes vitrées, on pouvait voir le réceptionniste en pleine conversation avec la vampire qui leur avait couru après. Quand ils eurent terminé, elle tourna la tête et se figea de surprise. Ils venaient tout juste d’entrer dans le hall, Agatha et le commissaire en première ligne, les trois autres en retrait.

 — Mademoiselle Tarocco, justement nous vous cherchions. Vous avez fait une belle frayeur à ces garnements, vous savez ? Je pense qu’ils méritent une petite explication.

 — Sai-Seigneur ! s’exclama la vampire. Pardon, j-je… Je ne me suis pas rendue compte. J-je voulais juste…

 — Parler à Miss Petipois ?

 — C’est bien elle ? Pas vrai ?

 Juliette, Lisa et Romulus écarquillèrent les yeux. La petite sorcière, en revanche, se contenta de se dandiner sur place. Elle avait du mal à cacher son excitation. Même si elle ignorait comment cette dame avait entendu parler d’elle, cela tendait à confirmer ses doutes. Les dires et les réactions du commissaire l’avait mise sur la piste.

 — En chair et en sucre, confirma le commissaire.

 — Bonjour, madame. Désolée de vous avoir fuie comme ça, j’ignorais que vous vouliez juste me demander un service.

 — Vous êtes déjà au courant ? Le commissaire vous en a parlé ?

 — Pas vraiment, mais je devine que vous avez besoin de mon aide pour résoudre une affaire et que la police ne peut pas vous aider. C’est bien ça ?

 — Exactement !

 — Alors, racontez-moi, vous avez perdu quelque chose, ou vous souhaitez retrouver quelqu’un ?

 — Non, il s’agit d’un meurtre.

 Agatha cligna des yeux, surprise. D’ordinaire, elle aurait sauté de joie à avoir l’occasion de résoudre un meurtre. Cependant, en vue du comportement du commissaire, elle s’était attendue à une affaire légère. Sinon, pourquoi la police ne pourrait-elle pas l’aider ? Partagée entre exaltation et curiosité croissante, elle pencha la tête avant de reprendre la parole.

 — Qui est mort, madame ?

 — Ma mère, la baronne Mary Tarocco.

 — Je suis navrée de l’apprendre… Cependant, je ne comprends pas pourquoi monsieur le commissaire ne peut-il pas…

 — Parce que l’affaire date d’il y a environ quinze ans, déclara le père de Romulus dans un soupir. Le coupable a déjà été arrêté, et même exécuté. L’affaire est officiellement classée.

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