Chapitre 2

5 minutes de lecture

Sunhee a une dent contre Hyujin et Aria. Je ne sais pas pourquoi, et elle n’a pas voulu m’expliquer. Tout ce qu’elle m’a dit, c’était qu’elle les détestait tous les deux. On a établi un plan pour s’enfuir. Au début, je voulais qu’Eni nous accompagne, mais il a refusé à cause de la présence de Sunhee.

D’abord, nous allons surveiller les gardes. On doit observer leurs horaires de ronde pour savoir quand ils surveillent le moins les cellules. Ensuite, on doit attendre une occasion propice pour s’évader, comme la nuit ou encore un jour de fête. Après, on passera par les couloirs les moins empruntés. Et enfin, on s’enfuira par la porte de sortie la plus proche, à environ deux cents mètres.

Je passe donc mes journées à observer les venues des gardes et Sunhee détermine les heures, comme je ne sais pas le faire. Sur le mur de sa prison, elle a gravé un emploi du temps complet des heures de surveillance des soldats.

Les jours, les semaines et les mois passent. Il recommence à faire chaud, et Eni a dit que nous étions arrivés au printemps. Parfois, des pétales roses et blancs passent par les minces fenêtres et volent dans les couloirs de la prison.

* * *

La nuit tombe et je jette un regard à Eni qui s’endort. Discrètement, je passe à Sunhee l’arme qu’il m’a taillé pour déverrouiller les prisons. Il lui a fallu des jours pour y arriver, et il devait aussi vérifier que le verrou de chaque cellule était identique.

Je tends le bras à travers mes barreaux pour qu’elle essaye une dernière fois la clé et pour qu’elle puisse sortir. Sunhee sourit et attrape l’outil qu’elle enfonce lentement dans la serrure. Elle doit faire quelques à-coups avant que l’on entende un léger «clac». La femme relève ses yeux sauvages vers moi et un sourire se dessine sur son visage pâle.

Elle se met debout et pousse la porte de la prison, dans un grincement abominable. J’espère que les gardes n’ont rien entendu, parce que sinon, nous sommes dans de beaux draps.

Sunhee s’avance vers la porte de ma cellule et la déverrouille un peu plus rapidement, et je m’empresse de quitter ma prison. Je n’ose pas imaginer ce qu’il se passera si quelqu’un nous découvre en train de nous enfuir.

- Suis-moi, souffle-t-elle en attrapant fermement mon poignet pour me conduire dans les couloirs lugubres.

Ici, l’odeur d’humidité est moins forte. Les bougies sont éteintes, et je distingue à peine les passages sinueux dans l’obscurité.

Une fois que nous avons regagné la porte de sortie, je sens un frisson me parcourir l’échine. Je vais être libre. Je vais quitter cet endroit horrible qui empeste la sueur et la moisissure. Sunhee aussi trépigne d’impatience. Elle glisse la clé dans la porte et secoue la tête.

- Ce n’est pas la bonne clé.

Je soupire et me retourne pour regarder les environs. Y-a-t-il une autre sortie ? Si oui, où ? Je m’avance vers la porte et abaisse la poignée. Comme je m’en doutais, c’est verrouillé. Les gardes ne sont pas assez stupides pour laisser la porte ouverte.

Sunhee s’éloigne de moi et je lui emboîte le pas rapidement. Elle s’aventure dans les couloirs comme si elle connaissait le lieu par cœur, avant de s’arrêter devant une salle entourée de vitres. Au mur de la pièce, des trousseaux de clés sont accrochés.

Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. C’est notre chance. On a juste à casser la vitre, s’introduire dans la salle, récupérer un trousseau de clés et s’enfuir. L’excitation monte en moi et je sens mes mains devenir moites.

Sunhee réagit immédiatement et brise le verre avec son bras, me sortant de ma transe. Les vitres ne doivent pas être très solides, pour qu’un coup de bras suffise à les détruire. Ou alors, Sunhee est vraiment très forte.

Du sang goutte de son coude, mais elle n’y prête pas attention. D’un geste souple, elle passe à l’intérieur de la salle et décroche du mur les clés. Elle ressort rapidement et m’entraîne à sa suite.

- Dépêchons-nous. Le bruit du verre brisé a dû alarmer des gardes.

Je me mets à courir pour la suivre et me stoppe net devant la porte, le cœur battant. Quand Sunhee glisse une des clés à l’intérieur de la serrure et la fait tourner vers la droite, j’entends le cliquetis du verrou.

La femme abaisse la poignée et la porte s’ouvre sur une ruelle sombre. Dans le ciel, je vois les étoiles scintiller, la lune briller. C’est magnifique.

- Hyuk. Dépêche-toi.

Je fais quelques pas et Sunhee referme la porte. Elle glisse les clés dans la poche de sa jupe déchirée et prend une grande inspiration.

- Ne traînons pas ici. Ils pourraient nous retrouver facilement.

Nous remontons la ruelle en trottinant et débouchons dans le cœur de la cité des Fleurs.

Les rues pavées sont bordées de maisons aux toits courbés. Des lanternes en papiers sont suspendues à chaque coin de rue, diffusant une lueur dorée, sûrement due aux bougies à l’intérieur. Un énorme lac remplit de fleurs de lotus reflétant la lune s’étend sous mes yeux. D’ici, je n’aperçois pas le Temple des Fleurs, et Sunhee m’informe qu’il est à quatre heures d’ici.

- Depuis l’unification du Temple du Lotus et des Cerisiers, la ville est immense, constate-t-elle. Il n’y a plus aucune trace des routes de campagne qui entouraient la ville.

Je continue de fixer les maisons, les passants et les arbres. La cité est tellement animée que je suis étonné de ne jamais avoir entendu tout ce bruit depuis la prison.

- Et maintenant, que faisons-nous ?

- Viens avec moi.

Sunhee tourne les talons et s’aventure rapidement dans les différentes avenues. Les passants nous regardent d’un œil mauvais, certains jugent notre apparence.

- Le marché noir n’est plus là ! s’exclame la femme lorsque nous arrivons dans une nouvelle rue animée et fleurie.

Elle grogne et reprend sa marche en maugréant des paroles incompréhensibles. Je me demande depuis combien de temps elle était enfermée et surtout, pourquoi. Je m’apprête à lui demander quand je remarque que l’on commence à quitter la cité.

- Où allons-nous ? lancé-je. On ne doit pas trouver Hyujin et Aria ?

- Non, pas maintenant, idiot. Qu’est-ce qu’on ferait, une fois qu’on les verrait ? Nous ne sommes pas armés, et nous n’avons pas de plan. Laisse-moi faire, je connais quelqu’un qui pourra nous aider.

- Pourquoi je te croirai ?

- Oh, ne commence pas, je t’en prie. Tu as choisi de me suivre, moi, je ne t’ai obligé à rien. Si tu n’as pas confiance en moi, pars.

Sunhee se retourne, fouettant l’air de ses cheveux dorés. Elle me toise de ses yeux verts.

- Tss, c’est bon, raillé-je en la bousculant pour la doubler.

Elle passe devant moi en seulement quelques pas.

- Idiot, tu ne sas pas où on va.

- Arrête de me traiter d’idiot.

- Alors arrête d’agir comme tel, rétorque-t-elle.

Je lève les yeux au ciel et pousse un énorme soupir. Le vent s’infiltre dans mes cheveux noirs et rosit mes joues pâles. Je frotte mes bras pour me réchauffer, mais mes doigts sont gelés.

* * *

Après environ un jour de marche, nous arrivons près de deux hautes montagnes. Sunhee n’hésite pas une seule seconde et entre dans la vallée, où se trouve un petit village abandonné. Une brume épaisse m’empêche de distinguer quelque chose, surtout que le jour commence à laisser la place à la nuit.

- Où sommes-nous ? questionné-je.

- Dans ma ville natale, sourit Sunhee.

Déconcerté, je lui jette un regard avant de fixer le village abandonné.

Annotations

Vous aimez lire Ella AA. ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0