CE1 CM2 ( V2 réécriture de texte )

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V2

Les débuts de mon éducation, du CE1 au CM2, restent flous dans ma mémoire. Je n’ai que peu de souvenirs de cette période, mais certains resteront gravés à jamais.

Les habituels cours de français étaient, à mon grand malheur, souvent composés de dictées écrites. L'instituteur déambulait dans la classe tout en récitant son texte ou la poésie du jour qu'il avait choisie. Seule sa voix et les bruits d’écriture pouvaient être entendus dans la salle. Chaque mot prononcé me laissait à peine le temps d’écrire sur ma feuille avec mon stylo-plume, me forçant à me concentrer sur chaque lettre tracée en vitesse. Il passait dans les allées tel un oiseau de proie, se penchant parfois au-dessus des copies des élèves, comme si la pression de l'écriture en temps réel ne suffisait pas.

Le stylo-plume glissait parfois sur le papier, s'accrochait jusqu'à déchirer la feuille, laissant des taches d'encre qu’il fallait effacer en urgence avant que le prochain mot ne soit dicté. Tant d’éléments rendaient ce moment pesant : la crainte de ne pas savoir écrire certains mots, de ne pas les comprendre, et cette pression constante sur ma main crispée.

J’écrivais tant bien que mal sur ma copie, luttant pour rattraper mon retard sur les paroles de l’instituteur. Mais ce jour-là, l’ombre du prédateur planait au-dessus de ma feuille. Il s'arrêta soudain en pleine dictée.

— Voyons, tu ne sais pas écrire ce mot ? Va l’écrire au tableau.

Je ne comprenais pas ce qui se passait. Pourquoi faire cela ?

Tous les visages de la classe s’étaient tournés vers moi. Je ne savais pas quel mal j’avais fait. Je me dirigeai vers le tableau, accompagné par des chuchotements et des rires étouffés. Le tableau me semblait gigantesque, écrasant. Paralysé, je restai figé devant cette surface noire qui me dominait.

— Alors, écris ton mot au tableau.

Je saisis la craie blanche et traçai maladroitement le mot sur le tableau, à la limite des larmes, sans comprendre pourquoi je devais subir ça.

La classe éclata de rire en chœur, leurs regards moqueurs me transperçant. L'instituteur s'approcha et barra mon mot pour me montrer comment il s’écrivait correctement. Mais l’enfant que j’étais à ce moment-là n’avait qu’une seule envie : pleurer. Pourtant, je refusai de leur donner cette satisfaction. Je restai là, figé, noyé dans mon incompréhension et ma frustration intérieure, avec une sensation de chaleur sur le visage.

Bien sûr, la récréation fut l’occasion pour certains élèves d’en rajouter une couche, entre moqueries et humiliations, amplifiant encore plus mon malaise.

Chaque dictée était une punition accompagnée d’un zéro. Et, dans les moments les plus sadiques du professeur, il m’arrivait même de récolter un -50, voire un -100, car il comptait le nombre de fautes et les soustrayait à la note initiale. Cela peut sembler ridicule, mais de mon point de vue, cela ne faisait que souligner encore plus ma médiocrité dans cette matière. À tel point qu’un jour, j’ai arrêté d’écrire. Plutôt que de voir ces notes humiliantes s’accumuler, je préférais rendre une feuille blanche avec simplement mon nom et mon prénom. Un zéro était toujours mieux qu’un -100.

Tout cela a contribué à faire naître en moi un profond dégoût pour la langue française et son écriture, qui me paraissait incompréhensible et injuste. Par extension, j’ai aussi rejeté la lecture des livres et même les instituteurs, qui ne cherchaient pas à m’aider, mais semblaient au contraire m’enfoncer encore plus dans ce ressenti amer.

Pour m’aider, on m’inscrivit chez une orthophoniste. Je garde peu de souvenirs de ces séances, mais je me rappelle quelques exercices : la prononciation des mots, l’apprentissage de quelques signes, des jeux de texte... Dire si cela m’a vraiment aidé ? Je ne saurais dire.

Sans vouloir dénigrer cette profession, de mon point de vue d’adulte, cela n’a rien changé pour moi, à part représenter une charge financière pour mes parents, qui faisaient de leur mieux pour m’aider à l’époque.

Avec le recul, je réalise que cette période a marqué le début de mon rejet total de l’écriture. C’est dommage, car c’est probablement l’un des moments les plus importants dans l’apprentissage d’un enfant, là où les bases devraient être consolidées, et non démolies.

V1


Je me souviens encore de ce jour en classe, en CE2 ou CM1. La dictée du jour était un moment redouté. En voyant la faute que j'avais faite, le professeur m'a demandé de venir au tableau. Devant toute la classe, j'ai dû écrire le mot, sentant les regards sur moi. C'était comme si le temps s'était arrêté, et cette expérience a laissé une marque indélébile. C'était un mélange de honte et d'incompréhension. Mais c'est aussi à ce moment-là que j'ai commencé à voir le monde de l'apprentissage différemment. Me sentant mal à l'aise et incompris, il semblait presque honteux de ne pas savoir écrire un mot. C'était comme si l'incapacité de le faire était une faute impardonnable. Et quand on reçoit continuellement des zéros, ou pire, des notes négatives, l'envie de faire des dictées s'évapore. Pourquoi s'acharner quand on sait qu'on aura un zéro, ou même un -100 ? À force, je ne rédigeais plus les dictées. Autant avoir un zéro qu'un -100, finalement, c'était presque une meilleure note. Être ridiculisé par un professeur, censé m'apprendre et me former, m'a profondément dégoûté de l'écriture, et par extension, de la lecture. Même si je savais lire, l'acte d'écrire devenait une source d'aversion intérieure. C'est comme si chaque mot mal orthographié creusait un peu plus le fossé entre moi et l'apprentissage. Les moqueries et les humiliations ont fait naître en moi un profond rejet de ces matières. Après cette période, on m'a orienté vers une orthophoniste. Je ne veux pas contredire cette profession, mais malheureusement, cela n'a rien changé pour moi, à part représenter une charge financière pour mes parents. C'était une période frustrante, où chaque effort semblait vain.

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