25/06

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Pieds nus. Dans le ruisseau des mains courantes, froides sur nos peaux d’enfants du soleil, fragiles comme des saltimbanques sur le fil des printemps d’hirondelle. Ses pieds nus sur tes pieds, nos orteils qui s’endoigtent comme des puzzles d’évidence, les bords qui découpent la lumière au couteau d’un sourire, le reflet qui passe, l’eau sauvage qui ravit le souffle au ravin, le poumon à vau l’eau, dévalant le sillage des algues enchevelées. Marquer la page, la plage au méandre des yeux bandés, le ruban de l’eau en collier d'éphèmère, s’égoutte, s’assèche, lèvres de peaux mates humides, scandées de soleil à foison, puisées à la dérive. Le ventre vide, avide, écrevissé au corps, à se croquer du bout du doigts sur la toile des faïences en pochade. La douceur qui meurtrit, hier encore, les murs troués des châteaux de papier, partis en fumée sur le socle des demains trop vastes, dévastés sur l’aiguille qui tangue des secondes en charpies. À se miner la veine au filon des fuseaux horreurs, s’éventrailler sur des danses acérées, et dormir cent ans, dans les bras du silence, de l’oubli plein le sang, et des bleus plein le vide. Le sommeil qui s’ecchymose sur le carrelage, qui se ronge les ongles sur le béton frais des souvenirs terrassés par le dragon du temps qui brûle entre nos doigts. Rappelle-toi, rappelle-nous, tu voudrais décrocher, oublier les meurtrissures et les coups du fil qui nous retient. Oublier tes atomes contre ses atomes, ton vide contre son vide, oublier le vent qui s’étire entre. Deux poussières d’étoile à la dérive, se souvenant du soleil, déchirant les atmosphères de trop courts sursauts de bonheur. La cime se recueille, comme un fruit rose des neiges alourdies d’éternité, des crevasses pleines de verre gelé, pilé, sans frisson ni demeure, et des ponts en plein ciel à l’embouchure des maux usés. Du sel plein les joues, les jours, et s’isole, les essuie-glaces pour débarbouiller les sommets des névées et les somnolences volées, les délits de fuite et les dépaysages. Le camaïeu limon des crues sarrazines, quand elle soulève ses jupes de rivière, que le lit se fait plume d’elle et repense. Le fleuve s’échappe et distord, fièvre et fugue, à la fenêtre des lueurs capharnaüm, les chiens mordent les talons bréchés de l’amnésie. Tu fuis encore ! Le parfum rôde au milieu des décombres, comme un fauve sépia, sa chaleur entre nos doigts, ses jambes à ton cou, la nuit qui s’écorche aux épines des buissons ardents, qui laisse passer le jour abattu des lanternes mouchées. Le grésil de l’aube qui tarde, la rue d’encre et tes doigts de tricot sur les trous de mémoire, du fil plein le ventre la gorge, qui pelote et se noue, se nous, se prend les pieds, se prend la tête, se corde raide et s’équilibrise en mille morceaux de voix. Il est cinq heures et elle t’engueule la bouche ouverte. Elle ne t’engueule même pas, elle ne décroche pas. Tes bras tombent, se murent, s’à-bout-de-brassent autour de rien. Tu pieds-nudes le pavé. La neige est belle comme un linceul.

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