Ces petites Choses

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Non. Excusez-moi. Pardon. Je… je ne devrais pas, mais en fait… Si ? Vraiment ? Pourquoi pas. Ma foi, il y a des moments où on devrait ne rien dire. Je pensais que c’en était un. Parce que vous sembliez attendre quelqu’un.

Oui, bien sûr, moi aussi, mais moi je ne fais que sembler. Je veux dire, j’attends, et je ne sais pas vraiment quoi. Sans doute quelque chose sans importance. Je ne voulais surtout pas vous déranger, comprenez-vous ? J’étais là, vous étiez là, et nous attendions. Bref.

Vous savez, si je me suis adressé à vous, c’était pure innocence, je n’avais aucune intention, ni bonne ni mauvaise. Bien sûr, vous ne me croyez pas. Pourtant c’est vrai. Mais excusez-moi. Je vais me taire.

*

Vous avez un très beau regard. Non, non, je suis sérieux. Un regard qui attend. Un regard tout de même plein de petites choses pas très amusantes. Des petites choses un peu tristes. Remarquez, ça ne gâche pas votre charme.

Vous souriez. C’est déjà ça. Et vous me trouvez sympathique ? C’est que vous ne me connaissez pas. Nous n’avons pas échangé plus de quelques phrases. Avec un peu de temps, vous en viendriez à me trouver franchement détestable. Je vous l’assure. Quand on me fréquente assez longtemps, on ne désire plus que mon absence. C’est véridique, il faut me croire.

*

Je vous plais ? Voilà qui est inattendu. Il me faut bien confesser que vous n’êtes pas désagréable non plus. Sinon, je serais sans doute allé patienter un peu plus loin. Vous dites que ç’aurait été dommage ? Ma foi, je n’en sais rien. Peut-être qu’il aurait mieux valu…

Mais je crains de devenir importun. Vous attendez quelqu’un. Je ne voudrais pas gêner. Cette personne pourrait arriver et me considérer d’un mauvais œil.

Comment ? Vous n’attendez personne ? Comme moi, en somme. C’est assez drôle. Nous attendons en n’attendant rien. Pas vraiment rien, dites-vous ? Ah, je ne comprends pas, mais je crois que c’est sans importance.

Vous confirmez. C’est bien. J’aime qu’on soit d’accord avec moi. Ça me sécurise. Non, non, je plaisante, bien sûr.

*

Oui, c’est vrai, il fait un peu frais. Nous serions mieux au chaud. Et il y a du vent. Heureusement, il ne pleut pas. À la radio, ils annonçaient des averses, et puis finalement non. Ils se trompent toujours. Remarquez, en cette saison, ce n’est pas étonnant.

Vous voulez marcher un peu ? Alors je ne vais pas vous retenir. Si je veux vous accompagner ? Pourquoi pas. Où allons-nous ? Vous avez raison. Peu importe.

J’aime bien votre voix. Douce. Mélodieuse. J’aime beaucoup.

*

Tiens, il commence à pleuvoir. Comme quoi, à la météo, ils peuvent aussi parfois avoir raison.

Excusez-moi, mais je ne comprends pas. Chez moi ? Quelle idée saugrenue. Chez vous ? Excusez-moi, mais je ne comprends toujours pas. Ce n’est pas la peine de vous énerver ! Je vous ai fait perdre votre temps ? Allons, vous n’attendiez rien. Vraiment, je ne comprends… Au revoir, donc. Je vais attendre encore. Attendre pour attendre. Comme c’est amusant. Alors bonne nuit. Au revoir. Ou adieu. Adieu.

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