CHAPITRE 7

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 Exceptionnellement, je me réveillai avant midi. J’en profitai pour envoyer un message à mes amis. Encore allongée dans mon lit, j'attrapai mon téléphone qui traînait par terre. Il était resté éteint pendant toute la semaine pour que je ne sois pas parasitée et distraite par les diverses notifications. En le rallumant, j’eus droit à une multitude de vibrations et autres sonneries me signalant l’arrivée de nombreux messages. Je ne portai guère attention à la plupart d’entre eux et ouvris l’application où nous avions créé une conversation de groupe. Mes amis avaient échangé quelques fois en mon absence. Je défilai rapidement le fil de la discussion pour être informée des nouvelles importantes.

Le trio infernal

Victoria dit : Salut, on se voit aujourd’hui ?

Sarah dit : Bonjour ! De retour parmi les vivants ?

Emrick dit : On n’avait plus de nouvelles depuis des jours ! T’étais où ?

Victoria dit : Je bossais, j’avais éteint mon phone. Je viens de voir tous vos messages.

Sarah dit : Tu es trop sérieuse, je n’ai même pas encore ouvert mon agenda.

Emrick dit : En même temps tu n’y notes pas grand-chose. Comme d’hab. tu vas paniquer deux jours avant la rentrée et demander aux mecs de ta classe de copier sur eux.

Sarah : Tu me connais trop bien ! Que-veux ils ne peuvent pas me résister et ça leur fait plaisir de m’aider.

Victoria : Tu es irrécupérable. On se retrouve au coffee-shop ?

Emrick : Ok.

Sarah : Ouep.

 Je me levai avec entrain, plus motivée que jamais. Je débordais d’énergie et me sentais prête à conquérir le monde. J’allumai ma chaîne hi-fi et la musique emplit rapidement la pièce. Pour terminer de me réveiller, je pris une douche bien chaude. Puis, en me brossant les dents, je regagnai ma chambre en dansant devant mon dressing. Je m’habillai simplement, avec une tenue confortable mais suffisamment soignée pour sortir en ville. Je retournai dans la salle de bain pour terminer ma toilette et mettre un brin de maquillage. Juste un trait d’eye-liner noir sur les paupières et du mascara.

 Je n’aimais toujours pas mon reflet, je ne me trouvais pas jolie mais je ne voulais pas user d’artifices pour avoir l’air plus belle que je ne l’étais réellement. Quitte à plaire, j’aimais autant que ce soit par mon physique au naturel. Je me maquillai rarement, et par petite touche, principalement pour me plaire à moi-même avant tout.

 Une fois satisfaite du résultat, je descendis les escaliers. La maison était propre et rangée, mes parents avaient dû faire le ménage avant de partir. En revanche, la cafetière était vide, avec un petit post-it dessus. Je m’approchai pour le lire.

« Je suis propre et le café est prêt à couler, il suffit d’appuyer sur le bouton. Bisous, papa. »

 Il avait ponctué sa phrase par un petit smiley et une flèche qui indiquait le bouton marche-arrêt de la cafetière. J’esquissai un sourire. Je n’avais fait que les croiser ces derniers temps sans trop donner signe de vie et pourtant il ne manquait pas d’humour. Une pointe de culpabilité s’empara de moi, très vite effacée par la douce odeur de la boisson qui coulait.

 Je bu mon café en faisant défiler les notifications sur mon téléphone, je traînais sur les réseaux sociaux en quête d’inspiration pour une nouvelle œuvre ou pour me tenir informée des derniers potins de mon école. Je n’appris rien de captivant, la plupart des publications tournaient autour de la soirée de l’Élite, certains faisaient des sondages pour essayer de deviner l’identité de leur anonyme. Après avoir fait le tour des dernières publications et une fois ma boisson avalée, j’attrapai mon sac et mes clefs pour sortir. Je hissai mon casque sur les oreilles et activai la musique depuis mon téléphone avant d’envoyer un message à mes amis.

Le trio infernal :

Victoria dit : Je pars

Emrick dit : Je serais un peu en retard.

Sara dit : Prem’s ! Je suis partie devant.

 Je souris et rangeai mon téléphone. Emmitouflée dans ma parka et mon écharpe, je marchais d’un pas vif et confiant en rythme avec les percussions de ma playlist. Le rock avait cet effet sur moi, je me sentais invincible, la musique réveillait en moi une force dont j’ignorais l’existence le reste du temps. J’atteignis rapidement le centre-ville, qui n’était qu’à quelques kilomètres, en à peine vingt minutes j’étais devant le café où nous avions rendez-vous. J’entrai pour passer commande au comptoir. Tandis que j’attendais mon tour dans la file d’attente, je cherchai Sarah du regard. Au vu du contraste entre ma tenue plutôt légère et la température extérieure, j’espérais qu’elle ne soit pas en terrasse. Par chance, je la trouvai sur l’une des tables hautes dans un angle de la salle, son ordinateur portable ouvert devant elle.

- Bonjour, qu’est-ce que je vous sers ?

- Bonjour, un capuccino noisette, format XL s’il vous plait. Sur place.

- Je vous apporte ça à table dès que c’est prêt. Allez vous installer.

 La serveuse n’attendit pas de réponse et s'en alla préparer ma commande. Je rejoignis rapidement mon amie et lui fis la bise.

- Hello, je suis surprise de pas te voir en terrasse.

- WiFi gratuit, c’est la table où on capte le mieux.

 Sarah tourna son écran vers moi pour appuyer son argument. Je levai les yeux au ciel ne pouvant réprimer un sourire amusé, elle traînait sur les réseaux sociaux et chattait en ligne avec de parfaits inconnus.

- Il faudra que tu m’expliques le concept d’apporter ton PC pour boire un café.

- Et toi il faudra que tu m’expliques le concept de porter un short déchiré et des bas résille alors qu’il fait huit degrés dehors.

- C’est toi qui me répètes toujours que le style passe avant la praticité.

- C’est vrai. Depuis quand tu écoutes mes conseils ?

 La serveuse interrompit nos rires en déposant ma boisson sur la table, je lui adressai un sourire en guise de remerciement et Emrick nous rejoignit à cet instant, encore essoufflé.

- Salut les filles, j’ai fait aussi vite que possible.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Demanda Sarah en lui tirant la chaise.

- Crise familiale, rien d’important.

 Il ne s’attarda pas sur le sujet. Comme il n’avait visiblement pas l’air affecté, aucune de nous deux n’insista pour en savoir plus. À son tour, il nous raconta sa première semaine de vacances bercée entre jeux vidéo et disputes fraternelles. Il relatait ses péripéties avec beaucoup d’humour, m’arrachant parfois quelques sourires amusés. Mes amis me laissèrent finalement la parole lorsque le calme fût revenu.

- Sinon Vic’ pourquoi tu voulais nous voir ?

- Rien de particulier, j’ai passé la semaine renfermée entre quatre murs, je voulais prendre l’air. Et puis, je me sens mal de vous laisser tout préparer pour notre anniv’.

- Ne t’en fais pas pour ça, on a tout organisé avec Emrick pendant ton absence.

- Je vous fais confiance, mais j’aimerais participer aux préparatifs.

- D’accord, alors tu n’as qu’à t’occuper du ravitaillement, suggéra Sarah après quelques secondes de réflexion.

 J’acceptai avec enthousiasme et nous terminâmes de siroter nos boissons au fil des discussions. Pour fêter cela, je pris la décision d’inviter mes amis. Je me levai pour régler l’addition au comptoir avant de les rejoindre à l’extérieur. Nous entreprîmes ensuite de nous promener dans les rues.

- Au fait Emrick, bégayai-je, je voulais te dire.... Ton frère est venu me voir la semaine dernière.

- Ah ? Où ça ?

- Hum, dans ma chambre.

- Pardon ?! S’exclama Sarah, et tu nous dis ça comme ça ? Raconte qu’est-ce que vous avez fait ?

- Je ne suis pas sûr de vouloir entendre cette conversation, hésita Emrick.

- Nous mais faut pas s’emballer, il ne s’est rien passé, je lui ai juste parlé de l’invitation.

 Je leur racontai toute cette aventure avec un certain détachement. Tout cela me semblait tellement loin, j’avais l’impression de leur raconter un rêve.

- Attends attends, que j’assimile les informations. Tu es en train de me dire que le mec qui te plaît est venu dans ta chambre et tu n’as pas tenté quoique ce soit ?

- C’est pas l’envie qui manquait, mais j’étais obnubilée par ce fichu bout de papier.

- Et le pire dans l’histoire, c’est que tu n’as rien appris à ce sujet non plus.

 Je lâchai un bruyant soupir. En effet, je n’avais avancé sur aucun plan et je ne pouvais cacher ma déception. Mais une chose restait sûre : anonyme ou pas, j’avais bien l’intention de me rendre à cette soirée pour découvrir ce qu’il s’y tramait et obtenir le fin mot de cette histoire. Hors de question de me laisser abattre. Je haussai les épaules.

- Pas grave, la rassurai-je, je ne lâche pas l’affaire.

- Ravie de l’entendre.

- Bon, je vous laisse, j’ai des courses à faire et mes parents vont bientôt rentrer pour manger.

 Ils me saluèrent et partirent dans la direction opposée. Comme convenu, Je me mis en route en direction du supermarché le plus proche. C’était une petite ville mais elle était très développée et tout y était conçu pour être facilement accessible. Nous avions donc rarement besoin d’aller dans les villes voisines, ce qui donnait parfois la sensation d’être isolés du reste du monde.

 Je connaissais chaque rue comme ma poche et pouvais faire n’importe quel trajet les yeux fermés. J’avais mémorisé et étudié chaque mur, chaque ruelle, chaque recoin en vue d’un éventuel projet de graff. Quand je me promenais dans ces allées, je me sentais à l’aise, mon anxiété disparaissait.

 J’arrivai finalement au magasin et me dirigeai directement vers le rayon des confiseries. J’attrapai plusieurs sachets de bonbons différents selon les goûts de chacun, prenant soin d’en prendre le double pour les préférés de Sarah. Parfois, je me demandai comment elle faisait pour avoir un ventre si plat en ingurgitant autant de calories. Sa gourmandise n’avait d’égal que la taille de son bonnet. J’esquissai un sourire à cette pensée puis m’orientais en direction des apéritifs. Mon casque audio toujours vissé sur les oreilles ; j’évoluais au rythme de la musique qui masquait le bruit environnant ; grâce à cela j’avais la sensation d’être coupée du monde comme portée par la voix du chanteur.

 Avant de me rendre à la caisse, je fis tout de même escale par le rayon jouet. En période d’Halloween, c’était l’endroit idéal pour trouver ce que je cherchais. Bien que les déguisements étaient loin d’être à ma taille, en plus d’être d’une qualité médiocre. Je savais qu’un simple masque en papier mâché serait à ma portée. J’en trouvai un dont les élastiques étaient réglables.

- Ça fera l’affaire pensai-je en murmurant.

 Je terminai mes courses et payai avec le peu d’argent de poche que j’avais pu économiser.

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