3.

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3.

Agustín Chavez dépassa les pallozas du village de bergers. La jeep ralentit et s’arrêta dans le chemin qui s’élevait vers les montes. Les deux hommes revinrent à pied. Le hameau était désert. Alejandro se dirigea vers un hangar couvert de tôles. Avec prudence, il regarda à l’intérieur de la grange où tout semblait sommeiller. Tout, en ces lieux, laissait à penser que le temps n’existait pas. Agustín, de son côté, grimpa les trois marches en pierres qui menaient à la première habitation. Une faible lueur venait par le soubassement de la porte. Il s’apprêtait à toquer lorsqu’une vieille dame, vêtue d’une jupe noire, avec un tablier noué à la taille, la tête coiffée d’un chiffon plié en deux enroulé autour de la chevelure, se mit à hurler.

— Ohé ! qu’est-ce que tu fais chez moi ? Tu veux que je te coupe la gorge ?

Agustín eut un sursaut. Il se tourna vers Alejandro qui lui jeta un sourire amusé. Près de la grange, un court instant, le colosse resta figé de peur d’être la prochaine cible. La vieille dame allait et venait dans la cour. Alejandro balada son regard vers les pâturages du haut, à l’endroit où la lisière de la forêt laissait apparaître une silhouette qui les observait. Il allongea le bras d’un air entendu pour montrer à Agustín l’ombre qui bougeait. Du bout des doigts il caressa ses épaulettes et s’approcha de la paysanne.

— Grand imbécile, voit la boue que tu traînes derrière toi, marmonna la mère d’Iban.

Le colosse se retourna machinalement au moment où la fermière lui décocha un violent coup de pied dans le derrière. Alejandro bondit du sol et d’un geste douloureux, se frotta les fesses avec la main.

— Ne t’avise plus à montrer quelqu’un du doigt ! Que cherchez-vous par ici ?

Agustín s’amusait à faire tournoyer le pommeau de sa canne. Dans les herbages alentour, de grosses gouttes de pluie s’écrasaient dans un bruissement régulier.

— Mon ami et moi-même, nous aimerions partir à la découverte de cette merveilleuse région et de ses montes verdoyants. Connaitriez-vous un jeune berger susceptible de nous y accompagner ?

— Dans cet accoutrement ? Avec un costume de flanelle et l’autre grand nigaud en tenue de la Marine ?

Agustín ne répondit rien qui puisse contredire les paroles de bon sens de la mère d’Iban. Alejandro, le regard toujours rivé sur la paysanne rejoignit son ami Chavez. La villageoise lui jeta un œil en coin :

— Reste où tu es ! Si tu fais un pas de plus, je taille ton uniforme en lambeaux. Il y aurait bien mon fils Iban, mais ce bon à rien doit être en train de vadrouiller je ne sais où. Repassez demain matin et trouvez-vous des bottes au patelin !

Cette nuit-là, de retour à l’hôtel, Agustín ne put rencontrer le sommeil. Il guettait par la fenêtre les silhouettes qui se baladaient dans les ruelles de la bourgade. Il posa le front contre la vitre et aperçut un attroupement d’hommes qui se chamaillaient. L’un d’eux plongea sa main sous la veste et dégaina un couteau. La lame ouverte, il obligea le groupe à reculer. L’individu fendit l’air en dessinant des arcs de cercle. Paniqués, les autres drilles s’enfuirent. Agustín saisit la bravoure des personnes de la région et comprit qu’Iban ne se laisserait pas neutraliser sans une lutte acharnée.

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