Chapitre 23 : Une grande nouvelle

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Sur Terra, ce mois qui venait de prendre fin eut une autre saveur pour la famille Junius Silanus. Marius était en plein conseil de famille avec les papiers officialisant l'adoption d’Endymion en tant que son fils. Il ne manquait plus que sa signature. Alors qu'il allait la poser grâce à une plume d'oie, son geste fut interrompu par l’entrée fracassante de son neveu :

« Mon oncle, vite ! C'est tante Idylla !

— Que lui arrive-t-il, Endymion ? Pourquoi autant d'agitation ? demanda le chef de famille le plus calmement possible. Je vous prie de reprendre votre sérieux. »

Au début, son attitude presque froide prit Endymion au dépourvu, qu’il eut du mal à reprendre ses esprits. Il n’aurait jamais pensé que Marius réagirait avec si peu d’émotions concernant le sort d’Idylla. Puis, jetant un coup d’œil autour de lui, le jeune garçon comprit en un instant la situation. Son oncle était entrain de l’instruire de sa première leçon en politique, rester imperturbable. En effet, face à son oncle, les anciens le regardaient, également dans l’attente de la nouvelle. Oui, il comprenait. En tant que chef, son parent se devait de garder son calme en toute circonstance, afin d’avoir les idées claires et prendre les bonnes décisions. Prenant exemple sur lui, il l’informa de la situation, d’un ton aussi stoïque qu’il en était capable :

« Ma tante et ma mère étaient entrain de discuter avec le philosophe qui m'instruit quand tout à coup, ma tante s'est sentie mal, et a perdu connaissance. Ma mère a réussi à l'attraper avant qu'elle ne touche le sol. Un esclave l'a emmenée dans votre chambre, alors qu'un autre est allé chercher un médecin.

— Bien Endymion, je vous remercie. Allez rejoindre votre mère. »

Le jeune garçon obtempéra, et partit après avoir salué son oncle qui reprit la parole :

« Quand à vous, membres du conseil, je pense qu'il est nécessaire d'ajourner pour le moment la séance. Je vous préviendrai le moment venu pour reprendre où nous en étions. »

Tout le monde acquiescèrent, et sortirent de la salle. Lorsque tous furent partis, Marius se dirigea vers sa chambre, où se trouvait son épouse. Il avançait sans précipitation pour ne pas affoler la maisonnée, mais surtout pour conserver sa réputation. Voir le chef de famille préoccupé plus que de raisons risquait de provoquer la panique. Et pourtant, il n'avait qu'une envie, courir au chevet de celle qu'il aime. Arrivé proche de ses appartements, il croisa sa belle-sœur entrain attendre le verdict du médecin qui venait de rentrer ausculter Idylla. Il attendit donc avec elle, lui demandant si c'était la première fois. Psy lui répondit que depuis quelque temps, son épouse se plaignait de vertiges et de nausées mais sinon, tout allait bien. Elle avait à peine fini son exposé que la porte de la chambre s'ouvrit pour laisser passer le soignant. Ce dernier invita Marius à rentrer, mais uniquement lui pour le moment. A l’intérieur, l’oncle d’Endymion vit sur leur lit, le dos soutenu par des coussins, sa tendre épouse en pleurs, le visage enfoui dans ses mains. Il s'approcha, et oubliant toutes les convenances sociales, lui fit part de son inquiétude grandissante :

« Idylla, comment vas-tu ? Pourquoi pleures-tu ? Est-ce si grave ? »

En entendant la voix de son mari, la jeune femme plongea son regard dans le sien. La brillance de ses yeux était si profonde, que Marius fut de plus en plus intrigué. De plus, son sourire ne témoignait pas d’une quelconque tristesse, bien au contraire. Il s'assit sur le bord du lit, tout prêt d’elle, et lui prit la main, l'incitant à parler :

« Je vais bien, Marius. Je suis juste si heureuse..., répondit enfin Idylla.

— Que veux-tu dire ? Je ne comprends pas… Tu t’es tout de même évanouie.

— Marius,..., je t’assure, je vais bien, réconforta son aimée, posant une main en dessous de son nombril en continuant. Nos prières ont été enfin entendues.

— Tu veux dire... que... que tu es..., » bégaya son époux, qui n'osait pas réaliser la réalité de leur rêve.

Idylla, les larmes aux yeux, sourit face à la réaction de son mari. Lui qui n’était jamais en perte de mot, excellant dans l’art de l’éloquence, se trouvait dans la situation inverse. Il ne savait pas quoi dire, tellement la surprise l’avait envahi à la merveilleuse nouvelle qu'elle abritait maintenant en son sein :

« Oui, Marius, j'ai en moi une petite vie qui grandit. Je porte en moi un enfant,..., notre enfant, » annonça-t-elle, penchant sa tête pour l'appuyer contre son épaule.

A ces mots, Marius se tourna vers elle, et porta sa main sur le ventre de sa femme. Il le caressa doucement dans l'espoir que le miracle qui s'y produisait et qu'ils avaient espéré pendant des années, ressente tout l'amour qu'il avait déjà pour lui. Pour la première fois de sa vie, une larme coula le long de sa joue. Il était tellement heureux. Enfin, ils allaient avoir un enfant. Pendant ce temps, ne supportant plus d’attendre, Psy ouvrit doucement la porte, et voyant la scène, voulut la refermer pour leur laisser leur intimité. Toutefois, l’apercevant, la maîtresse de maison arrêta son geste en l'appelant :

« Ma sœur, restez, je suis tellement heureuse. Le médecin m'a annoncée une merveilleuse nouvelle... Je suis enceinte.

— Oh ! Joie ! Je vous félicite tous deux ! Nous allons prier les dieux, et leur offrir des offrandes pour les remercier de leurs bienfaits ! S'exclama Psy, au comble du bonheur.

— Vous avez raison, chère belle-sœur, nous devons leur en être reconnaissants. Cependant, pour l'heure, je souhaiterai rester avec Idylla un moment, lui demanda le futur père.

— Oui, je le comprends. Je vais vous laisser donc. Reposez-vous Idylla. Il faut que vous preniez des forces pour cet enfant. Je vais vous faire parvenir de quoi manger et boire.

— Je vous remercie, mais, rendez moi service. Ne dites rien pour le moment. Nous l'annoncerons plus tard au reste de la famille, réclama Marius. Par contre, vous pouvez le dire à Endymion. J'ai confiance en son silence.

— Bien sûr, » consentit la veuve de Sol.

Après ces mots, elle sortit, heureuse qu'Idylla puisse enfin réaliser son vœu. Alors que Psy gagnait la cuisine pour demander à un esclave une collation pour le couple, un doute lui prit le cœur. Que deviendra maintenant Endymion ? Elle avait été satisfaite et fière que son beau-frère envisage de l’adopter et de faire de lui l'héritier. Bien sûr, ce n'était pas pour le pouvoir. Elle n'avait jamais été ambitieuse. Si elle n'avait pas aimé et épousé Sol, elle serait restée Vestale.

En effet, alors qu’elle avait eu six ans, elle avait été choisie pour servir comme prêtresse de Vesta, déesse du Feu, au sein de son temple en forme de globe, image de l’univers. Elle avait rejoint d’autres jeunes filles issues des plus grandes familles de Rome, et âgées entre six et dix ans. Puis, après avoir prêté serment de conserver intact leur virginité, chacune d’entre elles restait au service de la divinité pendant une durée de vingt à trente ans. Leur rôle était de renouveler le feu sacré une fois par an, le premier jour de mars, au cours d’une cérémonie où elles utilisaient les rayons du soleil au moyen d’un miroir pour enflammer le bois. Elle avait également le devoir de le garder et de l’entretenir pour que jamais il ne meure. Malheur à la Vestale qui ne prenait pas garde, et laissait le feu s’éteindre. Elle était sévèrement et cruellement punie, déshonorant sa famille. Malheur à la Vestale qui rompait son vœu de chasteté. Elle était mise à mort, parfois enterrée vivante. En compensation de toutes ces rigueurs, Psy avait bénéficié d’un respect universel, à l’image des hauts dignitaires. Elle avait souvent été appelée pour apaiser les dissensions dans les familles, ou pour conserver les secrets des particuliers, et quelques fois des plus grands. Après leur temps, les Vestales revenaient au sein de la société romaine pour se marier. La sœur d’Idylla avait bénéficié d’une dérogation pour quitter son sacerdoce plus tôt, afin d’épouser Sol.

Revenant de ses souvenirs, cette dernière se retrouva de nouveau face à la réalité de sa situation, veuve et mère d’un fils. En cet instant, elle ne désirait qu’une seule chose, et c’était… Sa réflexion fut coupée par une quinte de toux qui lui fit cracher du sang. Quand elle se calma, elle reprit sa tâche sans rien faire paraître de la douleur qui se logeait dans sa poitrine. Après avoir envoyé la nourriture et la boisson, elle alla dans sa chambre, s’y allongeant un instant, la respiration sifflante. Pendant ce temps, après avoir réceptionné le plateau de victuailles, Marius laissa sa femme qui venait de s'endormir. Oui, il était heureux, et entreprit de se rendre vers la salle du conseil. Arrivé dans cette pièce, il se dirigea vers une table où il y vit la demande d’adoption d’Endymion, qui attendait d'être signé. Il prit le parchemin entre ses mains, et soupira. Il devait prendre une décision par rapport à son neveu, mais surtout vis à vis de toute la famille. Personne ne mettra en cause son serment, mais devait-il le garder en tant qu'héritier ? Après avoir réfléchi un instant, d'un son de cloche, Marius fit venir un esclave, et lui commanda de prévenir tous ses parents, et de les réunir dans la grande salle. Il avait une annonce à faire. Pendant que l'envoyé entreprit sa mission, le maître de maison plia le parchemin, le rangea dans sa tunique et se rendit aux écuries, là où il savait qu'il le trouverait. En l'apercevant entrain de brosser son cheval, il l'interpella :

« Endymion, mon neveu.

— Oui, mon oncle, que puis-je pour vous ?

— Je savais que je te trouverai ici, mon garçon. Dès que tu as besoin de réfléchir, ou de calmer tes craintes, tu viens voir ton destrier. »

Endymion n'osa pas interrompre l'homme devant lui, car il n’avait pas tord. De plus, il était sûr d’une seule chose. La discussion touchait le domaine privée. Il n’avait pas devant lui le chef, mais l’oncle, le frère de son père, qui lui demanda :

« A quoi penses-tu ? Demanda Marius. Je sais que ta mère t'a mis au courant pour la venue d'un enfant au sein de mon couple.

— Je...je suis heureux pour vous, et vous en félicite. Je ...

— Endymion, je voudrai connaître tes vrais sentiments, et non pas entendre des félicitations hypocrites, encouragea son oncle. Je vais en recevoir tout un panel quand je ferai l'annonce de la grossesse d'Idylla.

— Non, mon oncle, je suis vraiment content pour vous, et surtout pour ma tante. Je voyais bien qu'elle souffrait de son infertilité, rassura le jeune garçon. Ma mère ne l’a jamais démenti quand je lui en parlais. Je...je me demandais...je me demandais juste ce que je vais devenir maintenant... Vous allez avoir votre propre enfant, votre héritier... Je ne suis que votre neveu.

— Sache, Endymion... »

Malheureusement, Marius fut coupé par un esclave. Ce dernier le prévint que tous les membres de la famille étaient réunis dans la grande salle.

« Bien, nous arrivons... Allons-y, Endymion. Je tiens à ce que tu m'accompagnes, » invita-t-il avant de repartir vers la maison suivi par son jeune parent.

Ils arrivèrent tous les deux, et en entrant, Endymion alla s'asseoir près de sa mère. Idylla était aussi présente. Elle avait tenu à être là, comme son devoir l'exigeait. Beaucoup de Junius Silanus se demandaient pourquoi ils étaient tous réunis, et plus particulièrement, la mère de Lua. Elle avait un mauvais pressentiment, écoutant le brouhaha ambiant pour avoir des informations. Levant les mains, Marius exigea le silence. Quand il l’obtint, il s’exprima :

« Ma chère famille, comme certains ont pu en être informés, Idylla, mon épouse, a souffert d'un malaise ce matin. Le médecin l'a examinée... »

Il fit une pause pour s'assurer qu'il avait l'attention de tous. Il prit ensuite une main de son aimée dans une des siennes, et continua :

« Les Dieux nous ont bénis, Idylla et moi. Ma chère épouse attend un heureux événement. Un enfant va nous être donné dans quelques mois. »

Dès ces mots prononcés, tous les Junius Silanus voulurent être le premier à les féliciter. Le plus enthousiaste de tous fut Colinus, le père de Lua, qui proposa l'organisation de cérémonies et de sacrifices pour remercier les Dieux pour ce cadeau inespéré. Beaucoup de ses voisins appuyèrent cette idée.

« Ma famille, s'il vous plaît, je vous remercie de vos félicitations. Qu'en à votre proposition, mon cousin, vous avez parfaitement raison. Le conseil se réunira pour la mettre en œuvre dans les plus brefs délais.

— Marius, excusez moi d'interrompre vos réjouissances, mais j'ai une question, intervint le plus fervent de ses détracteurs. Qu'en est-il de l'adoption de votre neveu, et de votre projet de le nommer héritier ? Votre serment semble obsolète, maintenant. »

Cet ancien, connu sous le nom de Severus Junius Silanus, était le plus conservateur de tous, et le plus âgé des membres du conseil familial. Il n’appréciait pas beaucoup les réformes apportées par Marius, notamment celle concernant les mariages arrangés. De par le passé, dès leur naissance, deux enfants auraient pu être liés par une promesse de mariage. De par sa propre ancienneté, sa petite-fille aurait été promise à l’héritier. Attendre leur majorité, et leur laisser le choix pendant une année avant de décider pour eux, étaient pour lui une absurdité. Malheureusement, son opposition à la nouvelle politique n’avait pas abouti. Les contrats maritaux à un si jeune âge étaient maintenant prohibés, contrairement à d’autres foyers romains. De son côté, Idylla était estomaquée. Jamais, elle n’aurait pensé qu'une personne mette la parole de son mari en doute. Elle se retenait d'intervenir. En effet, d'une part, la colère n'était pas bonne pour le bébé et d'autre part, ce n'était pas son rôle. Elle serra la main de Marius qu'elle tenait toujours pour l'encourager, et lui montrer son soutien, un soutien apprécié, mais nullement nécessaire. Marius s'attendait à cette question, et s'y était préparé lors de la discussion avec son neveu. Il ferma les yeux, et lâcha la main de sa femme. Tout le monde attendit sa réponse, pendu à ses lèvres. Les premières impatientes étaient Psy et sa sœur. Toutes deux espéraient qu'il tienne parole, mettant ainsi Endymion sous sa protection. Certes, il n’était pas son fils, mais Idylla l’aimait comme tel. Bizarrement, une autre personne cachait difficilement son excitation et son impatience, comme si tous ses plans ne dépendaient uniquement de cette réponse. Calmement, Marius ne les fit plus attendre plus longtemps :

« Sachez que je tiens à honorer mon serment prononcé devant les Dieux et nos ancêtres, déclara-t-il avec force et conviction. J'adopte Endymion. Je l'appellerai désormais mon fils, et j'espère que vous ferez de même. »

Suite à ses paroles, il prit le parchemin faisant acte de l'adoption, et le signa devant tout le monde. A ces paroles, Endymion eut du mal à retenir ses émotions, mais avec grand effort, y parvint. En faisant ce geste devant tous les membres de la famille, son oncle venait de rendre sa décision incontournable et incontestable. Il devait maintenant être le plus digne des Junius Silanus pour honorer celui qui était désormais son père. Ce ne fut pas le cas de sa mère qui, reconnaissante, laissa couler une larme de soulagement. Son fils allait avoir une figure paternelle forte, qui le protégera, et qui lui donnera un avenir. Alors que tous pensaient avoir réglé la situation, Severus insista :

« Mais quand est-il du poste d'héritier ?

—Je pense qu'il est désormais trop tôt pour se prononcer, répondit Marius. Ne pensez-vous pas, mon oncle, que nous devrions attendre la prochaine naissance ?

— Vous avez parfaitement raison, mon cousin, répliqua Colinus. Il se pourrait que notre cousine attende un fils, et ainsi la question ne se posera plus. »

Encore une fois, toute la famille se rangea à cet avis des plus clairvoyants. Si Idylla mettait au monde un garçon, il héritera de son père sa place, même s’il était le dernier-né. Endymion n’arriverait que second dans l’ordre de succession. Ainsi la question de l'héritier pouvait attendre l'accouchement de l'enfant à naître. Par contre, Severus s’en mordit la lèvre d’indignation. Il aurait voulu une décision claire et nette, ou du moins, créer la zizanie. Toutefois, encore une fois, toutes actions étaient vaines. Déjà, qu’il n’avait pas réussi à marier sa propre fille à Marius, il avait espéré se rattraper avec sa petite-fille. L’infertilité d’Idylla, il l’avait prise comme une bénédiction. La nomination d’Endymion, en tant qu’hériter, aurait été une telle opportunité pour lui. Il avait déjà presque tout planifié pour Lua, afin de la pousser dans les bras du jeune garçon. Malheureusement, Colinus, son propre fils, avait encore une fois tout gâché, en proposant d’attendre la naissance. Certes, l’enfant à naître pourrait être une fille, mais cette dernière prouvera qu’Idylla n’est pas stérile, et serait capable de donner naissance à un garçon par la suite. C’était rageant, car toutes les possibilités étaient incertaines, et il n’aimait pas perdre le contrôle de la situation. Que devait-il espérer maintenant ? Que les Dieux favorisent Endymion, ou qu’un coup de pouce leur soit donné ? Les accidents lors d’une grossesse étaient si vite arrivés. Il ne pouvait que souhaiter maintenant que les choses s’arrangent en sa faveur. En tout cas, ses prières seront dirigées vers cette espérance. S’asseyant pour cacher son mécontentement et ses noires espoirs, il préféra se consacrer à sa belle-fille, Infama, assisse à ses côtés.

Bien que son fils ait renoncé à sa place dans l’ordre de succession pour elle, la jeune mère avait su le conquérir, le soutenant bien souvent dans ses décisions, et lui montrant qu’elle partageait sa soif de pouvoir. Peut-être pourra-t-elle l’aider ? Il fut surpris de la voir sourire à Colinus, comme si elle partageait sa joie d’une telle nouvelle. S’était-il donc trompé sur les ambitions de cette femme ? Visiblement, oui. Elle l’avait juste brossé dans le sens du poil pour être appréciée, mais sans ambitieuse aucune. Débité, il préféra noyer ses déceptions dans le vin. Heureusement qu’il pouvait compter sur sa propre épouse, Octavie, aussi calculatrice et assoiffée que lui. Des deux, c’était elle la plus cruelle, au point que jamais elle n’était allée rendre visite à Infama, refusant de l’accepter comme sa bru.

De son côté, Colinus était vraiment heureux de partager ce moment avec son femme, qui lui témoigna le même contentement, bien qu’il n’arrivait pas à déchiffrer son regard, où brillait une étrange lueur. Il lui exprima son inquiétude. Lui souriant toujours, son aimée le rassura en prétextant sa fatigue post-natale, leur petite Lua accaparant toute son énergie. Rempli de sollicitude, son mari le comprit, et l’excusa dans l’instant. Il lui proposa alors de la raccompagner dans leur appartement pour qu’elle puisse s’y reposer, ce qu’elle accepta de bon cœur, proposition qui fut suivie par Severus, partant avec eux. Alors qu’Infama sortait au bras de son mari, un frisson glissa sur sa colonne vertébrale, la stoppant un court instant. Elle jeta un coup d’œil derrière elle, mais ne voyant rien de suspect, haussa des épaules avant de poursuivre son chemin. Derrière elle, un regard froid et suspicieux n’avait pas quitté leur petit trio un instant, un regard qui se promit de protéger ceux qui lui étaient chers.

De leur côté, après les félicitations, tout ce beau monde repris leur routine. Marius incita les membres du conseil à le suivre, car il désirait organiser la cérémonie de remerciement aux Dieux pour cette future naissance. Endymion repartit à ses études plus motivé que jamais. Cependant, avant de partir, il dût se plier aux traditionnels remerciements aux personnes venues le féliciter pour son adoption. Le jeune homme se doutait que certains ne le faisaient que pour rentrer dans les bonnes grâces du nouveau fils du chef de famille, et pourquoi pas du futur mari de leur fille, ou de leur petite-fille. Ce fut le cas de l’épouse de Severus qui, avec un sourire aguicheur, essaya de lui faire la bise, et s'épuisa en compliments de toutes sortes. Endymion lui fit l'affront de l'ignorer, ainsi que le baiser. Décidément, il était d'accord avec sa mère, certaines femmes sentaient l'hypocrisie à plein nez, ne l’encourageant pas à voir la gente féminine d’un bon œil. Qu’en à elles, Idylla et sa sœur rejoignirent leur quartier tout en discutant de cette grossesse tant espérée, accompagnées par certaines de leurs comparses qui désiraient prendre part à leur conversation. Ces dernières étaient sincèrement heureuses pour l’aimée de Marius, car toutes l'appréciaient pour sa gentillesse et sa douceur. Les autres préférèrent rester à l’écart, rongeant leur déception de ne plus la savoir stérile.

Par la suite, dans la soirée, Marius rendit visite à son épouse, qui s’était installée dans une alcôve de la maison. Il était suivi par le médecin. Ce dernier la réexamina, afin de s’assurer que son malaise n’ait pas eu de trop grosses conséquences. Constatant que tout était rentré dans l’ordre, il en profita pour lui donner les principales recommandations, ainsi qu’au futur père. Il conseilla de ne pas trop voyager, de faire attention à ce qu’elle mange, tout en évitant de trop se restreindre, de bien se reposer dès qu’elle en sentait le besoin, et de ne pas hésiter à marcher un peu, mais sans trop forcer. Elle devait surtout rester au calme, et fuir les situations stressantes. En d’autres termes, Idyllla devait être à l’écoute des besoins de son corps, et prendre les lotions qu’il lui prescrivit pour préserver cette grossesse.

« Je vous remercie pour vos conseils. Nous les suivrons à la lettre, affirma la future mère.

— Bien, je vais vous laisser. Je reviendrai régulièrement pour vérifier l'évolution de votre grossesse, conclue le médecin, en prenant congé du couple. N'hésitez pas à m'appeler à la moindre complication. »

Alors qu'un esclave le raccompagna à la porte de la demeure, Marius était déterminé à suivre tous les conseils. Il parla donc à sa femme :

« Idylla, vous avez entendu les recommandations. Je vous demanderai de les suivre à la lettre, mais surtout de vous faire seconder dans la gestion du personnel, et dans tous vos devoirs. La priorité est votre santé, et celle de notre enfant.

— Oui, Marius, j'en suis consciente.

— Ne vous inquiétez pas, mon cher beau-frère, s'exclama la mère d’Endymion qui venait de rentrer, et qui avait surprise le discours de Marius. J'y veillerai personnellement.

— Je vous en remercie, ma chère belle-sœur. Je sais que je peux compter sur vous, conclue le futur père. Je vous invite à ce qu'on aille se coucher maintenant.

— Vous avez raison, mon aimé. Il est vrai que cette journée a été riche en émotion et m'a fatiguée, » rajouta Idylla qui prit le bras de son mari.

S'y appuyant, ils prirent tous deux le chemin de leur appartement. Tout le monde suivit leur exemple. Le couple s'endormit, la main de Marius posé sur le ventre de sa femme, heureux de savoir que la vie y grandissait.

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