Chapitre 41 Papa

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Je me souviens de ces moments d’enfance où tu m’appelais ta princesse, ou Heidi quand je portais mes cheveux relevés en tresses autour de la tête, faites par Anne-Elisabeth.

Je me souviens aussi de cette seule fois où tu m’as frappée si fort que maman a eu peur et a hésité à m’emmener aux urgences.

Je n’avais rien fait ; tu étais énervé par les autres, et c’est moi qui avais pris… m’a-t-elle dit, car je ne me souviens pas de tous les détails.

Je me souviens encore de ces matins de week-end où on venait jouer avec toi dans le lit. Tu faisais semblant de dormir, tes jambes en montagne. On grimpait et tu nous faisais tomber sur le lit.

Ou de tes crises de colère où tu criais sur tout le monde, lançais des choses par terre et partais pour la soirée afin de te calmer et nous protéger de ces colères que tu ne contrôlais pas.

Je me souviens de ces matins où tu disais bonjour à maman en l’embrassant, de ces balades où vous vous teniez la main, et je me promettais d’un jour aimer mon partenaire aussi fort que tu aimes maman.

Il y a eu ces années difficiles de chômage où maman divisait les portions en se privant pour qu’on en ait assez, où tu disais que tu n’avais pas faim.

Ces Noëls où le petit Jésus passait peu… Vous nous avez vite expliqué que vous n’aviez pas toujours assez pour nous gâter.

Pourtant je n’ai jamais eu le sentiment de manquer matériellement. Pas de vêtements neufs, pas de sortie au resto, au parc d’attractions ou au cinéma…

Mais des balades à vélo récupérés à la déchetterie et retapés, des après-midi du dimanche sur le parking du Gifi où tu nous apprenais à faire du roller ou du vélo.

Ces câlins et ces baisers dont j’ai manqué parce que ce n’est pas ta façon de faire… et ces câlins tellement précieux parce qu’ils sont si rares.

Il y a eu Valentin aussi. Tu t’es renfermé sur toi-même. Tu Lui en voulais. Pourquoi nous imposer un enfant handicapé ? Pourquoi lui imposer un handicap ?

Tu ne pratiquais plus, tu n’allais plus à la communion, tu ne te confessais plus. Tu riais peu, parlais moins et tu t’énervais beaucoup.

Je ne t’en ai jamais voulu de ne pas savoir exprimer tes émotions, d’être un peu rude, tout en angles. Tes parents t’ont élevé ainsi et tu n’as jamais su comment faire autrement.

Tu n’as jamais compris mon fonctionnement, mais tu as fait tellement d’efforts pour en parler avec maman et la laisser faire le lien… je pense que tu ne voulais pas me blesser.

Et puis ces paroles d’affirmation qui m’ont fait pleurer, ta présence en pleines crises de douleur quand je ne savais pas si j’allais pouvoir tenir…

Tu as toujours été là pour nous, te sacrifiant tout au long du chemin, avec tes défauts et cette douleur toujours contenue, cette inquiétude que tu n’exprimes qu’en colère…

Parce que la colère, le feu, l’énergie… c’est plus facile que d’admettre qu’on est vulnérable, qu’on s’inquiète, qu’on aime si fort qu’on en a peur, n’est-ce pas ?

En tout cas… merci, papa. Merci de nous aimer. De m’aimer.

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