Lundi 25 Février 2019

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LUNDI 25 FÉVRIER 2019

C’est au petit matin que Hyun-ae et Aimé sortent du bar et marchent dans la rue. Ils sont passablement ivres, surtout Hyun-ae qui n’arrive qu’avec peine à marcher droit.

— Merci Hyun-ae. Grâce à toi je viens de réaliser le rêve fou de rencontrer une de mes actrices préférées ! Par contre… je n’aurais jamais pensé qu’elle était gay.

— Esom ? Ani ! Non, non ! Elle adore les hommes ! Puis après un court silence, elle marmonne avec affection : D’ailleurs elle t’aurait bien mise dans son lit… 그년 … (La garce …)

— HEIN ?!!! C’est vrai ?

Hyun-ae prend soudain un air féroce.

— 이봐 … (Hé ! Ne rêve pas !!!) Tu es déjà pris ! Saloperie de mecs. Tous pareils...

— Hé mais je n’ai rien dit !

— You don't … (De toute façon tu n’as aucune chance ;) J’ai dit que tu peux plus… Tu sais.

Pointant son index devant son nez, elle le replie lentement en faisant un petit bruit comique…

— Hyun-ae !!

La caméra qui jusque-là les suivait ralenti sa progression, continuant de les filmer tandis qu’ils s’éloignent progressivement sur le trottoir.

— Si tu dragues encore une fille devant moi, je le dirais à Eun-jung !

— Mais Hyun-ae ! Je n’ai jamais…

— Regardez bien ce pauvre petit bonhomme innocent ! S’écrie-t-elle en prenant à témoin les rares passant. Méfiez-vous, c’est un obsédé qui raconte ses histoires de sexe au premier venu !

— Hyun-ae…

— He’s my … (C’est le vilain nounours de ma chérie !)

— Mais calme-toi Hyun-ae !

………………………

A l’aube, Eun-jung frappe vigoureusement à la porte de son ex belle-mère. Imprudente, Byun Bong-ae ouvre grand la porte et reçoit sans préavis une violente claque qui la propulse en arrière. Eun-jung s’avance vers elle et la prend par le col, furieuse :

— 왜 … (Pourquoi tu ne m'as rien dit ! Pourquoi tu ne m'as pas dit qu'il était mort ! Salope !)

Pour la première fois de sa vie peut-être, Byun Bong-ae a peur ; Eun-jung pourrait bien la tuer.

— 나리 … (Qu'est-ce que tu as fait à Na-ri ! C'est comme ça que tu as pris soin d'elle ? Que fais-tu de l'argent que je t’envoie chaque mois ?)

Bong-ae se reprend ; il n’est pas question de se laisser intimider par son ex-bru.

— 당신이 … (Ce que tu m'as donné n'est rien comparé à ce que mon fils a fait pour toi et ta bâtarde ! Tu ne pourras jamais me rembourser !)

Eun-jung regarde la vieille femme ; son air farouche dit toute sa rage. Elle répond calmement mais sa voix est chargée de colère contenue.

— 당신은 … (Tu ne nous as jamais accepté. Na-ri et moi... Pendant 15 ans tu nous as haï en silence...)

— 당신과 … (Toi et ta fille, vous m'avez volé mon fils ! Jamais je ne vous le pardonnerais !)

— 당신이 … (Si tu avais eu le moindre respect pour ton fils, tu ne m’aurais pas caché sa mort ! Tu ne m'aurais pas caché que vous avez déménagé dans cet appartement sordide ! C’est toi qui m’as volé ma fille ! Pendant des mois ! Tout ça pour que je continue à te donner de l'argent ? Tu n'es pas humaine !)

Les deux femmes s’affrontent du regard un instant, puis Bong-ae s’élance en direction de l’évier pour attraper un couteau qu’elle n’a pas le temps de brandir ; surgissant du couloir, Na-ri a déjà fait irruption dans l’appartement et bousculant sa mère, désarmé sa grand-mère. Eun-jung saisit le couteau tombé à ses pieds pour le dresser devant Bong-ae, prête à tuer. Elle se serait jetée sur son adversaire si sa fille ne retirait calmement l’arme de sa main.

— 괜찮아 … (Ça va maman. C'est fini... Elle n'a plus toute sa tête depuis la mort de papa... Viens, allons-y.)

Na-ri tenant sa mère par la main l’entraine dehors, en direction de la colline.

Arrivées près de la tombe de Mme Park, Na-ri s’accroupit et parle en étalant un peu de terre par-dessus :

— 할머니 … (Bonjour grand-mère... Voici ma maman. Tu ne la connaissais pas. Je croyais qu'elle m'avait abandonnée parce qu’elle ne m’aimait pas mais je me trompais...)

Na-ri prend la main de sa mère qui s’accroupit à son tour, lui fait caresser le monticule terreux.

— 엄마 … (Maman, c'est là que repose grand-mère Park. Elle m'a donné beaucoup d'amour. Avec Hyun-ae et Dounia, ce sont les seules personnes que j'ai su accepter. Maman, c'est moi qui ai rejeté le monde après la mort de Papa, c’est de ma faute.)

Eun-jung dégage doucement sa main de celle de sa fille pour caresser des deux mains la tombe de Mme Park avec beaucoup de tendresse. Puis, larmes humidifiant la terre :

— 딸을 ... (Merci halmeoni d'avoir aimé ma fille. Merci, merci, merci, merci, merci, merci...)

La reconnaissance d’Eun-jung se perdant en sanglots, Na-ri attire la tête de sa mère pour la poser contre son épaule.

Mère et fille redescendent de la colline en se tenant par la main.

— 엄마 ... (Maman... Tu la voyais depuis que tu es partie ? Grand-mère...)

— 아니 ... (Non. Elle est venue me voir une première fois il y a 10 mois environ. Je pense que c'est après la mort de ton père. Je ne sais pas comment elle m'a retrouvée. Elle m'a réclamé de l'argent. Elle disait que ton père avait fait quelques dettes. Elle disait que tout allait bien, que ce n’était pas très grave, que tu étais heureuse...)

— 난 ... (Je ne savais pas...)

………………….

En tout début d’après-midi à Donggyo-dong, Eun-jung entre chez elle, trouve le séjour vide et ouvre la porte de sa chambre. Le tableau qu’elle découvre ne la surprend pas vraiment ; il la fait sourire. Simplement débarrassé de son manteau, Aimé dort sur le dos, découvert, ronflant légèrement. Tout aussi habillée et en partie couverte par la couette, Hyun-ae a pris ses aises en dormant ; douillettement lovée contre Aimé, elle a passé une jambe au travers des siennes et un bras autour de son cou, tête bien calée au creux de son épaule et buste pressé contre son flanc. Il ne lui manque qu’à sucer son pouce pour qu’on lui donne sept ans tout au plus.

Doucement, Eun-jung vient s’allonger près de son homme, buste relevé sur un coude. Malgré tous ses efforts pour faire le moins de bruit et de mouvement possible, la place qui reste dans le lit est si étroite qu’elle est obligée de se serrer contre Aimé et le réveille. Il ouvre les yeux, la regarde et va pour se redresser mais souriante, elle le stoppe en posant un index léger sur ses lèvres puis dessine un cœur de deux doigts avant de les désigner, lui et Hyun-ae. Aimé sourit à son tour et dégage son bras libre pour accueillir sa tête au creux de son épaule.

Flottant entre deux sommeils, Hyun-ae rêve. Petite fille marchant dans les nuages, elle voit au loin un irrésistible gros nounours en peluche rose, court vers lui et saute dans ses bras pour un énorme câlin. Gloussante de bonheur, elle pince légèrement son nez, ses lèvres et ses bonnes joues rondes et c’est là que quelque chose cloche car gros nounours n’a plus de fourrure… Elle ouvre les yeux et découvre les regards souriants d’Aimé et d’Eun-jung tournés vers elle, puis ses doigts enserrant la joue de son amie…

3 secondes et 4 dixièmes. C’est très exactement le temps qui s’écoule dans le silence et l’immobilisme que lui cause sa stupeur avant qu’elle ne pousse un cri et se jette en arrière et tombe du lit, enroulée dans sa couette. La scène est si comique que ses amis ne peuvent qu’éclater de rire avant de s’inquiéter pour elle.

Plus tard dans le séjour… Assis sur des coussins autour de la table basse, Aimé et Hyun-ae boivent leurs fioles anti gueules de bois apportées par Eun-jung. Aimé sourit intérieurement en voyant la gêne de sa compagne de beuverie qui garde la tête baissée et évite son regard. Eun-jung finit de cuire une omelette, la roule, la coupe en tranches et l’apporte à table avec du riz et du kimchi.

Les deux fêtards de la veille mangent en silence sous le regard un peu moqueur de leur hôte, puis :

— How are … (Comment allez-vous, vous deux. Pas trop de ‘’Hangover’’?)

— Hang… what, demande Aimé ?

— Hangover… Gueule de bois, traduit Hyun-ae.

— Ha… Ça va, juste un peu mal à la tête. Et toi Hyun-ae ? Tu as bu beaucoup plus que moi…

— Mmmm…

Eun-jung éclate de rire.

— You were so … (Vous étiez si mignons ensembles ! De vrais amoureux)

Aimé sourit, Hyun-ae lui jette un regard noir.

— 당신이 … (Ne raconte jamais ce que tu as vu Eun-jung !)

— Are you sure … (Est-tu certaine de n'être QUE lesbienne ? Vous aviez l'air de si bien vous entendre au lit...)

Alerté par la pointe de soupçon teintant l’expression amusée de Eun-jung, Aimé intervient de crainte que les choses ne dérapent.

— This night … (Cette nuit, elle m’a appelé ‘’appa’’…)

Hyun-ae réagit vivement :

— Mwo ? (Quoi ?) C’est quoi ces bêtises ?!

— Tu ne te souviens pas pourquoi nous avons dormi ensemble ?

Hyun-ae ne semble vraiment pas désireuse de se souvenir mais Eun-jung veut absolument savoir alors Aimé raconte :

— J’ai presque dû la porter jusqu’au lit… et elle ne m’a jamais laissé repartir. Elle était si collante ! On aurait dit une fillette capricieuse ! Explique Aimé en riant avant de s’adresser à Hyun-ae d’un ton plus grave : Je n’ai réalisé que tu étais vraiment effrayée que lorsque tu t’es endormie. Ton sommeil était si agité ! Je n’ai pas compris grand-chose de ce que tu disais mais tu semblais vraiment avoir peur que je te laisse seule. Et puis tu as commencé à m’appeler papa.

Eun-jung fronce les sourcils et couvre de sa main celle de Hyun-ae posée sur la table.

— Tu fais souvent des cauchemars ?

— Ani… En tout cas je ne m’en souviens pas.

— C’est probablement un de ces petits traumatismes ressurgi de l’enfance, on en a tous.

— Yes… Some can … (Oui… Certains peuvent nous hanter des années…), conclut Eun-jung d’un air sombre.

Aimé vient prendre dans les siennes la main libre d’Eun-jung et les trois se taisent tandis que la caméra recule tout en filmant en plongée leurs mains jointes sur la table.

………………….

Suivie par Na-ri en retrait, Dounia entre d’un pas résolu dans la salle des professeurs du Lycée Sangam. Elle se dirige sans hésitation au fond, droit vers Lee Jung-wan qui encore une fois se balance nonchalamment dans son fauteuil, regard vague fixé sur les nuages au travers de la fenêtre. Arrivée à moins d’un mètre de son objectif, Dounia s’incline bien bas et reste ainsi pour annoncer d’une voix forte :.

— Annyeonghaseyo seonsaengnim ! (Bonjour professeur !)

Lee Jung-wan tourne lentement la tête vers elle puis retourne à ses nuages.

— Where … (Où te crois-tu ? Dans ton lycée en France ?)

Dounia se redresse en souriant.

— Ani, gyosunim! (Non professeur !) In France … (En France nous sommes moins formels mais j’ai toujours rêvé de saluer mon professeur comme dans les dramas.)

— 드라마가주는 … (Tu vois l’image de notre pays que donnent les dramas ? Formalité et obéissance… Pauvre Corée…), dit-il d’un air désabusé à Na-ri venue plus discrètement saluer à son tour.

— This is not true … (Ce n’est pas vrai ! Les dramas sont bien plus complexes que ça.), s’indigne Dounia.

— 글쎄! … (Eh bien ! La réputation de l'amour des Français pour la controverse semble bien réelle !) Fortunately … (Heureusement que tu n’es pas mon étudiante, les leçons dureraient éternellement...), s’exclame à son tour le professeur, un peu surpris par la véhémence de la jeune française.

Puis il désigne aux filles deux piles de manuels posées sur son bureau. Elles les prennent.

— 이것이 … (Voilà ce que je vous ai trouvé, Na-ri. Avec ça, vous devriez pouvoir rapidement communiquer correctement entre vous. Je vous ai aussi noté mon téléphone, n'hésitez pas à m'appeler si vous avez des difficultés.) Miss Dounia Battini ... (Mademoiselle Dounia Battini… Je suis curieux de savoir ce que tu es venue faire a Susaek-dong. On ne voit pas beaucoup d’étranger de l’autre côté de la voie ferrée…)

— I followed ... (J’ai suivi Na-ri jusque chez elle…)

— Why … (Pourquoi ? Si je ne suis pas trop indiscret…)

Na-ri s’avance d’un pas :

— Because I… hit her and I… stole her camera.I … (Parce que je… l’ai frappée et j’ai… volé son appareil photo.)

Le professeur la regarde, manifestement époustouflé :

— Na-ri ?! … (Na-ri ?! Tu… Tu… Tu parles Anglais ?!!!!!!!!!!)

— ‘’Un peu English… A little Français… After, Dounia et moi chingu and naneun saeng-gaghaessda Dounia got am. Après Dounia abeoji sick geuttae Dounia tabasser mur avec main et broken finger. Look. Then…’’ (Après, Dounia et moi sommes devenues amies et j’ai cru qu’elle avait le cancer. Après, le père de Dounia était malade alors Dounia a frappé un mur et s’est cassé un doigt. Regardez. Ensuite…)

— STOOOOP ! Stop, stop, stop, s’exclame le professeur ébahi avant de poursuivre après un cour silence : 두 분이 … (Je crois que vous vous êtes bien trouvées toutes les deux...)

Puis, comme s’il se souvenait de quelque chose après avoir regardé l’heure, il se lève et ordonne :

— You two… (Vous deux… suivez-moi.)

Lee Jung-wan entre dans une salle de classe suivi par Na-ri et Dounia. Surpris, Ha-ru et Dong-yul leur font un petit signe de main. Œil gauche caché par un pansement, Hee-jung s’esclaffe de rire :

— 나리 … (Na-ri, Dounia ! Vous faites quoi ici ?)

— 프로그램 … (Changement de programme, rangez vos manuels.), annonce le professeur. 이 … (Ce cours portera sur les libres moyens de communication.)

Petit chahut surpris en classe quand il pousse Na-ri et Dounia devant lui.

— 다들 … (Vous connaissez tous Kim Na-ri... Vous connaissez son niveau en Anglais ? Complètement nul bien sûr. Ne parlons pas du français, on n’en fait pas ici.)

Rares rires étouffés…

— Dounia Battini입니다. (Voici Dounia Battini.) Dounia, if … (Dounia, si tu veux bien te présenter ?)

— Heu… En quelle langue m’sieur ? En Français ? In English? Hangug-eoleul?

Quelques petits rires plus ou moins spontanés parcourent de nouveau la salle…

— Annyeonghaseyo. Je ileum-eun … (Bonjour. Je m'appelle Dounia Battini. Je suis française et j'ai 18 ans.)

— 나리와 … Na-ri and … (Na-ri et Dounia, je voudrais que vous racontiez à tous votre rencontre et ce que vous avez fait jusqu'à maintenant, ensemble.)

Comme les intéressées se regardent, dubitatives, il les encourage.

— 나리 … (Na-ri, parle exactement comme tu m'as parlé tout à l'heure.)

— Ha ! Na-ri émet un petit rire un peu gêné. Toi d’abord Dounia.

— ‘’D’accord ! I was taking pictures in Yeonhui-dong et j’ai vu Na-ri.’’ (Je prenais des photos à Yeonhui-dong quand j’ai vu Na-ri.) ‘’Je l’ai trouvé belle. Ippo.’’ So I took … (Alors j'ai pris des photos d'elle sans lui demander sa permission.)

— 그것은 … (Ça m'a énervée !) ‘’Geulaeseo j’ai tabassée elle and I took camera !’’ (Alors je l’ai tabassée et j’ai pris son appareil photo !)

D’autres rires fusent, plus fournis, alors les deux prennent de l’assurance, s’aidant de gestes et mimiques, Dounia d’abord.

— ‘’J’ai trouvé hagsaeng kadeu on the snow alors je suis venue looking for her at Susaek-dong.’’ (J’ai trouvé sa carte d’étudiante dans la neige alors je suis venue à sa recherche à Susaek-dong.)

— 집 … (Ça m'a fait peur de la voir près de chez moi !) ‘’After, I see le fou tabasser elle ! Moi colère ! After Dounia malade. Moi bad for elle.’’ (Après j’ai vu le fou la frapper ! J’étais en colère ! Après, Dounia était malade. Je me sentais mal pour elle.) 그래서 … (Alors j'ai demandé à mon amie Hyun-ae de lui rendre son appareil photo.)

— À moi Na-ri ! S’exclame en souriant Dounia qui se prend au jeu. ‘’Hyun-aega malhaess-eo : viens voir Na-ri à la maison ! I was soo scared! I think: Na-ri dangerous! Geuleona I find some courage and…’’ (Hyun-ae m’a dit : viens voir Na-ri à la maison ! J’avais trop peur ! Je pensais : Na-ri est dangereuse ! Mais j’ai trouvé un peu de courage et…)

Eclats de rires de plus en plus francs. Toute la classe est captivée par le récit, les plus vifs à comprendre traduisant pour les autres.

— 때 … (Quand ça a sonné, je croyais que c'était le livreur de poulet !) ‘’Je suis couru, open the door and: DOUNIA !” (J’ai couru, ouvert la porte et : DOUNIA !) 바로 … (Elle était Juste là ! À 10 centimètres ! J'avais si peur !)

— Et moi alors ! ‘’This is how we became friends… chingu. Mais j'ai une autre amie ici… who saved my life.’’ (C’est comme ça que nous sommes devenues amies… Mais j’ai une autre amie ici…qui m’a sauvée la vie.)

Des exclamations de surprise fusent tandis que Dounia se dirige vers Hee-jung qu’elle prend par la main et tire à côté de Na-ri. Gênée, Hee-jung tente d’empêcher Dounia de s’incliner très bas devant elle.

— ‘’Gamsahabnida Hee-jung! You are my hero!’’ (Merci Hee-jung ! Tu es mon héros !)

Na-ri lève un bras de Hee-jung.

— 맞아 … (C'est vrai que Hee-jung lui a sauvé la vie. J'en suis témoin !)

Le professeur commence à se demander comment il va calmer la classe en délire quand Dounia et Na-ri se dirigent chacune vers Dong-yul et Ha-ru qu’elles ramènent aussi près du tableau. Dounia désigne ses quatre amis :

— ‘’And it’s hard to believe mais ceux-là save the life of naui abeoji’’ (Et c’est difficile à croire mais ces quatre ont sauvé la vie de mon père).

Des rumeurs interrogatives parcourent la salle de classe devenant un peu plus sceptique à mesure que la traduction en Coréen se répand, quand un des élèves se lève :

— 나는 … (Je suis témoin, c'était au restaurant de mon père !)

Soudain c’est du délire, cris et applaudissements retentissent jusque dans le couloir, attirant des élèves des autres classes qui viennent se presser aux fenêtres intérieures.

Plus tard, après avoir difficilement ramené un peu de calme, le professeur interroge les élèves :

— 나리와 … (Avez-vous tous réussi à comprendre ce que nous ont raconté Na-ri et Dounia ?) Puis, en réponse à la classe dans l’ensemble affirmative : 그러나 ... (Pourtant beaucoup de mots Anglais et même pas mal de Français ont été utilisé. Qui est bon en Anglais ? 4 personnes... Et en français. Personne bien sûr puisqu'on ne l'enseigne pas... Et pourtant je sais que vous avez tous bien suivi... Cela montre deux choses : d'abord vous êtes bien meilleurs quand le sujet vous intéresse. Ensuite, pour bien apprendre une langue il faut d'abord communiquer. C'est ça l'essentiel. On communique avec sa bouche et ses mots mais aussi avec ses yeux, ses gestes. Et ce n'est pas grave si on n'est pas très bon, pas grave si notre accent est mauvais. L'important est de se faire comprendre par tous les moyens. C'est nul si vous n'osez pas parler avec un étranger parce que vous pensez que votre prononciation est mauvaise. C'est en parlant que vous deviendrez meilleurs. Ce n'est pas grave si vous êtes mauvais au début. Kim Na-ri a-t-elle été bonne un jour en Anglais ? Non ! Et pourtant elle vient de vous raconter une histoire en utilisant de nombreux mots de cette langue, et beaucoup d'autres dans une langue dont elle n'avait jamais entendu parler il y a un mois... Elle y est arrivée seulement car elle a cherché chaque jour le meilleur moyen de communiquer avec Dounia. Et je vous fais le pari qu’en pratique, Na-ri est déjà plus à l’aise que la plupart d’entre vous pour communiquer avec un étranger. Voilà ce que je voulais vous apprendre aujourd'hui.)

………………….

Les cinq amis se promènent en marchant sur la large place du Sangam Cultural Square, bien connue pour être régulièrement traversée par les nombreuses célébrités fréquentant ce quartier qui abrite les immeubles des principales chaines de télévision et beaucoup d’autres entreprises de divertissement.

Hee-jung ne boite plus. Tenant Dong-yul par la main, Dounia lui lance souvent des regards amoureux. Alors qu’il la regarde en souriant, Dounia en profite pour lui voler un baiser appuyé avant de s’accrocher langoureusement à son bras… ce qui a le don d’agacer Na-ri marchant en retrait. Hee-jung qui ne rate rien la rejoint pour la taquiner.

— 사랑은 … (C'est beau l'amour ! Pas vrai, Na-ri ?)

Na-ri hausse les épaules, désabusée.

— 당신은 … (Qu'est-ce que t’as ? T’es jalouse ?)

— 거리 … (Il parait que c’est normal pour eux de s'embrasser en pleine rue... Ces français n'ont aucune pudeur.)

— 오 … (Oh ça va ! On n'est plus à l'ère Joseon ! T’es vraiment coincée parfois.) Puis, après un court silence : 말 ... (Dis... Dounia... C'est quoi cette histoire de cancer ?)

Na-ri la regarde sans comprendre.

— 당신은 … (Tu as entendu comme moi. C’était il y a deux ans.)

— 하지만 … (Mais ses cheveux... Son cancer a-t-il vraiment bien guéri ?)

Un grand sourire illumine le visage de Na-ri.

— 아 … (Ah ça c’est rien ! Ils avaient découvert un truc un peu inquiétant pendant un contrôle alors ils ont fait des analyses mais sans attendre les résultats, Dounia s’est rasée la tête et a piqué la carte bancaire de son père pour venir ici.)

— 허!? … (Hein !? C'est quoi cette histoire ?)

— 실화입니다 … (Une histoire vraie. Son père est venu la rechercher à Séoul pour lui dire que ce n'était rien de grave.)

Hee-jung mime du geste la tonte de sa tête.

— 그녀는 … (Tu sais pourquoi elle a fait ça ?)

— 질병에 … (Son père dit que c'est une façon de se révolter contre la maladie. Un truc du genre : Tu veux prendre mes cheveux ? Ben tu ne les auras pas !)

— Ouaaaa ! … (C’est vraiment un phénomène cette fille… Mais pourquoi s'enfuir, pourquoi refuser de savoir ?)

— 그녀는 … (Elle dit qu'elle a eu peur de ne jamais pouvoir revenir en Corée. Tu te rends compte ? Elle était prête à affronter la mort pour pouvoir retourner ici.)

— 우리는 … (Il faut croire que notre petit pays peut être fascinant... Elle doit être folle.) Puis en riant : 미친 … (Mais nous on aime bien ce genre de folle !)

Les deux amies marchent un moment en silence en regardant Dounia puis Hee-jung baisse le ton en désignant Ha-ru qui marche devant :

— 왜 … (Pourquoi l’ignores-tu ? Ne le fais pas trop attendre, il finira par se lasser et chercher ailleurs…)

Na-ri hausse les épaules pour signifier son indifférence… mais son regard s’attarde sur son fidèle ami et une légère angoisse la traverse à cette idée. Dounia subitement se retourne vers elle et s’exclame, joyeuse.

— Na-ri ! Tu crois qu’on va voir quelqu’un de célèbre ? Maybe … (On verra peut-être Jimin ou Shuga !)

— Hey … (Hé ! Ne rêve pas petite fille !), s’exclame Hee-jung. 그녀는 … (Elle est si naïve. Trop mignon…)

— 그녀는 실망할 수도 있습니다. 월요일 저녁에는 아무도 없습니다.

— Ha-ru … (Ha-ru dit qu’il n’y a presque jamais personne le lundi.) Traduit Dong-Yul.

Na-ri arrache d’autorité Dounia du bras de Dong-yul :

— 스튜디오로 … (Allons-voir au studio.) Viens Dounia. Gaja !

Tous arrivent devant le DMC Studio Garden où par chance se déroule une interview filmée visible depuis l’extérieur au travers d’une baie vitrée, le son étant diffusé dans la place par des haut-parleurs. La faible fréquentation du moment n’est pas sans avantage ; ils trouvent facilement à s’installer sur les quelques bancs de bois aménagés pour les spectateurs. Délaissant son amie, Dounia rejoint Dong-Yul. À peine assise, elle se blottit contre son amoureux, regarde distraitement ce qui se passe derrière la vitre et soudain, se redresse en poussant un cri tout en tendant un doigt en direction du studio

— Oh !!!! Oh c’est pas vrai ! C’est Wing !

Les quatre jeunes Coréens la regardent, surpris ; pas un ne reconnait le visage désigné de façon aussi cavalière par leur amie consternée par leur manque de réaction.

— C’est Wing ! Wing ! Nobody … (Personne ne le connait ? Vous ne connaissez pas le Jinjo Crew ?!)

Ses amis se regardent piteusement en haussant les épaules ; ce nom ne leur dit rien du tout.

— Are you serious?!! … (Vous êtes sérieux ?!! Jinjo est une des meilleures équipes de Break Dance au monde !!! Ils ont remporté deux fois le Boty !)

— C’est quoi Boty ? Demande Na-ri.

Dounia saute sur place, bras toujours tendu.

— C’est le “Battle Of The Year “, la plus grande compétition de Break Dance ! The biggest Street Dance competition! Traduit Dong-yul !

— "Battle Of The Year" 는 … (“Battle Of The Year “, c’est la plus grande compétition de Break Dance au monde.)

L’agitation de Dounia finit par attirer l’attention à l’intérieur du studio. L’animateur la regarde et s’adresse à son invité sur un ton taquin.

— 한국의 … (Mon cher Wing, vous qui vous plaignez régulièrement dans les médias de la trop faible audience de la Break Dance en Corée, il semble que vous ayez une grande fan devant notre studio. Est-ce vous qui l’avez amené ?)

— 아니, 아니! (Non, Non !), dénie vivement Wing en riant. 내가 … (C’est vrai que j’aimerais être plus populaire mais je n’irais tout de même pas jusque-là ! Vous pouvez quand même constater que je n’ai pas complètement tort : la seule personne qui semble me connaitre dans le public n’est visiblement pas coréenne…)

— 사실이야 ... (C’est vrai… C’est la seule mais elle compense par son enthousiasme ! Que diriez-vous de lui faire une petite surprise en l’interviewant ?)

— 기쁨으로! (Avec plaisir !)

Ses amis la regardant soudain d’un air ébahi, Dounia craint un instant avoir eue un comportement trop inconvenant… avant que son cœur ne s’emballe en voyant Win sortir du studio et se diriger vers elle en compagnie de l’animateur, les deux tenant un micro en main et suivis par un caméraman.

— 안녕하세요 … (Bonjour Mademoiselle ! Il semble que vous soyez fan de Wing. Accepteriez-vous de répondre à quelques questions ? Si vous voulez bien vous présenter d’abord ?)

— Uh… Annyeonhaseyo … (Heu… Bonjour, je m’appelle Dounia et j’ai dix-huit ans) Sorry, I … (Désolée, je comprends un peu le Coréen mais je ne le parle pas vraiment.)

— Dounia ! 당신은 … Are you … (Es-tu Américaine ?), demande Wing.

— No, I am French. (Non, je suis française.)

—Ah ! J’aime la France ! Puis, se tournant vers l’animateur : 그녀는 … (Elle est Française. J’adore ce pays, j’en garde de très bons souvenirs.)

— I know … (Je sais. Vous aviez l’air si heureux !)

— 당신은 … (Tu sembles me connaitre...)

— ‘’Of course, dangsin-eul al-ayo... miljeobhage.’’ (Bien sûr, je vous connais… étroitement.)

Comprenant instantanément avoir dit une bourde en voyant toute l’assemblée prendre une mine choquée, Dounia essaie maladroitement de se rattraper.

— No … (Non, non ! Je veux dire que je vous connais de très près !)

L’animateur s’adresse à Wing sur un ton de plaisanterie pour détendre l’atmosphère :

— 이것이 … (C’est l’avantage de ne pas être trop connu ; avec une star ces propos auraient déjà provoqué un scandale...)

Dounia soudain comprend la méprise et ses joues s’empourprent.

— It's not that! … (Ce n’est pas ça ! J'étais juste devant il y a deux ans à Montpellier, quand vous avez gagné le Boty !)

— So you ... (Tu étais donc à Montpellier… Oh ! Je me souviens ! Tu étais avec une amie juste devant la scène, c’est ça ?)

— Yes … (Oui ! Avec mon amie Hizia.), s’exclame-t-elle, soulagée.

— I was … (J’étais juge et je me souviens très bien de vous deux, vous étiez si enthousiastes !) Puis se tournant de nouveau vers l’animateur : 2 년 전 … (Je me souviens très bien d’elle quand nous avons remporté la première place en France il y a deux ans. Elles étaient vraiment déchainées avec son amie. Elles nous ont beaucoup encouragées.)

— 그녀도 … (Demandez-lui si elle danse.)

— You dance … (Tu danses aussi si mes souvenirs sont bons.)

— A little … (Un peu… Mais je suis débutante ! Rien à voir avec ce que vous faites !)

— 가다! … (Allez ! Faites-nous une petite démonstration !), incite l’animateur.

— A little … (Un petit battle Dounia ?)

— No … (Non, non ! Je ne suis pas assez bonne !)

Restés jusque-là discrets dans leur coin, ses amis se manifestent soudain avec enthousiasme.

— Go Dounia! (Vas-y Dounia !)

— Dounia 어서 … (Allez Dounia ! Courage !)

— Come, don’t be shy! (Viens, ne sois pas timide !), l’encourage Wing.

Forçant un peu la jeune française, l’animateur fait un signe en direction du studio.

— 가다! … (Le studio ? À vous de jouer !)

Soudain mu par le rythme du beat envahissant l’espace, Wing se lance. Comme lors d’une vraie battle, il s’échauffe par un « top rock » durant lequel il vient gentiment provoquer en lui tournant autour, une Dounia qui peu à peu oublie le contexte. Entrainée par la musique, elle ose alors quelques pas, de plus en plus assurés. Bientôt, tout le monde peut constater que si sa danse n’a rien d’une pro, elle montre une bonne maitrise de ses mouvements et un feeling certain. Rassuré et amusé, Wing alors accompagne un moment ses mouvements puis tous sont étonnés de le voir commencer à virevolter dans les airs en quelques acrobaties avant que de terminer par un « foot work » assez basique, mais puissant et irréprochable qui ébahi l’assemblée. Sincèrement impressionné, l’animateur le complimente…

— 와! … (Wow ! Ça c’est de la dance !)

… avant de se tourner avec un petit sourire ambigu vers une Dounia radieuse :

— 그와 … (Vous devez être heureuse d’avoir dansé avec votre idole, non ?)

— Oh oui ! Kkum gatda! (C’est comme un rêve !)

Sournois, il referme son piège avec un sourire innocent :

— 우리는 … (On peut le comprendre. Vous qui l’avez poursuivi depuis la France jusqu’en Corée…)

Dounia ne sachant trop comment interpréter ce qu’elle vient d’entendre, Wing croit venir à son secours en la taquinant :

— That is true? … (C’est vrai ? Tu es venue en Corée pour me voir ?)

— Ani, Ani ! (Non, non !)

Ignorant la gêne visible de son interlocutrice dons les joues s’empourprent de nouveau, l’animateur sournois insiste lourdement :

— 우리 … (On a tous compris qu’elle est amoureuse de notre invité…) Tell us … (Dites-nous ; êtes-vous amoureuse de Wing ?) 인정해 … (Avouez-le. Cela restera entre nous.)

Toujours inconscient de ce qui se trame, Wing enfonce involontairement le cou :

— 불행히도 … (C’est malheureusement sans espoir ; mon cœur est déjà pris.)

— Mais… Non… Je…. , bafouille la pauvre Dounia complètement désarçonnée.

Ne pouvant supporter plus longtemps de voir son amie aussi embarrassée, Na-ri intervient soudain. S’interposant brusquement entre Dounia et les deux hommes, elle apostrophe ceux-ci vertement :

— 야 … (Hé ! Laissez-là tranquille ! C’est quoi ces questions ?!) ‘’Viens Dounia ! 그들은 바보 야! C’est des cons ! Gaja !’’

Tirant derrière elle une Dounia désemparée, Na-ri s’en va au pas de charge, sans plus se soucier de l’émission que l’animateur tente de sauver en faisant des signes désespérés en direction du studio pour qu’ils passent de la musique… mais ce n’est pas fini car saisissant fermement sa main pour approcher le micro de sa bouche, Hee-jung en rajoute une couche, véhémente :

— 그녀가 … (Vous essayez de la faire passer pour une sasaeng ou quoi ?! On est venu ici par hasard. Elle ne savait pas !)

Puis elle se tourne vers Wing, cinglante :

— 그리고 … (Et tu ne dis rien toi ! Tu rentres dans son jeu ! C’est ça l’esprit Break Dance ? Je pensais qu’il y avait plus de sincérité chez les Bboys !)

Surpris par la tournure des évènements, Wing descend enfin de son petit nuage. Il jette un regard noir à l’animateur soulagé d’entendre démarrer la musique, puis se tourne vers Hee-jung.

— 그러나 … (Mais… Non…) N’arrive-t-il qu’à bafouiller sous son regard féroce, avant que de s’énerver de la voir partir en l’ignorant superbement et crier : 야! 당신! (HÉ ! TOI !)

Les deux garçons se lèvent aussi pour s’en aller, Ha-ru rejoignant les filles et Dong-yul se dirigeant droit vers Wing qu’il affronte quelques secondes du regard avant de le braver en pointant fermement son index vers sa propre poitrine :

— Dounia (Dounia c’est MA copine, d’accord ?!)

Puis il rejoint au trot ses amis.

— 야 … (Hé ! Vous avez vu comment elle danse Dounia ? Elle assure !)

— 네 … (Ouais ! C'est du sérieux !), rajoute Hee-jung.

— Mais non… Naneun … (Je… Je ne suis pas si forte !)

— 네 … (Si, c’était vraiment bien.), confirme Ha-ru.

— 와우 … (Wow c’est pas vrai ! Dounia vient de recevoir un compliment de Ha-ru ! Na-ri va être jalouse. Lui qui n’en fait jamais...)

— 닥쳐 … (Tais-toi sorcière !)

Marchant d’un bon pas, le groupe plaisante comme s’il ne s’était rien passé, les quatre coréens entourant la jeune étrangère comme pour la protéger. Wing les regarde s’éloigner et un sourire remplace bientôt son air contrarié.

………………….

En début de soirée, Eun-jung sort de la chambre de Hyun-ae et rejoint celle-ci assise devant la table de cuisine.

— 괜찮을까요 … (Tu es sûre que ça ira ? On peut retourner chez moi avec Aimé.)

— 당신은 … (Comment feras-tu ? Tu vas le porter ? Laisse-le dormir. Il a l'air épuisé.)

— 예 ... (Oui, j'ai l'impression qu'il se fatigue de plus en plus vite...) 나는 … (Je peux dormir sur le canapé si...)

— 절대 … (Pas question ! Dormir dans le même lit qu'un homme était peut-être une expérience intéressante... Mais cela n'arrivera plus jamais !)

Eun-jung sourit en se remémorant le spectacle découvert le matin même dans son lit. Elle taquine son amie :

— 오늘 … (Vous étiez pourtant si mignons ce matin.)

— 나는 … (Je préfèrerais mille fois m'endormir dans tes bras...)

Un silence s’installe, un peu gêné pour Eun-jung.

— 왜 … (Pourquoi moi ? Il y a tant de femmes plus séduisantes.)

— 그러나 … (Mais si peu avec ta force de caractère... Tu me plais vraiment.)

— 제발 ... (Arrête s’il te plait. Aimé… Je l’aime.)

— 알아요 … (Je le sais. Lui aussi t'aime.)

Hyun-ae hésite une seconde… puis ose.

— 그러나 … (Mais je ne pense pas que l’idée lui déplaise...)

— 무슨 … (Que veux-tu dire ?)

Hyun-ae sourit, mystérieuse :

— 그의 … (Demande-lui de te parler de ses amies Dominique et Fanny...) Puis changeant brusquement de sujet : 게스트 … (Ton travail au Guest house te plait ?)

— 휴가 … (C'est cruel de me parler de travail pour mon premier jour de congé… Il me plait assez oui. Ce n'est pas qu'il soit des plus gratifiant mais je l'organise comme je l'entend et je rencontre des tas de gens venus des quatre coins de la planète. J'aime bien ça. Pourquoi ?)

— 저는 … (J'ai un projet en tête depuis longtemps... Je crois que le moment de le concrétiser est arrivé. Tu saurais gérer une fondation ?)

— 음 ... (Et bien... Je ne sais pas trop. J'imagine que c'est comme gérer une entreprise mais avec d'autres priorités.)

— 바로 … (Exactement. Le but ne serait pas de faire du profit mais de réaliser un maximum de choses avec le budget disponible.)

— 흥미롭게 … (Cela semble tout aussi intéressant. Quel serait l’objet précis de la fondation ?)

— 도움말 … (Aider de jeunes artistes. Je voudrais leur offrir un lieu pour créer, pour exposer, pour performer. Il y aurait des ateliers, des salles d'exposition, une salle de restaurant avec scène où se produiraient acteurs et chanteurs...)

— 야심 … (C'est un projet ambitieux. Il faudrait un immeuble entier pour cela, et un financement conséquent.)

— 알아 … (Je sais. L'argent n'est pas un problème. Ce qu'il nous faut, c'est trouver le bon endroit. Tu es partante ? On pourrait l'appeler « Douni&Nari ».)

Eun-jung regarde son amie sans répondre ; est-elle vraiment sérieuse ? Elle semble y croire pourtant…

………………….

Pendant ce temps, les trois filles sont rassemblées au restaurant Dagayi Sundaeguk autour qu’une copieuse tablée où se mêlent Sundae et Gopchang à peine entamés et cinq canettes de bière déjà vides. Na-ri et Hee-jung tentent de réconforter Dounia à leur manière pour lui faire oublier sa mésaventure.

— 하지만 … (Mais si ! Allez ! Dites-nous que vous êtes une folle harceleuse !), déclame Na-ri, imitant l’animateur radio.

— 근데 … (Mais… Quoi ? Heu oui… Si vous voulez…), bégaie Hee-jung imitant une Dounia timide et perdue.

— 이 … (Quel enfoiré ! Ce journaliste… Il mériterait une bonne baffe !) Puis, posant un gros morceau de foie dans le bol de riz de Dounia : Mange Dounia ! Je tabasse grand con !

— 그는 … (Moi c’est l’autre idiot que je voudrais gifler. Un Bboy ça ? Pfff ! Un pauvre type qui ne se soucie que de sa popularité oui !) Puis, posant un gros morceau de boudin sur le foie : Mange Dounia ! Ton Wing c’est grand con !

Nez dans son assiette, Dounia déjà un peu ivre ne voit pas en face d’elle ses amies se figer soudain de surprise tandis qu’elle tente de prendre la défense du danseur.

— Ani, Ani! Y’a que moi ici qui le connait ! He … (Il n’est pas comme ça !)

— Yes … (Si. J’ai été comme ça et je m’en excuse.), répond une voix d’homme derrière elle.

Dounia se retourne et se lève si brusquement qu’elle manque tomber en reconnaissant Wing qui lui adresse un sourire penaud.

— I should … (J'aurais-dû comprendre tout de suite la mauvaise intention de ce mec. Je n’ai pas réalisé à quel point ses paroles pouvaient être blessantes. Je te prie d’accepter mes excuses.)

— Ani, Ani! C’est pas toi qui… This is not … (Ce n’est pas de ta faute !)

Un court silence gêné s’ensuit avant que Hee-jung la première ne réagisse.

— 그는 … (Il n’est peut-être pas si con que ça… Ajumma ! Une autre bière s’il vous plait !)

Puis elle s’adresse directement à Wing en lui désignant la chaise libre à côté de Dounia.

— 앉아서 … (Asseyez-vous et mangez avec nous… Seonbae.)

— 정말 … (Vraiment ? Je ne dérange pas ? On m’a dit que leur Sundae est délicieux ici.), déclare en souriant le danseur tout en s’asseyant prestement sans plus se faire prier. Can … (On peut en avoir d’autre ?)

— 야 … (Hé seonbae ! Vous croyez qu’on est riche ?), réplique vivement Na-ri.

— Do … (Ne vous inquiétez pas ! Je vous invite. Pour me faire pardonner…) 원하는 … (Commandez tout ce que vous voulez.)

Les trois amies se regardent d’un air agréablement surpris… puis prennent un air entendu avant de se lever pour s’incliner à l’unisson avec un grand sourire :

— Daedanhi … (Merci beaucoup ! Seonbae !)

Un peu plus tard, la table est débarrassée de ses plats mais jonchée de nombreuses cannettes de bière vides, surtout devant Dounia. Ivre, celle-ci fixe Wing d’un air énamouré… ce qui a le don d’agacer fortement Na-ri qui lui jette régulièrement des regards noirs. Repus, Wing se laisse aller contre le dossier de sa chaise.

— 네 … (Où sont vos amis ? Ils ont raté un bon repas.)

— 학원 … (Ils avaient des cours de hagwon.), répond Hee-jung.

— 그리고 … (Et vous ? Vous n'y allez pas ? Et on dit les filles plus sérieuses que les garçons…), taquine-t-il.

Les deux jeunes coréennes se regardent ; elles n’avaient jamais vu les choses sous cet angle… Na-ri réagit la première.

— 우리는 … (On n'aime pas le lycée ! Et alors ! Ça fait de nous des délinquantes ?)

— 나는 … (Je n'ai pas dit ça ! Vous semblez un peu rebelles...), se défend-t-il en riant.

— 반란군 … (Rebelles, révoltées, délinquantes... Tu peux nous appeler comme tu veux.), dit Hee-jung qui rajoute, philosophe : 우리 … (On a chacune nos raisons...)

Dounia qui était jusque-là apathique se réveille soudain.

— Révoltées ! Oui ! On est des révoltées de la vie ! S’écrie-t-elle avant de se pencher vers Wing, affalée sur la table, regard dans le vague : Et toi Wing, y’a rien qui te révolte ? Life is … (La vie est pleine de merde !)

-- It's sad you… (C'est triste que vous pensiez cela… Vous êtes jeunes. Vous êtes belles.) 당신은 … (Vous avez le monde à découvrir, toute une vie devant vous !)

Dounia se lève brusquement et le regarde dans les yeux, chancelante d’ébriété.

— C’est vrai ? On est belles ? Toi t’es trop canon…

Elle se penche vers Wing, son visage se rapproche et… elle se retrouve soudain le cul sur sa chaise, brusquement tirée en arrière par une Na-ri furibarde qui vient de faire le tour de la table à toute vitesse.

— 나는 … (Je l’emmène dehors prendre l’air frais !)

Hee-jung regarde en souriant Na-ri entrainer Dounia hors du restaurant en la soutenant.

— 그를 … (Pardonne-lui. Elle est saoule.)

— 괜찮아요 … (Tout va bien. J’espère qu’elle ne sera pas trop malade.)

Elle le regarde un court instant dans les yeux en silence.

— 당신이 … (Je te trouve bien conventionnel. N'y a-t-il pas plus de révolte dans le rap ?)

— 래퍼와 … (Il ne faut pas confondre rappeurs et Bboys. La break dance demande trop de discipline et d’entrainement pour laisser place à la révolte.)

— 조금 실망 … (Je suis un peu déçue… Je ne connais pas vraiment votre monde mais il m’attirait. Je vous croyais sincères, libres…)

— 그렇게 … (C’est dommage que tu penses cela… C’est dans la danse que nous exprimons notre sincérité et notre liberté. Il faudrait venir nous voir pendant un entrainement.)

Il continue tout en écrivant une adresse sur une serviette en papier.

— 우리는 … (On s’entraine tous les jours mais venez de préférence le mercredi après-midi, l’ambiance est plus décontractée.) Puis, lui tendant l’adresse avec un franc sourire : 당신은 …

(Vous serez toujours les bienvenus, même avec vos deux amis trop sérieux.)

— 우리는 … (On passera…), dit Hee-jung, l’esprit déjà ailleurs.

Puis elle se lève et lui dit avec un sourire énigmatique.

— Dounia가 아직 … (Je vais voir si Dounia est dessaoulée. On a encore un truc de délinquantes à faire cette nuit. Salut ! Merci pour le repas !)

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