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San Francisco, 1930

Nous sommes en novembre. J’ai dix-huit ans. Dans six mois, je me marie. Putain de merde ! Je prends ma veste dans le placard. Je sors le sachet de cocaïne. Je n’y ai toujours pas touché. Il me nargue. Je le garde pour la nuit de noces. J’en aurai besoin. Je ne m’habitue pas à ses yeux de hibou. Tiens, au fait, en parlant d’elle, je ne l’ai pas vue depuis un moment. Faut dire, plus je l’évite, mieux je me porte. On ne discute pas quand on se voit de toute manière. Les rencontres se déroulent toujours lors des réunions chez Zio. Je suis occupé à rédiger les rapports. Je me consacre pleinement aux affaires de mon père. Je n’ai pas le temps de me préoccuper d’elle. On ne peut pas forcer deux personnes à s’aimer. Si ? Tout m’agace. J’ai besoin de me défouler. Je m’amuse, je déconne, je ni… Je rencontre des jeunes femmes.

Un après-midi, je me fais griller par le padre Vitali. Il n’apprécie pas mes relations sans lendemain. Bah quoi, je m'entraîne pour sa fille ! Ça ne lui a pas plu. Mon père m’a giflé. C’est lui qui a mis fin à ma dernière relation d’ailleurs. Je sortais avec une femme du nom de Lucia, au style tape à l’œil. Robe rouge moulant ses formes pulpeuses et sa taille de guêpe. Lucia était une ex de Milo, mais ça, je l’ai su plus tard. On s’est croisés par hasard sur Montgomery Street. Elle s’accrochait à mon bras, comme un chat, voyante dans sa robe vert pomme et moi, élégant dans mon costume noir et chapeau Stetson. Milo, lui, est arrivé dans sa salopette en jean. Il nous a reconnus. Il a pété un câble. Nous nous sommes disputés. Il m'a reproché de sortir avec son ex, mais aussi de l'avoir laissé tomber pour son problème avec les Spinelli. Il a tout perdu.

Mon père passait par là avec ses hommes. Je doute que ce soit un hasard. Il m’a séparé de Lucia. Elle ne s’est pas remise avec Milo pour autant. Mais lui, était ravi. Même si notre relation n’était basée que sur le sexe, je n’ai pas supporté que Marco s’en mêle. Et surtout pas face à Milo. Je n'ai pas aimé perdre sur ce coup-là. Le soir venu, j'ai défoncé la gueule de Milo. Je n’ai pas oublié ses insultes. Moi aussi, je peux être rancunier.

Ma mère a honte de moi. Je donne une mauvaise image de ma famille à Vitali. Elle m’a sermonné. Terminé mon comportement de donnaiolo*. Il était temps que je devienne sérieux, pour reprendre les termes de mon père. Je devais aussi arrêter mes conneries, pour être bien vu de mon frère et de sa future belle-famille.

Mon père a décidé de célébrer nos unions la même année. Alberto se mariera le 20 mars 1931, avec Prisca, une italienne un peu rondelette, fille du consigliere Costa. Date du premier jour du Printemps. Bien plus poétique que la sainte Rita. Contrairement à moi, il aime sa femme. Il déverse des niaiseries à longueur de journée à en vomir. Je soupire. Je n’ai pas mon mot à dire.

* Donnaiolo = Coureur de jupons

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