Chapitre 8 : Pandémonium

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Ezra était mon unique chance. C'était le seul susceptible de me venir en aide. Je tournai les talons pour aller me faufiler dans sa « demeure », m'évertuant à faire le moins de bruits possibles. Sa chambre n'était pas gardée. Estimant qu'il n'était plus un danger pour personne, ses geôliers ne lui avaient même pas accordé la considération d'un garde. La porte de sa cellule était fermée uniquement de l'intérieur, n'importe qui pouvait y rentrer.

Il était là, allongé au centre de la pièce à attendre paisiblement la mort. C'est à peine s'il remarqua mon entrée.

– Te revoilà déjà en ces lieux. Tu as décidé de prendre un arrêt maladie ? Il termina son propos d'un ricanement sarcastique.

Trop de choses à lui dire en si peu de temps... Pas assez pour lui hurler ma colère vis-à-vis de sa « clé », pas assez pour lui demander des explications sur la raison qui l'a poussé à cacher une bombe, pas assez pour partager mon expérience souterraine.

– Je vais sortir d'ici et tu vas m'y aider.

Jamais je n'avais été aussi vindicatif, jamais mon ton n'avait été si coercitif.

– Ah bon ? Encore ?

A nouveau, le même ricanement.

Tu devrais abandonner, l'espoir est le confort des naïfs. Accepter la fatalité, voilà le vrai courage.

La gravité de sa voix laissait entendre que l'homme en face de moi n'était pas seulement meurtri mais bien brisé. C'était la première fois que je l'entendis parler avec sincérité, probablement la dernière également.

– Ces quelques jours m'auront appris que le vrai courage apparaît quand l'espoir n'est plus. Permets-moi de t'en faire la preuve par un exemple concret.

Je n'avais jamais brutalisé personne, je ne saurais dire si l'on pouvait considérer cette action en tant que telle. L'urgence de la situation me fit outrepasser mes barrières morales, balayer ma culpabilité d'agir à l'encontre de sa volonté et simplement foncer. Quoi qu'il en soit je le saisis, , pour le placer sur mon épaule, le portant comme un vulgaire sac à patates.

M'étonnant de son faible poids et malgré les difficultés que ma blessure à la main occasionnait, Ezra était si léger que ce fut d'une facilité déconcertante,

Enlever ses bras, ses jambes, quelques organes. Finalement, que restait-il de cet homme ? Quand ils ont prélevé tout ça, ont-ils également prélevé sa moralité, ou l'avait-il déjà perdu avant ? Cette légèreté que je ressens en le soulevant est-elle coutumière de ceux qui ont tout abandonné ?

Une longue sonnerie stridente retentit. Ça ne pouvait être que la fin de la pause déjeuner.

Des gardes allaient débarquer de partout sans que je ne puisse anticiper quoique ce soit, surtout avec Ezra sur l'épaule. Il n'y avait plus une minute à perdre. Mon cœur battait désormais au rythme du bruit des bottes... Que ce soit celle des contremaitres, des gardes, des ouvriers, tout était synonyme de danger.

Ma seule issue était de foncer dans la salle commandant l'ouverture des portes, me cacher là jusqu'à attendre le moment propice.

J'avais depuis longtemps perdu le fil dans le compte à rebours de la bombe. Les obstacles ne faisaient que s'amonceler, la situation commençait à échapper à tout contrôle, malgré cela je traitai ces problèmes comme je l'avais fait pour tous les précédents, l'un après l'autre.

Je pris une profonde inspiration pour me gorger du courage.

Chaque bruit de pas était synonyme de danger et partout il résonnait. Chaque écho ricochant dans ma direction plantait un clou de plus à mon cercueil. Supplicié par mes peurs, au bord de l’effondrement, je me sentis contraint de changer de stratégie.

Au diable la discrétion, place à l'audace.

Je pris une mine déterminée, une démarche pressée, j'espérais me fondre dans le décor en apparaissant comme un livreur de viande.

S'ils remarquent mon uniforme, je suis foutu.

Je portais Ezra de sorte à camoufler un maximum les éléments distinctifs de ma combinaison. M'exclamant bruyamment par de fastes « poussez-vous », « dégagez », bousculant quiconque se dressait sur mon chemin.

Curieux sentiment que de jouer la comédie dans des conditions pareilles. J’étais comme l’acteur principal d’une pièce de théâtre, essayant de jouer mon rôle alors même que je sentais la caresse froide du canon d'un révolver sur la nuque. Prêt à m’abattre à la moindre erreur de jeu. Envahi par l’adrénaline, ragaillardi par un frisson m'invitant à danser débridement avec la mort.

Nous arrivâmes dans la salle sans être plus inquiétés. Enchainant le regard méfiant d'un garde zélé prenant son poste aux grommellements d'exaspération de quidam que je bousculais en m'élançant à toute vitesse.

- Désolé, je travaille là

Cette phrase suffisait à faire fuir tout soupçon. C'était dévoilé aux yeux de tous que nous étions le mieux caché.

Arrivé dans la salle des commandes, je posai Ezra sur une chaise.

– Je t'installe aux manettes et tu m'ouvres dans 30 secondes

Je n'attendis pas sa réponse, alors que je fis demi-tour pour retourner au sas de décontamination, je fus surpris de découvrir qu'un employé me barra la route, je ne lui laissai même pas le temps de réagir.

– C'est à cette heure-ci que vous arrivez ? Agent Tempès, de l'unité d'inspection du travail, nous réalisons une opération de routine afin de contrôler l'état d'usure des machines, veuillez patienter dans le couloir en attendant la fin de l'analyse.

L'audace est la clé qui ouvrira les portes de mon caveau. J'ignorai si le mensonge était devenu une seconde nature chez moi, toutefois je n'en avais cure et avais pris mon ton le plus persuasif.

– Et je fais quoi moi, en attendant ?

J'haussais les épaules.

– Qu'est-ce que j'en sais moi... j'ai du travail.

J'insistais lourdement sur ce dernier mot d'une manière presque triomphal, un brin hautain puis tournant la tête vers Ezra lui glissa :

- Allez, Roger, lance l'opération.

De sa seule main valide, Ezra enclencha le processus de décontamination, l'employé ne broncha pas, il se mit sur le côté du couloir, m'ouvrant la voie en soupirant.

– Vous en avez pour longtemps ?

– Le temps qu'il faudra. Plus vous me parlez, plus ce sera long.

Les bruits de pas s'étaient un peu tassés, les seuls restants devaient, à coup sûr, être ceux des gardes de patrouille. J'entendais l'écho sourd des bottes claquant le sol se rapprocher. Chaque répercussion approvisionnait ma paranoïa, comme si chaque résonance dégageait une fumée qui, allant s'infiltrer dans mes oreilles, venait me susurrer : « tu vas mourir, maintenant ».

Sillonner ces couloirs pendant un bon quart d'heure m'aura permis de bien cartographier les lieux, je pouvais identifier que deux patrouilles de gardes allaient se croiser à ma position dans moins de dix secondes. Et l'autre, le technicien qui a cru à mon imposture, suspectait-il ne serait qu'une once de ma mascarade désespérée ?

Les escouades s'entrecroisèrent devant une porte fermée.

Au vu du système mis en place, l'endroit ne pouvait être que totalement insonorisé. Je tombai à genoux, contraint par d'ardentes suffocations de tétanies lorsque la porte du sas se referma derrière moi. Un instant d'une intensité, d'une euphorie, d'une libération tellement enivrante que seules les larmes sauraient y répondre.

Mes premiers pas dehors furent comme ceux d'un nouveau-né, aveuglé par le soleil et rampant hasardeusement pour me mouvoir, encore incrédule de l'exploit que je venais d'accomplir.

Je n'en revenais pas.

J'avais vaincu. Leur système aussi barbare que sophistiqué n'était pas infaillible. Reprenant péniblement mes esprits, j'enjambai désormais avec aisance et une certaine félicité le terrain escarpé des Terres Mortes, lugeant de cratère en cratère avec un enthousiasme guilleret.

– Gagné ! Sorti ! Fini ! hurlais-je, effrontément.

En cet instant, le temps se figea. Ma nuque se raidit et tout mon corps se paralysa comme si je pressentais un danger.

Une onde de choc surpuissante secoua la terre, sans qu'aucune explosion ne s'imposât à mon regard. Je remarquai qu'elle fit disjoncter tout système électrique sur des kilomètres à la ronde.

Je pus vérifier que les yeux de ma combinaison s'illuminèrent avant de s'éteindre, témoignage s'il en était de la présence de caméra en elle. Mes frères contemplaient donc mon voyage depuis le début, jamais ils ne m'avaient abandonné.

Je regardai la porte avec la conviction que mes ennemies étaient bloquées à l'intérieur. C'était un instant magique... Après une impulsion électromagnétique suit un silence éloquent, un moment de tranquillité suspecte, annonciateur de trouble.

La terre trembla, secouée par le fracas de multiples éboulements sous-terrain qui ne fit que raffermir mon envie pressante de courir. Quelques secondes plus tard, je fus alerté par un vacarme lointain, je fis volte-face pour découvrir un nuage de sable se former à l'horizon. C'était comme si une tempête était en train de se constituer sous mes yeux. Aux pieds de cette fumée, j'aperçu une forme dont je ne pouvais que deviner les contours qui arriva à toute vitesse, droit dans ma direction.

Mes frères ! Ils sont là ! Ils viennent pour me tirer de ma torpeur !

Épris d'enthousiasme de toujours être en vie, je courrais en direction de mon salut. Ça ne pouvait être qu'eux, ils ne pouvaient qu'avoir répondu à mes suppliques, ils ne pouvaient ignorer mes lamentations. La fin de mon calvaire était juste là, à quelques kilomètres à peine.

La vitesse de mouvement de ce phénomène, couplée à ses dimensions cataclysmiques me fit douter, je ne savais pas réellement si je devais courir vers eux ou fuir.

Ce fut en tendant l'oreille que l'illumination me vint, comme un bruit de terre piétinée, pire que cela non... Grignotée de l'intérieur. Ce n'était ni le son d'un véhicule humain ni le sifflement des vents en furie.

Concentrant ma vision sur la base de la fumée, je finis par comprendre mon erreur. En son seuil, au fur et à mesure de sa progression, un profond sillon se creusait. La trajectoire parfaitement rectiligne de la tempête ne laissant planer aucun doute. Ce n'était pas un phénomène naturel, spontané, la chose se dirigeait droit sur l'origine du bruit. La « bombe » d'Ezra n'était qu'un écran de fumée, un hors d'œuvre pour mettre en appétit. L'évènement majeur c'était cette indescriptible cicatrice qui se dessinait à la surface de la Terre, comme si la terre se labourerait d'elle-même.

En fronçant les sourcils et en plissant les yeux, les alentours se découpèrent avec plus de précision. Je pus distinguer par moment les contours élégants d'un fourmillement de cafards. Le peu que je voyais à la surface constituait probablement une escouade d'éclaireur, je les observais avec attention. Certains avec leurs ailes déployées planaient à hauteur d'homme, scrutant les environs. D'autres comme autant de phalanges en formation, de manière parfaitement synchrone, comme si cette masse ne formait qu'une seule entité uniforme. Là encore, je sus instinctivement que ce ne fut pas le gros des troupes, le reste m'était invisible. Pourtant, je devinais facilement que cette armée n'était que la partie émergée de l'iceberg. J'avais beau ne pas les voir, je pouvais entendre que la majorité des cafards étaient présent en sous-sol... ils creusent la terre pour bientôt cultiver la mort.

Cette fois-ci, ma volte-face fut émotionnelle.

Je me souvins des paroles de mon ami cyclope : « Insecte égal danger, mort. Si toi vu par insecte toi mort. Toi et tocards autour de toi morts. Tous morts. »

– Je ne suis pas sauvé, je n'ai jamais été autant en péril.

Cette myriade de pattes d'insectoïdes battant le sol, sonnait comme une oraison funéraire, un appel à se mettre à l'abri.

Comment faire pour échapper à ça ? Me cacher ? Fuir ?

Ce bruit... La logique va les pousser à enquêter sur la source sonore la plus forte, c'est pour ça qu'ils sont autant, pour faire face à quiconque aurait émis un vacarme pareil. Ils ne devraient pas faire attention à moi... Je vais partir dans la direction opposée, qu'ils se régalent de ces cannibales réactionnaires. Je retournerai chez les miens, tant qu'il me reste de l'oxygène, tant que je suis encore en vie pour le raconter.

Pressé dans ma course, je m'interrompis pour jeter un dernier coup d'œil à la station.

– Ezra, tu es sans conteste la personne que j'ai le plus aimée et détestée successivement, je ne sais pas si l'on peut dire que j'ai été ton bourreau comme tu l'entendais, je suis toutefois heureux de ne pas t'avoir dévoré. Meurs avec tous les autres, mais.... Merci quand même.

Après une demi-heure de marche, caché par la hauteur d'une dune, je fis l'inventaire des ressources à ma disposition. De tous les équipements qu'il me resta dans un état fonctionnel, j'avais donc une boussole, une demi-journée de vivres et une détermination vacillante.

Les cafards arrivaient du nord-est, le dôme était à l'est, je vais les contourner par le sud-est. Cette trajectoire en cloche devrait m'assurer un trajet rapide sans trop d'encombres.

Passé six heures de marche, je marquai un temps de pause, ma main m'élançait de douleur comme jamais auparavant, je vis des cloques purulentes formées autour des contours violacés de ma plaie. J'étais épuisé.

Il me fallait résumer la situation.

Rien pour faire du feu, pas de quoi faire un campement de fortune, pas de quoi manger, pas de quoi boire, rien à appliquer sur ma plaie.

Pas de solution, pas de problème.

Rétrospectivement, je me fis la réflexion que ce fut plus facile que je ne l'aurais cru de sortir de l'antre des cannibales.

Je suppose que la plupart d'entre eux sont nés là-bas et se résignent face à leur seul choix de vie, n'ayant probablement aucune envie de trouver la mort ici. Au fond...Qu'est ce qui est préférable entre un enfer solitaire ou un enfer collectif ?

Je me pris de curiosité pour mes anciens « camarades » et jeta un coup d'œil derrière moi :

Le nuage avait disparu, le sillon gargantuesque laissé par le passage des cafards perdurera. C'était comme si cette partie du désert était en chantier. Une épaisse trainée de fumée noire s'échappait de la station.

Je me demandai comment les insectes donnaient la mort, comment ils nous consommaient, j'étais convaincu que leur manière de tuer était paradoxalement plus humaine que ces forçats anthropophages.

Si j'en croyais le discours de mon ami cyclope, personne n'en réchapperait vivant.

Ami... oui probablement enfin s'il est toujours en vie. Rien n'est moins sûr en ce monde.

C'était amusant de repenser en priorité à lui plutôt qu'au dôme. Je n'en revenais pas d'imaginer qu'ils pouvaient avoir tout vu et tout entendu, cela me terrifiait. Allaient-ils seulement m'accepter de nouveau chez eux ?

Retournes-y, tu verras bien, c'est eux qui m'ont abandonné, pas l'inverse.

Retournes-y, c'est à eux de s'excuser de m'avoir laissé captif, à la merci de milles dangers.

Qu'est-ce que c'est que ce voyage, où ma vie n'a fait qu'être menacée en chaque instant ?

Je réclamais la nouveauté, j'héritais de la paranoïa.

Je repris ma course pendant deux longues journées. Sans boire ni manger, je ne me souvins plus de la fin de mon périple... Des fragments de mémoire délabrés furent les seuls témoins attestant de la réalité de mon voyage. Simplement moi, la sensation du fracas de mon corps s'écrasant à répétition sur le sable. Je me souviens juste m'être effondré une ultime fois, à bout de souffle à proximité de ce que j'imaginais être le dôme.

Il me semblait m'être assoupi quelques instants après une énième chute pourtant... Quand je rouvrais les yeux c'était comme si je m'éveillais à une nouvelle vie.

Je sus dans la seconde que j'étais rentré. Était-ce la pureté de l'air ? La décoration absente de cette salle ? Même sans avoir remarqué l'œil énorme surplombant la tête de lit. J'étais persuadé que j'étais chez moi.

– Félicitation Zachary.

Mon regard se braqua à la source du son, une personne était présente à mon chevet, mon professeur de philosophie.

– ...

Je tentai de répondre, mais cela devait faire un certain temps que j'étais dans cette pièce. Mes lèvres se mouvaient, mais rien ne s'en échappait. Pas même les borborygmes, les raclements de gorges roques, des sons balbutiants communs à toutes personnes sortant du coma.

– N'essaye pas de parler, cela ne servira à rien. Tu es pour l'heure condamné au mutisme par la haute autorité de la Noire Candeur. Avant que l'on ne décide si oui ou non tu retrouveras l'usage de la parole, tu vas devoir m'écouter. Prends ton temps, digères ce que je viens de te dire puis clignes des yeux trois fois d'affilé de l'œil gauche quand tu seras prêt.

Je ne suis chez moi nulle part, déjà rentré que je rêverais d'en sortir ? Ma vie ne sera-t-elle rythmée que par la déception que m'inspirent mes pairs et par de perpétuelles évasions ?

Après quelques minutes, je lui adressai donc ces trois clins d'œil.

– Maintenant que tu es calmé, permets-moi à nouveau de te féliciter. Beaucoup partent, peu reviennent.

Il prit une profonde inspiration.

Non tu n'es pas un cas isolé, il y en a eu d'autres, beaucoup d'autres. À ton air surpris, je parie que tu te demandes quelle société enverrait régulièrement ses enfants à la mort. Une société au bord du gouffre. Nous sommes autosuffisants pour un environnement d'une centaine d'individus, pas plus, pas moins. Quand nous rognons sur ce chiffre, nous devons prendre des mesures drastiques, quand nous rognons sur ce chiffre c'est tout notre mode de vie qui est menacé.

Son ton ne manifestait d'aucune joie, d'aucune peine, il avait assimilé ce discours comme d'une réalité inaliénable de laquelle on ne pouvait échappait.

Nous envoyons certaines personnes dans les Terres Mortes pour établir des communications avec d'autres dômes, cela peut également être pour collecter des ressources, explorer, échanger, et j'en passe... Quoiqu'il soit nécessaire de faire et de suffisamment létal pour les choisis.

Incapable de hurler ma colère, cette dernière du se traduire dans l'expression de mon visage.

N'oublie pas, nous ne les envoyons jamais dans ces missions périlleuses vainement. Mortel pour les choisis, salvateur pour les résidents. Oui c'est immoral, toutefois quand on ne peut plus faire autrement, qu'est-ce qui relève encore de moral ou de l'immoral quand la survie de tout un peuple est menacée ?

Les dents serrées, les poings crispés, je mobilisais la totalité de mon esprit à réprimer mon envie de me jeter sur Aquifolius, mon professeur.

C'est une décision dure que l'on impose aux élus, peu reviennent, la plupart meurent, d'autres ont fait le choix de vivre en ermite dehors. Ceux qui parviennent à rentrer reviennent en héros. Tous ceux qui rentrent ont cependant eu une décision à prendre, tu ne feras pas exception. Comme tu l'auras peut être remarqué, nous suivions pas à pas ta progression, tout ou presque a été enregistré. Tu as le choix suivant :

Montrer tout l'enregistrement de tes « aventures », toutefois tu demeureras dans le mutisme à tout jamais

ou

Nous laisser enterrer cela et retrouver la parole.

L'espace d'un instant, ma rage se tut.

Inutile de dire que si tu n'étais pas au courant, c'est que strictement tous tes prédécesseurs ont choisi la seconde option.

C'est ça oui... Ou bien je n'étais pas au courant parce qu'on les a exilés, ou pire.

La première option révèlerait à tous comment nous procédons, sur quoi est basé notre système.

Tu te doutes bien des répercussions que peut avoir ce genre de nouvelles, c'est le type d'information qui a le pouvoir de déclencher une révolution... Cette révolte pourrait bien signifier la fin de notre civilisation. Tu as vu comment ça se passe dehors, tu ferais courir le risque au dôme, à tous tes frères, de se transformer en un monde de sauvage comme tu as pu en découvrir ?

Ce doit être un cauchemar. Ce n'est pas possible. Je serais contraint de me taire pour préserver mon peuple de ses bourreaux de dirigeant ? Ces mêmes tyrans qui nous envoient à la mort ?

Voici ton choix : Ou tu prends sur toi, tu refoules au nom du bien commun, ou tu considères que cette vérité est plus précieuse que la survie de tous tes frères.

Le premier choix assure ta sécurité, le second garantit l'imprévisible.

Je fusillais Aquifolius du regard, je sentais qu'il n'était pas le seul responsable de mes maux, qu'il y avait une dimension systémique à cet enfer, pourtant en cet instant il était le seul à haïr.

Une dernière fois : Le premier te conduira à devoir assumer l'ensemble de tes actes, sans pouvoir prendre la parole pour te défendre. La seconde, tu n'auras qu'à vivre, mieux que cela, tu feras partie des instances dirigeantes du dôme. Je t'en dirais plus le cas échéant.

Il me regarda d'un air qui semblait sincèrement compatissant.

Pour le moment, tu es encore faible, je reviendrais dans quelques jours écouter ta réponse. En attendant, repose-toi bien, mais surtout réfléchis à chacun des choix et aux conséquences qu'il impliquerait.

À bientôt, Zachary, quoique tu décides, je suis déjà fier de toi.

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