Chapitre 26 : Entre retrouvailles et manigances

26 minutes de lecture

Le roi du dôme me jeta un dernier regard d’un air impassible.

-Je te dois beaucoup, Zachary. A très bientôt.

Sans attendre son reste, il claqua la porte de ma cellule qu’il referma à clef. Cette isolation allait me permettre de faire le point sur tout ce que je venais d’apprendre. Une nouvelle dépassait largement les autres par le soulagement qu’elle me procurait.

Il est en vie. Cyclope est en vie. Tout n’est pas perdu…

Je portais en moi la culpabilité de l’avoir entraîné avec moi. Jamais je ne me serais remis de son deuil. Au-delà de cela, c’était la seule personne qui avait su me cerner, même avant que l’on use de télépathie. Même si le fardeau de ma peine s’était allégé en apprenant la nouvelle de sa survie, j’étais toutefois inquiet de son sort. Sa condition n’avait pas l’air bien plus enviable à la mienne.

Notre futur allait dépendre de la volonté de Radicor.

Radicor…

Dans ce dernier échange télépathique, je m’étais essentiellement concentré sur le dôme des deux sens et bien peu sur lui après tout. Je voulais en apprendre plus sur les us et coutumes d’ici avant de déterminer à qui j’avais affaire. Les Radicor en charge de diriger les dômes avaient tous été élevés selon un paradigme spécifique. Celui du dôme de l’œil suivait des principes d’une extrême sévérité, celui de l’ouïe avait façonné activement son éducation en synergie avec son tuteur. Il restait donc un Radicor à qui l’on n’avait jamais rien refusé et un autre qui devait survivre entièrement par lui-même.

Je présume au vu de son titre, de son opulence et de ses incertitudes qu’il s’agit du Radicor hédoniste. Son penchant pour la manipulation, son incapacité à faire confiance à l’autre me tend vers cette hypothèse.

J’ignore pourquoi je l’avais tant sous-estimé. Je l’avais même trouvé sympathique. Son apparence, sa fausse jovialité ou simplement ce regard fuyant m’a leurré. Tapis dans l’ombre se cachait un monstre que sa culpabilité avait su domestiquer.

Malgré moi, j’avais détaché la muselière de sa psyché. Désormais, le dôme des deux sens retrouverait son dirigeant. Etait-ce seulement pour le mieux ? Je n’en avais aucune idée.

Pardonne moi Cyclope, comme au dôme de l’ouïe, j’ai peur que mes actions n’aient des conséquences désastreuses pour l’avenir des Terres Mortes.

Ces deux évènements m’avaient déjà profondément marqué, pourtant ils ne sauraient éclipser ce que j’ai pu apprendre du roi du dôme. Abiotos était en vie et il commandait à l’esprit de tout une ruche. S’il m’était donné l’opportunité de rencontrer le scientifique, je pourrais enfin comprendre le fonctionnement des cafards et permettre aux hommes de se protéger de cette menace. Peut-être même pourrait-on bâtir une société sur le modèle des cafards ?

Pourquoi demande-t-il un tribut ? Que cherche-t-il à faire ? Fait-il des expérimentations sur l’homme ? Ou s’agit-il seulement de nourrir la ruche ?

Est-il toujours sain d’esprit ?

Cyclope et moi abordions par le passé le sujet de l’Imponere en termes de menace. Comparé à ce qu’Abiotos incarnait, il s’agissait à présent d’un amuse-bouche.

Toutes ces nouvelles m’avaient épuisé, aussi, après avoir fait le point sur tout ce que je venais d’apprendre, je décidais de prendre du repos.

Je fus tiré de mon sommeil par des cliquetis au niveau de la porte de ma cellule. Deux gardes firent irruption dans le cachot.

Immédiatement en signe d’obéissance, je détournai mon regard du leur et me mis à genoux. Je tendis mes poignets vers le haut afin qu’ils me menottent et me hissent en dehors de ces lieux. Je ne dis mot, de peur qu’ils utilisent cela comme prétexte pour me lyncher.

Un des soldats se gaussa de ma soumission.

-On dirait bien que les vieilles méthodes marchent encore plutôt bien… Qui a dit que la prison ne servait à rien.

L’autre militaire ricanait en chœur alors que les deux me saisirent par le poignet pour me traîner dehors. Mes genoux raclaient contre le sol, la peau de mes jambes râpant contre le sol me faisait le plus grand mal, pourtant je faisais mon possible pour étouffer tout gémissement de douleur. Instinctivement, je maintenais mes yeux baissés, je ne voulais croiser le regard de personne pour n’avoir personne à haïr.

Ils me tirèrent pendant ce qui m’apparut comme une éternité. Je me focalisais sur ma douleur pour ne pas penser à mon égo.

Mon « escorte » me mena à l’extérieur un court moment, je ne prêtais aucune attention aux réactions que nous pouvions susciter. Je sentais que mes jambes étaient en sang à force de frotter contre les différences surfaces au sol.

Je su que nous arrivâmes à destination lorsque les gardes me lâchèrent. Les deux gardes firent coulisser une porte dont je devinais l’immensité à la difficulté qu’ils avaient pour l’ouvrir.

Quand ils eurent terminé, un soldat me jeta à l’intérieur sans ménagement puis les deux entreprirent de fermer la porte derrière moi.

Enfin je redressai la tête pour admirer les environs.

Un espace démesurément grand doté d’une atmosphère bleutée, des bancs de messe, un autel. Je connaissais déjà les lieux. Je me relevais péniblement alors que mes jambes me faisaient encore un mal de chien. Ma démarche erratique devait me donner des airs de parias, la douleur me faisait boiter pourtant je parvins à me trainer au niveau de l’autel. Je n’y avais pas prêté attention pourtant il régnait un silence religieux, il semblait n’y avoir personne.

Je tentais de tempérer mes espoirs, au cas où Cyclope ne soit plus là. Pourtant mon cœur se refusait à la raison et voulait trop y croire.

Tu ne sais pas ce dont est capable Radicor, il t’a peut-être fait espérer pour mieux te décevoir.

Je gravissais les dernières marches qui me séparaient de l’autel quand finalement je le vis.

L’espace d’un instant, je contemplais le géant à la peau diaphane comme lors de notre première rencontre. Pourvu, d’un œil cintré au sommet de son nez, c’était une montagne de muscles qui pouvait insuffler de la frilosité chez les plus braves. Les radiations avaient façonné son être autant que ses géniteurs. En plus de sa taille exceptionnelle et de son teint de peau anormalement laiteux, on pouvait observer au niveau de sa poitrine les contours d’une protubérance palpitante qui ne pouvait être que son cœur, dont les pulsations ostensibles inspiraient un certain malaise. Il était paisiblement assis sur un trône qui devait avoir été façonné sur mesure pour pouvoir l’accueillir. Il arborait un air morne et triste qui ne lui était pas coutumier, pourtant je savais que derrière ce désespoir se trouvait mon fidèle ami.

Il soupirait, d’ennui probablement, quand subitement nos regards se croisèrent.

Instantanément son expression comme la mienne se figea.

Cyclope se leva de son siège alors que je faisais mon possible pour tituber jusqu’à lui.

La pièce résonnait désormais d’un silence qui portait le poids de notre amitié. L’émotion inqualifiable qui nous saisissait l’un et l’autre ne saurait ressortir par des mots.

Je sentis que mon ami voulait se jeter contre moi pourtant ses attaches lui interdisaient la manœuvre. Je découvris tout une série de liens dont la longueur laissait à peine l’opportunité à mon ami de s’écarter du trône. Ses poignets étaient menottés au siège, on avait également jugé utile de fixer à même la peau des arceaux de métal au niveau de ses épaules et de son dos pour y faire passer des chaînes qui interdisaient au tocard de s’éloigner de plus de trois pas du fauteuil.

Je pris un moment avant de saisir la vision qui s’offrait à moi. Dégouté mais curieux, j’observais mon ami géant, enchaîné de manière barbare à ce trône.

Qu’est-ce qu’ils ont voulu faire avec lui ? C’est une coutume religieuse qui les a poussés à réaliser ça ? Ou c’est … artistique ? Une métaphore du pouvoir qui enchaîne l’esprit des dirigeants ?

Je mis mes réflexions de côté pour m’approcher avec une lenteur solennelle de mon compère. Il me fallut rassembler tout mon sang froid pour garder mes moyens, me retenir de me jeter immédiatement dans ses bras.

Une part de moi considérait que la tenue était la mesure de l’humanité, aussi, je prenais un malin plaisir à maîtriser mes émotions.

Arrivé à portée d’accolade, je me maintiens droit face à lui puis lui lançait d’une voix digne.

-Cyclope

Un sourire amusé aux lèvres, il me répliqua.

-Zachary.

Un instant plus tard, j’armais mon poing pour lui décocher une droite qui, contrairement à ce que je dégageais, fut chargée en émotion. Je vis l’empreinte de mes phalanges marquer ses joues et le sourire de mon compère s’élargir encore.

De mieux en mieux, mon ami, de mieux en mieux.

Je le regardais droit dans les yeux, je ne contractais aucun de mes muscles, espérant recevoir de plein fouet la douleur qu’il allait m’infliger. Je ne fus pas déçu. L’impact ne manqua pas de déraciner mes pieds du sol. Son poing foudroya ma joue avec une telle intensité que ma tête suivit la trajectoire de sa frappe. Je sentis dans son coup toute la puissance de son affection, toute l’émotion qui l’étreignait également. Je me massais les joues en ripostant d’un large sourire.

-Content de te revoir mon ami, je pensais que tout était perdu…

J’abandonnais mon flegme pour me jeter dans ses bras.

Merci d’être en vie.

Il plaça ses bras sur mes épaules pour appuyer nos retrouvailles d’une étreinte fraternelle.

-Tout le plaisir est pour moi.

Je baissais la tête pour fuir son regard.

-J’ai cru devenir fou…

Cyclope me repoussa légèrement pour observer mon visage.

Je pensais t’avoir perdu également. Je me suis maudit de nous avoir fait courir le risque de cette traversée. C’était bien trop dangereux.

Nous savourions tous les deux nos retrouvailles quand Radicor fit irruption dans la salle. Il avait dû emprunter un passage dérobé puisque ni moi ni Cyclope n’avions remarqué son entrée.

Le commandeur du dôme était maquillé d’un fond de teint blanc, pourtant on avait pris soin de rosir très légèrement ses pommettes de sorte à ne pas lui donner des airs malades. Il était vêtu d’un pourpoint élégant dont les motifs à rayure formé de bandes blanches, bleutés et dorés lui donnaient une certaine élégance. Le col de son veston dépassait largement son menton, il laissait entrevoir ses joues potelées mais ne cachait rien de son sourire. Son pantalon bouffant couleur pourpre grossissait ses jambes pour jeter le doute quant à sa corpulence. En réalité son embonpoint lui donnait une certaine majesté, une certaine grandiloquence. À bien des égards, ses vêtements le grandissaient, pourtant je ne parvenais pas à me sortir de l’idée qu’il n’était rien d’autre qu’un support pour l’élégance, que derrière ne se cachait qu’un homme lâche, vulnérable mais manipulateur.

-Navré d’interrompre ces charmantes retrouvailles mais j’ai à vous parler.

Cyclope se détacha de moi pour jeter un regard au roi du dôme.

-Vous êtes ?

Radicor avait regagné toute sa stature, derrière un air amusé, son visage luisait de malice et d’arrogance.

-Je suis Radicor, le dirigeant suprême du dôme des deux sens.

Rassuré par la présence de Cyclope, je me sentais désormais plus libre, détaché de la culpabilité et de la solitude. Je foudroyais le roi du dôme du regard.

-Nous venons à peine de nous réunir que vous interrompez déjà nos retrouvailles.

Radicor laissa s’échapper un pouffement de rire hautain.

-N’oubliez pas que ces « retrouvailles » n’aurait pas été possible sans moi.

Je soupirais alors que le tocard reprit le pas.

-Quant à moi, je suis Cyclope, l’élu des…

Le roi du dôme l’interrompit sans ménagement.

-Je sais qui vous êtes, élu des mers. Il est difficile de ne pas entendre parler de vous. Votre arrivée est salutaire, vous êtes une distraction toute trouvée pour attirer l’attention du peuple sur des choses … disons superficielles.

Radicor était certes désagréable mais ma colère était démesurée par rapport à ses actes. Ce n’était pas simplement son irruption entre moi et Cyclope ou même sa condescendance naturelle mais plutôt que j’étais à l’origine de cet orgueil décomplexé. J’étais énervé, certes mais surtout contre moi-même.

D’un ton acerbe, véhiculant mon mépris, je repris.

-Bien sûr, tu es là pour annoncer notre libération, ô commandeur du dôme ?

Le roi ne prêta même pas attention à ma remarque et poursuivit.

-Quand j’ai provoqué votre réunion, ce n’était pas simplement par … altruisme. J’ai besoin de vous. Tous les deux, vous allez gagner votre libération en échange d’un petit service.

Petit service… c’est ça. Prends-moi pour un imbécile.

Cyclope enchaina d’un air désabusé.

-Nous vous écoutons.

Radicor planta son regard sur Cyclope et prit une longue inspiration.

-Mon dôme est menacé par un danger que vous avez déjà pu observer. Une fois par semaine, nous devons payer un tribut, une vie humaine, auprès d’une ruche de cafard. Derrière les blattes se cache un homme que vous avez déjà « rencontré », Abiotos. Ma demande est simple : Neutralisez-le et vous serez tous les deux libres.

J’éclatais de rire avant de reprendre.

-Rien que ça ? Un petit service, tu dis ? Tu ne veux pas aussi que l’on supprime toute radiation de la terre ou qu’on apporte la paix dans le cœur des hommes, tant qu’on y est ?

Toute facétie disparu de l’expression de Radicor. Les traits de son visage affichaient désormais un air résolu et implacable. Ce n’était plus un manipulateur qui se jouait des hommes mais un dirigeant prêt à tout pour sauver son peuple.

-Aucun de vous deux ne possède de puces. Si l’un de vous deux devient le prochain tribut, Abiotos n’y verra aucune différence, ce qui vous laisserait le champ libre pour intervenir.

Cyclope protesta.

-Vous voulez que l’un d’entre nous y aille seul ?

Radicor afficha un sourire sardonique aux lèvres.

-Pensiez-vous que j’allais vous libérer tous les deux, simultanément ? Vous laisser dans la nature pour me reposer sur votre bonne foi afin de réaliser cette mission ? Non… évidemment que non. Vous irez, un par un. Si le premier échoue et meurt, le second pourra retenter la semaine suivante.

Le roi du dôme poursuivit son discours en manifestant un effroyable pragmatisme.

Dans tous les cas, cela apaisera le peuple de ne pas avoir à se sacrifier pendant deux semaines. Cela offrira une bouffée d’air frais à tout le monde. Et dans le cas d’une réussite, vous serez des héros.

Plus qu’un sourire sarcastique, j’avais surtout l’impression de montrer mes dents. Je repris la parole d’un ton grinçant.

-Moi qui rêvais de devenir le héros d’un peuple de connard. Quelle magnifique opportunité, merci de tout cœur votre majesté.

Radicor me fixa d’un regard qui laisser deviner sa détermination.

-Je me moque de ta bonne volonté. Ce qui m’importe, ce sont les résultats. Ces résultats conditionnent ta survie, tu devrais t’en préoccuper également.

Cyclope intervint à nouveau, cherchant à pacifier un échange qui se faisait de plus en plus tendu.

-De combien de temps disposons nous avant de passer à l’action ?

Le roi du dôme semblait se détendre devant la bonne volonté de Cyclope.

Le prochain tribut devrait être désigné dans six jours, c’est le temps qu’il vous reste pour vous préparer. En attendant, je vais fermer le lieu au public.

Il désigna l’entrée principale de la cathédrale.

Quand ces portes s’ouvriront à nouveau, l’un de vous deux devra être prêt à l’action.

Rassemblant un semblant de lucidité, je tempérais ma colère avant de reprendre.

-Pourquoi faire appel à nous ? Tu le sais maintenant, au moins un de tes frères est en vie. Pourquoi ne pas lui demander de l’aide ?

Radicor soupira, l’espace d’un instant, un voile de tristesse drapait son visage.

-Penses-tu que je n’ai pas sérieusement envisagé cette option ? Ce que tu m’as appris lors de cet échange télépathique m’interdit cette possibilité. Outre le fait que le dôme de l’ouïe n’a pas d’armée, et que le dôme de la vue s’apprête à se faire envahir, en cas d’échec, Abiotos aurait la main mise sur deux dômes, peut-être même trois. Avant d’en arriver là, à une solution aussi désespérée, je veux tenter ma chance avec vous.

L’espace d’un instant, je lus clair dans son jeu. Je sentais qu’il ne prenait aucun plaisir à nous utiliser. Il était simplement désespéré et donc prêt à tout. Il se comportait comme un connard parce que, selon lui, il le fallait. Ma haine envers lui se tut, mon empathie reprit le pas sur mon ressentiment.

Je pris une profonde inspiration et soupirais longuement.

C’est entendu. La première semaine, ce sera moi qui me chargerai d’Abiotos.

Cyclope et Radicor furent aussi surpris que possible. Le commandeur suprême du dôme semblait désarçonné par ce changement soudain d’attitude.

-Très bien. Je reviendrais dans les prochains jours pour vous faire un briefing de la situation, nous discuterons de la marche à suivre. Sur ce, je vous laisse à vos « retrouvailles ».

Il nous salua respectueusement avant de repartir.

Le silence qui suivit son départ n’était pas tant dû à un quelconque malaise mais à un flot de réflexions qui tourbillonnait dans nos esprits. Ne trouvant aucune issue, je brisais notre mutisme d’un ton léger.

-Partout où je vais, je ne cherche qu’à être un simple visiteur. Je m’étais juré de n’enfreindre aucune loi, de veiller à ne pas fragiliser les forces en place. Pourtant d’une manière ou d’une autre, mon arrivée en terres inconnues provoque systématiquement des bouleversements.

Cyclope eut un petit hoquet d’amusement.

-Le noble s’accommode rarement du faisable. Ton arrivée provoque des changements sur lesquels tu n’as aucun contrôle. Tout comme tu n’as aucun contrôle sur les forces en place. Tu as fait ce que tu as pu…

Je partageais alors au Tocard une réflexion qui me surpris moi-même.

-Tu sais, mon ami, plus nous parcourons ces dômes, plus le désert me manque.

Le géant haussa un sourcil.

-Et pourquoi donc ?

Je détournais les yeux pour observer la salle d’un air absent.

-J’en ai plus appris sur le monde, sur les autres et sur moi-même en parcourant le désert qu’en visitant ces dômes. Seul dans le désert, j’ai affiné la connaissance que j’avais de mon être. Accompagné, j’ai découvert des liens d’une vivacité incomparable. J’ai cette sensation que la survie en groupe en milieu hostile ne peut créer que du rapprochement ou du déchirement mais pas d’entre deux hypocrites… comme dans les dômes.

Je ponctuais mon propos d’un moment de silence pour aller au cœur de mon propos.

Pire encore, il me semble que chacune des civilisations que j’ai pu observer, à quelques exceptions près, ne font que reproduire les sociétés d’avant.

Cyclope intervint à ma suite.

-Les tocards font partie de cette exception. Nous n’avons pas le confort, le luxe de nous entredéchirer. Survivre ensemble créer de la fraternité, vivre ensemble créer de la jalousie. Je ne connais pas l’histoire de notre race, je ne sais pas comment les hommes se comportaient entre eux, cependant une civilisation qui a produit la grande Débâcle ne méritait que de s’éteindre.

Je surenchéris pour conclure son propos.

-C’est pour cela que je ne sais pas quoi penser des dômes. Les laisser prospérer pourrait permettre de meilleurs augures pour l’humanité mais pourrait également reproduire les excès du passé. Quand je vois le dôme de l’ouïe, un espoir naît en moi. En observant le dôme des deux sens, cette espérance meurt et me plonge dans le doute. Une existence sédentaire permet à la vie de prospérer dans la sécurité mais veut-on réellement de cette vie ?

La question demeura en suspend alors que nous revenions à des sujets plus triviaux. Nous profitions alors de ce temps apaisé pour ressasser de vieux souvenirs… Nous passions en revue avec nostalgie de moments d’aventures oubliés, nous nous confions des craintes, des aspirations…

Nous savourions ainsi de deux jours de quiétude où personne ne vint troubler notre compagnie, hormis pour nous apporter de quoi nous sustenter.

Cyclope et moi nous laissions facilement distraire des enjeux pressant du dôme des deux sens. L’urgence nous commandait de mettre sur pied un plan qui mettrait un terme au règne d’Abiotos. Or plus nous cherchions, plus le problème nous apparaissait inextricable. Lorsqu’il nous parut évident qu’à défaut d’information supplémentaire, nous n’arriverions à rien de plus, Cyclope se mit à compléter mon savoir, notamment de survie en milieu hostile. Il m’enseigna tout ce qu’il savait sur les cafards, préconisant la discrétion et la prudence à toute option frontale. Quand il n’eut plus rien à m’apprendre, nous nous abandonnions dans d’innocentes rêveries.

Etait-ce l’atmosphère quasi-mystique des lieux ? Ou l’architecture exotique de cette immense bâtisse ? Voir cet édifice démesurément grand mais complètement déserté stimulait notre imagination. Comme si la pierre, chargée en émotion et en souvenir, racontait elle-même une histoire.

Le jour, les rayons de soleil perçant les vitraux de ce lieu sacré se coloraient du verre qu’ils traversaient, donnant des teintes orangées, bleutées et violacées à la lumière. De l’aube au crépuscule, l’éclairage donnait une dimension onirique à la pièce. Le soir, des domestiques venaient religieusement allumer des cierges. J’étais fasciné par la manière dont les flammes vacillaient pour éclairer la pièce. Les chandeliers façonnaient les ténèbres, comme si les formes dansaient avec leur ombre esquissant des silhouettes exagérées à partir de statues, des candélabres et même d’humains. Je ne savais plus exactement si la lueur des bougies domestiquait la pénombre ou si l’ombre subjuguait le concret, quelle perception reflétait vraiment le réel ?

Mon regard dévia sur Cyclope dont une moitié du visage était éclairé pendant que l’autre embrassait l’obscurité. Ce clair-obscur dans lequel il était baigné m’inspira de macabres réflexions.

La plupart des hommes m’inspirent du mépris. Il est le seul humain à ne jamais m’avoir fait défaut. Un phare dans un océan de misanthropie. Quand viendra le jour où il me trompera, comment vais-je réagir ?

Cette seule pensée me terrifia, imaginant avec effroi l’homme que je pourrais devenir.

La solitude ne serait-elle pas préférable à cette menace pendante. La question n’est pas de savoir s’il me décevra, mais QUAND. N’aurait-il pas été préférable qu’il meurt avant que cela n’arrive ?

De ces hypothèses naquit la culpabilité, m’entrainant toujours plus profondément dans cette spirale de tourment à laquelle ma bête humaine répondit en écho.

Afin de te préserver tu aurais souhaité sa mort ? L’égocentrisme dont tu fais preuve n’as aucune limite. Ne crains pas la venue d’un monstre, il est déjà là, tu l’incarnes déjà à merveille.

Cela devait faire un certain temps que je m’étais figé en regardant mon frère. Il dut capter ma détresse puisqu’il se mit à me faire la conversation d’un ton léger. J’étais certain qu’il avait remarqué mon absence pourtant il n’y fit jamais référence, comme pour préserver mon intimité.

Ainsi, nous nous plaisions à imaginer quelle cérémonie ce peuple célébraient tout en contemplant les superbes fresques peintes à même le mur. A quoi leur servait cet autel central ? Quelle relation lie ce peuple à l’eau ?

Deux jours plus tard, le militaire que j’avais rencontré dans ses quartiers, Occamen, se présenta à nous. Il présentait une stature digne et semblait nous considérer avec un certain respect. Il était vêtu d’une cuirasse composée de bande de fer maintenue ensembles par des courroies de cuir. Il portait un casque de métal sous lequel on devinait une barbe épaisse qui lui donnait un air grave. Sous son armure on devinait une tunique rouge qui mettait en valeur l’argenté du métal. J’ignorais s’il s’agissait d’un habit de cérémonie où une tenue de combat, pourtant son port lui conférait une aura incontestable.

-Messieurs. Ravi de vous voir. Le temps n’est pas encore venu pour vous, toutefois je pense pouvoir dire que je suis porteur de bonnes nouvelles.

Le soldat s’approcha de nous sans quitter le tocard des yeux. Le géant à œil unique semblait lui inspirer une peur qu’il peinait à réfréner. Le gradé nous présenta un curieux objet. Cela ressemblait à un revolver mais doté d’une petite parabole en lieu et place du canon.

Ceci est peut-être la clé de votre réussite.

Cyclope jeta un œil sur l’objet d’un air fasciné alors que je gardais mes réserves.

-Qu’est-ce que c’est ?

J’empoignais l’objet pour le soupeser, me familiariser avec son poids, le braquer contre un mur pour tester sa praticité.

Occamen fronça les sourcils devant mon audace avant de répondre.

Au lieu de vous donner une arme pour abattre Abiotos, j’ai demandé à nos meilleurs scientifiques de construire ceci. Il s’agit d’un relais énergétique qui permettra, du moins nous l’espérons, d’activer depuis le dôme la puce d’Abiotos. Dès lors, nous pourrons le ramener ici et le juger comme il se doit.

Interloqué, j’intervins à la suite du général.

-Je pensais que toi et Radicor vouliez le tuer.

Je sentis le poids de la rancœur du militaire dans sa réponse.

-Ce sera la finalité. Pourquoi vous donner ceci au lieu d’un fusil, me diras tu ? Si je te donnais une arme quelconque et que tu abattais Abiotos, il y a fort à parier pour que toute la ruche ne se retourne contre toi. Immédiatement cela anéantirait tes chances de survie. Avec ceci, tu as une vraie chance de t’en tirer sans perturber le fonctionnement de la ruche.

Cyclope me mit la main sur l’épaule.

-Avec ceci, on peut mettre sur pieds un plan correct.

Je haussais les épaules d’un air désabusé.

-Si vous le dites.

Le militaire posa les yeux sur moi avant de m’interroger.

-Cela n’a pas l’air de t’enchanter ?

Un sourire amusé aux lèvres, je lui rétorquai.

Tu t’attendais à quoi ? Un torrent de joie ? Tu pensais crouler sous les félicitations pour cette initiative ? N’attends pas que je me réjouisse qu’une situation totalement désespérée ne soit plus que probablement une catastrophe. Je préfère accepter le pire et si la mission est une réussite, la surprise n’en sera que meilleure.

Le général me laissa dans mes élucubrations avant de répondre ironiquement.

-De rien.

Cyclope qui se posait jusqu’alors en pacificateur commençait à sonner d’une voix dissidente, comme pour remettre en place Occamen.

-C’est toi qui nous condamne alors ne t’attends à aucun remerciement.

Cyclope reprit quelques secondes plus tard.

Il est vrai que ça devrait quand même nous aider.

Le gradé se tourna une dernière fois vers moi.

-Nous ne savons pas encore comment la ruche va influencer le champs d’action de l’appareil, tu devras probablement te tenir à quelques pas de lui pour que l’appareil fonctionne.

Le militaire commença à s’éloigner de nous.

Ton départ est prévu dans cinq jours. Réfléchis biens à ce que tu feras une fois dehors. Tu tiens peut-être le destin de tout un peuple entre tes mains.

Occamen s’interrompit.

Une dernière chose avant que je m’en aille.

Le soldat sorti la carte que je lui avais dressé ainsi qu’un crayon. Il planta son regard dans le mien, d’un air imperturbable en me tendant le tout.

Il est temps de vérifier si t’as une parole.

Le sourire moqueur qui commençait à s’installer sur mes lèvres se mua en un rire sardonique. Je complétais la carte en lui lançant une diatribe acerbe.

-T’as le toupet de venir m’arracher ces informations maintenant ? Rends service à l’humanité, suicide-toi pour le bien de tous. Ce soir, au moment d’embrasser ta femme et de coucher tes enfants, gardes bien à l’esprit que la seule chose qu’ils voient est une merde sans honneur. Je comprends pourquoi ce peuple me répugne autant quand on voit les rats qui sont aux commandes.

Occamen ne dit mot et garda ses yeux rivés sur la carte puis nous adressa un signe de main en guise d’adieu avant de tourner les talons.

Immédiatement je me tournais vers Cyclope.

-Outre le fait que nos vies sont en jeu, que penses-tu de la situation ?

Le tocard se rassit sur son fauteuil, il affichait une mine pensive alors qu’il soutenait son visage de son poing.

-ça ne sent pas bon… Quelque chose me dit que si l’on suit le plan à la lettre, personne n’en sortirait gagnant.

J’observais les différents vitraux de la cathédrale d’une mine distraite. Naguère, j’aurais été fasciné par l’histoire que contais ces fresques, dorénavant mes considérations étaient tout autre.

-Si j’étais assuré de sa sincérité, cela ne poserait aucun problème. S’il compte vraiment tuer Abiotos, cela m’irait. Toutefois ramener ce taré à Radicor avec une puce en état de marche, c’est prendre le risque de lui donner le contrôle sur une armée de cafards. Ce risque-là, je ne suis pas prêt de le prendre.

Cyclope considéra cette possibilité avec gravité.

-Tu as entièrement raison, Zachary. Alors en admettant que tout se passe bien, que comptes tu faire ?

Détachant mon attention des vitraux, je m’intéresserais désormais aux chaines de cyclopes, curieusement je pris plaisir à entortiller les maillons de la chaine de Cyclope autour de mon bras.

-Peut-être dans un premier temps… J’exécute son plan. Il active la puce, il attire Abiotos dehors… Et une fois que l’on est loin de la ruche… je le « neutralise ».

Comme il est curieux de parler autant de légèreté de la mort d’autrui. Cela pourrait effectivement être immoral si nous avions une plus grande marge de manœuvre.

-Zachary, tu as déjà tué quelqu’un ?

Sa question eut l’effet d’un coup de fouet qui me ramena à la réalité. Immédiatement je reculais pour me séparer des chaines et faire face à mon frère.

-Je suis responsable de la mort de centaines…

Mon ami m’interrompit sans ménagement.

-Je sais. Ce n’est pas la question. As-tu déjà fait couler le sang ? Utiliser un fusil pour abattre ta proie ? Etrangler ta victime jusqu’à ce que la teint de ton ennemie vire au bleuâtre ? Planter une lame dans le corps encore chaud de ton adversaire ?

Chacune de ses phrases provoquait en moi des représentations mentales où je me voyais terrasser Abiotos de différentes manières, dans un curieux mélange de crainte, d’appréhension et de curiosité.

Je me demande ce que cela fait de tuer, de tuer directement. Est-ce que je vais y prendre plaisir ? Ou au contraire c’est le dégoût qui prendra le pas ? Est-ce que je vais m’en vouloir toute ma vie, ou me répéter que je fais ça pour la bonne cause supprimera toute culpabilité ? Est-ce qu’Abiotos opposera une grande résistance ? Non… S’il est sous l’effet de la puce, ce sera comme un mannequin animé, un tas de chair désincarné.

Dépassé par mes propres pensées, je hurlais presque mes pensées à haute voix.

-NON ! Même s’il est contrôlé par la puce, ça reste un humain. Même si ça devient une marionnette, ça reste un humain. Peu importe les enjeux, ça reste un acte horrible.

Je secouais la tête alors que Cyclope me regardait d’un air inquiet.

-ça va ?

Je baissais la tête.

-Tout à l’heure je t’ai dit que j’ai cru devenir fou, parfois je me demande si le processus n’est pas déjà engagé.

Mon ami me glissa à l’oreille.

-Quand tout ceci sera terminé, on ira s’installer loin de tous ces tarés, loin des dômes, loin de toute cette agitation. Tu auras tout le temps de redevenir… « sain d’esprit », si ce mot a encore un sens dans le monde dans lequel on vit.

-Ça ne pourra pas me faire de mal.

Les derniers jours qui me séparaient du grand départ passèrent en un clin d’œil. Plus nous nous approchions du jour J, moins Cyclope parvenait soutenir mon regard. Je pressentais que quelque chose n’allait pas, je savais qu’il ne croyait pas en mes chances de succès et qu’il pensait ma fin proche. Il se refusait de me le dire, pourtant je lisais avec tant de clarté en lui qu’il n’en avait même pas besoin. J’essayais, en vain, de lui faire oublier la triste réalité de ce constat, que je partageais également. Quand le dernier jour arriva, c’est tout juste s’il parvenait à retenir ses larmes. Il était inconsolable, le désespoir imprégnait les traits de son visage, le regard baissé, c’est à peine s’il parvenait à conserver sa dignité.

Si je reviens, j’aurais de bonnes histoires à te raconter.

Cyclope soupira sans répondre.

Je lui adressais un signe de main en guise d’adieu avant de me retourner et de me diriger vers la sortie où déjà la grande entrée principale commençait à s’entrouvrir.

Alors que je m’apprêtais à en franchir le seuil, mon frère me hurla.

-Peu m’importe que tu reviennes avec une jambe, les bras arrachés ou totalement fou. Reviens. Juste reviens.

Son chagrin avait atteint un point culminant, je sentais une certaine rage dans sa mélancolie mais aussi un fort sentiment d’impuissance. Malgré tout mon flegme, une larme perlait le long de mes joues alors que je murmurais à voix basse, sans savoir s’il m’entendait.

-Tout le plaisir était pour moi, mon frère.

Je redécouvris le dôme sous un nouveau jour. Toute la population qui m’avait conspué, craché dessus, méprisé, formait désormais une haie d’honneur à ma gloire.

Mon chemin était pavé de louanges, de pétales de roses et de sourires. Certains célébraient mon courage, d’autres cherchaient à tout prix à me remercier quand d’autres voulaient simplement m’admirer. Je voyais défiler ces visages, ces expressions de joie, je voyais l’espoir dans leurs yeux illuminer leur regard. Tous ces regards qui convergeaient vers moi, tous comptaient sur moi, comme si tous me faisaient confiance. L’espace d’un instant je ne voyais plus une accumulation d’individu mais un ensemble, une foule, une volonté commune. De cette entité ressortait une attente, l’envie d’un futur radieux, or, s’ils célébraient mon passage c’est qu’ils pensaient que c’était à ma portée. Ils me donnaient l’impression d’être un dieu duquel on voulait s’attirer les faveurs. A chacun de mes pas me rapprochant de la sortie, les louanges s’accentuaient, comme s’ils voulaient me prouver leur dévouement. Ils scandaient mon nom comme pour se convaincre de ma gloire.

Mon sacrifice et peut-être celui de Cyclope une semaine plus tard épargnerait probablement des vies. Ils en étaient certainement reconnaissants, mais ce n’était pas tout, derrière leur encouragement je mesurais le poids de leurs craintes. Leur existence entière n’était qu’un sursis accordé par Abiotos. Je sentais dans leur regard qu’ils fondaient tous leurs espoirs surs moi, que j’avais le pouvoir de changer leur vie.

Si je ne méprisais pas ces gens, j’aurais pu ressentir la pression qu’ils voulaient mettre sur mes épaules, le fardeau de leur espoir.

Quelle étrange sensation. Plus ils me glorifient, moins je les estime. Je suis sûr que dans cette immense foule, il doit y avoir un de ces connards qui m’a craché dessus ou qui menaçait de me lyncher.

Ma bête humaine me répondit.

-Ne t’y trompe pas, n’importe lequel de ces cloportes aurait essayé de tuer la semaine passée s’il en avait eu l’occasion.

Je répondais désormais aux acclamations de la plèbe par une haine vengeresse.

Je souhaiterais tous vous voir mourir, un par un. Rien d’autre que des hypocrites qui se réjouissent de la mort d’un autre.

J’offrais un sourire factice à la foule en lui adressant des signes de main.

Radicor et Occamen se joignirent à moi pour m’accompagner jusqu’à l’embarcadère, sous les olas de la foule. D’une voix calme et sans que mon visage ne trahisse mon émotion, je leur adressais ces quelques mots.

-Vous m’accompagnant jusqu’ici, pour me rendre « un dernier hommage » est probablement la pire insulte que vous pourriez me faire. Vous essayez de récolter auprès de la foule le fruit de mon sacrifice. C’est vous qui m’envoyez à la mort et vous voudriez en recevoir les lauriers. Vous êtes pitoyable.

Arrivé sur le quai, le militaire s’adressa à moi d’un air désemparé.

-Merci d’avoir joué le jeu jusqu’au bout.

Je laissais éclater ma haine au grand jour.

-Ferme ta gueule, chien. Tes remerciements sont un affront de plus que je dois supporter. Au moins si je crève, j’aurais de quoi me réjouir… au moins je n’aurais plus à supporter vos gueules.

Occamen baissa la tête et Radicor demeura tapis dans le silence alors que j’embarquais sur le radeau du passeur.

Dominer ces deux personnes de pouvoir m’accordait une satisfaction inqualifiable.

Dans une forme de plaisanterie malsaine hérité de ma colère, je m’adressais à Khàrôn un sourire malicieux aux lèvres.

Allez bourreau, fais ton office.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire Alain Justice ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0