Samedi 18 juillet 2020
Coucou journal !
Il est midi et je n'ai toujours pas osé sortir le nez de la maison de peur de croiser Alekseï.
J'avais apprécié notre baiser et nos caresses, mais je ne me sentais pas encore prêt à franchir le cap d'avoir « un petit ami ». Lui était dans son monde, alors que moi, je ne savais pas du tout où je mettais les pieds. Pourtant, chacun de ses effleurements, chacune de ses étreintes, chacun de ses baisers étaient tatoués sur ma peau comme des traces indélébiles qui ne demandaient qu'à fusionner. Plus les jours passaient, plus je devenais dingue de lui. J'entendais sa voix quand il n'était pas là, je sentais la douce odeur de son after shave autour de moi, je l'imaginais étendu sur mon corps nu, le souffle de son amour caressant mon visage.
J'avais tant de choses à raconter à ma rouquine. Elle avait dû lire dans mes pensées, car je reçus un appel d'elle aussitôt.
— Allô, la rouquine !
— Joyeux anniversaire, mon cœur ! On se fait une pizza ce soir, tous les trois ?
— J'ai envie qu'on ne mange que tous les deux.
— Oh ! Il y a de l'eau dans le gaz chez mes princes ?
— En fait, il s'est passé plein de choses en une semaine. S'il faut que je te raconte tout, on mange et on se pose chez moi ou chez toi.
— Nan ! Tu rigoles, on se fait une boîte, mixte !
— Pourquoi, mixte ? Arrête tes conneries !
— Parce qu'elles sont devenues plus cool que les boites dites hétéros.
Sacha n'était pas au courant que Sally avait déjà pris contact avec Alekseï pour organiser sa soirée d'anniversaire.
Alekseï ne se doutait pas que Sacha se sentait mal à l'aise, suite à leur baiser. Profitant de la soirée d'entreprise prévue par son père pour rencontrer, en lieu festif, ses principaux actionnaires, il saisit l'occasion, et organisa la sortie en discothèque, puis en informa Sally.
À 19 heures passées, Sally est venue me chercher et nous nous sommes rendus dans une pizzeria à l'extérieur de Chavernay. Nous nous sommes stationnés devant un restaurant à la devanture rouge et noir avec une grosse enseigne lumineuse où était inscrit « Pizza Délis ».
À l'intérieur, la salle baignait dans une lumière tamisée, rendant l'endroit vraiment cosy. En ce samedi soir, les clients ne faisaient pas la queue au portillon, ils avaient sûrement préféré rejoindre la capitale pour des soirées plus extravagantes. Nous serions au calme pour que je lui expose en détail ma semaine avec mon prince.
Nous avons commandé des « kir royal » en apéro et des pizzas. Elles étaient excellentes avec leurs pâtes fines et bien garnies.
Je n'avais parlé que la visite de la maison d'Alekseï et de notre week-end au Tréport, que Sally reçu un SMS.
Comme je l'avais prévu, le descriptif de la douche avait rendu ma rouquine complètement hystérique. Elle nous imaginait déjà en train de faire l'amour à l'intérieur, moi, le cul collé contre la paroi de verre. La fausse demande en mariage et la pelle qu'Alekseï m'a roulée au resto autoroutier l'ont beaucoup fait rire. Elle frétillait sur sa chaise comme une anguille. La bagarre dans le Mac Do l'a laissé sans voix. Elle ne s'attendait pas à ce que je couche les deux gars moi-même. Les années passées et la boxe avaient fait de moi un vrai guerrier, je n'avais plus peur d'affronter qui que ce soit.
— Mon cœur, il faut qu'on décolle. J'ai invité deux trois amis, garçons et filles, à nous rejoindre en boîte. Je t'emmène dans un nouvel endroit à la mode.
— Sur Paris ?
— Non, pas loin de l'aéroport Charles de Gaulle. On y sera en vingt minutes.
— J'espère que t'as pas invité les abrutis de la dernière fois.
— Bien sûr que non ! Je ne suis pas amie avec eux en plus. Ils avaient été invités par un pote à moi que j'ai viré de mes contacts du coup.
— Tant mieux !
— J'ai invité mon amie Sarah et sa copine Marjo. Elles sortent ensemble depuis trois mois. Tu verras, elles sont cool et font la fête sans se soucier de personne.
En mecs, j'ai invité, Swan, Neal et Jack, des amis de l'Université. Jack et Swan sont dans la musique et Neal se spécialise en tant que styliste. Il se pourrait que tu les croises entre deux cours et ils peuvent aussi t'aider, si tu te perds dans les couloirs. Toi et ton sens de l'orientation !
— Très drôle, la rouquine ! T'es pas mieux que moi !
— Ils sont tous les trois super mignons et de vrais amours. Je te réserve une surprise concernant ces trois-là.
— Ne tente pas de me caser avec un de ces gars. J'ai déjà mon prince.
— Non, ça ne risque pas, t'inquiète. Je veux juste qu'on passe un excellent moment et qu'on fasse la fête.
Après avoir reçu un premier SMS d'Alekseï qui lui indiquait qu'ils sortaient du restaurant et se dirigeaient vers la Discothèque, Sally en reçu un deuxième pour dire qu'ils étaient arrivés sur place.
Nous avons roulé une vingtaine de minutes comme me l'avait dit Sally, puis elle s'est garée sur un parking gigantesque déjà bondé. Il était surveillé par des mecs à cheval qui faisaient les placements. La discothèque, qui de l'extérieur ressemblait à un immense entrepôt, portait le doux nom de « Lotus Bleu ». Nous ne pouvions pas rater, en gros néons multicolores, l'enseigne qui surplombait le bâtiment.
Une fois passés les deux gros bébés tahitiens aux carrures d'armoires à glace, à qui Sally présenta son coupon de réservation, nous nous sommes frayés un chemin jusqu'à la table sur laquelle était placée une ardoise à son nom. Deux filles et quatre garçons s'y étaient installés.
— Salut mes chéris ! Vous êtes déjà tous là ? Cool !
— On attendait plus que vous, pour faire la teuf !
— Je vous présente d'abord mon ami d'enfance, le Prince de la fête, Sacha. Sacha, voici Sarah et Marjorie. Marjo pour les intimes. Ensuite, dans l'ordre, Swan, Jack et leur bébé, Neal.
— Leur bébé ? Demandais-je discrètement à l'oreille de Sally.
— Oui, les trois sortent ensemble. Je te l'avais dit que tu aurais une surprise.
— Enchanté à tous ! Et toi, tu t'es trompé de siège ? Ai-je questionné froidement le quatrième gars qui me dévisageait mystérieusement derrière sa longue frange noire.
— Salut Sacha et Sally, je suis Lorens, le grand frère de Marjo.
— Je lui ai proposé de nous accompagner, car il me saoule à rester enfermé à broyer du noir à cause de son ex. Cette pétasse s'est tapée son meilleur pote.
— Pas de souci. Plus on est de fous, plus la fête va être grandiose. C'est bon pour toi, mon cœur ?
— Ouais !
— Je prends vos commandes avec mon tel. Qui veut quoi ? Proposa Lorens.
Pour la première tournée, nous avons tous commandé des cocktails exotiques avec alcool.
— Tu viens m'aider avec les plateaux, Sacha ?
J'ai accepté de l'accompagner et nous avons brièvement discuté au bar en attendant nos verres.
— Donc, tu t'appelles Sacha et tu as 23 ans aujourd'hui. Moi, j'en ai 37 et j'avais vraiment besoin de me changer les idées. Désolé de m'imposer dans ta soirée.
— Oh, ce n'est pas grave. J'espère que tu t'amuseras ce soir. On est là pour ça !
Après les cocktails, ils ont commandé une bouteille de « Cardhu », un whisky écossais, une bouteille de Rhum « Captain Morgan » et du coca. Sally et Sarah ne burent plus que des boissons sans alcool, car elles avaient choisi d'être les Sam de la soirée.
Étonné par le trouple qui me faisait face sur la banquette, j'examinais leur comportement avec attention. M'imaginer avec un mec était déjà compliqué pour moi, mais de là à sortir avec deux mecs, était impensable. Comment faisaient-ils dans la vie de tous les jours ? Comment faisaient-ils l'amour, sans aucun d'eux ne soit jaloux ? Ils étaient complètement différents les uns des autres.
Jack, 1, 80 m environ, était un gars mince, aux cheveux châtain clair, coiffés en arrière. Il avait l'air de quelqu'un de mature et posé. Swan était le bad boy, tatoué et vêtu de cuir. Aussi grand que Jack, il avait des cheveux noirs qui ondulaient jusqu'à ses épaules. Son débardeur sans manche en résille noire me laissait libre d'admirer ses bras musclés et ses pecs. Neal, leur bébé, comme ils l'appelaient, était un petit blond au visage angélique et aux joues rondes et rosées. Il ne devait pas mesurer plus d'1,60 m et avait une silhouette « d'adolescente ». Toujours entre ses deux hommes, que ce soit sur la banquette ou sur la piste de danse, il était protégé et cajolé comme un joyau. Je pouvais voir des petits cœurs sortirent de leurs yeux quand ils se regardaient tous les trois amoureusement.
Les filles, deux petites brunes aux looks de Bimbos, sorties tout droit de téléréalités, étaient moins tactiles et démonstratives. Elles ne cessaient de remuer, en dansant autant sur leurs sièges que sur la piste. Ma Sally les singeait en riant aux éclats et en levant les bras au-dessus de sa longue « perruque » rousse.
Marjorie et son frère avaient la main leste sur l'alcool et j'étais de plus en plus inquiet pour leur santé et pour le bon déroulement des festivités. Lorens avait la carrure d'Alekseï, mais son regard ne m'indiquait rien qui vaille. Quelque chose en lui, m'avait intrigué toute la soirée. Je n'arrivais pas à cerner ses intentions, bonnes ou mauvaises.
Alekseï me manquait comme un fou en ce jour. J'aurais dû l'inviter si, mais je n'assumais pas ce que j'avais fait la veille et j'avais peur de me laisser tenter.
Dévasté par son absence à ma soirée d'anniversaire, le regard noir de ce type, tel celui d'un vampire, m'envoûta au point que je perdis toute notion de méfiance. De plus en plus triste, j'avais besoin de me vider la tête, seul dans un coin. Le bruit et les gens qui dansaient autour de moi, me donnaient le tournis.
Après être allé aux toilettes, Sally est venue me chercher pour que je les rejoigne sur la piste de danse, mais à mi-chemin, je lui ai lâché la main et je me suis enfui vers les WC.
En passant devant une salle VIP, quelque chose attira mon regard... Alekseï ! Mon Prince ! À moitié débraillé, qui faisait la fête avec des vieux types en costards cravate ou du moins, ce qu'il en restait. Comme dans un éclair, nos regards se sont croisés et nous avons immédiatement dessoûlé, malgré tout l'alcool que nous avions pu ingurgiter au cours de la soirée. Je ne savais pas si je devais rire ou pleurer de la situation. J'ai choisi de me précipiter dans une toilette pour me cacher.
Je n'eus pas le temps de comprendre ce qu'il m'arrivait, qu'une grosse main m'a fait faire un demi-tour sur moi-même et s'est plaquée sur ma bouche, en me collant au mur.
— Chut ! Calme-toi, gamin ! Me dit l'homme en glissant ses mains sous ma chemise. J'ai cru mourir en me pissant dessus, dans cet endroit lugubre et puant la vieille odeur d'urine alcoolisée. C'était Lorens !?
J'avais beau avoir fait de la boxe, je n'étais qu'un poids plume face à ce gars et j'étais trop décontenancé pour agir promptement.
Profitait-il pour se venger des homos, en s'attaquant à celui qui était seul ? Pourquoi s'en prenait-il à moi ? Nous ne nous connaissions pas et nous nous étions à peine adressés la parole.
J'essayais de me débattre pour échapper à son étreinte, mais il me serrait de plus en plus fort, en continuant à me tripoter à travers mon jean. Arrivant à déplacer ma mâchoire inférieure sous sa main, j'ai profité de cette échappatoire pour le mordre à sang et je me suis mis à hurler à l'aide.
De l'autre côté de la porte, quelqu'un a assené un coup de pied si violemment, que le contreplaqué à exploser, projetant Lorens, tête la première contre le mur derrière moi.
— Alekseï !
— Baby ! Non, baby ! Qu'est-ce qu'il t'a fait ?
*** Alekseï ***
Sacha me sauta dans les bras en hurlant. Il me fixa sans expression, seules les larmes qui ruisselaient en cascade sur ses joues rougies par l'alcool et la montée d'adrénaline, m'indiquaient son état de panique. Il tourna de l'œil et s'écroula.
J'ai attrapé mon homme et je l'ai porté jusqu'à ma voiture, croisant sur notre passage, les policiers qui emmenaient l'autre pourriture à la leur.
Sacha était toujours inconscient et il fallait absolument que je prévienne Sally, avant qu'elle ne s'aperçoive de son absence et qu'elle devienne hystérique.
J'étais si abasourdi de le voir dans cet état, que j'en ai oublié mes actionnaires.
J'ai enfermé mon Baby dans la voiture et je me suis précipité dans la discothèque afin de la trouver. Elle dansait et ne prêtait aucune attention à ce que j'essayais de lui faire comprendre.
J'ai quitté la piste de danse, complètement dépité. Je ne savais pas quoi faire, car je ne connaissais pas les personnes avec qui ils étaient venus.
En survolant la salle du regard, je vis un jeune homme blond se diriger droit sur moi.
— Vous êtes un ami de Sally ? Je vous ai vu lui parler sur la piste.
— Je suis le fiancé de Sacha ! ai-je exagéré pour le mettre en confiance.
— Le prince ? Je m'appelle Neal et je suis absolument fan de Sacha et de vous. Avec Sally, on est comme des amies « filles » et j'adore les histoires de princesses.
— Oui Neal, c'est moi. Il faut que tu m'aides. Un type a agressé Sacha dans les WC et il est inconscient dans ma voiture. Le gars a été emmené par les flics, il y a trois minutes. Je n'ai aucune info sur son identité. Préviens Sally que j'emmène Sacha à l'hôtel, je ne veux pas qu'on le voie dans cet état.
J'ai déguerpi de la boîte de nuit aussi vite que j'y étais entré. J'ai sauté dans ma voiture et j'ai démarré en trombe.
Je me suis arrêté devant le premier hôtel que j'ai trouvé sur ma route et j'y suis entré. J'ai expliqué au réceptionniste que mon mari avait un peu bu et qu'il s'était endormi dans la voiture. Le jeune homme à moitié dans le coaltar ne prit même pas la peine de me répondre et me tendit une clé avec un numéro de chambre.
Je suis reparti chercher Sacha à la voiture et je l'ai porté de nouveau jusqu'à notre chambre qui se trouvait au rez-de-chaussée, au bout d'un long couloir lugubre. Je l'ai calé contre le mur pour pouvoir ouvrir la serrure. Ensuite, je l'ai mis en sac à patates sur mon épaule et je l'ai transporté jusqu'au lit miteux qui trônait dans cette chambre glauque. On se serait cru dans une chambre des films d'horreur.
Il fallait que je le réchauffe à tout prix, je n'avais donc pas le choix que de le mettre sous les couvertures poussiéreuses. Ensuite, je suis allé dans la salle de bain, j'ai attrapé une serviette que j'ai humidifiée à l'eau tiède et je suis allé lui passer sur le visage, les bras et les mains pour le rafraîchir.
— Mon bébé... Mon amour... Tout est ma faute ! Ma surprise a viré au cauchemar. Je n'avais pas prévu que cette soirée prendrait cette tournure.
Assis sur le bord du lit, je me suis laissé glisser au sol et j'ai posé mon visage sur sa petite main toute froide que je serrais avec force.
Je ne sais pas qu'elles étaient les intentions de ce type, mais la peur que j'ai entendue dans ton cri, a suffi à me donner l'envie de le tuer de mes mains. Il a eu de la chance de s'être assommé contre le mur. Je t'en prie Baby, réveille-toi ! Je t'aime tellement mon amour, réponds-moi.
Ne sachant que faire de plus, j'ai continué de lui parler tout en le secouant un peu et jusqu'à ce qu'il immerge enfin.
— Alekseï... Tu es là ! J'ai eu vraiment peur, si tu savais. Je me suis vu mourir.
— Baby, je suis là ! Tout est fini, il est derrière les barreaux et demain, à la première heure, on ira porter plainte.
— Je me sens sale ! Je sens son parfum de merde sur moi. Si je le recroise, j'te jure qu'il prend mon poing dans la gueule.
— Tu te souviens de son visage ?
— Oui, bien sûr ! Comment veux-tu que j'oublie cet enculé ? Ce bâtard s'appelle Lorens. C'est le frère de la copine de Sarah, la pote à Sally.
— Chut ! Calme-toi, Baby !
Un « chut ! Calme-toi, gamin » resurgit à l'esprit de Sacha qui, aveuglé par la colère, assena une droite magistrale à Alekseï. Encore heureux, que celui-ci avait une bonne esquive, Sacha le rata de peu.
— C'est moi, Alekseï ! Calme-toi, mon ange. Je t'en supplie, arrête de te débattre.
Sacha effaça tout geste de violence et s'écroula en larmes dans mes bras. Je lui caressais le dos et la nuque.
— Allonge-toi ! Tu prendras une douche demain. Essaye de dormir un peu, je reste près de toi.
J'ai glissé mon bras sous sa tête et j'ai posé celle-ci sur ma poitrine.
Je ne m'étais pas déshabillé, principalement, parce que je ne voulais pas que ma peau soit en contact avec les draps, mais également pour que mon parfum prenne le dessus sur celui de son agresseur.
Mon pauvre Baby s'est bien vite endormi en pleurant.
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