Samedi 12 décembre 2020

6 minutes de lecture

Au petit matin, le jeune infirmier, blond comme les blés, entra dans la chambre de Gabriel et Enara. Les infirmières les avaient installés confortablement afin de surveiller leur état de stress.

Notre couple, encore très affaibli par le choc, eut l’impression de voir leur Sacha entrer dans leur chambre. Tous deux fondirent en larmes.

— Madame et Monsieur Morison, je m’appelle Jules et je vais vous guider jusqu’au bureau du médecin qui a examiné votre petit-fils. Rassurez-vous, malgré son état, il est réveillé. Vous pourrez le voir juste après, si le médecin vous en accorde la permission.

Gabriel prit Enara par le bras et ils suivirent Jules.

— Bonjour Monsieur et Madame Morison, je suis le docteur Dagher, c’est moi qui ai pratiqué les examens sur Sacha.

Pour commencer, je voudrais vous adresser toute ma sympathie et mon soutien moral, en tant que père de famille. Ce qu’a subi Sacha est monstrueux et inimaginable. Il faut que vous ayez le cœur bien accroché et que vous pensiez à la façon dont vous allez l’aider. Il faut que vous soyez forts, il va avoir besoin de tout votre amour pour surmonter ces horreurs.

— Ça va, Enara, tu es prête ? Si c’est trop dur à entendre, interromps le Docteur et sors du bureau.

Allez-y Docteur !

— Donc, nous avons relevé des blessures à la tête, elles ne sont pas trop graves. Nous l’avons simplement recousu. Nous verrons, lorsqu’il reprendra ses esprits, si au niveau cognitif tout va bien. Il a perdu une incisive sur la mâchoire du haut.

Ensuite, il a huit côtes de briser. Il a légèrement été atteint à un poumon, heureusement, nous avons opéré à temps.

Il a également une petite fracture à l’avant-bras gauche et une à la jambe droite. Rien de grave, il va vite se rétablir de ce côté-là.

Monsieur et Madame Morison. Là, je vais arriver au moment le plus critique, qui concerne son intimité.

Enara comprit et se mit à sangloter. Gabriel l’a pris dans ses bras.

— Allez docteur, nous voulons tout savoir pour leur faire payer un jour.

Le docteur, qui avait aussi les larmes aux yeux, prit une grosse inspiration et reprit.

— Sacha a été victime de viol avec un objet contondant.

Il baissa les yeux, ne pouvant retenir ses larmes plus longtemps.

Il avait de nombreuses déchirures anales. Nous l’avons recousu. Il va beaucoup souffrir pendant quelques mois, mais le pire va être son état d’esprit suite à ses événements. Il va vraiment avoir besoin d’être entouré par ceux qu’il aime. Il devra aussi consulter le psychiatre qui le suit habituellement.

Laura m’a dit qu’il avait un fiancé. Aura-t-il la force de le soutenir ?

— Leur situation est compliquée, Docteur. Le fiancé de Sacha a disparu depuis plus d’un mois. Sacha n’a plus de nouvelle et il est injoignable ! confia Gabriel.

— Laissez-nous vous avouer quelque chose. Nous pensons que la disparition de son fiancé, l’enlèvement et le passage à tabac de Sacha sont liés. Nous savons que la mère de son fiancé s'oppose fermement à leur relation. Ces gens ont du pouvoir et ils sont capables du pire.

Enara ressentit le besoin de déballer son sac.

— Votre témoignage va être d’une aide précieuse pour la police. Toutes les pistes doivent être prises au sérieux.

Gabriel et Enara avaient encaissé courageusement ce que le médecin leur avait dit.

— Comme je constate que vous avez été fort, je vous autorise à aller le voir. Il est encore en état de choc. Rassurez-le par des sourires et des regards. Évitez de trop lui parler et de le faire parler.

Ils sortirent du bureau. Jules les attendait pour les conduire à la chambre. Il saisit le bras d’Enara pour la soutenir.

— Ne vous en faites pas, Madame, nous allons bien le soigner. Laura et moi, nous veillerons sur lui jours et nuits.

Encore en état de choc, Enara fixait le sol tout en marchant.

— Il est beau comme un ange avec ses cheveux blonds comme les vôtres et ses grands yeux bleu océan. Vous les découvrirez lorsqu’il sera dégonflé.

Vous êtes aussi très beau et très gentil, mon garçon. Prenez soin de lui en notre absence.

Elle se remit à pleurer.

— Faudra pas m’le dire deux fois, m’dame !

Il baissa la tête en rougissant.

Tous trois entrèrent sans bruit dans la chambre. Sacha était branché à des machines qui surveillaient ses constantes.

Il tourna la tête et comme pour les rassurer, il leur adressa son merveilleux sourire.

— Alekseï ? murmurais-je. Je veux Alekseï !

Son beau sourire se transforma en une moue tordue et les larmes ruisselèrent sur ses joues gonflées, comme des torrents.

— Ne t’inquiète pas mon garçon. Nous allons vite le retrouver ton chéri. Pour l’instant, il faut que tu te rétablisses. La police est lancée à sa recherche.

— Mamie, appelle Sally ! Irina et elle doivent être inquiètes.

Enara sortit dans le couloir pour appeler immédiatement les filles. Ne dévoilant pas la gravité des blessures de Sacha, elle les informa de son état en se retenant de pleurer.

— Irina rentre dimanche. Sally et elle viendront te voir lundi, me rapporta-t-elle.

— Mon chéri, il faut que tu sois fort et que tu te reposes. Nous rejoignons, Christophe qui nous attend en bas et nous allons faire notre déposition au commissariat.

Nous te laissons entre de bonnes mains !

Gabriel fit un clin d’œil à Sacha qui lui répondit par un sourire forcé.

Ils se retournèrent pour partir lorsqu’ils remarquèrent que Jules rougissait de nouveau avec la tête baissée. Gabriel lui tapota l’épaule et lui souhaita bon courage.

— Bonjour Sacha, tu te souviens de moi ? Je suis Jules et c’est moi qui suis mandaté (en souriant) par Laura, pour prendre soin de toi. Je suis en première année de médecine. Alors ne sois pas trop dur avec moi s’il te plaît.

— Humm.

— Je vais te faire une petite toilette. Juste le visage, les bras et les jambes. Ça va te rafraîchir un peu. Tu seras bien après.

Si c’est ok ! Dis-le avec ta tête. Si quelque chose te dérange, arrête-moi tout de suite en levant le bras ou uniquement la main. Évite de parler.

On y va ?

Sacha acquiesça avec un signe de tête.

Jules prit le linge humide et le passa d’abord sur son visage.

Il est vraiment mignon avec ses yeux aussi bleus que les miens et son nez fin et pointu. Ses gestes et son regard sont très doux lorsqu’il est concentré sur ses patients.

Jules descendit le long de ses bras et ses mains. Toujours aussi concentré. Il avait peur de lui faire mal. Il avait envie de pleurer en voyant de si près l’état de Sacha, mais il réussit à contenir sa peine.

Ça me fait un bien fou, autant de douceur. Je ferme les yeux et j’imagine que c’est toi, mon amour, qui prend soin de moi. Tu me manques. Je t’aime si fort !

Jules regarda Sacha. Il constata qu’il avait les yeux fermés et souriait. Il était content de lui apporter un peu de joie.

Il rinça de nouveau le linge et attaqua les jambes en commençant par les cuisses du côté où la jambe était plâtrée.

Lorsqu’il passa le linge sur la face interne de la cuisse de Sacha, celui-ci eut directement les images horribles de son viol en tête. Dans un mouvement de panique, il lui assena un énorme coup de pied en plein visage et essaya de se relever.

Le regard de Sacha avait changé, il oscillait entre la colère et la terreur. Jules recula d’un mètre et secoua rapidement la tête pour recouvrer ses esprits.

— Désolé, Jules !

Jules sourit pour le rassurer, puis s’approcha et lui prit la main.

— Ne t’inquiète pas pour moi, plus que je m’inquiète pour toi ! Je vais bien et j’ai bien l’intention de prendre soin de toi.

Je reprends ou j’en étais, mais je ne monterais pas si haut, ok.

— Télé !

— Tu veux la télé ? D’accord ! Attends, je l’allume.

Tiens, prends la télécommande. Si tu appuies trois fois sur le cinq, tu auras une chaîne musicale. C’est pas Spotify, mais ça te distraira, me dit-il en riant.

Jules saisit mon index et me montra la touche que je voyais à peine, à l’extrémité du clavier numérique. Je distinguai l’odeur délicieuse de son parfum sucré, mêlée à l’odeur d’antiseptique.

Je vais te poser des compresses d’eau froide. Elles t’aideront à faire dégonfler tes yeux et ta bouche.

À demain matin. Je rentre chez moi dormir un peu, la nuit a été longue.

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