Et dans mon cœur, une guerre douce

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Les jours ont passé, et depuis cette annonce, je vis comme dans une double réalité.

Le monde autour de moi continue de tourner, les gens parlent, rient, vivent…

Et moi, je marche au milieu d’eux avec ce secret lourd et tendre à la fois.

Un secret qui pousse mon ventre et rétrécit mon souffle.

Un secret qui sourit parfois la nuit, quand je sens une bulle, un frisson, un mouvement doux comme une caresse de l’intérieur.

Je suis enceinte.

Mais personne ne le sait.

Pas ma mère.

Pas mes frères.

Pas ma famille.

Personne, sauf deux ou trois amis choisis.

Et toi, petit Raham, bien sûr.

Toi, tu le sais mieux que personne.

Tu vis en moi.

Et tu respires dans mon silence.

Les jours sont devenus plus lourds.

Pas seulement à cause du poids de mon ventre.

Mais à cause de celui de mes pensées.

Comment leur dire ?

À ma famille, si fière, si vigilante, si prompte à juger les silences prolongés.

À ma mère, dont les yeux savent toujours deviner ce que mes mots ne disent pas.

À mon père, s’il était vraiment présent pour moi, aurais-je eu moins peur ?

Aurait-il été en colère ou tendre ?

Et puis, surtout, comment le dire à lui ?

Au père de mon fils.

Ce chapitre, c’est aussi une lettre non envoyée.

Un aveu qu’il ne lira peut-être jamais.

Mais qu’il me faut écrire pour m’alléger.

À toi,

Le père de Raham,

Celui que j’ai aimé,

Celui que j’aime encore, parfois, en silence.

Je ne sais pas par où commencer.

Depuis quelque temps, nous sommes loin.

La distance n’est pas qu’une affaire de kilomètres.

C’est un silence épais, comme un brouillard qui a avalé nos mots.

On s’est perdus.

Ou peut-être que je t’ai perdu.

Je ne t’en veux pas.

Pas vraiment.

Je me demande juste…

Est-ce que tu saurais, si je te le disais ?

Est-ce que tu saurais porter cette vérité avec moi, ce poids, cette responsabilité, ce miracle inattendu ?

Ou est-ce que tu t’en irais, comme tant d’autres le font ?

Tu sais, parfois, je me prends à rêver que tu arrives, que tu poses ta main sur mon ventre, que tu me regardes et que tu dis :

« Je suis là. »

Pas avec grand-chose.

Pas avec des promesses.

Juste ta présence.

Mais peut-être que ce n’est qu’un rêve.

Et moi, je ne sais pas encore si je suis prête à le briser en t’annonçant que tu vas être père.

Alors je vis cette grossesse dans une sorte d’entre-deux.

Entre l’amour et la peur.

Entre la joie d’attendre mon fils et la peur de l’élever seule.

Entre le silence que je garde et les mots qui me brûlent les lèvres.

Il y a des soirs où je pleure.

Parfois de tristesse ou pas toujours, mais juste parce que je ne sais pas comment faire.

Parce que j’aurais aimé que ce moment soit entouré d’amour, de lumière, de main posée sur mon ventre, de voix qui chantent pour lui.

Mais à la place, c’est moi.

Toute seule.

Face à ce monde qui s’apprête à s’agrandir,

Avec mon cœur qui bat pour deux.

Raham.

Ce petit prénom que j’ai choisi sans consulter personne.

Je l’ai trouvé un matin.

Comme un souffle.

Il m’est venu sans effort.

Raham, comme la miséricorde, comme la douceur divine, comme un pardon silencieux accordé à ma vie.

Ce prénom, je l’ai gardé pour moi.

Comme un secret sacré.

Un mot doux que je murmure parfois le soir, quand il bouge.

Quand il me dit :

« Je suis là, Maman. Même si tu as peur, moi je t’écoute. »

Chaque jour, je me prépare.

Pas à être une mère parfaite.

Mais à être présente.

À l’aimer, ce petit garçon, plus que je ne me suis jamais aimée.

À lui offrir ce que j’ai de plus beau : mes mots, mon courage, mes bras.

Et surtout, mon cœur réparé, pour lui.

Je ne sais pas encore tout ce que l’avenir nous réserve.

Je ne sais même pas où j’en serai demain.

Mais je sais qu’aujourd’hui, je veux être là.

Pour lui.

Pour Raham.

Et pour moi aussi, quelque part.

Car en portant ce fils,

Je me redonne naissance.

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