Ses chats et la souris

6 minutes de lecture

Je suis sur la route du bonheur. Là, j'attends la dépanneuse ... 

Les Mamonymous



Dans ces rencontres multiples au hasard du site, Ella voulait par moments trouver et échanger avec des hommes mûrs, voire bien mûrs pouvant presque être son père comme si deux ne lui suffisent pas. Ses chats ont chacun leur période unique d’homme mûr dans sa vie. Les rencontres ont été folles et précieuses et leur présence virtuelle encore aujourd’hui lui est quasi nécessaire. Elle a parfois l’impression de jouer d’eux qui rêvent encore de sa cambrure mais elle leur dit aussi que le sexe, elle n’en veut plus ou pas avec eux. Ils ne sont pas son avenir, au fond d’elle, sans leur avouer vraiment tout à fairt mais ils le savent, elle les devine, elle ne veut pas vivre et subir leur mort. Et oui selon toute vraisemblance, ils vont partir avant elle. En posant ces mots ainsi, elle réalise que c’est mal. Ils ont tellement fait pour la sortir de sa spirale dépressive, dépressionnaire à toujours lui tendre une main pour la sortir du puits … réellement, elle ne peut pas les abandonner là. Et en même temps, elle n’a plus envie d’eux. Alors ils s’échangent des messages à moindres fréquences qu’avant, à moindres régularités.


Fleur fanée par les aléas de la vie

Petite fleur à la vie accélérée

Blessée meurtrie ressuscitée


Chacun à sa manière l’a ressuscitée. Chacun à sa manière la maintient quand elle est en bad mood. Chacun a la sagesse nécessaire, pour la faire réagir et rebondir et ils sont précieux de conseils comme parfois de bras pour se perdre un peu en mode pause et lâcher prise. Cela ne signifie pas qu’elle fait l’amour, ils sont parfois juste un refuge pour Ella qui se ressource auprès de l’un ou de l’autre ou de l’autre encore. Quand elle répond « oui ça va ! » sans développer davantage, ils savent que forcément elle ne va pas bien. Ils creusent un peu ou la laissent venir car ils savent bien qu’à un moment, elle aura besoin de décharger ses bagages du moment, trop lourds à porter pour supporter les affronts de la vie. Ils acceptent cette place étrange … peut-être bien parce qu’ils l’aiment un peu, sûrement parce qu’elle leur fait pitié de son état de femme forte et indépendante qui n’est qu’une frêle et fragile femme qu’il faut soutenir pour qu’elle avance. Elle est butée bornée. Elle dit n’avoir besoin de personne, mais eux à distance de sa vie quotidienne, sont là … dans l’ombre quand elle appelle à l’aide sans toujours formuler le « help me ! »w

Le site de rencontres a amené des tas de belles rencontres à Ella, sans que ce ne soient des relations toujours sexuelles mais son univers secret est grandement masculin finalement. Là où la parole est libre car beaucoup sont passés par les mêmes désarrois de solitude ou d’envie ou les deux à la fois. Quoi de mieux que baiser pour se vider la tête et aller mieux même temporairement.


Je voulais lui faire oublier ces hommes de passage
qui ne l'avaient pas regardée ou mal, ces aventures au goût amer,
ces rejets qu'elle camouflait sous un masque de petit soldat fier.
Je la sentais parfois si fragile, si chancelante, sans point d'ancrage,
jouant des rôles dans lesquels elle se perdait.
Petite fille tremblante ou séductrice chevronnée,

apprentie balbutiante ou chef de chantier galonnée.
Je ne voulais pas la changer,
je voulais qu'elle se reconnaisse,
qu'elle fasse la paix avec elle-même,
qu'elle abandonne ses masques et ses peurs.
C'est cela que j'ai ressenti dès notre première rencontre : 

sa dérive éperdue,
prête à se donner au premier venu pour qu'il lui parle d'elle,
qu'il lui donne confiance en elle.
En quête d'un regard qui la reconstruirait.
J'étais ce regard.
J'allais la reconstruire.
J'étais assez fort pour deux.
Katherine Pancol


Ella est une souris perdue. Perdue dans la rue de la vie. La vie de couple. La vie de famille. La vie de travail. La vie de bénévole. La vie d’amie. La vie de femme. Oui celle d’une femme tout simplement. Une femme qui fait mille choses, pour mille gens et qui n’a besoin que de deux bras pour la soutenir un peu tous les soirs.

Mais le chat a choisi le mauvais cheval. Ce n’est pas toujours un mauvais bougre. Heureusement d’ailleurs. Mais ses bras, elle ne les veut pas, elle ne les veut plus. L'aimer lui son chat ? Mais pour quoi faire ? Il ne change rien à son quotidien de manque. Il ne lui ajoute du manque au manque.

Je ne veux guère me lever

Chéri va le chercher

La pose sur la table de chevet

Avant de me donner un baiser

Le café refroidit

Adossée dans le lit

Je sens qu’il a envie

De révéler ce mamelon

Tout beau tout rond

Sa bouche est attirée

Il commence à téter

À en perdre la tête

Ôter cette couette

Pour des galipettes

Du mamelon vers le nombril

Les corps en total exil

Pour deux exhib’

Qui s’annihilent


Il lui déclare « Madame sachez que vos fesses sont très bien foutues… que votre cambrure de reins est excitante… que vos seins sont un délice … que votre regard est plein de malice… et que votre bouche est un éternel appel à l'embrasser… quant à l'ensemble … c'est craquant ! ».

En réponse à cette déclamation, elle lui a dit « je suis amoureuse de vous », comme Ghandhi, il lui a dit « Je ne mérite pas votre amour, mais mon frère derrière vous qui est plus jeune et plus beau que moi oui ! ». Ella a regardé en arrière et n'a vu personne. Comme Ghandhi il lui a dit « si vous étiez amoureuse de moi, vous n'auriez pas regardé en arrière ».

Alors Ella lui écrit un poème … plus tard après son départ.

Je veux moi pas à pas

dans tes bras sur les draps

Je veux tes mains

sur mes seins

sous nos airs coquins

Je veux ta jolie queue en tête à queue

avec un queue-de-pie

Je veux écrire à quatre pieds

après avoir lu la femme de papier

Je veux me révéler sous le ciel printanier

Je veux nous enfermer dans le noir

d’un grand manoir

Je veux jouir de ton plaisir qui aspire

Je veux entendre

me susurrer des mots tendres

Je veux te sucer

du fond de mon palais

Je veux me lover comme m’empaler

Je veux par mes bas avoir la tête en bas

Je veux nos doigts enfilés sans filet

Je veux nos lèvres complices sans supplice

Je veux nous voir dans le miroir de l’espoir

Je veux la photo dos à dos

Je veux tout, dans l’ordre ou le désordre


Ses chats savent tous que leur différence d’âge ne les conduira jamais ensemble. Mais ils sont toujours là pour elle, cette femme ambiguë aux mille facettes, torturée de son passé, de son présent, de son futur, tel un amant, tel un père, ils lui font l’amour, ils l’écoutent, ils la protègent… les silences sont parfois longs, les relations sexuelles se disloquent… ils savent qu’elle mène ses combats intérieurs et au-delà, ils savent que sous ses dires de nonne, elle reste bonne à celui qui pénètre ses entrailles mais plus son cœur qu’elle a fermé … laissant malgré tout son cul traîner dans des lits espérant quand même trouver le prince charmant au détour d’une dinguerie ou d’un hasard servi sur un plateau.

Chacun sait que ce moment ne se produira que lorsqu’enfin elle s’acceptera, Ella, avec ses forces, ses faiblesses, ses entrailles et que sa tête sera moins tiraillée par tout ce remue-méninges d’âmes auquel ils ne croient pas mais la laisse dans cet état d’esprit qui semble, malgré tout, l’apaiser, la rassurer ou lui donne un sens à sa nouvelle vie, à son futur dans lequel ils ne seront plus car trop vieux.

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