15 novembre 2020 – Espoir

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Pour Henry, l’espoir restait la plus belle chose qui avait habité son existence. Cette petite flamme avait illuminé toute sa vie et, du haut de ses cent dix ans, il pouvait affirmer, à qui voulait l’entendre, qu’il serait mort depuis longtemps sans elle.

Pour comprendre cela, il fallait savoir qu’Henry était le cadet d’une famille de sept enfants et, au début du vingtième siècle juste avant la première guerre mondiale, voire pendant, la vie n’était pas toute rose. Il avait perdu son père en 1914, ; puis son frère aîné en 1916 à Verdun. Il avait essayé d’aider sa mère et ses petits frères et petites sœurs à vivoter. Les temps étaient rudes, tout le surplus étant réquisitionné pour l’armée, la guerre. Mais il n’avait pas perdu espoir de revoir son frère aîné malgré la mort de son père et le renoncement de sa mère. Celle-ci, après avoir couché ses enfants, pleurait longtemps son mari et son fils. Elle travaillait trois fois plus et ne dormait presque plus.

La vie sembla récompenser l’espoir d’Henry lorsque son frère revint, défiguré mais possédant toutes ses dents, tenant sur ses deux jambes et pouvant utiliser ses deux bras. Pour une fois depuis longtemps, sa mère ne pleura pas de tristesse, mais de joie. La joie infinie d’avoir retrouvé son fils vivant.

Les années qui suivirent, bien que compliquées financièrement, furent empreintes de bonheur. La petite famille vivait comme elle pouvait, au jour le jour. Puis vint le temps des amours, Henry rencontra Juliette. Ils furent heureux ensemble, puis le mariage arriva un an avant les accords de Matignon. Ils partirent à la mer l'été suivant.

Puis les temps difficiles revinrent, les tensions entre les pays européens menèrent à la guerre. Heureusement, le frère aîné d’Henry n’avait pas à y retourner, mais lui, il ne pouvait pas y échapper. Avec Juliette enceinte, c’était un déchirement de quitter ses terres, mais il n’avait pas vraiment le choix.

Alors quand l’armistice fut déclaré, il était mitigé. Il retournait en territoire libre auprès de sa femme sans être traumatisé comme son frère par la violence de la guerre… Mais il n’était plus réellement libre, sa France n’était plus réellement France. Encore une fois, il s’estima heureux de sa vie car il habitait en zone libre loin de tout le raffut que faisaient les Allemands.

Il fit ce qu’il pouvait de son côté pour ne pas aider l’ennemi. Il espéra pendant cinq longues années un meilleur avenir pour son fils et ses deux filles. Puis la libération arriva.

Et malgré la perte de sa femme, de ses deux frères et de son fils il avait toujours gardé le sourire et cette flamme de vie et d’espérance. Il souhaitait le meilleur pour ses filles, pour l’humanité. Quand la mort vint le faucher il l’accueillit en amie, et son mérite, celui d’avoir toujours espéré, lui valut la plus douce des morts.

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