4 septembre 2025
De fin juillet à début septembre, aucune nouvelle. A aucun moment je n'ai envisagé de lui écrire mais chaque jour je consultais ma boite mail. Plus le temps passait, moins j'espérais un message, pourtant mon coeur, lui, ne pouvait pas croire à ce silence. Chaque jour, ce coeur s'effritait un peu plus.
Je savais qu'à la rentrée nous allions nous revoir au travail. Cela m'angoissait sans que je n'imagine rien de particulier.
Le jour de la rentrée, quand je suis arrivée, il était là. Nous n'avons fait que nous croiser. Il m'a adressé la parole une fois ou deux, naturellement. Et moi, au cours de la journée, je me sentais de plus en plus mal.
Mon patron, qui savait que j'avais fait une tentative de suicide en juillet, m'a convoqué pour me demander ce qu'il pouvait faire pour moi. Alors, je lui ai demandé des aménagements de mon poste. J'ai prétexté me sentir trop seule dans le bureau quand Clément n'était pas là, et avoir besoin de travailler avec plus de monde que seulement lui. En réalité, je voulais éviter de le croiser.
Mais à ma grande surprise, mon patron avait un avis tranché sur ma tentative de suicide et le lien avec ma relation avec Clément. "Il a pris ses distances et tu n'as pas supporté".
J'étais abasourdie d'entendre ça.
Non seulement, ça résumait mon geste à un problème avec Clément, ce qui était faux. Mais en plus, la formulation même de la situation concernant notre relation était au mieux une caricature de la réalité, au pire un mensonge. N'avais-je pas voulu prendre mes distances, moi ? M'avait-il laissé partir ?
J'étais furieuse et décidée à rétablir la vérité.
Clément,
Je m’étais promis de ne pas t’écrire mais face à mes derniers échanges avec François-Xavier, je ne peux pas rester silencieuse.
François-Xavier m'a renvoyé une image déformée, probablement influencée par ta position : « Clément a pris ses distances dans la relation amicale et tu ne l’acceptes pas ». Je ne peux accepter une telle simplification de la réalité.
« Tu as pris tes distances » ? Est-ce vraiment ainsi que tu résumes la situation ? Te rends-tu compte que lorsque j'ai accepté la distance que tu as demandée en mai, c'est toi qui es revenu vers moi à plusieurs reprises ? Ça m’a donné l’illusion que tu avais changé d’avis et j’ai voulu renouer, mais pendant un mois je me portais très bien sans toi ! As-tu conscience de ta réaction de petit garçon blessé, de ta peur que je te déteste, de ton reproche d’épée de Damoclès lorsque j'ai voulu prendre mes distances en mars ? As-tu conscience que je voulais déjà mettre fin à la relation en décembre ? Si on remonte le temps, as-tu conscience que ta façon de me dire que tu n’avais pas d’amis m’a liée à toi d’une façon particulière ? Et pourquoi récemment me parler de « nos puissantes amitiés » si tu ne voulais pas une amitié puissante avec moi ? As-tu conscience de ta façon de renforcer ma peur de la solitude des HPI avec, en substance, « je suis comme toi et on n’est que 2% » ? Quoi le mieux que tout ça pour renforcer mon impression que notre relation était irremplaçable ? Tu dis que tu ne veux pas être indispensable mais tu as tout fait pour que je n’arrive pas à partir, et maintenant tu racontes que c’est toi qui a pris tes distances !
C’est bien joué, t’as le beau rôle du mec sain et indépendant et moi de la pauvre conne dépendante affective ! Chapeau l’artiste.
J’ai passé des interrogatoires sur mon geste de juillet et à aucun moment je n’ai mentionné que notre relation en était la cause. Je n’ai pas menti, tu sais toi-même que c’était un état général multifactoriel. Pourquoi alors parler de « ta distance » et de me faire passer pour une femme accro à toi ? Pourquoi ne pas plutôt parler de tes confortables flous, de tes messages contradictoires incessants, du non-respect des rares limites que j’ai exprimées, du jeu de « je te fuis tu me suis » que tu joues constamment et qui égarerait n’importe quelle personne tenant à toi ? Ce que je comprends aujourd’hui, c’est que ta manière de souffler le chaud et le froid n’était pas anodine : elle m’a maintenue dans un état de confusion et a réactiver, dès les premiers jours, une dépendance affective qui était guérie. Le côté aléatoire de ton besoin de connexion ou de distance ferait vriller n’importe quelle personne normalement constituée (c’est le mécanisme le plus fort pour créer une dépendance, c’est ainsi que fonctionnent les jeux d’argent et les applis stupides sur les smartphones). Tu as alterné entre des paroles qui créaient un lien fort, presque exclusif, et des prises de distance qui me faisaient culpabiliser et douter de ma valeur. C’est exactement ainsi qu’opère la manipulation : elle fait perdre confiance en ses propres ressentis, elle entretient l’espoir d’un rapprochement tout en instaurant la peur de perdre. Je ne dis pas que tu l’as fait consciemment, mais l’effet a été bien réel sur moi. Tu as douté plusieurs fois d’être un « connard manipulateur », et je t’ai rassuré sur ce point, mais aujourd’hui je suis pleine de doute et c’est très souffrant pour moi de te voir ainsi alors que j’ai encore beaucoup d’affection, de tendresse et d’empathie pour toi.
Je t’écris pour ne pas devenir folle, j’ai besoin de refuser un résumé déformé et injuste de la fin de notre relation ! Je ne rétablirai pas la vérité auprès de François-Xavier mais j’ai besoin de la rétablir entre nous, pour ne pas me laisser ronger par un sentiment d’injustice. Je crois que j’aurais besoin que tu me dises « effectivement ça s’est passé comme ça, je me suis comporté ainsi malgré moi » mais tu ne le feras probablement jamais. Alors je revendique moi-même la vérité, par respect pour ce que je suis, pour ce que j’ai donné et pour ne plus jamais me laisser manipuler de la sorte.
Nos schémas sont les deux faces d’une même pièce, puisses-tu ouvrir les yeux ! Je voulais qu’on grandisse ensemble et tu m’as fait croire que tu voulais grandir ! Alors grandi, maintenant ! Combien de temps vas-tu continuer à te raconter des histoires et à ne pas voir la manipulation que tu fais subir, inconsciemment, par tes mécanismes de défense, tes non-dits et ta peur du rejet ? Vas-tu raconter ces histoires sur moi à la prochaine, comme tu l'as fait avec moi sur Corine ? Ça fonctionne bien, ça crée l’empathie envers le petit garçon victime des méchantes femmes ! Mais vas-tu continuer ainsi encore longtemps à te mentir à toi-même pour éviter la douloureuse remise en question ?
Mon seul tort a été de croire que tu te remettais réellement en question. En brisant notre amitié tu m’as montré qui tu veux continuer à être et ton refus d’être l’homme que tu estimeras vraiment.
Mon psy me dit depuis des mois que tu as des comportements manipulateurs et que tu te re-narcissises à mes dépends. J’ai espéré que tu lui donnerai tort, que tu me donnerai raison de l’avoir envoyer chier ! Je me suis trompée.
Ouvre les yeux, remets-toi réellement en question ! Arrête de te mentir à toi-même. Je suis peut-être un dommage collatéral pour que tu ouvres enfin les yeux, alors fais en sorte que tout ça ne soit pas vain (fait chier, j’ai un côté Jesus, moi aussi, en fait).
Comment fait-on pour bosser ensemble, maintenant ? Va-t-on foutre ça en l’air, aussi ? Ne s’adresse-t-on plus la parole que par obligation ? Fait-on comme si rien ne s’était passé ? Dois-je retourner à un poste qui me fait chier pour ne plus qu’on bosse ensemble ?
Quelle colère ! Criante volonté de restaurer mon image publique et de refuser d’être réduite à “la dépendante”. J'avais un besoin fort de justice et de reconnaissance, je réclamais un aveu, une validation du tort subi.
Je lui attribuais nettement toute la responsabilité en lui reprochant son comportement « souffler le chaud et le froid », et en l'accusant de manipulation.
Je suis restée quelques semaines à me persuader qu'il était un dangereux manipulateur.
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