12 octobre 2025
Voilà.
J'ai relu toutes mes lettres à Clément, une par une. Aujourd'hui, j'ai l'impression que j'écris la dernière.
Clément,
Je crois que je pourrais écrire un livre sur l’attachement évitant.
Je croyais que j’étudiais ton style d’attachement pour sauver notre relation, « par amour », mais en réalité, ça me permettait juste de ne pas m’attaquer au mien.
Et à quoi est-ce que cela m’a servi ? Ca m’a envoyé dans le mur et ça a fini par détruire la relation que je voulais sauver.
Pourquoi diable ai-je passé mon temps à essayer de te comprendre, au lieu de me concentrer sur moi ? J’ai regardé des dizaines de vidéo sur les « évitants », quelles sont leurs peurs, d’où viennent-elles, ce qu’ils ressentent, etc. Le net regorge de vidéos sur les « évitants », tout simplement parce que nombreux.ses doivent être les anxieux.ses désireux.ses de mieux comprendre.
Mais en réalité pendant tout ce temps, je n’ai pas pris mes responsabilités pour soigner mon propre système d’attachement. J’étais obnubilée par la souffrance que « tu » me faisais ressentir. Même si je ne l’exprimais que rarement, je te blâmais au lieu de travailler à ma propre guérison. J’ai continué à confondre connexion émotionnelle et dépendance. Je ne réfléchissais pas à comment je pourrais guérir, mais à comment toi tu devais te comporter pour ne pas me blesser.
Je disais que je travaillais sur moi, mais je travaillais sur toi.
Je n’ai pas essayé de guérir, j’ai essayé d’apprendre une nouvelle langue pour t’expliquer pourquoi tu devais changer, pourquoi tu ne devais pas garder le silence plus de 4 jours ou mettre plus de 24h à répondre à mes messages, pourquoi tu devais être d’avantage proactif et comment je me sentais si tu ne le faisais pas.
Je n’ai pas cherché à guérir mon anxiété, j’ai cherché à comprendre pourquoi tu la réveillais.
J’ai cru agir au nom de l’amour véritable, cette louable volonté de grandir ensemble. Mais en réalité, je cherchais à ce que toi, tu grandisses, sans faire d’effort pour grandir de mon côté.
J’ai voulu t’expliquer. J’ai voulu que tu m’acceptes comme je suis sans réellement travailler sur moi. Pire, je crois que j’ai été la "pire version de moi-même" pour me prouver que je serais abandonnée une fois de plus.
Mais comment aurais-tu pu faire autre chose que de m’abandonner alors que je me suis abandonnée moi-même ?
Je voulais que tu m’aimes, mais je ne m’aimais pas moi-même.
Je pensais que si je t’aimais assez fort, tu finirais par voir la chance que tu as. Mais quelle chance ?
Alors, oui, tu as des torts, oui, tu as un travail à faire sur toi. Mais ton évitement, ta peur de l’intimité, ta peur d’être vu, de ne pas être à la hauteur, tout ça ne me concerne pas. Tout ça ne dit rien de ma valeur et n’aurait pas dû m’impacter.
Tu n’es pas la raison pour laquelle je me suis perdue. Je me suis perdue toute seule. Chacun de tes besoins de distances me disait que je n’étais pas assez bien, pas d’assez bonne compagnie pour toi. Chacun de tes silences me disait que je n’étais pas assez bien pour mériter une réponse. Chacune de tes incohérences me disait que j’échouais à te donner une safe-place où tu retrouverais ta liberté d’expression. J’ai perdu toute confiance en moi. D’abord en ma féminité et ensuite en le fait même d’être quelqu’un de bien.
Alors, j’ai besoin de me reconstruire.
J’ai besoin de reprendre confiance en moi en dehors du regard d’un homme. Je ne veux plus jamais être cette femme anxieuse qui quémande sa place dans la vie d’un homme.
M.
Je crois que tout est dit.
Si j'ai souhaité partager tout ça, c'est à la fois pour me reconstruire et pour que mon histoire, si elle peut, serve à d'autres.
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