Déjeuner sur l'herbe.

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En effet, l'endroit est paradisiaque, mais très difficile à trouver. Nous garons la voiture à l'ombre d'un vieux mur puis marchons dix bonnes minutes sur un chemin dont les traces disparaissent. Une magnifique clairière descend en pente douce vers la rivière. L'eau est limpide, un très léger courant circule entre de grosses pierres moussues et des galets ronds. Plus loin, un antique pont piéton à demi écroulé domine une petite plage de sable noir. L'ombre et la lumière se partagent avec équité l'espace, nous restons un long moment silencieux devant tant de beauté. Je déplie une couverture à un endroit herbeux et nous y déposons les paniers.

Claire, à genoux face à l'eau, lève son visage au soleil.

— Tu ne nous as pas dit que nous pourrions nous baigner. C'est trop bête, nous n'avons pas pris nos maillots de bain ! me reproche-t-elle gentiment.

Je leur réponds, mentant effrontément.

— Je ne savais pas, j'ai juste demandé un endroit sympathique pour déjeuner. J'avoue ne pas avoir regardé une carte, j'ai seulement retenu les indications fournies.

— Oh, nous sommes isolés et le coin est tranquille, dit Mat. Nous pouvons nous baigner en sous-vêtement.

Il donne l'exemple en retirant son bermuda. Il porte un simple boxer noir moulant en synthétique fin.

— Léopold, viens, elle est bonne !

Il entre dans l'eau, qui lui arrive rapidement aux genoux, la pente est raide.

Je fais semblant d'hésiter.

— Je ne préfère pas, vous savez... Je porte des trucs pas très adaptés à la natation.

— Comment ça ? m'interroge Claire sans arrière-pensée.

— Le genre sexy.

Mat se met à rire bruyamment.

— Allez ! Tu as un string ? Ce n'est pas grave, hein ! Il m'arrive d'en porter, mais enfin, je ne trouve pas ça très confortable.

— Non, non... Mais bon, vous l'aurez voulu.

Je retire ma chemise que j'accroche à une branche basse, déboutonne lentement ma braguette. J'ai l'impression de faire un strip-tease et vérifiant l'attention que me portent Claire et Mat, c'est exactement ça. Je fais tomber à mes pieds mon pantalon et relève la tête avec une innocence feinte.

— Vous voyez ?

Je tourne sur moi-même, les bras levés, comme pour montrer ma bonne foi. La lingerie est très moulante et si l'on devine mon sexe plaqué droit contre mon pubis sous la dentelle, l'arrière, fait d'une maille très espacée, découvre entièrement mes fesses. Je place mes deux mains sur ces globes que j'écarte un peu au moment où je les présente à Mat, dans un geste d'impuissance.

— Impossible de me baigner avec ça. Je préfère sans, si cela ne vous gêne pas.

Sans attendre de réponse, je glisse mon index dans l'ourlet, et descends lentement la culotte. Claire me sourit, amusée. Je regarde Mat, alors que, la culotte encore à mi-cuisse, ma petite queue se replace à l'horizontale.

Son sexe barre franchement son boxer dans une inconfortable érection, le tissu fin élastique dessinant parfaitement son gland gonflé. Souriant, je dépose la dentelle noire pliée sur la même branche, et rentre paresseusement dans l'eau. Arrivé près de Mat, qui n'a pas bougé d'un pouce, je lui lance :

— Oulala, elle est super froide ! Mais bon, ça raffermit, on dirait !

Je remplis d'air mes poumons, et plonge tête la première dans l’onde glacée.

....

Je remercie intérieurement ma mère, pour les séances de natation auxquelles elle m'a forcé d'assister dans mes plus jeunes années. Je remonte à la surface, une inspiration, mon corps reprend instinctivement ce battement rythmé qui m'est devenu naturel. Je file d'un crawl fluide jusqu'à l'autre rive, flotte un instant sur le dos, me laissant dériver, réchauffé par le soleil. Je repars plus doucement en brasse, appréciant chaque particule d'eau caressant ma peau nue.

Mat a regagné la berge, il ne s'est finalement pas baigné. Il fouille le sol avec attention, cherchant des cailloux plats qu'il lance en ricochet dans la direction opposée à la mienne. Je ralentis pour l'observer. Il a un air sombre, presque boudeur. J'espère qu'il n'a pas proposé à Claire de calmer son ardeur par une rapide fellation... c'est son genre, je le crains. Et elle est tout à fait d'humeur à l'envoyer se faire foutre, aussi. Zut, pourvu qu'ils ne soient pas brouillés, je n'avais pas anticipé ça.

Je me retourne et fais la planche un instant. Je dois m'avouer que rien n’est rigoureusement planifié : j'improvise, navigue à vue, prévoyant au moins de toucher une terre inconnue. Claire ? Mat ? Les deux ?

Pour l'instant, je reprends pied sur le sable. C'est le moment que choisit Mat pour pousser un cri, assorti d'un chapelet de jurons.

— Merde ! Je me suis coupé !

Je récupère ma chemise sur l'arbre. Elle se colle instantanément à ma peau mouillée. L'effet esthétique involontaire est plaisant, mais inadapté à la situation. Claire se lève pour rejoindre Mat, je suis déjà auprès de lui.

— Je crois que j'ai ramassé un bout de verre, cela saigne un peu.

Il ouvre sa main droite, maculée de sang : la paume est méchamment entaillée, d'une profonde et nette coupure. Je cherche dans l'eau à proximité : une bouteille de bière, brisée récemment sur les galets, en quelques éclats tranchants.

— Bon, je ne suis pas médecin, mais ça a l'air plutôt sérieux. Sans parler de recoudre, il faut désinfecter, voir si rien n'est présent à l'intérieur et poser des straps, sinon tu vas te traîner une vilaine blessure, handicapante pour un bout de temps. Habille-toi, je te ramène en zone civilisée, il y a forcément une pharmacie ouverte.

Mat me regarde avec intensité.

— Merci, mais ça n'a pas l'air si grave... je ne souhaite pas gâcher votre journée avec mes conneries. Restez là, je vais bander cette blessure avec une serviette de l'hôtel. Si tu veux bien me prêter ta voiture, je fais un aller-retour jusqu'à la ville pour consulter... C'est une boîte auto, pas besoin de la main droite ! ajoute-t-il avec un sourire désarmant.

Il n'y a pas mort d'homme, je vois une improbable opportunité pour un tête-à-tête avec la belle Claire... J'accepte, l'air faussement contrarié.

— D'accord, sois prudent. Je prends les clés dans mon pantalon, ainsi que la carte grise dans le portefeuille que j'ai glissé dans la poche arrière. Je lui tends l'ensemble en ajoutant :

— Je crois qu'en t'attendant, nous allons déjeuner, avec Claire. Toutes ces émotions... Ne t'inquiète pas, nous gardons ta part !

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