Contrat.

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Je pose le doigt sur le bouton de l'interphone, elle me répond, je décline mon identité, ma voix tremble un peu.

Il y a trois jours, j'ai découvert son message sur mon répondeur, rendez-vous chez elle, samedi, vingt-et-une heures. Dernier étage et porte blindée, parquet point de Hongrie, murs crème, lithographies signées.

— Bonsoir Léopold. Tu as trouvé facilement ?

Son appartement n'est qu'à deux rues du restaurant où nous avons dîné, j'ai compris à l'instant que le parking de notre rencontre est celui de son immeuble.

— Oui, Nathalie, merci.

Elle m'invite à la suivre au salon, les rideaux sont tirés, d'épais tapis couvrent le sol, un feu crépite dans la cheminée. Nous sommes tous deux au centre de la pièce, elle se tient debout, les jambes droites. Elle porte une tenue d'intérieur classique, une jupe de lainage et un chemisier rouge un peu terne. Rien de sexy, même si ses jolies jambes attirent mon regard. Elle est pieds nus sur le tapis, juste sa paire de bas noirs très fins.

— Avant d'aller plus loin, je dois te demander quelque chose : déshabille-toi, entièrement. L'appartement est bien chauffé, tu n'auras pas froid.

Ne pas obeir à cette injonction étant impensable, je me débarrasse rapidement de mon blouson, chemise et pantalon, j'ôte slip et chaussettes. Elle tourne autour de moi, m'observant en connaisseuse. Elle touche ma nuque, mes épaules, ma poitrine plate dont elle comprime les tétons puis les étire par jeu, prend la mesure de ma taille, flatte mon ventre plat. Elle saisit mes bourses, caressant mon gland du pouce. Je ferme les yeux, me forçant à penser à quelque chose de déprimant pour ne pas montrer signe d'excitation. Elle descend sur mes cuisses, aussi dénuées de poils que le reste de mon corps. Elle apprécie la finesse de mes attaches, mes os fins. Mes pieds étroits, pointure 38, semblent la satisfaire. Elle revient sur les fesses, les malaxant un instant.

— Sans plier les jambes, touche tes orteils. Bien, très bien. Pose les paumes au sol. Parfait.

Elle tapote ensuite l'intérieur de mes cuisses pour m'obliger à les écarter, passe la main entre mes fesses, caresse mon petit trou de son index, appréciant sans doute sa souplesse et sa bonne volonté à l'introduction d'un doigt.

— Très bien, assieds-toi près de moi, nous avons à parler.

Elle s'assoit sur un fauteuil club de cuir patiné, me montrant le sol de sa main, tout contre elle. Je prends place sur le tapis, en plaçant mes jambes pliées de côté pour conserver une position élégante. Elle caresse mes cheveux.

— Veux-tu une tasse de thé ?

Sans attendre ma réponse, elle remplit deux tasses d'une théière posée sur la table basse, m'en offre une. Le liquide chaud m'apaise.

— Cet examen clinique était nécessaire, je dois m'assurer que ton corps est conforme à nos projets. Tu le sais déjà, je cherche ma petite soumise, il est important que, naturellement, ta physionomie soit en accord avec ce statut. Tu as de la chance d'avoir ce corps si féminin. Je ne sais même pas si nous aurons besoin d'un corset. Ton visage fin et cette absence de pilosité vont nous faciliter la tâche. Nous pourrons ainsi sortir rapidement dans les tenues que je t'imposerai.

Elle boit une gorgée de thé, me regarde avec une désarmante douceur dans le regard, caresse ma joue.

— Soumission, féminisation, humiliation. Si tu le souhaites, c'est à ce régime que je te destine. Je suis une femme occupée, j'ai des amis, quelques amants de passage et amantes ponctuelles. Mais j'ai besoin de quelqu'un à mes côtés pour ne pas être seule et aussi pour réaliser mes fantasmes. Tu seras mon amie, mon esclave, mon animal de compagnie. Je peux te prêter, te louer, te baiser ou te faire baiser par d'autres.

Tu seras mon épouse, ma fille, ma confidente, tu pourras me confier tes peines, mais tu sera aussi celle que je gifle quand mon humeur m'y pousse. Tu riras et tu pleureras. Tu ne jouiras qu'avec mon autorisation, de la manière par moi décidée. À de très rares exceptions près, ta petite queue ne te servira plus hors fonctions naturelles.

Ah, j'oubliais. Ceux qui ne m'apprécient pas, te dirons que je suis une manipulatrice perverse. Que je suis calculatrice, égoïste, parfois violente. Encore même bipolaire, schizophrène, et j'en oublie. Mes amis t'assureront que je suis ultrasensible, occasionnellement romantique, toujours aimante, pleine d'imagination, protectrice et d'une fidélité absolue. Cette dualité t'effraie-t-elle ?

— Non, Nathalie. Peut-être parce que je me reconnais aussi dans certains de ces avis contraires ? C'est notre partie intime, multidimensionnelle, qui doit inquiéter ceux qui ne la déchiffrent pas.

— Bonne réponse. Tu n'as pas qu'un joli cul, tu as aussi une tête. La soumission par manque de caractère est la pire chose qui soit. Reprenons. Tu ne connaitras que deux conditions : le mode "off", comme actuellement, où nous formerons un couple — presque — normal. Dans ces moments-là exclusivement, tu pourras m'appeler Nathalie, user du tutoiement. Ton autre statut sera celui de soumise. Tu ne t'adresseras à moi qu'en utilisant Madame, Madame Nathalie et naturellement, Maîtresse.

Il n'y a pas de "safe word" pour tout arrêter si ça va trop loin. Je ne suis pas une dominatrice SM dans son donjon. Mon emprise n'est pas que physique, elle ne peut disparaître d'un claquement de doigts.

Tu deviens ma propriété, et tu me transfères le droit de décider pour toi pour toute chose, même la plus insignifiante. Je m'engage en retour à assurer ta sécurité et ton intégrité physique, et à satisfaire tes pulsions pour te maintenir dans un état psychique optimal. Pour le temps passé en soumise, et cela, jusqu'à ce que cet accessoire te devienne inutile, tu porteras cette cage de chasteté.

Elle se penche, prend sur la table une boîte rectangulaire de bois sombre. Il y a plusieurs objets de métal dans la boîte, hésite et prend celui du milieu.

— Elle est à toi désormais. Dans quelque temps, quand ton sexe se sera conformé à cette entrave, j'en ferai réaliser une à tes mesures. Cela permet en général une taille minimale et une contrainte forte, mais un port aisé sur de longues périodes.

Elle me tend la cage que je garde en main.

— Tu as huit jours pour te décider. Dans le porte-documents sur la table, il y a un texte que tu copieras de ta main et que tu signeras en double exemplaire, si tu es d'accord. Et une clé USB. Je te demande de me raconter ta vie, de ta naissance à aujourd'hui. Je me fiche de tes voyages scolaires et de ta première angine, mais je veux tout connaître de tes premières érections, tes traumatismes, tes expériences sexuelles et tes fantasmes. Utilise un traitement de texte, soigne la rédaction et enregistre ta vie sur la clé. Il est important pour moi de tout savoir.

Je te propose de vivre enfin la vie dont tu rêves, j'ai besoin de ces informations pour te la construire. Qu'en penses-tu ?

Je me redresse sur mes genoux, prend sa main dont je baise la paume.

— À très bientôt, Madame Nathalie.

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