Soumission.

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Le trajet du retour est un délicieux cauchemar. La cage d'acier est comme une enclume incandescente dans la poche intérieure de mon blouson, le porte-document de cuir glacé mauve me brûle les doigts. Une fois à l'abri, dans mon appartement, je dépose religieusement les deux objets sur la table,

Sans oser les regarder, je me sers un whisky, que je bois d'un trait.

Deux minutes plus tard, je vomis mes tripes dans le lavabo.

...

Ouvrir la pochette me semble impossible, j'ai peur de me jeter sur le papier, de le signer sans le lire. Je prends plutôt la cage en main, tentant de me l'approprier. Je tripote la clé accrochée à une minuscule manille ; j'en fais un symbole paradoxal de ma libération. Nathalie m'en a convaincue lors de notre premier rendez-vous. Sublimer la douleur, la contrainte, la honte, pour les refondre en plaisir, liberté et force. Je dois comprendre que ma seule forme d’autonomie possible est désormais l'acceptation consciente de la réduction de celle-ci. Et pour la tolérer, je dois la subir, dans ma chair.

La cage se sépare en deux, mais comment passer l'anneau derrière mon sexe ? Pas de notice. Après une demi-heure d'essais infructueux, meurtri, je trouve par hasard la méthode. Enfermer mon pénis est ensuite un jeu d'enfant. Enfin, si jamais les petits garçons ont des rêves de castration plutôt que d'en faire des cauchemars.

À bien y réfléchir, c'est peut-être mon cas.

Je déplie une paire de bas neufs de leur boite, les enfile lentement, tentant de calmer mon rythme cardiaque qui s'affole. Je glisse mes pieds dans des escarpins à très hauts talons que je réserve à un usage strictement intérieur.

J'observe le résultat dans la glace qui me fait face. Mon sexe, minuscule entre mes cuisses, se balance comme une petite chose inutile. Je sens le poids de la cage sur mon scrotum, perçois intensément la contrainte sur mon corps. Le sang qui pulse ne remplit plus la chair de ma verge, mais se diffuse massivement vers les terminaisons nerveuses de ma zone anale. Je me caresse mon périnée gonflé, mon anneau qui s'élargit naturellement sous la pression des doigts. C'est délicieux.

Je me décide à rejoindre le salon. J'ouvre le porte-document, en extrais deux feuilles d'un papier épais. Elles sont identiques, le même texte a été écrit puis signé deux fois par Madame Nathalie :

Je soussigné Madame Nathalie X. (ou : "Maîtresse"), accepte de prendre sous ma domination totale Monsieur Léopold X. (ou : "Soumise"), consentant ce jour à se plier à ma volonté, exclusivement.

Fait le xxx À xxx

Un texte à écrire de ma main est agrafé :

Je soussigné Monsieur Léopold X. (ou : "Soumise") accepte la domination totale de Madame Nathalie X. (ou : "Maîtresse"), et consent ce jour à se plier à sa volonté, exclusivement.

Fait le... À....

En bas, les deux feuilles sont préimprimées d'une mention, Le présent contrat ne peut être moralement annulé que par décision commune des deux parties.

...

Assise presque nue sur ma chaise,

moi, soumise,

recopie deux fois le texte suggéré,

inscrit la date du jour,

et

signe.

...

J'ai dormi avec mes bas et la cage. Après avoir paraphé l'engagement, j'ai bien allumé mon laptop, créé un nouveau document, mais j'avais l'esprit trop dirigé vers mon futur pour me concentrer sur mon passé. Je me suis écroulée sur le lit et la lumière du jour me réveille à présent. La cage me pince, mes testicules comprimés sont enflés et sensibles. J'ôte mes bas, file sous la douche. À travers les fins barreaux d'acier, je réussis à vider ma vessie. L'eau chaude me fait du bien, j'ai envie de me masturber, je caresse les parties de mon sexe restées apparentes, la frustration devient délicieuse.

Je dois demeurer concentrée, un travail d'importance m'appelle. Je n'ai jamais pris le temps d'écrire réellement autre chose que des lettres et cartes postales et bien sûr quelques rédactions lors de mes études. Ma connaissance de l'écriture autobiographique ne dépasse pas la lecture de Pagnol ou du Journal d'Anne Franck... Je suppose que Madame Nathalie n'attend pas de moi une oeuvre littéraire exceptionnelle, mais quelle forme adopter pour que ce ne soit pas soporifique ? Ma vie me semble si ...insipide.

J'écris une vingtaine de lignes, que je supprime immédiatement. J'entame la rédaction d'un plan que j'efface aussitôt. Je referme l'ordinateur, prends quelques feuilles et un stylo. Je réalise qu'il m'est plus facile de coucher mes mémoires à la plume, cela me rassure. Son grattement sur le papier me connecte à des souvenirs d'enfance, comme ces lignes recopiées sur mes cahiers à petits carreaux.

J'ai plus à dire que je ne le pensais, les images affluent. Cela va me prendre du temps, peut-être plus que la semaine allouée.

Je retourne dans ma chambre me changer. Je passe une robe courte, une paire de bas et des sandales à petits talons que j'affectionne. J'ai l'adresse mail de Nathalie, nous avions confirmé par ce canal notre première rencontre. Je dois l'informer de ma signature du contrat, dont je lui remettrai un exemplaire en main propre, mais aussi que la rédaction de mes souvenirs risque de m'occuper longtemps.

Je ne veux plus attendre d'être à son service, je souhaite être soumise sans délai, si elle l'accepte.

Je rédige le mail en ce sens, en restant humble et respectueuse, signant Léopoldine, soumise.

...

Maîtresse Nathalie me répond dans l'après-midi.

Oh, qu’elle est charmante, ma petite chienne, qu'elle est docile et soumise ! Ton empressement prouve ta motivation, ta Maîtresse apprécie.

Transmets donc par mail les chapitres de ta vie, au fur et à mesure de leur rédaction, je les lirais le soir, en t'imaginant allongée à mes pieds. Oublie la clé USB.

Un coursier viendra demain chez toi à onze heures te porter mes premières instructions ainsi que tes vêtements et accessoires, pour les semaines à venir.

Je vais commencer par te dresser, t'élever au standard de qualité requis pour mériter d'être ma petite esclave. Que ton abandon soit rapide, je n'ai pas que cela à faire.

Prends une photo de ton sexe en cage, transmets-la-moi, immédiatement .

Je remonte ma robe, et, assise fesses nues sur un tabouret, capture un gros plan de mes cuisses écartées dégageant mon sexe contraint.

La réponse arrive sur-le-champ.

Cette cage est BEAUCOUP trop grande pour toi. Tu recevras demain un modèle plus petit, qui annulera mieux ta désormais inutile queue de soumise. Suis mes ordres, écris-moi, et attends de mes nouvelles.

Je regarde mon sexe, chasse un bref moment d'inquiétude par un sourire. Je reprends ma plume.

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