De : Léopoldine. Objet : Votre soumise, chap.5

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Hélène me reçoit à nouveau chez elle, avec une proposition qui devrait me convenir. Elle recherche depuis quelque temps, en vain, une femme de chambre qui pourrait la seconder. Elle travaille pour monsieur Paul, un haut fonctionnaire désormais en retraite anticipée, après un cancer il y a cinq ans. Rentrée comme simple employée, elle a rapidement évolué vers un poste de gouvernante.

Sa maladie en rémission, Il s'est séparé du personnel, ne gardant qu'elle, qui s'occupe désormais de tout. Il ne reçoit plus, sort rarement. C'est un homme très secret, discret, elle ne lui connait aucune liaison et pense qu'il est peut-être bisexuel.

Elle a proposé à monsieur Paul de m'employer à ce poste, ne lui cachant rien ni de mon sexe, ni de ma motivation à vivre ainsi. Il a accepté, un peu surpris, Tu ne risques rien, je ne suis pas en train de vendre ton corps à un vieux pervers, me dit-elle en riant, voyant mes yeux qui s'arrondissent.

Dire que je suis stupéfait serait encore loin de la vérité. En réalité, je suis ravi ! Hélène me propose de travailler en femme, dans un univers connu. Comme je commence à ressentir beaucoup d'affection pour elle, travailler avec elle sera un plaisir. Concernant Monsieur Paul, j'imagine un homme distingué, réservé, d'une éducation parfaite, qui saura apprécier ma différence

Je peux débuter dès que ma présentation physique sera correcte. Pas question de décevoir cet homme. Hélène s'occupe de l'uniforme, très classique, une robe de service noire à manches courtes et col Claudine, avec un tablier blanc, des collants, chaussures plates. Elle m'emmène ensuite chez la coiffeuse puis une esthéticienne, pour accentuer ma féminité. Les salons sont très discrets, je suis bêtement terrifié à l'idée de pareilles prestations en extérieur, mais je dois passer par là et m'assumer de toute façon.

Le mercredi, je suis... Prête !

Elle me trouve très jolie, dans mon uniforme qu'elle a un peu retouché. J'adore ma nouvelle coupe de cheveux, un carré court avec une frange. Hélène me convainc que je n'ai pas besoin de maquillage, je ne suis qu'une femme de chambre. Hier, elle m'a appris les rudiments du métier, comment se tenir, ou bien s'adresser à monsieur. Je ne peux m'empêcher de l'embrasser. Elle me rappelle qu'elle est ma cheffe, et que je n'aurai peut-être plus envie de la remercier après quelques jours d'un travail ingrat et épuisant. Nous rions, elle gare sa voiture sur une place réservée, dans la cour intérieure de l'Hôtel particulier de monsieur Paul.

C'est immense, luxueux, mais toutes les pièces ne sont pas utilisées, nous n'aurons pas à nettoyer les trois cents mètres carrés tous les jours. Elle me fait visiter, puis me présente. J'appréhende beaucoup, s'il ne me trouvait indigne de travailler chez lui ?

C'est un homme charmant, de taille moyenne. Sous ses cheveux gris, le visage est très peu ridé, il fait plus jeune que son âge. Je suis un peu gourde devant lui, et je me présente de façon confuse. Il me sourit et me rassure gentiment en me tapotant l'épaule. Il prend congé rapidement en déclarant qu'il fait entièrement confiance au choix de sa gouvernante.

La première matinée est consacrée au ménage, puis nous réceptionnons des denrées qui sont livrées quotidiennement. J'aide à la préparation du repas, qu'elle sert à monsieur qui déjeune seul. Nous restons en cuisine pour le même repas.

L'après-midi, toujours occupées à des tâches ménagères et au rangement du linge, nous restons à disposition, il prend un thé à dix-sept heures. Nous préparons ensuite le repas du soir, qu'il prendra après notre départ. Tant que je suis en formation, nous travaillons ensemble, nous aurons des horaires décalés plus tard.

Nous rentrons vers dix-neuf heures, et je m'écoule sur mon lit, épuisée.

Je m'entends très bien avec Hélène, nous parlons -et rions- beaucoup, et elle se confie parfois, tristement, sur son passé. Comment elle a été séduite par un beau voyou plus âgé qu'elle, qui la force à se prostituer, puis lui fait miroiter une nouvelle vie dans la boutique héritée. Son départ, en vidant le compte en banque, lui laissant un enfant de dix ans à élever et des prêts à rembourser. Plus jamais elle n'a fait confiance à un homme, hormis Paul, qui ne l'a jamais touchée.

Plusieurs mois passent ainsi. Je suis désormais autonome et il m'arrive de sortir dans le quartier pour de menues courses. Les commerçants parlent de moi comme "La jolie petite bonne de Monsieur Paul", me rapporte ma cheffe, je suis ravie. Elle pense que je devrais passer mon permis de conduire, mes déplacements seraient plus aisés ; elle a un ami moniteur, elle va organiser ça.

Monsieur Paul est toujours très correct et amical avec moi, il me parle souvent, me pose des questions. Je lui réponds avec beaucoup d'honnêteté, je le sens bienveillant. Pour les fêtes de Noël, nous sommes seules, et il nous propose de dîner avec lui. Un traiteur s'occupe du repas, nous nous sommes faites belles, je peux enfin porter une belle lingerie, des bas, des chaussures à talons, je suis aux anges. Monsieur nous félicite, et suggère, en riant, qu'à l'avenir, je devrais peut-être porter un uniforme plus élégant et féminin. J'en frissonne de plaisir.

Nous lui avons fait un cadeau, une édition rare d'un roman qu'il affectionne. Il est très touché, et offre à Hélène une très belle montre - elle se met à pleurer d'émotion- et à moi une paire de boucle qu'il tient à placer sur mes oreilles lui-même.

Je me laisse faire, je sens sa main chaude et sèche sur ma nuque. Dois-je avouer qu'à ce moment, j'ai très envie de lui. Mais est-ce réciproque ?

Dans les semaines qui suivent, j'en parle à Hélène, j'ai peur de faire une bêtise, de tout gâcher. Elle me rassure, me dit que les situations doivent évoluer, sinon elles pourrissent. Je ne peux pas rester femme de chambre toute ma vie, et ma place ici n'est un épisode dans la vie que je dois construire. Elle a confiance, elle sait qu'il ne peut me faire du mal.

Un jour que je suis occupée à détacher des rideaux de leur tringle pour les porter à nettoyer, je rate une marche de l'escabeau et tombe. Cela fait un bruit terrible, j'ai brisé un guéridon en chutant dessus. Hélène n'est pas là, monsieur Paul quitte son bureau pour me venir en aide. Il me relève, j'ai mal à une côte, j'espère qu'elle n'est pas cassée. Il palpe mon flanc très doucement, me calme en me disant que ce n'est surement qu'un méchant hématome.

Je n'en peux plus d'attendre, alors je me déclare, en mode "tout ou rien".

Tout en lui proposant de regarder ma possible blessure, je déboutonne ma robe de travail, qui s'ouvre par devant. Je ne porte qu'une jolie culotte et une paire de bas en dessous. Sa respiration s'accélère. Je fais glisser la robe de mes épaules. J'ai brutalement envie qu'il me voie nue, telle que je suis. M'acceptera-t-il ainsi ? Je retire lentement ma culotte, je dois aller jusqu'au bout.

Je le sens hésiter un instant, je suppose qu'il sait qu'il n'y aura pas de retour possible, qu'il pèse les risques qu'il prend, les implications futures. Il fait un pas en avant, pose ses mains sur mes fesses, et m'embrasse avec passion.

C'est un amant merveilleux, doux, attentionné, inventif. Je m'offre à lui le premier jour, après ce premier baiser. Je ne pouvais plus attendre, je pense que, lui aussi, s'est longtemps contenu. Dans sa chambre, je le prends dans ma bouche, il est déjà dur, et je guide son sexe pour le poser contre mes fesses en le retenant longtemps à cette position. Je veux profiter, me souvenir de ce moment où il n'est pas encore en moi et où je le désire comme une folle.

...

Je reste avec monsieur Paul deux ans. Nous sommes amants, mais pas amis. Je reste sa subordonnée, salariée, nous usons toujours du vouvoiement. Même s'il me couvre de bijoux, de la lingerie la plus fine et me remplit un dressing de tenues sublimes dans lesquelles il aime me voir en privé, jamais, nous n'avons dormi dans le même lit. J'ai continué à le servir, avec Hélène bien sûr, dans les mêmes conditions. Je l'ai accompagné dans ses voyages, mais avec un statut de secrétaire, dormant dans une autre pièce, qu'il prenait soin de réserver pour moi.

J'aurais pu passer ma vie ainsi. Aimée, respectée et dominée. Il m'instruit et nourrit mon esprit, mais je suis aussi sexuellement satisfaite, tant il comble tous mes fantasmes avant que je ne les exprime. Il m'exhibe sans jamais me montrer, me viole sans jamais me contraindre. Je découvre les plaisirs de la fessée amoureuse, de l'humiliation désirée. Il aime me voir jouir sous ses caresses, je lui rends au centuple.

...

Au mois de juin, son cancer en rémission se rappelle à lui. Mon amie et moi découvrons les mots métastases, chimiothérapie.

Le 19 octobre, il décède à l'hôpital, inconscient, sous les fortes doses de morphine.

...

Sans l'aide d'Hélène, j'aurais sombré, tant mon inutilité sur terre m'était criante. Privée de monsieur Paul, je n'avais plus de raison d'être femme. Plus de raison d'être.

Elle me trouve rapidement un travail, pour occuper mon corps, et je classe désormais des dossiers dans un grand cabinet d'assurance. La responsable de l'agence est une femme très maternelle, une connaissance proche. Elle m'encourage à reprendre des études pour pouvoir m'engager à un poste plus intéressant, je me décide à suivre son conseil au bout de quelques mois, en préparant un BTS, à distance et en alternance.

Je reprends le genre de mon sexe biologique.

Monsieur Paul n'avait pas d'héritiers directs. Par volonté testamentaire, une grande partie de sa fortune est léguée à des associations LGBT. Une autre revient à Hélène, la mettant à l'abri du besoin pour toujours. Ironiquement, j'apprends qu'elle et monsieur Paul étaient pacsé, depuis son premier cancer, uniquement pour lui permettre d'hériter d'une partie de ses biens.

J'hérite à ma grande surprise d'un appartement à Paris, ainsi que de l'importante somme nécessaire au règlement des droits de succession. J'habite toujours cet appartement.

Après deux ans, mon diplôme en poche, j'intègre le staff de l'agence comme conseiller. Émotionnellement, ma vie amoureuse est au point mort, je n'arrive pas à dépasser le vide que monsieur Paul a laissé, malgré la béquille des antidépresseurs. J'ai une relation semi-platonique avec Corinne, une collègue de l'agence, qui ne sait pas si elle est une lesbienne qui s'ignore, ou une hétéro qui n'aime pas les hommes. Nous échouons à résoudre nos problèmes ensemble, mais nous restons très amis.

Je quitte finalement l'agence, trouve un travail identique pour une société étrangère qui n'a pas de bureau en France. Je travaille donc de chez moi, et cela permet à Léopoldine de refaire surface. J'ai quelques aventures, sans suite.

Je décide enfin à m'inscrire sur un site de rencontre, spécialisé dans des relations de soumission consentie.

Après quelques profils que je refuse, on m'unit à une très belle Maîtresse, qui m'accepte telle que je suis, pour faire de moi ce qu'elle veut.

FIN

Maîtresse Nathalie, je termine ainsi la rédaction des chroniques de mes courtes expériences.

Je souhaite ne pas vous avoir ennuyée, avec de si plates aventures.

Et soumise à vous, j'oublie tout mon passé, vous faites de moi une autre femme.

[ Fin de la deuxième partie]

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