Le premier mur
> « J’écris ce que Maurevers tait. Et parfois, j’ai peur que ce soit trop. »— Extrait du carnet 16 mars 1901
Le bureau de Maître Lauris semblait figé hors du temps. Boiseries ternes, tapis usé, globe terrestre d’un autre siècle. Dans cet antre d’érudition, chaque meuble semblait avoir une mémoire. Une fonction précise. Comme s’il s’agissait d’un décor où la vérité attendait son rôle.
Maurevers arriva tôt, redingote parfaitement ajustée, chapeau sombre à la main. Il n’attendait pas une approbation, mais une alliance.
— Vous n’étiez pas censé revenir vers moi, dit Lauris en levant à peine les yeux.
Maurevers se contenta d’ouvrir la serviette. Un à un, il en sortit les documents, les posa, les ordonna. Puis il tendit un fragment jauni.
— Regardez cette marge. Le nom. Duval. Il ne devait pas être là.
Lauris fronça les sourcils. Il était de ceux que seule la faute choquait, pas l’injustice. Mais cette fois, il y avait les deux.
Ils travaillèrent des heures. L’après-midi fut rythmée par le froissement des papiers, le grattement de plume, les soupirs discrets. Vélin, silencieux, griffonnait, dessinait même — des visages, des plans, des liens.
— La révision sera refusée, dit enfin Lauris. Du moins en surface.
— En surface, oui. Mais nous ne cherchons pas une victoire judiciaire. Nous voulons créer un tremblement.
En fin de journée, une enveloppe fut remise en main propre. Papier satiné, cachet sec. À l’intérieur : une convocation. Chambre des Silences.
Lauris la lut deux fois.
— Ce n’est pas un accueil. C’est un avertissement.
Il y a des mots qui n’ont pas besoin de menaces pour être dangereux. « Chambre des Silences » en était un.
Le nom même de cette pièce résonnait en Maurevers comme un écho d’enfermement. Pourtant, ce n’était pas la peur qui le faisait frissonner, mais l’excitation glacée de la vérité imminente.
À la première heure, il se leva. Il savait déjà quoi dire. Mais il ignorait ce qu’on lui permettrait d’entendre.
— Et moi, dit Maurevers, je prends chaque avertissement comme une confirmation.
t
> Il y a des mots qui n’ont pas besoin de menaces pour être dangereux. « Chambre des Silences » en était un.
Le nom même de cette pièce résonnait en Maurevers comme un écho d’enfermement. Pourtant, ce n’était pas la peur qui le faisait frissonner, mais l’excitation glacée de la vérité imminente.
À la première heure, il se leva. Il savait déjà quoi dire. Mais il ignorait ce qu’on lui permettrait d’entendre
Annotations
Versions