Orgueil
Le soleil était haut et, depuis son piédestal, il irradiait la mer infinie. Le ressac et les mouettes jouaient paisiblement et seuls les cris graves des marins dépassaient. Voyageurs, mages et ambassadeurs se pressaient mollement pour embarquer vers le coeur du monde et, qui sait, peut-être y trouveront-ils fortune ou pouvoir. Peut-être même la liberté tant cherchée.
Les immenses embarcations tranquilles titubaient, projetant parfois quelques embruns parfumés. L’appel des voiles blanches, gonflées par le vent chaud, sonnait comme un cor d’ivoire. Elle se retourna, contemplant sa victoire à la fois douce et amère, pareil aux figues qui avaient soigné son corps. Puis elle s’avança, quittant la terre le temps d’un croissant.
Elle ne retoucha le sol qu’en son coeur. Enfin. Le brouhaha, le tumulte, la foule, le chaos, la paix. Pouvoir être n’importe qui, tout le monde, quelqu’un et personne. Puis le flot interminable des gens l’emporta, sans distinction.
Aussi absurde qu’elle fut, la pensée de l’ennui la traversa. Aussi absurde que le marchand à l’étal vide ou le forgeron au foyer éteint. Un vide pathétique. Elle ne pouvait qu’en rire. L’ennui n’est-il pas le premier par vers la réflexion ? Alors elle s’ennuya.
Peut-être allait-elle remercier les dieux de l’avoir aidé dans cette évasion… Mais qui l’avait aidée ? Non, pas les dieux . Ils ont préféré la voir dépérir, croupir. Seul un homme l’avait secouru, presque par hasard, presque par défi. Mais l’hubris est bien mauvais conseiller.
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