Le doux ronflement des alambics avait guidé sa vie, durant laquelle il avait plus goûté, senti et essayé que n’importe quel autre. Il avait pour seul bien son savoir. Du reste, il estimait que ça n’avait pas de grande importance. Il aidait les hommes et lui-même par la science et sa raison.

    Parfois, il priait les dieux. Non pas pour imiter le reste de la foule, dissimulée dans l’ombre des temples. Il aimait les belles idées et parfois, pour contempler d’un peu plus près le beau, il priait les dieux.

    Souvent, le soir, il recherchait la compagnie des hommes de la cité. Qu’importe leur statut social, leurs richesses ou leur savoir. Il discutait des affaires avec les puissants, déplorait la pauvreté d’esprits des plus riches et éduquait les plus jeunes. Ainsi la cité l’honorait comme un prince, lui qui n’était qu'un homme.

    À chaque fois, après avoir discouru sur la nature de l’homme, sur la vie, ses espoirs ou même la mort, il écrivait. Sans omettre la moindre de ses pensées, de celle de ses amis, de ses détracteurs ou de ses élèves. Il aimait écrire sur ses rencontres et sur l’histoire de la cité. Un jour, on le lira pour connaître la vie d’un roi, ou d’un guerrier légendaire. Mais lui, lui depuis longtemps aura été oublié.

    Il se demandait si la somme de savoir qu’il avait accumulée allait être, un jour, consultée, puis à son tour débattue. Il en riait, caché parmi ses sourds rayonnages. La nature des Hommes ! douce folie, déliquescence et recherche des plaisirs. Cependant, il continua à écrire, jusqu’au jour où son corps heurta une dernière fois sa couche.