Terminus, tout le monde s'embrouille

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Le haut de la tour s’embrase !

Toutes les têtes, amies, alliées ou ennemies, se lèvent vers les cieux. Des morceaux de charpente, de verrailles, de titanes et autres métaux fendent l’air, s’écrasent en fumant sur le béton scarifié par l’affrontement.

- Nom de…

Martha se protège le visage, avant de se réfugier dans l’ombre d’un camion retourné. Des morceaux de fonte s’écrasent à l’endroit qu’elle vient d’abandonner. Les projectiles sifflent.

- Qu’est-ce qui se passe ?

La question a échappé à Psy. Malgré sa fine barrière protectrice, le SuperZ en lévitation, louvoie entre les débris, jusqu’à stopper, d’extrême justesse, l’antenne qui auparavant catalysait la foudre. Arrachée à son support, fondue par le milieu, elle touche terre dans un bruit mat.

- Ce n’est pas possible, murmure Psy, sondant le champ de bataille.

Le bouclier a cédé. Non par les assauts répétés des Pandas, mais depuis l’intérieur. Le SuperZ fronce les sourcils. Quelque chose se rapproche. Quelque chose de familier. Vite. Très vi…

La foudre s’abat ! Devant les portes béantes du Donjon, un éclair céruléen fracasse le sol, déchiquetant le bitume, envoyant voler tout ce qui s’y trouvait dans un nuage de poussière électrostatique. Lorsqu’elle se disperse, quelqu’un est maintenant accroupi sur le sol, silencieux.

Cette présence… Psy frissonne. De fines volutes de condensation s’échappent entre ses lèvres brûlées.

Non… pas lui…

Par réflexe, il porte une main à ses yeux mutilés. Il n’a besoin de voir son bourreau pour en reconnaître l'aura. Le froid, la foudre… On ne peut les contenir sans sacrifice. Il s’est échappé ! Il faut de l’aide, maintenant ! Le télépathe ouvre son esprit, sauf que…

Noir. Il n’y a rien que du vide. Les énergies saturent, aucun flux conscient n’accroche son esprit. Ni au sol, ni en dessous, juste une sensation collante, paralysant son corps flottant, poissant ses pensées d’ordinaire si puissantes.

La peur.

- Sigma… souffle-t-il, sa conscience érigée en bouclier protecteur autour de sa silhouette ballotée par l’effroi.

Il l’a entendu et bientôt sera sur lui. Psy soulève tout ce qui traîne… Sur sa droite, un objet file. A sa rencontre. Il lève sa main.

- Elrin ! Vas-y ! crie une voix.

- Encore en vie, vieille harpie ? sourie Psy, prêt à retourner la roue contre son envoyeur.

Une explosion de douleur lui cisaille la taille. Une masse effilée s’est fichée en travers du corps, lui faisant perdre le contrôle. Il hurle.

- Argh !

Après la peur, la souffrance, ravivant de douloureux souvenirs, qu’il n’a toutefois le temps de goûter. Au moment où son corps, copieusement embroché, va pour s’écraser au sol, quelque chose creuse sa poitrine. Tout l’air est expulsé de ses poumons, clapotant de résiné.

Le monde explose.

Un éclair le traverse de part en part, lacérant de son souffle la frêle constitution du SuperZ, gelant sa bouche grande ouverte dans un cri silencieux. L’air est froid, épais. Ses mâchoires se cristallisent soudainement et une main parcourue d’électricité se referme sur son visage.

Psy devine la silhouette, ses yeux brûlants, violacés, Un nouveau coup de poing lui comprime la trachée. Incapable de crier, un gargouillis s’échappe de sa gorge à présent gelée. Abandonnant son égo, il voudrait supplier, se prosterner, mais son corps ne répond plus. Glacial, le froid est partout durcissant ses fluides, crevant son cœur épuisé, de piques de glace.

- P… P… é…

Ce furent ces dernières paroles. Bien triste épitaphe pour celui qui a été le SuperZ tant adulé des foules. À la mesure de la désintégration de son organisme. Des mains de Sigma, ne reste plus qu’une fine poussière lunaire, scintillant dans les cendres, emporté par le vent et les hurlements terrifiés.

Non loin, Martha et Elrin sont restés en position défensive. La scène a été si rapide ! Cinq secondes tout au plus et le SuperZ qui à lui seul, a massacré la moitié de leurs effectifs, n’est plus.

- L’ennemi de mon ennemi est mon allié, souffle Elrin, sans quitter des yeux le mutant électrique.

- Je s’rai pas si sûr, tu vois, répond Martha avant d’interpeller franchement le nouveau-venu. Hé ! Toi !

Dans la seconde, il est devant eux. Elrin cligne, l’un de ses pieds fuse, seulement pour être attrapé et immobilisé sous une aisselle glaciale.

- Rapide… Hum… Qui êtes-vous ? demande-t-il simplement, la jambe d’Elrin solidement bloquée sous son bras. Vous avez pas l’air de faire partie de ces givrés. Vous êtes les fameux “révolutionnaires” ?

- Et qu’est-ce tu vas nous faire si on répond, oui ? gronde Martha, prête à ouvrir les valves.

- Je vous demanderais si vous avez déjà croisé… c’était quoi leur nom déjà… Hum… Un petit gars haut comme ça, au phrasé bizarre et un excité jurant comme un charretier, répond Matthew à force de gestuelles confuses et de descriptions ratées.

Martha et Elrin échangent un regard.

- Aisaan ? prononce Martha.

- C’est ça ! Voilà ! Un nom bizarre et des insultes plein la bouche. Vous le connaissez ?

- Qui es-tu ? demande Elrin.

- Ah ça… C’est compliqué, soupire Matthew. Enfin, je vais prendre ça pour un oui, hum ? Ravie de vous rencontrer du coup. Maintenant, si vous le permettez, j’ai un petit coup de balai à passer.

- Hé là ! Attend...

Sans laisser le temps à qui que ce soit de lui donner une quelconque forme de réplique, Matthew file, zébrant les troupes armées d’arcs voltaïques, projetant alliés comme ennemis contre les débris fumants.

- Je sais pas qui c’est, mais à ce rythme, il va tous nous égorger ! tempête Martha. Repliez-vous, éloignez-vous de la tour !

Hélas, ses paroles se perdent parmi les détonations et le sifflement des projectiles, ponctués des cris de surprise et douleur mêlés, au passage de Matthew. Après un tour complet autour de l’édifice amoché, celui-ci bondit dans les airs.

Autour de lui, l’atmosphère se condense brutalement, esquisse les prémices d’une nouvelle ère glaciaire. Lors de l’atterrissage, ses paumes frappent la base de la tour, propageant une épaisse couche de givre sur toute sa surface. Alors, sans trompette, ni bombarde, un éclair aveuglant vient une dernière fois frapper l’édifice.

Les mâchoires béent, la tour pète, ouverte en deux. D’une onde de choc, ses entrailles de métal giclent hors de ses parois pourtant pratiquement indestructibles, soufflant son haleine carbonisée sur toute la ville. L’ogre d’Esprenys qui des années durant, dominait les cieux, gît maintenant plié en deux, déversant ses larmes métallisées sur les rues courroucées.

Dissimulés derrière les vestiges d’un poste d’observation, décapité d’un jet de voiture, Martha, Elrin et une poignée de pandas encore debout, contemplent le spectacle, victorieux. Bien qu’étranger au coup de grâce, leur est ennemi est enfin à genoux.

- La fin est proche, prononce Martha, alors qu’au loin se répercutent les clameurs d’un monde affolé.

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