Aussi longtemps que je puisse me souvenir, j’ai toujours aimé jouer. Petit bébé, mes pieds étaient incrustés dans le bac à sable des petites heures du matin jusqu’au coucher du Soleil. Enfants, Victor et moi sortions dans les ruelles du quartier pour jouer au ballon ou se lancer la balle, chose que je ne pouvais faire avec un père absent. L’amusement et le divertissement font partie intégrante de ma jeunesse et de mon adolescence. Qu’est-il arrivé?

Je crois que la mort de maman et le désir de fuire ont pris le dessus sur les jeux de ballons et de balles. Mon âme enfantine et mon cœur de jeunesse ne sont plus aussi présents qu’auparavant. Sont-ce les raisons de ma perte identitaire ces derniers temps ? Serait-il donc important d’embrasser son enfant intérieur afin de jouir de son innocence et d’ignorer les méfaits que la vie nous apporte ? Dans une société hiérarchique comme la nôtre, il est impossible de vivre dans le déni de toute chose, sentiment, action sérieuse: nous nous devons de regarder la réalité dans les deux yeux pour avancer, pour « grimper les échelons ». Et si je ne veux pas les grimper, ces échelons ? Et si je veux rester dans ma bulle d’enfant, rire avec la vie plutôt que de la vie, ne voir que le rose dans le ciel chromatique de l’espoir ?

Le Soleil maintenant rendu au zénith, le nombre de piétons me dévisageant approchant de la centaine, je me remets sur mes deux pieds, essuie mon visage d’un mélange d’eau salée et de sang, et me questionne sur la suite des choses. Quelles sont mes valeurs ? De quoi suis-je formé? Pluton est-elle vraiment une planète ? Le ciel en est rempli, et Pluton est dans le ciel, alors pourquoi ne serait-elle pas une planète ? Mon esprit divague. Mes paupières sont lourdes. Ma dernière nuit de sommeil remonte déjà à un bon moment, et mon lit me manque affreusement. « Je ne peux retourner là-bas, je ne dois pas succomber à la fatigue », me dis-je, mes jambes déjà en marche vers mon humble et ténébreuse demeure.