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LES ICÔNES DU PÉCHÉ - chapitre quatrième
Hors antenne
— Vous souvenez-vous, cher Monroe, des dossiers disparus d'Emerance et de l'ombre funeste qui plane au-dessus de notre monde ?
— Bien évidemment ! Je me souviens aussi de votre théorie à laquelle j'adhère totalement, ma Janette !
— Et bien, les dossiers restent introuvables, Monroe. Cependant, la maquilleuse ne les a pas encore vendus à la concurrence, autrement toutes les chaînes du multivers en parleraient déjà. Bonne nouvelle, en quelque sorte, puisque nous gardons la primeur. De plus, Emerance a bien travaillé, ces derniers mois, pour rattraper la boulette des studios - il faudrait investir dans un coffre sans fond comme celui que vous avez chez vous - elle a retrouvé l'empreinte du mal absolu. Le destructeur des mondes a injecté son venin dans une petite région oubliée des USAY...
— Vous m'en direz tant, ma chère... oh, c'est à nous !
*
À l'antenne
— Chalut, les Troll-spectateurs ! Chalut, ma Janette !
— Bonjour, les trollitos ! Marcello !
— Je trépigne d'impatience, Janette ! Avez-vous des nouvelles de notre pigiste de l'horreur, c'est quoi les news aujourd'hui, je suis perdu ? L'excitation me fait perdre la bulle !
— Non seulement j'en ai, Marcello, mais je peux vous dire que son enquête avance à grands pas !
— Ne prenez pas vos airs mystérieux avec moi, ma Janette ! Servez-nous donc une tasse de ce merveilleux thé bleu du Tibet et parlez-nous de ce nouveau documentaire que nous avons hâte de découvrir !
— Et bien... c'est toujours Alessya, notre pigiste du bizarre qui réalise les reportages de l'horreur. En attendant qu'Emerance finisse le montage de sa dernière trouvaille, alors nous allons devoir patienter un peu, cher Marcello... lancez l'holovid !
~*~
Famille
Parish rentre tard. La section spéciale a fini par arrêter le Doll Master. Non sans mal. Kelly Burke n'a pas été retrouvée à temps. Dorian a dû annoncer la terrible nouvelle à ses parents. La jeune fille avait à peine dix-neuf ans. En refermant la porte de chez lui, il s'adosse à celle-ci, puis se laisse glisser, vidé. Il ose à peine imaginer sa réaction, si cette tragédie avait touché sa petite famille. Quelques semaines auparavant, c'est Jessica Preston, une petite de l'âge de sa nièce, qui n'avait pas eu de chance. Son frère ne se remettra sans doute jamais de cette perte. Il culpabilisera toute sa vie de n'avoir rien pu faire, alors que ce n'est pas de sa faute. Qui peut empêcher le mal d'empoisonner le cœur des Hommes ? Personne. Megan s'approche de son frère, une bière dans chaque main, s'assoit à côté et lui tend une des deux bouteilles. Le jeune homme boit une gorgée.
— C'était comment ta journée ? demande Dorian.
— Pas pire que la tienne, je pense. Irene a appelé. Comme d'habitude, elle a insisté pour voir sa petite fille, puis m'a quémandé de l'argent. Le scénario habituel. Cinq minutes plus tard, c'est Jordan qui me harcèle pour voir sa fille. L'ordonnance du juge est pourtant claire. Je ne vais pas t'ennuyer plus longtemps avec mes soucis de toujours. Raconte, t'en as bavé, j'ai l'impression ?
— Cameron est couchée ?
— Depuis une heure.
— J'aurais aimé la border. Petit bout... Sept ans déjà. Le temps passe vite.
— Oui.
— On vit dans un monde de dingues. Kelly est morte. Nous sommes arrivés trop tard. Il l'a vidée de son sang et allait la balancer à la décharge. Le nouveau nous a bien aidés.
Dorian finit sa bière, puis se relève.
— Il m'en faut une autre, s'exclame-t-il, tendant le bras vers sa sœur.
Elle l'aide à se relever. Tous deux se rendent dans la cuisine, en silence, pour ne pas réveiller Cameron. Cela fait six mois maintenant, que les filles vivent chez lui. La famille Parish au complet. Le jeune homme adore sa nièce, une petite très mature pour son âge. Il est heureux que Megan se soit enfin décidée à accepter son aide. Après ce qu'elle a dû endurer depuis sa plus tendre enfance, Dorian peut enfin jouer son rôle de grand frère. Le décès de leur père les avait séparés. Étant nés de mères différentes. Il était tout ce qui leur permettait de garder contact, à l'époque. Parish se reproche d'avoir failli. Il n'a pas su protéger sa petite sœur, devenue aujourd'hui une femme forte, ne montrant jamais ses émotions, redoutant d'en affecter sa fille. Dorian désir profondément apporter à la petite Cameron, tout ce qu'il n'a pu donner à Megan. Et elle le sait. Elle aimerait tant qu'il cesse de se blâmer de ce dont il n'a jamais été responsable. C'est sans doute la raison pour laquelle son frère a choisi de traquer les criminels les plus dangereux du pays.
— Tu te lèves tôt demain ? lui demande Megan, sortant deux autres bières du frigo.
— Levar m'a donné un jour de congé.
— Un film. Je veux qu'on s'installe tranquillement devant un bon film et qu'on se détende ! Pacific Rim ou Edge of Tomorrow ? lance la jeune femme en cognant doucement sa bouteille contre celle de Dorian.
— Pacific Rim alors. Et demain on pourrait traîner tous les trois au lit, devant la filmographie de Idris Elba, réplique le jeune homme, faisant un clin d’œil à sa frangine.
— Hmm. Tu me prends par les sentiments ! Heimdall... Yummy !!
— La Tour sombre et les Marvel, Cameron peut regarder ça ?
— Sans problème, Do, elle connaît.
— Mon patron a plus que des faux airs d'Idris Elba !
— Et tu me l'as caché, tu fais exprès ? Loue le ciel que Cameron soit en train de dormir, sans ça, tu finissais direct sur le tapis ! lance la jeune femme en mettant une claque sur l'épaule de son frère, puis se penchant vers la télécommande pour lancer le DVD.
Frère et sœur retombent en enfance, se remémorant les Comics qu'ils dévoraient assidûment chaque fois qu'un nouveau numéro sortait en librairie. Après une journée si éprouvante, ils méritent bien un moment de complicité en famille.
Les chroniques du Monde - BEHAVIORS
Réalisation : Alessya M. pour TROLL MAG INFINI-TEA
~*~
— Janette, il serait très intéressant de rencontrer les membres de cette section afin de les interviewer.
— Quelle bonne idée, Marcello ! Et nous pourrions leur demander leur ressenti quant à la menace qui plane au-dessus de nous...
— Oui, ma Janette, si vous ne faites rien ce soir, je vous invite au restaurant ! Joignons l'utile à l'agréable, nous pourrions travailler sur les questions en dégustant des gnocchi all'Arrabbiata accompagnées d'un bon petit Orvieto, par exemple ?
— Avec plaisir, cher Marcello ! En attendant, à la semaine prochaine, chers Troll-spectateurs et ne trollez pas trop devant l'écran !
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