(III)

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— Pose ton cul !

— Non !

— Fais gaffe...

— Oui ! Oui ! Oui !

Ils ont tiré leurs grands couteaux, grossiers comme des restants d'hélices raccourcies à la pierre, empoignés par des lambeaux de fichus qui devaient s’appeler chemise... ou bien jeans... Méconnaissables, ils les serrent dans leurs paumes comme pour leur rappeler l'essorage ; drôles de lavandières : se préparant à faire du sale, le sifflet à l'air. Il l'avait averti, Fallait pas qu'il s'approche. Visiblement, tu as un protecteur chez les barbares.


Coup de bol. Coup de boule. Pile dans la bouche de Simplet.
C'est pas ça qui va l'aider à mâcher ta viande sèche de pèlerin.


Riposte. Rasage de prés.
Il s'en ait fallut de peu que des bras n'en tombent des nus.


Deuxième tentative.

La pointe dans le bide.

Touché.


Ça, c'est pas bon pour toi Marat ; tu as tout intérêt à parier sur l'autre : celui qui veut te bouffer plus tard. Ça pisse du rouge partout. Il charge. Lui ceinture la taille. Son oreille contre son cœur. Il serre, Serre ! serre. Le jette au sol. Le couteau tombe. Rencontre avec une pierre : le glas sonne, mais la cloche est vide :

— Pov'con...

Pas mieux.

Un de plus en moins . La belle affaire !Emballé, c'est pesé, n'en parlons plus. Ayant cessé, place à ceux qui persistent ! À Toi, à ton héros qui se traîne dans ce qui lui reste de force pour adosser contre la passerelle son corps percé qui fuit dru entre ses doigts lymphatiques. Il n'y peut rien bien sûr, mais il essaie quand même de faire barrage. Se met la pression, se décolore, le visage en drapeau blanc. Peut-être pense-t-il que la reddition n'est pas certaine. Que s’il lutte comme il faut, quelque chose, quelqu'un, récompensera son acharnement, son courage. Faut-il y croire ? Non. La seule adhésion à laquelle se tenir, c'est celle du sol. Le même qui te porte Marat et sur lequel ton sauveur finira par s'allonger. Sur mon lit arénacé, où le marchand de sable abusa, pernicieux, par une quantité étouffante de générosité. En coup de vent d'Afrique, salutations chaleureuses, il noya les poissons et tout ce qui y barbotait autour. Et rien ne perturbe plus, ni n'accompagne, le sommeil tranquille de ceux et de celles qui y meurent, y mourraient, asphyxiés par la même idée d'un sauvetage prochain qui n'arrivera peut-être pas. La consolation reste que pour lui, Enzo, le fond est visible, sec et chaud. Mais il s'attarde, ne s'y assied pas, se tient debout, la nuque pliée en deux, menton levé. Que regarde-t-il ? Il penche à droite, à gauche, dans l'indécision de savoir si cette joue, si l'autre, viendra la première se coucher sur le sable fin. Il vit sa chute individuelle. Alors, bien évidemment, la liberté que tu réclames ne parvient pas à se faire entendre, à briser cette solitude soudaine. Elle manque d'importance. Tu comprends, on ne crève qu'une seule fois et ma foi toujours seul. Acte communément unique. Laisse-le donc vivre cet instant, gentiment.

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