Chapitre 34

3 minutes de lecture

Palais royal, 22h39, 3 nafonard de l’an 1900.


La veille au soir, Rosalie avait attendu qu’Amerius soit endormi pour enfiler un peignoir trouvé dans la salle de bain attenante et sortir en douce de la chambre, bottines à la main. Elle ne les chaussa qu’une fois les escaliers descendus. Elle trouva un domestique, qui, s’il était choqué par sa tenue n’en montra rien et lui indiqua la chambre où l’on avait installé ses parents.

La jeune femme les trouva assis au pied de leur lit, en train de discuter emmitouflés dans une couverture, comme deux adolescents fous amoureux – ce qu’ils étaient encore.

En l’apercevant, ils s’écartèrent de concert pour lui proposer une place entre eux. Enfant, Rosalie adorait cela. Installés devant la cheminée, ses parents lui racontaient des histoires directement issues de leur imagination. S’autorisant ce retour en bas âge, la jeune femme se lova entre eux.

– Je suis contente que vous ayez été innocentés.

– Nous ne sommes pas complètement tirés d’affaire. Les sorties du palais nous sont interdites. Même de notre aile, sauf pour aller au dispensaire sous escorte.

Pyrius demanda si elle avait des nouvelles des autres magiteriens.

– Non, désolée. Vous êtes une exception, parce que quelqu’un se porte garant pour moi.

Jasmine colla sa joue à la sienne. Rosalie pouvait presque sentir son sourire curieux.

– Ce fameux ami, peut-être ? Comme tu l’as rencontré ?

– On travaille ensemble.

– Ho. Et bien tu diras à cet ami que nous le remercions de veiller sur toi.

– Vous pourriez le faire en nous rendant service.

Rosalie pivota et recula pour se mettre face à eux.

– Parlez-moi de Noé. De tous les détails qui pourraient vous revenir à propos de lui. Racontez-moi cette journée.

Ses parents se regardèrent. Pyrius commença le premier, remontant les manches de son peignoir pour mieux signer.

C’était le printemps. Tu étais en isolement depuis trois jours. Ta température ne baissait pas. Ta mère et moi avions pris des remèdes, mais ils ne marchaient pas. La situation était telle qu’on nous a demandé de te laisser, de respecter la volonté de la Lune de te reprendre à elle. Nous avons refusé, malgré les risques de contagion.

– Ma sœur était partie à peine trois jours plus tôt, continua Jasmine. Il n’était pas question de te perdre toi aussi. J’ai prié la Lune, la Terre, tout ce qui me passait par la tête.

» Mon vœu fut exaucé la nuit suivante. Avec ton père, nous prenions l’air dans le jardin quand un homme a traversé la lisière de la forêt pour venir à notre rencontre. Une femme se tenait quelque pas derrière lui avec un sac sur le dos et une mallette en main.

Tu connais la suite. Il a prétendu devoir te sauver, sous les conditions dont nous t’avons parlé.

Nous n’avons rien vu de ce qu’il a fait. Il nous avait chassés de la cabane. On devait se borner à surveiller que personne n’arrive. Six heures plus tard, ils ressortaient, lui et la femme. Tu allais déjà mieux. Il avait remplacé les organes malades et t’avait donné un remède, celui-là même que les scientifiques du royaume avaient réussi a fabriqué l’année suivante. Je… ne vois pas ce qu’on pourrait te dire de plus. Ça remonte à presque vingt ans.

Rosalie se mordit la joue. Sans rien d’autre, il allait lui être difficile de faire ce qu’elle avait prévu. Soudain, Pyrius agita les mains.

Il sentait le métal et l’humidité. De manière assez écœurante.

– De l’eau et du métal… marmonna Rosalie.

Un éclair de compréhension jaillit dans son esprit. Elle se retint juste à temps de l’exprimer, au cas où ses parents n’y penseraient pas. Cela lui permettrait de gagner du temps.

– Je le dirais à Amerius. Il saura quoi faire.

Rosalie vit que sa mère s’apprêtait à l’interroger sur lui, aussi la jeune femme prit-elle les devants. Elle n’eut pas à feindre sa fatigue. Elle laissa ses parents et regagna sa chambre. Amerius n’avait pas changé de position et ne réagit pas davantage quand elle rangea le peignoir et se glissa à ses côtés. La jeune femme se colla contre son torse, et cette fois, la main d’Amerius vint trouver la sienne.

Rosalie s’assoupit aussitôt, en essayant de ne pas penser au lendemain.

Annotations

Vous aimez lire Benebooks ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0