Jour 14 : TRONC
J’ai fini par sortir. Je me suis dit que si je restais enfermé, le carnet finirait par me dévorer tout entier. Alors j’ai marché, hagard, jusqu’au petit square au bout de la rue.
Là-bas, je me suis arrêté devant un vieux chêne.
C’est son tronc qui m’a figé sur place.
Il était couvert de gravures. Des mots, des dessins maladroits, mais reconnaissables. Une moustache. Des fils entrelacés. Une étoile de mer grossière. Même une couronne dentaire, esquissée dans l’écorce.
Et, juste en dessous, mon prénom. ENZO, gravé profondément, comme avec un couteau.
Mon sang s’est glacé. J’ai approché ma main blessée et, sans réfléchir, j’ai posé la paume sur le bois.
Une douleur fulgurante m’a traversé le bras.
Sous mes yeux, les gravures semblaient bouger, se réorganiser, comme si l’arbre respirait. Les dessins s’étiraient, prenaient vie : la moustache ondulait, les fils vibraient, l’étoile s’ouvrait comme une bouche béante.
J’ai arraché ma main, horrifié, et j’ai reculé.
Mais en baissant les yeux, j’ai vu qu’un nouveau mot s’était ajouté, frais, l’écorce encore humide :
“RENTRE.”
Et quand je suis retourné dans mon appartement, le carnet m’attendait, ouvert sur la table. À la page suivante, déjà écrite :
“Alors, la balade t’a plu ?”

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