Jour 16 : Bourde
Aujourd’hui, j’ai commis une erreur monumentale. Une vraie bourde.
Au travail, j’ai voulu me confier. J’en pouvais plus de garder ça pour moi, alors j’ai raconté à Marion, la collègue la plus sympa du bureau, que mes nuits étaient pourries par un carnet “vivant” qui me réclamait du sang et que mes doigts tombaient en poussière.
Elle m’a regardé avec des yeux ronds, et j’ai vu le moment où son sourire poli s’est figé.
— …Tu devrais dormir plus, Enzo, m’a-t-elle dit.
Et puis elle a reculé discrètement, comme si j’étais contagieux.
Mais le pire, c’est que j’ai ajouté, nerveux :
— Tu verras, il veut boire, ce fichu carnet ! Hier encore, il me suppliait, il était tout trempé de sang !
Sauf que j’ai réalisé, un peu trop tard, que j’étais en train d’agiter mon carnet sous son nez. Oui, LE carnet. Celui que je traîne partout, malgré moi.
À ce moment-là, une goutte rouge a coulé sur la couverture.
Pas beaucoup. Juste une petite perle sombre, qui a roulé lentement. Mais suffisamment pour que Marion pâlisse et recule encore.
— C’est… du ketchup ? a-t-elle bredouillé.
Et moi, sans réfléchir, j’ai répondu :
— Non, c’est mon sang !
Voilà. La phrase qu’il ne fallait pas dire.
Bourde monumentale.
Marion a prétexté un rendez-vous et a disparu. Depuis, elle ne répond plus à mes messages.
Je crois que demain, tout le bureau saura que je suis fou.
Et quand je suis rentré chez moi, le carnet m’attendait.
Il avait écrit, d’une écriture ironique :
“Pas malin, Enzo. Tu n’as pas le droit de parler de moi.”

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