Jour 17 : Orné
Quand je suis rentré ce soir, le carnet n’était plus là où je l’avais laissé.
Je l’ai trouvé posé au centre de ma table basse, comme un trophée qu’on aurait soigneusement exposé. Mais ce n’est pas ça qui m’a glacé le sang.
Il avait changé.
La couverture de cuir, d’ordinaire lisse et terne, était maintenant ornée.
Des motifs étranges couraient sur toute sa surface : des arabesques sinueuses, des spirales fines comme des toiles, des moustaches miniatures gravées avec soin, des étoiles mal formées.
Et au milieu, incrusté dans le cuir, il y avait… une dent.
Une vraie dent humaine, jaunâtre, enchâssée comme une pierre précieuse.
Je l’ai touchée du bout du doigt. Elle a vibré, comme un nerf encore vivant.
Chaque page semblait avoir reçu sa propre décoration : taches de sang séchées disposées en cercles, mots calligraphiés en lettres presque élégantes, petits dessins grotesques de visages grimaçants.
Tout était beau… et monstrueux à la fois.
Un livre qu’on aurait confié à un artisan fou, méticuleux, qui avait pris plaisir à orner chaque détail d’horreur.
Au bas de la dernière page, une phrase m’attendait :
“Tu vois, je me fais beau pour toi. Mais toi, Enzo… qu’as-tu à m’offrir en retour ?”
J’ai claqué le carnet et je l’ai jeté dans un tiroir, tremblant.
Mais je le sens encore. Comme si l’ornementation continuait d’évoluer, dans le noir, pour m’impressionner davantage demain.

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